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Une circonstance indépendante de notre volonté nous interdit de continuer la publication de la Note sur l'annexion de l'administration des forêts au ministère du commerce, de l'agriculture et des travaux publics.

DE LA FORMATION DU PLAN D'EXPLOITATION

DANS L'AMÉNAGEMENT DES FUTAIES.

(Suite.)

RÈGLEMENT DES EXPLOITATIONS PAR PÉRIODE.

Nous supposons toujours que la révolution peut être définitive, et le plan d'exploitation normal. Le règlement des exploitations par période devient alors la chose du monde la plus aisée. On ne change rien à la première partie du tableau des affectations, et l'on substitue dans la seconde partie les mots parcelles à régénérer dans la première, la deuxième, la troisième période, etc., aux mots classement des parcelles dans l'affectation de la première, la deuxième, la troisième période, etc.; tous les bois compris dans la colonne affectée à la première période devront être régénérés, la révolution étant de cent ans, et la période de vingt, dans les vingt premières années; tous ceux compris dans la colonne affectée à la deuxième période, dans les vingt années suivantes, etc.

Mais les coupes de régénération, autrement dites coupes principales, ne sont pas les seules qu'il y ait à faire dans une futaie, et si, dans les taillis, les nettoiements et les éclaircies sont des opérations exceptionnelles et, dans tous les cas, d'une faible importance par les produits immédiats qu'elles sont susceptibles de fournir, il n'en est pas de même dans les futaies. Ici, les exploitations de l'espèce ont une grande utilité, sous le rapport cultural, et sont en outre très-recommandables par les avantages matériels qu'elles procurent immédiatement. On ne peut donc pas se dispenser de les faire figurer sur le tableau des exploitations. D'ailleurs, une éclaircie, pour être bien faite, ne demande pas seulement que les agents d'exécution se conforment aux exigences actuelles et à ce qu'on appelle les circonstances intérieures du peuplement; elle demande surtout qu'ils

AVRIL 1857.-4e SÉRIE.-T. III.

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aient connaissance et qu'ils se préoccupent du rang qne ce peuplement est appelé à prendre dans l'échelle des âges. Comme il est très-rare de rencontrer des massifs homogènes, comme les sujets de différents âges s'y trouvent ordinairement entremêlés, il importe beaucoup, pour qu'une éclaircie puisse remplir le but qu'on doit se proposer, que les agents d'exécution sachent quel est l'âge qu'il convient de faire prédominer dans un peuplement, et qu'ils connaissent en conséquence pendant combien de temps ce peuplement aura à rester sur pied, avant d'arriver en tour de régénération. Voilà pourquoi il est nécessaire de faire figurer les nettoiements et les éclaircies sur le tableau des exploitations; voilà pourquoi il est nécessaire que ce tableau indique, sinon l'année précise, du moins la période de la révolution dans laquelle une parcelle devra être nettoyée ou éclaircie. Or, cette indication n'est nullement embarrassante; les périodes embrassent presque toujours un laps de temps plus considérable que celui qui, d'après les règles de la culture, doit s'écouler entre deux éclaircies successives; et il en résulte nécessairement qu'il convient de porter chaque parcelle dans toutes les périodes, soit pour être nettoyée, soit pour être éclaircie, à l'exception pourtant de celle dans laquelle elle aura été portée pour être exploitée en coupe de régénération. Ainsi la parcelle R, qui figure sur le tableau comme devant être régénérée dans la première période, devra y figurer en outre comme devant être nettoyée ou éclairc e dans les autres périodes. Seulement, pour éviter qu'on ne confonde, sur le tableau des exploitations, les coupes d'amélioration avec les coupes principales, on a soin d'affecter aux unes et aux autres, pour chaque période, une colonne spéciale, et le tableau des exploitations, par période, dont nous nous dispensons de reproduire la première partie, devient alors conforme au modèle suivant :

TABLEAU DES EXPLOITATIONS PAR PÉRIODE.

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Comme nous avons supposé que l'état de la forêt permettait de fixer dès à présent et d'une manière définitive l'ordre des exploitations, en totali

sant les contenances portées dans les colonnes affectées aux coupes d'amélioration, on devra trouver pour chacune d'elles une étendue égale à la contenance totale de la forêt.

