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C'est dans le régime douanier que réside la cause de cette inconcevable déperdition de richesse.

Voici quel est le régime imposé aux écorces à tan à l'entrée et à la sortie.

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Aux termes des lois des 7 juin 1820 et 6 mai 1841, la prohibition de sortie des écorces à tan peut être levée exceptionnellement. Dans ce cas, il est perçu, en vertu des lois des 2 juillet 1836 et 6 mai 1841, les droits ci-après :

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Le décret du 5 décembre 1857 n'a rien changé à ce régime.

Il a été importé, en 1856, 574,178 kilogrammes d'écorces de sapin et 1,245,623 kilogrammes d'écorces de chêne et autres provenant de l'Association allemande, de Belgique, d'Espagne, etc.

Il a été exporté, pendant la même année, en vertu d'autorisations spéciales, 404,935 kilogrammes d'écorces de toute nature à destination de la Belgique, des Etats Sardes et autres contrées voisines.

Ces quantités relativement insignifiantes ont été échangées, par voie de filtration, entre les points voisins des frontières, à l'aide de facilités locales de transport, mais le commerce général est resté étranger à ce mouvement.

Cette immobilité du commerce extérieur s'explique sans peine d'une part, l'industrie du pays, surabondamment pourvue d'écorces, n'a pas à en demander à l'étranger; d'autre part, l'application des lois des 7 juin 1820 et 6 mai 1841 n'a jamais pu tempérer la rigueur de la prohibition à la sortie; il va être démontré par quelques exemples que ces lois sont implicitement paralysées par les restrictions qui résultent de leur caractère exceptionnel.

Une ordonnance du 30 août 1820 a permis l'exportation, par la rivière de Meuse, de quantités illimitées d'écorces: mais le droit imposé à cette

exportation est équivalent à la somme dont le prix des écorces devrait être augmenté pour devenir rémunérateur.

En 1854, la prohibition a été levée, pour un temps limité, en faveur du département de la Seine-Inférieure: mais, ainsi qu'on pouvait le prévoir, il arriva que les écorces d'autre provenance tentèrent de profiter du bénéfice de la mesure, qui dut être rapportée.

En 1854 encore, sur les réclamations réitérées du Conseil général du Var, la prohibition de sortie fut levée pour les écorces de ce département jusqu'à concurrence de 10 millions de kilogrammes: mais les marchandises qui ne peuvent supporter un fret élevé ne trouvent de débouchés que dans les ports dont le mouvement commercial est considérable. La mesure aurait été efficace si les écorces du Var avaient pu être conduites au port de Marseille; restreinte aux ports peu commerçants du département, elle devait demeurer sans effet l'exportation n'a pas dépassé 11,000 kilogrammes par an.

On peut donc considérer comme absolue la prohibition qui pèse, à la sortie, sur les écorces à tan.

L'intérêt de l'industrie nationale de la tannerie réclame-t-il impérieusement cette mesure, si préjudiciable à l'intérêt non moins respectable de la propriété boisée? Il est permis d'affirmer le contraire: située à proximité des lieux de production du tan, douée des qualités propres à l'industrie française, initiée par une longue expérience aux procédés perfectionnés de fabrication, la tannerie française n'a rien à redouter de la concurrence étrangère. Au surplus, sa supériorité a été constatée avec éclat à l'Exposition universelle de 1855; voici, dans l'ordre de leur distribution, les récompenses qui ont été accordées aux tanneurs :

1° Dix-huit médailles de première classe, savoir:

Les huit premières à des fabricants français;

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2o Vingt-deux médailles de seconde classe, savoir:

Les neuf premières à des fabricants français ;

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3o Vingt-cinq mentions honorables, savoir;

Les neuf premières à des fabricants français;

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Est-ce à une industrie aussi florissante que le gouvernement doit réserver le secours de mesures protectrices, alors surtout que ces mesures blessent des intérêts moins prospères? On n'évalue pas à plus de 10 à 20 pour 100 l'augmentation immédiate qui résulterait pour le prix des écorces de la levée de la prohibition; et encore est-on fondé à penser que cette augmentation ne se maintiendra pas, lorsque la production des écorces à tan, trouvant enfin un débouché, prendra le développement dont elle est susceptible.

