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complots et les vœux insensés de leurs aveugles partisans. Les États qui ont admis des changemens dans leur régime politique, ne sont pas plus à l'abri de leurs attaques, que ceux dont les anciennes institutions ont traversé les orages du temps.

Monarchies pures, monarchies limitées, constitutions fédératives, républiques, tout est englobé dans les arrêts de proscription d'une secte, qui traite d'oligarchie tout ce qui, dans quelque forme que ce soit, s'élève au-dessus du niveau d'une égalité chimérique. Les chefs de cette ligue impie, indifférents à ce qui résultera de la destruction générale qu'ils méditent, indifférents à toute espèce d'organisation stable et permanente, n'en veulent qu'aux bases fondamentales de la société. Renverser ce qui existe sauf à substituer ce que le hasard suggérera à leur imagination déréglée, ou à leurs sinistres passions: voilà l'essence de leur doctrine et le secret de toutes leurs machinations!

Les souverains alliés n'ont pu méconnaître qu'il n'y avait qu'une barrière à opposer à ce torrent dévastateur. Conserver ce qui est légalement établi, tel a dû être le principe invariable de leur politique, le point de départ et l'objet final de toutes les résolutions. Ils n'ont pu être arrêtés par les vaines clameurs de l'ignorance ou de la malice, les accusant de condamner l'humanité à un état de stagnation et de torpeur incompatible avec la marche naturelle et progressive, et avec le perfectionnement des institutions sociales. Jamais ces monarques n'ont manifesté la moindre disposition de contrarier des améliorations réelles ou la réforme des abus qui se glissent dans les meilleurs gouvernements, des vues bien différentes les ont constamment animés; et si ce repos, que les gouvernements et les peuples avaient le droit de croire assuré par la pacification de l'Europe, n'a point pu opérer tout le bien qui devait en résulter c'est que les gouvernements ont dù concentrer toutes leurs pensées sur les moyens d'opposer des digues au progrès d'une faction qui, répandant autour d'elle l'erreur, le mécontentement, le fanatisme des innovations, eût bientôt mis en problème l'existence d'un ordre publique quelconque.

Les changements utiles ou nécessaires dans la législation et dans l'administration des États ne doivent émaner que de la volonté libre, de l'impulsion réfléchie et éclairée de ceux que

Dieu a rendus responsables du pouvoir. Tout ce qui sort de cette ligne conduit nécessairement au désordre, aux bouleversements, à des maux bien plus insupportables que ceux que l'on prétend guérir. Pénétrés de cette vérité éternelle, les souverains n'ont pas hésité à la proclamer avec franchise et vigueur; ils ont déclaré qu'en respectant les droits et l'indépendance de tout pouvoir légitime, ils regardaient comme légalement nulle et désavouée par les principes qui constituent le droit public de l'Europe, toute prétendue réforme opérée par la révolte et la force ouverte. Ils ont agi, en conséquence de cette déclaration, dans les événements de Naples, dans ceux du Piémont, dans ceux même qui, sous des circonstances très-différentes, mais par des combinaisons également criminelles, viennent de livrer la partie orientale de l'Europe à des convulsions incalculables.

Les monarques sont d'autant plus décidés à ne pas s'écarter de ce système, qu'ils regardent la fermeté, avec laquelle ils l'ont maintenu dans une époque si critique, comme la véritable cause du succès dont leurs efforts pour le rétablissement de l'ordre en Italie ont été accompagnés. Les gouvernements de la Péninsule ont reconnu qu'ils n'avaient rien à craindre, ni pour leur indépendance politique, ni pour l'intégrité de leurs territoires, ni pour la conservation de leurs droits, en réclamant des secours qui leur étaient fournis à la seule condition d'en profiter pour défendre leur propre existence. C'est la confiance réciproque qui a sauvé l'Italie; c'est elle qui a fait cesser dans l'espace de deux mois un incendie qui, sans l'intervention des puissances alliées, aurait ravagé et ruiné la totalité de ce beau pays et menacé pour longtemps le reste de l'Europe.

Rien n'a plus efficacement démontré la force de ce ressort moral qui liait le salut de l'Italie aux déterminations des monarques, que le dénouement prompt et heureux de la révolte qui avait éclaté dans le Piémont. Des conspirateurs, en partie étrangers, avaient préparé ce nouveau forfait et mis en œuvre, pour le faire réussir, le plus détestable de tous les moyens révolutionnaires, en soulevant contre l'autorité cette force armée, qui n'est créée que pour lui obéir et pour défendre l'ordre public. Victime d'une trahison, inexplicable si quelque chose pouvait l'être tant que les crimes politiques trouveront en Europe

des voix qui osent les défendre, un souverain jouissant à juste titre du respect et de l'affection de ses sujets, se vit forcé de descendre d'un trône qu'il avait orné par ses vertus; une partie considérable des troupes fut entraînée dans l'abîme par l'exemple et les intrigues d'un petit nombre d'ambitieux; et le cri banal de la faction antisociale retentissait de la capitale aux provinces. Les monarques réunis à Laybach ne tardèrent pas à y répondre. Leur union était du nombre de celles qui se fortifient et grandissent avec le danger; leur voix fut entendue. Aussitôt les serviteurs fidèles du roi, sentant qu'ils n'étaient point abandonnés, employèrent ce qui leur restait de ressources pour combattre les ennemis de la patrie et de la gloire nationale; le pouvoir légitime, quoique comprimé et paralysé dans son action, n'en sut pas moins soutenir sa dignité et ses droits; et les secours arrivant au moment décisif de la crise, le triomphe de la bonne cause fut bientôt complet. Le Piémont a été délivré en peu de jours; et il n'est resté de cette révolution, calculée sur la chute de plus d'un gouvernement, que les souvenirs honteux emportés par ses coupables auteurs.

