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respectant par conséquent l'indépendance des gouvernements particuliers, y serait évidemment impuissante. Un homme de génie, un despote favorisé par les circonstances, tel que Charles-Quint ou Ferdinand II, y réussirait peut-être pour un moment; mais alors l'instrument remis entre ses mains deviendrait trop redoutable à l'Allemagne et à l'Europe entière. Ce moment passé, le prétendu pouvoir fédéral, épuisé par cet excès même, tomberait dans une véritable atonie, et la Confédération, pour avoir trop voulu s'étendre, pour avoir forcé les ressorts de son existence, finirait peut-être par se dissoudre, livrant l'Allemagne à une anarchie qui laisserait l'Europe sans contre-poids.

Il faut donc écarter des combinaisons auxquelles se lient sans aucune chance avantageuse, tant de chances dangereuses et funestes.

juillet-14 août 1851.

Correspondance de M. de Tallenay, ambassadeur extraordinaire et ministre plénipotentiaire auprès de la diète, relative à la demande d'admission des États non allemands de la Prusse et de l'Autriche dans la Confédération germanique1.

M. de Tallenay au président de la diète germanique.

Francfort-sur-le-Mein, le 9 juillet 1851.

Monsieur le président,

I

J'ai l'honneur de vous envoyer par ordre de mon gouvernement, et je vous prie de placer sous les yeux de la diète la copie ci-jointe des deux dépêches et d'un mémorandum remis aux mois de janvier, février et mars derniers, aux divers gouverne

1. Meyer, Corpus Juris, t. II, p. 553.

ments germaniques. Comme Votre Excellence le verra, ces documents se rapportent au projet agité à cette époque de l'incorporation des provinces non allemandes de l'Autriche à la Confédération, projet contre lequel la France et l'Angleterre ont cru devoir protester mutuellement aux termes de l'acte général de Vienne. La question dont il s'agit, et qui intéresse au plus haut degré toutes les puissances européennes, étant plus particulièrement à certains égards du ressort de la diète, le gouvernement de la République n'aurait pas manqué de l'en saisir dès le premier moment si, à cette époque, il eût déjà entretenu avec elle des relations officielles. Aujourd'hui que les circonstances lui ont enfin permis, à sa grande satisfaction, d'établir ces relations, il s'empresse de faire communiquer à la haute assemblée des documents qui n'ont pas cessé d'être l'expression de ses convictions bien arrêtées sur la matière importante et délicate à laquelle ils se réfèrent.

Je saisis avec empressement cette occasion, monsieur le comte, de renouveler à Votre Excellence les assurances de ma plus haute considération.

Signé : De Tallenay.

II

Francfort-sur-le-Mein, 19 juillet 1851.

Monsieur le comte,

J'ai reçu avec la note que Votre Excellence m'a fait l'honneur de m'adresser le 17 de ce mois les deux documents qui s'y trouvaient joints. Je les transmets à M. Baroche à qui il est réservé d'en apprécier la portée en ce qui concerne la République française.

Je ne puis cependant m'empêcher de faire observer à Votre Excellence que la haute diète en s'en référant à un acte d'une autre époque paraît avoir perdu de vue la différence des temps et des choses, le gouvernement français d'alors n'ayant pas cru d'ailleurs devoir accepter comme régulière dans sa forme et teneur la résolution qui lui fut communiquée par l'entremise de l'un de vos prédécesseurs.

Je saisis, etc.

Signé De Tallenay.

III

Francfort-sur-le-Mein, 14 août 1851.

Monsieur le comte,

Ainsi que je l'annonçais à Votre Excellence par une lettre du 19 juillet, j'avais transmis à mon gouvernement la note qu'elle m'avait fait l'honneur de me remettre le 17 par suite de ma communication du 9, relative au projet d'incorporation des provinces non allemandes de l'Autriche au territoire fédéral. Je viens de recevoir l'ordre de répondre à cette note par la communication suivante.

Le gouvernement de la République n'a pu voir sans une extrême surprise reproduire au nom de la diète les arguments auxquels on avait eu recours il y a dix-sept ans pour contester aux puissances signataires de l'acte général de Vienne le droit d'intervenir dans une circonstance où elles jugeaient que l'indépendance d'un des États allemands, stipulée par cet acte, était violée. Ces arguments avaient été alors de la part des cabinets de Paris et de Londres l'objet d'une réfutation péremptoire à laquelle on n'avait pas répliqué, et lorsqu'en 1847 on vit l'Autriche et la Prusse réclamer énergiquement contre les actes par lesquels la diète de la Confédération suisse leur paraissait porter atteinte à l'indépendance de quelques-uns des cantons, on dut penser que ces deux puissances avaient reconnu le peu de justesse des principes trop absolus proclamés par elles quelques années auparavant. Cette supposition était d'autant plus légitime que le pacte fédéral de la Suisse, ne faisant pas, comme celui de l'Allemagne, partie intégrante de l'acte général de Vienne, le droit des gouvernements étrangers de s'interposer dans les débats des cantons était, contrairement à ce point de vue, plus contestable que celui dont la France et l'Angleterre avaient voulu se prévaloir par rapport à la Confédération germanique.