RÈGLEMENT DES EXPLOITATIONS ANNUELLES.

Coupes principales. - Si la forêt à aménager était susceptible d'être exploitée à blanc étoc, s'il était permis de compter sur la régénération naturelle, malgré l'abatage en une fois de tous les arbres existant sur une contenance donnée, ou bien, si l'on trouvait économique de remplacer le repeuplement naturel par un repeuplement artificiel, et que celui-ci n'eût besoin, pour réussir, d'aucun abri, le règlement des exploitations annuelles s'effectuerait en partageant chaque affectation en vingt parties ayant des contenances égales ou inversement proportionnelles à leur fertilité; et ce, conformément aux considérations qui nous ont servi de guide pour le partage de la forêt en affectations. On suivrait enfin, pour la division de chaque affectation en coupes annuelles, les mêmes règles que pour l'aménagement d'un taillis.

Mais, nous l'avons déjà dit, la nécessité de n'exploiter qu'en plusieurs fois les arbres existant sur un point donné, afin d'en assurer la régénération naturelle, s'oppose à l'adoption de cette manière toute simple de procéder, et c'est ici que l'aménagement des futaies exige des opérations qui n'ont aucune analogie avec celles que comporte l'aménagement des taillis.

Jusqu'à présent, tous nos efforts ont tendu, dans nos études sur l'aménagement, à baser les exploitations sur la contenance, à cause de la simplicité, de la rapidité et de la sûreté que cette méthode est de nature à imprimer à l'assiette des coupes. Il nous faut maintenant recourir à une autre base, car nous essayerions vainement de concilier la possibilité par contenance avec les exigences du rapport soutenu et de la régénération naturelle. On l'a tenté cependant et il paraît qu'on y a presque réussi (voir les Annales de 1848, p. 158); mais évidemment cette tentative a eu lieu dans des conditions tout à fait exceptionnelles, et l'on ne saurait s'en prévaloir quand il s'agit de poser des règles d'une application générale. On conçoit, par exemple, que dans une futaie de hêtres, reposant sur un sol substantiel, dans un climat tempéré, croissant enfin dans des conditions favorables à la fertilité des arbres de cette essence et à la germination des semences, on puisse préciser, sans s'exposer à de trop grands mécomptes les époques auxquelles devront avoir lieu, sur un point donné, les coupes de régénération. Le jeune plant de hêtre résiste longtemps sous le couvert. Les dernières éclaircies, pour peu qu'elles soient fortes, seront suivies, dans la forêt supposée, d'un repeuplement naturel qu'on trouvera

en bon état, qu'on pourra utiliser, lorsqu'arrivera le moment de procéder aux coupes principales; et que ces dernières soient faites un peu plus tôt ou un peu plus tard, en une ou plusieurs fois, cela n'aura pas beaucoup d'importance pour la régénération, qui sera déjà un fait accompli. Mais supposons une autre essence, le chêne par exemple, un climat plus rude, un sol moins fertile, et le repeuplement sera exposé à des éventualités qui ne permettront pas aux exploitations annuelles de suivre une marche régulière.

