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Le gouvernement sarde prend à témoin de la justice de sa cause toutes les nations civilisées; il en appelle à ces hautes puissances qui déjà lui ont généreusement prêté leurs bons offices; il en appelle à tous les peuples qui, jadis ou récemment, ont combattu ou combattent encore pour l'indépendance, et savent combien sa privation est amère, combien sa conquête est difficile; il en appelle à la Germanie elle-même, à qui les rapports de langue, de voisinage et de mœurs avec l'Autriche ne doivent pas faire oublier combien elle est hostile à la recomposition d'une forte nationalité allemande. Nous en appelons surtout, et avec plus de chaleur et de confiance, aux populations de la péninsule italique, qui, toutes, malgré les fautes et les erreurs des siècles passés, sont toujours unies par les souvenirs par les sentiments, par les espérances et par le cœur.

La guerre de l'indépendance nationale recommence donc. Si elle ne se rouvre pas sous des auspices aussi favorables que l'an dernier, la cause à soutenir est toujours la même. Cette cause est sainte comme le droit de tous les peuples à posséder le sol où Dieu les a placés; elle est grande comme le nom et les souvenirs de l'Italie. Certes, les vœux de l'Italie nous accompagneront sur ces champs de bataille où déjà l'armée subalpine, avec son roi magnanime, avec les courageux fils de ce roi, a donné des preuves si éclatantes de valeur, de constance et d'intrépidité; où nos frères de la Lombardie, de la Vénétie, des duchés, ont souffert pendant sept mois les outrages les plus cruels, les tortures les plus poignantes.

Oui, nous en avons la noble confiance, nous vengerons les douleurs de la patrie, nous affranchirons toute la portion de l'Italie qui porte le cruel joug de l'étranger, nous délivrerons l'héroïque Venise, nous assurerons enfin l'indépendance italienne.

Signé par tous les ministres : Chiodo, président du conseil, ministre de la guerre et de la marine; de Ferrari, ministre des affaires étrangères; Ratazzi, ministre de l'intérieur; Ricci, ministre des finances; Sineo, garde des sceaux, ministre de la justice; Carodna, ministre de l'instruction publique; Tecchio, ministre des travaux publics; Bussa, ministre de l'agriculture et du commerce.

18 mars 1849.

Manifeste du cabinet autrichien.

L'armistice conclu le 9 août de l'année dernière avec la Sardaigne a été dénoncé par cette puissance le 12 de ce mois; il faut par conséquent que l'Autriche tire une seconde fois l'épée pour la défense de son bon droit. Dans cette lutte, malheureusement inévitable, elle pourra se rendre ce témoignage d'avoir fait tout ce que lui permettaient l'honneur et le devoir pour l'éviter. L'exposé suivant des faits mettra en lumière cette vérité.

Lorsqu'au mois d'août de l'année dernière les glorieuses armées impériales eurent remporté plusieurs victoires décisives sur l'armée piémontaise, ce fut le roi Charles-Albert qui demanda un armistice comme introduction au rétablissement d'une paix définitive. Il eût dépendu alors de la volonté du gouvernement impérial de poursuivre à outrance l'ennemi qui se retirait, et de lui dicter la paix sur son propre territoire; mais l'Autriche, animée d'un véritable amour de la paix, donna au monde une preuve irréfragable de sa modération en arrêtant ses armées victorieuses à la frontière du Piémont, pour montrer qu'elle n'avait pris les armes que pour la défense légitime de l'intégrité de son territoire.

En conséquence, l'armistice fut accordé au roi de Sardaigne. Pour satisfaire en même temps au vou qu'il avait exprimé d'entamer sur-le-champ des négociations pour la paix, l'Autriche nomma un plénipotentiaire à cet effet. Sur ces entrefaites, la France et l'Angleterre avaient offert leur médiation amicale pour le rétablissement de la paix. Le cabinet impérial hésita d'abord à accepter la médiation, attendu que, d'après ce qui s'était passé, il était autorisé à regarder les négociations immédiates avec la Sardaigne comme étant ouvertes; mais quand cette puissance déclara qu'elle avait accepté la médiation, et qu'ainsi elle ne pouvait se soumettre à des négociations directes, le cabinet impérial accepta aussi la proposition des puissances médiatrices.

Mais le gouvernement impérial repoussa la base de la paix proposée par les puissances médiatrices, d'après laquelle la Lombardie devait être séparée de l'Autriche, ainsi que toutes les autres propositions de paix faites avant la reprise des dernières hostilités, mais rejetées par l'ennemi, sous la réserve expresse de s'entendre avec les puissances médiatrices sur une base différente. Plus tard, le cabinet impérial exprima à plusieurs reprises et de la manière la plus formelle, la conviction que la paix ne pourrait être conclue sur aucune autre base que sur celle de l'état territorial consacré par les traités européens.