Les doctrines invoquées par la diète en 1834 fussent-elles d'ailleurs aussi fondées qu'elles le sont peu en réalité, il est évident qu'elles ne s'appliqueraient pas à la question actuelle. Dût-on admettre en effet qu'une Confédération d'États souve

rains est investie, en ce qui concerne les relations de ses membres entre eux, d'une autonomie aussi complète que celle qui appartient par la force des choses à un État unitaire ou même fédératif dans son régime intérieur, il ne s'ensuivrait certainement pas que cette Confédération pût modifier ses rapports avec les gouvernements étrangers, de sa seule autorité, et sans que ces gouvernements eussent le droit de réclamer.

L'Europe, par le premier traité de Paris et par l'acte général de Vienne, a reconnu l'existence de la Confédération germanique dans des limites territoriales déterminées. Par l'effet de cette reconnaissance, chacun des États fédérés est placé, du consentement des puissances européennes, sous la protection de la Confédération tout entière, qui est ainsi autorisée à intervenir dans les différends de ses membres avec l'étranger lorsqu'ils prennent un certain degré de gravité. On ne prétendra pas apparemment que les puissances puissent voir avec indifférence un pareil état étendu à de nouveaux territoires, et si cette extension avait lieu sans leur assentiment, elles seraient certainement en droit de ne pas en admettre les conséquences, par exemple de repousser l'intervention de la Confédération dans leurs démêlés avec les possesseurs de ces territoires. Les chances de conflit seraient donc multipliées, l'organisation politique d'une partie considérable de l'Europe ne reposerait plus sur des bases universellement reconnues, et le droit des gens établi par des traités, aurait reçu une atteinte peut-être irréparable.

Il serait superflu de s'étendre sur une question qui prêterait à de grands développements, le projet qui avait mis le gouvernement de la République dans la nécessité de la soulever, ne paraissant pas devoir être soumis à la diète. Il est bien loin de sa pensée de vouloir prolonger une controverse qui n'aurait pas d'opportunité. Il lui suffit d'avoir établi d'abord que la France ne reconnaît pas plus aujourd'hui qu'en 1834, les principes énoncés alors par la diète, et ensuite que ces principes, fussentils conformes au droit, ils ne s'appliqueraient pas à la grande affaire qui a fourni à la diète l'occasion de les proclamer de

nouveau.

Je saisis, etc.

Signé De Tallenay.

1er septembre 1851.

Articles additionnels au traité de commerce et de navigation du 5 octobre 1846 entre l'Autriche et les Deux-Siciles, d'après une déclaration échangée entre les deux gouvernements, en date du 1er septembre 18511.

I

Jusqu'à ce qu'une disposition contraire soit dénoncée réciproquement au moins trois mois à l'avance, les bâtiments de commerce autrichiens, de même que ceux du royaume des Deux-Siciles, à la destination de l'un ou de l'autre des deux pays, pourront non-seulement, aux termes du traité, signé le 5 octobre 1846, être chargés de produits de leur sol et de leur industrie, mais encore si ces bâtiments se trouvent, à leur départ, des ports autrichiens ou de ceux du royaume des Deux-Siciles pour une destination telle que celle ci-après indiquée, chargés seulement en partie desdites productions ou ont débarqué pendant leur voyage une partie de leur charge primitive, ces dits bâtiments auront la faculté de compléter leur charge dans les ports étrangers intermédiaires, en continuant toujours à jouir sans réserve des avantages, tels qu'ils se trouvent stipulés par le traité précité conclu, entre les cabinets de Vienne et de Naples, le 5 octobre 1846.

II

Toutes les fois que les productions du sol ou de l'industrie de l'empire d'Autriche et du royaume des Deux-Siciles seront importées directement de l'un dans l'autre pays par les bâtiments des deux nations, elles jouiront des avantages stipulés dans le susdit traité, sans qu'elles aient besoin d'être munies de certificats d'origine.

1. Martens et Cussy, VI, 608.

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