Il y a deux choses qui ne sauraient être prévues longtemps à l'avance et d'une manière précise dans l'application de la méthode du réensemencement naturel: c'est d'abord l'assiette des coupes; c'est ensuite le nombre d'arbres à enlever dans chacune de ces coupes. Un écrivain forestier fort distingué, auquel ce recueil doit des communications très-intéressantes, a essayé de prouver que la possibilité par contenance pouvait se concilier avec l'incertitude de l'assiette des coupes (1). Mais, pour cela, il a été obligé d'admettre qu'il était possible de se fixer sur le nombre des arbres à enlever dans chacune des trois coupes de régénération. Ce nombre étant, par exemple, d'un tiers des arbres sur pied, pour chacune d'elles, au lieu d'exploiter chaque année, en coupe rase, un vingtième de l'affectation des bois exploitables, la période étant de vingt ans, on exploiterait les trois vingtièmes, partie içi, partie là, en coupe d'ensemencement, en coupe claire ou en coupe définitive, suivant l'état des peuplements. S'il était admis que chacune des deux premières coupes dût prendre un quart des arbres sur pied et la coupe définitive un deuxième, chaque hectare exploité soit en coupe d'ensemencement, soit en coupe claire, serait considéré comme représentant un quart de la possibilité, et chaque hectare exploité en coupe définitive comme représentant un deuxième. Pour compléter la possibilité, il faudrait done, chaque année, parcourir une étendue telle que, multipliée, selon la nature de la coupe d'ensemencement, secondaire ou définitive, par le facteur 1/4 ou une 1/2, elle reproduisit un nombre d'hectares égal au vingtième de l'affectation. Tel est le moyen imaginé pour échapper aux prétendus inconvénients de la méthode d'exploitation basée sur la possibilité par volume. Ce moyen a été repoussé par des raisons très-catégoriques dans un article qui n'est pas signé, mais dont il est facile de deviner l'auteur; car il est fait ex professo. Nous renvoyons à ce remarquable travail ceux de nos lecteurs qui auraient le désir de se rendre compte de tous les motifs qui rendent inapplicable au traitement des futaies la possibilité par contenance (2). Nous nous bornerons à faire observer ici que l'expédient inventé pour démontrer le contraire serait de nature, lors même

(1) Voir les Annales forestières du mois de septembre 1847. (2) Voir les Annales forestières du mois de décembre 1847.

qu'il ne s'appuierait pas sur une hypothèse inadmissible, à enlever à cette possibilité les principaux avantages qu'on en attend. On ne saurait fixer pour un peuplement donné le nombre d'arbres qu'il sera nécessaire ou utile de faire tomber dans chacune des coupes de régénération, et, pour s'en convaincre, il n'est pas nécessaire de recourir à des preuves tirées de la variabilité des conditions dans lesquelles peut se trouver un massif et des accidents imprévus auxquels la végétation est exposée; il suffit de considérer qu'en réalité, si l'on en excepte la coupe définitive, les coupes de régénération, quelque faible que soit leur étendue, ont bien rarement un caractère tranché qui permette de les classer soit dans la catégorie des coupes d'ensemencement, soit dans la catégorie des coupes claires. Elles participent presque toujours des deux : les unes ne sont que la continuation des autres; mais alors on tend à l'impossible quand on veut délimiter chacune de ces coupes, en préciser l'assiette et par conséquent la contenance; ajoutons qu'en adoptant, pour les futaies, la possibilité par contenance, on ne réaliserait aucun des avantages qui la rendent recommandable pour les taillis. Ces avantages consistent, on le sait, dans la régularité, la simplicité, la promptitude, la sûreté des opérations. La régularité il faudrait y renoncer puisque l'assiette des coupes ne suivrait plus aucune marche certaine. La simplicité: ou ne pourrait point l'obtenir, puisque l'étendue à donner aux coupes annuelles devrait changer suivant la nature même de ces coupes, et qu'il serait nécessaire, sans parler de la difficulté de fixer la ligne précise de démarcation entre deux coupes différentes, de procéder à des arpentages multipliés. La promptitude et la sûreté : il est aisé de prévoir ce qu'elles deviendraient en présence des incertitudes, des tâtonnements, des difficultés d'appréciation et des travaux géodésiques que nous venons de signaler.

Il faut donc absolument trouver une autre base que la contenance pour régler les exploitations annuelles dans une futaie exploitée par la méthode du réensemencement. Cherchons-la.

Si la forêt dans laquelle nous avons à faire cette découverte, forêt exploitable dans une révolution de cent ans, se composait de cent peuplements ne différant que par l'âge, occupant d'ailleurs d'égales contenances, composés des mêmes essences, végétant dans les mêmes conditions; si l'on pouvait ajouter au matériel existant celui que chaque peuplement serait susceptible d'acquérir, n'est-il pas vrai qu'en divisant par cent le volume total fourni par cette addition, nous aurions pour quotient la quanLité de bois dont la forêt serait susceptible de s'accroître annuellement et, par conséquent, celle qu'on pourrait prendre chaque année et perpétuellement, sans altérer sa puissance productive, si l'on avait soin toutefois de ne jamais abattre que les arbres les plus vieux ?

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