C'est ainsi qu'en suivant sans déviation les principes établis et la ligne de conduite tracée dès les premiers jours de leur réunion, les monarques alliés sont parvenus à pacifier l'Italie. Leur objet direct est atteint. Aucune des démarches qui y ont abouti n'a démenti les déclarations que la vérité et la bonne foi leur avaient inspirées. Ils y resteront fidèles, quelque nouvelle épreuve que la Providence puisse leur avoir réservée. Plus que jamais appelés, ainsi que tous les autres souverains et pouvoirs légitimes, à veiller sur la paix de l'Europe, à la protéger nonseulement contre les erreurs et les passions qui pourraient la compromettre dans les rapports de puissance à puissance, mais surtout contre ces funestes tentatives qui livraient le monde civilisé aux horreurs d'une anarchie universelle, ils croiraient profaner une vocation aussi auguste par les calculs étroits d'une politique vulgaire. Comme tout est simple, patent et franchement avoué dans le système qu'ils ont embrassé, ils le soumettent avec confiance au jugement de tous les gouvernements éclairés.

La réunion qui va finir doit se renouveler dans le courant de

l'année prochaine. On y prendra en considération le terme à fixer aux mesures qui, de l'aveu de toutes les cours d'Italie, et particulièrement de celles de Naples et de Turin, ont été jugées nécessaires pour raffermir la tranquillité de la Péninsule. Les monarques et leurs cabinets apporteront à l'examen de cette question le même esprit qui les a dirigés jusqu'ici, Des motifs d'une gravité incontestable et pleinement justifiés par les résultats, avaient déterminé les souverains à intervenir dans les affaires de l'Italie; ils sont loin de vouloir prolonger cette intervention au delà des limites d'une stricte nécessité, désirant bien sincèrement que les circonstances qui leur ont imposé ce pénible devoir ne se reproduisent jamais.

Nous avons cru utile, au moment où les souverains vont se séparer, de rappeler par le précédent exposé les principes qui les ont dirigés dans les dernières transactions.

Vous êtes, en conséquence, chargé de faire communiquer cette dépêche au ministre dirigeant les affaires étrangères de la cour près laquelle vous vous trouvez accrédité.

Vous recevez en même temps une déclaration, conçue dans le même esprit, que les cabinets ont fait rédiger et imprimer pour porter à la connaissance du public de l'Europe les sentiments et les principes dont les augustes souverains sont animés, et qui serviront constamment de guides à leur politique.

Recevez, etc.

1er février 1821.

Convention entre S. A. I. et R. le grand-duc de Toscane et Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique, relativement à la possibilité du passage des troupes autrichiennes par les États toscans 1.

Comme il peut arriver que les troupes impériales et royales autrichiennes aient à se porter dans les provinces inférieures de l'Italie, S. A. I. et R. le grand-duc de Toscane et Sa Majesté

1. Neumann, III, 571.

Impériale et Royale Apostolique, voulant régler, pour le cas supposé du passage desdites troupes par les États toscans, le service relatif aux besoins de ces mêmes troupes, ont désigné, du côté de S. A. I. et R. l'archiduc grand-duc de Toscane, S. E. M. le chevalier Fossombroni, secrétaire d'État, ministre des affaires étrangères, et du côté de Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique, S. E. M. le général feld-maréchal baron Koller, intendant général de l'armée, lesquels deux délégués, s'étant donné réciproquement communication de leurs pouvoirs respectifs, et S. E. M. le feld-maréchal étant resté convaincu que la nature du pays toscan ne permet pas d'y faire passer un gros corps d'armée, et, en cette année spécialement, de cavalerie, attendu le manque notable de fourrages, sont convenus des articles suivants :

I

Un chemin d'étapes est établi dans les États de S. A. I. et R. l'archiduc grand-duc, pour le passage des troupes autrichiennes, qui devront se porter du nord au midi et du midi au nord del l'Italie.

II

Les troupes de Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique, en se portant vers le midi de l'Italie, prendront la route suivante, et s'arrêteront dans les étapes ci-dessous désignées : Barberino di Mugello, Florence, Poggibonsi, Sienne, San Durico et Radicofoni, et les troupes qui, venant du midi, retourneront dans le nord de l'Italie, parcourront le même chemin, en commençant par l'étape de Radicofoni.

III

Si, en quelque occasion, les projets militaires exigeaient qu'on prît, pour le passage des troupes, un autre chemin que celui indiqué ci-dessus, ces passages devront être annoncés, au moins huit jours auparavant, par le commandant suprême de l'armée ou de l'intendance générale de ladite armée, au département des affaires étrangères de Toscane.

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