Le 23 mars de l'année dernière, la Sardaigne, qui, jusqu'au moment décisif, avait fait des protestations d'amitié, avait passé le Tessin sans déclaration préalable et sans pouvoir colorer son agression injuste autrement que par l'affinité nationale avec les Lombards qui venaient de se révolter contre leur gouvernement légitime, au moment même où ce gouvernement leur avait ouvert une ère nouvelle en leur accordant des libertés politiques étendues. Après une lutte sanglante de six mois, accompagnée des plus grands sacrifices, les armées vaillantes de l'Autriche avaient repoussé l'ennemi au delà de la frontière, et alors le vainqueur se borna à exiger, indépendamment d'une juste indemnité de guerre, ce qui lui appartenait de par Dieu et son droit.

Personne ne niera qu'une pareille conduite ne portât l'empreinte de la plus haute modération et de l'amour le plus formel de la paix. La conduite que la Sardaigne a tenue depuis la conclusion de l'armistice est en opposition directe avec cette manière de procéder. La flotte sarde, qui, d'après l'article IV de l'armistice, devait quitter immédiatement Venise pour retourner dans les États sardes, ne se retira que tard et par degrés; mais elle n'a jamais quitté la mer Adriatique, où elle est encore en ce moment.

Cette violation manifeste de l'armistice de la part de la Sardaigne a seule mis la ville de Venise en état de résister aux armes impériales. Non contente de cela, la Sardaigne alla plus loin en accordant ouvertement, et en plein armistice, à cette ville rebelle, des sommes importantes par versements mensuels. Dans la capitale du Piémont, il se forma une consulte lombarde,

composée en grande partie des membres du gouvernement expulsé de Milan. La cour de Turin la regarda comme une autorité légale et lui fournit les moyens de nourrir, sous sa protection et sous ses yeux, la discorde et la haine dans les provinces austro-italiennes voisines, et de susciter tous les obstacles imaginables aux efforts que faisait le gouvernement impérial pour y rétablir la tranquillité et le calme des esprits.

Des émissaires maggyars et des réfugiés polonais furent également bien accueillis et protégés à la cour de Turin. Ils avaient évidemment pour but d'établir une fraternité étroite entre la révolution italienne et le parti criminel qui a allumé la guerre civile dans certaines parties de notre patrie, pour amener ainsi la dissolution de la monarchie autrichienne. Le langage officiel du gouvernement sarde fut d'accord, en toute occasion, avec cette manière d'agir, qui dénotait les intentions les plus hostiles.

Lorsqu'au commencement du mois dernier l'Assemblée législative ouvrait ses travaux à Turin, l'Autriche dut apprendre avec indignation que le roi avait annoncé, dans un discours solennel, un royaume de la haute-Italie, et provoquait les provinces austro-italiennes, sans détour, à se révolter de nouveau contre leur gouvernement légitime.

Un pareil langage, tenu devant l'Europe entière, au moment où le plénipotentiaire autrichien se disposait à partir pour Bruxelles pour y entamer les négociations de la paix, ne pouvait être accueilli avec indifférence par le cabinet impérial. Il comprit la nécessité de demander aux puissances médiatrices si elles ne pensaient pas qu'entre les prétentions illimitées de la Sardaigne et le bon droit de l'Autriche l'abîme était trop grand pour qu'il fût permis d'espérer encore le succès d'une médiation.

En tout cas, le cabinet impérial crut devoir détourner le danger de voir échouer les négociations de la paix au premier pas contre les prétentions démesurées de la Sardaigne, en insistant pour que l'on s'entendit avec les puissances médiatrices sur le point de départ avant de les commencer. Mais, d'après l'opinion plusieurs fois exprimée par le gouvernement autrichien, ce point de départ ne pouvait être autre que l'état territorial qui

avait été consacré par les mêmes traités auxquels la Sardaigne doit son existence.

Au moment où les négociations étaient commencées, la Sardaigne abandonne ouvertement les pensées de paix dont elle s'était depuis longtemps détachée en secret, et elle fait un nouvel appel au sort des batailles. Quel qu'en soit le résultat, l'Autriche peut se donner le témoignage qu'elle n'a point provoqué la guerre que l'orgueil de ses ennemis l'oblige de soutenir.

L'Autriche n'a pas été guidée par des vues ambitieuses, elle n'a pas convoité de couronne étrangère, elle n'a voulu que ce qu'il est permis à chacun de vouloir : conserver ce qui lui appartient et protéger contre des prétentions injustes l'intégrité de la monarchie, reconnue par des traités solennels et fortifiée par la proclamation impériale et la constitution du 4 de ce mois, et qui est la première condition de la liberté, de la puissance et de la prospérité des peuples.

Dans cette lutte pour les biens les plus précieux des peuples, l'empereur d'Autriche peut compter sur la sympathie de tous ceux qui ont encore le sentiment du droit, sur la fidélité inébranlable et l'héroïsme de sa glorieuse armée, sur le dévouement de ses peuples, enfin sur la protection et l'appui du Dieu des armées, qui ne laissera pas succomber la juste cause. Vienne, 18 mars.

29 avril 1849.

Dépêche du gouvernement autrichien relative à la marche des troupes autrichiennes dans les Légations et dans la Toscane.

(Traduction communiquée le 17 mai 1849, à lord Palmerston.)

A M. le comte de Colloredo.

Vienne, 29 avril 1849.

Le gouvernement de l'Empereur a envoyé au maréchal comte

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