Il n'est pas inutile de prévenir l'objection qui pourrait être tirée de ce que la pratique de l'écorcement causant aux taillis un certain dommage, il peut ne pas être sans danger d'en favoriser l'essor. L'écorcement s'effectue au printemps, lorsque le mouvement de la séve diminue l'adhérence de l'écorce au bois; l'exploitation du taillis se trouve ainsi reculée, la repousse des souches n'a lieu qu'à la séve d'automne et le rejet, encore peu formé à l'entrée de l'hiver, court le danger d'être atteint par la gelée. Ce dommage peut être atténué et même rendu à peu près nul à l'aide de quelques précautions usitées d'ailleurs dans les forêts soumises au régime forestier dans ces forêts, l'écorcement doit être terminé au 15 mai; il ne cause, à cette époque, que peu ou point de mal au bois. Que les particuliers adoptent cette pratique, au lieu de reculer l'opération quelquefois jusqu'à l'automne, sacrifiant ainsi une feuille entière et recueillant une écorce qui, d'après Davy, ne renferme que 4.38 pour 100 de tannin, tandis que celle du printemps en contient 6.04 pour 100; qu'ils renoncent surtout à l'écorcement sur pied qui déchire la souche jusqu'aux racines et en compromet l'existence; qu'ils prennent soin enfin de réserver le plus grand nombre possible de baliveaux de semence, ce qui est, à tous les points de vue, la garantie de la régénération, et l'écorcement ne présentera plus aucun danger.

« Je dois faire observer, dit Hartig, à ce sujet, que l'écorcement diminue les produits en bois dans les climats rigoureux, à cause du retard

qu'on est obligé d'apporter dans l'exploitation. En effet, la repousse est bien plus lente dans les taillis qu'on ne coupe que dans le mois de mai que dans ceux qu'on exploite au mois de mars. Cependant il y aura encore avantage suffisant si on peut vendre les écorces au prix ordinaire. Quant aux climats tempérés, on n'aura presque rien à craindre de ces inconvénients. >>

D'après ces considérations, il ne semble pas douteux que les écorces à tan ne doivent disparaître de la liste des articles de commerce dont l'exportation demeure prohibée.

BULLETIN FORESTIER.

G. SERVAL.

Nous venons de parcourir les coupes en exploitation dans les départements de l'Est, et ce que nous avons vu confirme ce que nous disions dans le dernier numéro des Annales.

La situation fâcheuse pour certains produits de 1857 est relativement bonne pour ces mêmes produits en 1858.

Ceci s'applique spécialement aux bois d'industrie, aux futaies surtout. Les chênes de 1857, façonnés en charpentes, restent dépréciés et invendus. Ceux de 1858, façonnés en sciages, merrains, lattes, échalas, ont trouvé prompt et avantageux écoulement, à ce point que les fournitures de traverses ne peuvent se faire à défaut de bois disponible dans certaines localités, et que partout ces fournitures se font sans profit sinon avec perte pour les fournisseurs.

Les prix sont différents, suivant que la consommation a demandé les bois sous telle ou telle forme.

Dans les Ardennes, la marine et les sciages ont enlevé toutes les pièces de fortes dimensions aux prix moyens de 6 francs pour la première, et de 5 francs à 5 fr. 50 c. pour les seconds, au quart de la circonférence sans déduction. Ces prix, applicables au bois rendu sur les ports flottables, avaient à supporter des frais de transport de 1 franc à peu près par décistère. L'exportation en Belgique a fait, sur certains points, une vive concurrence et contribué à maintenir les cours.

Les bois ordinaires employés aux constructions locales ou en traverses, dont le transport était extrêmement coûteux, ont rapporté 2 fr. 50 c. à 3 francs, en forêt, par décistère également au quart sans déduction.

AOUT 1858.—4° SÉRIE.-T. IV.

T. IV-16

Dans la Meuse, la concurrence du merrain a élevé le prix des pièces de choix à 8 franes au quart, rendu sur les ports; mais la distance considérable qui sépare les forêts des rivières flottables a réduit ce prix de 2 fr. 50 c. à peu près pour le transport de chaque décistère..

Les petits arbres de l'Argonne, envoyés ordinairement en Champagne pour les constructions particulières, et manquant cette année de ce débouché, sont restés sans valeur en forêt, où on les estime 1 fr. 50 c. au plus le décistère en grume, toujours au quart sans déduction.

Les sciages se seraient vendus cher, si on les eût faits en bois de choix, mais la fente en merrains prenant la plus belle partie de l'arbre, il n'est resté à scier en planches que des bouts chargés de nœuds, et vendus 10 à 20 francs par 100 mètres au-dessous du cours des bois choisis de la Haute-Marne. Or, la dépense étant la même pour le transport et plus élevée pour le débit, le rendement est, en fin de compte, resté peu avantageux.

Dans la Meurthe, la principale industrie est le débit en planches pour Paris. Les arbres très-gros, mais assez mal conformés, ne permettent que par exception de faire des bois de marine. Les cours moyens ont été de 6 à 7 francs au cinquième déduit pour les bois propres au sciage, et de 4 à 5 francs pour les petits arbres mis en traverses.

Le Bas-Rhin, le Haut-Rhin, traversés par un canal de communication avec le Rhône, ont envoyé dans le Midi beaucoup de leurs bois sous toutes formes et à des conditions avantageuses. La vente au cinquième déduit a rendu, pour les pièces de choix, jusqu'à 8 et 9 francs le décistère. Les petits arbres mis en traverses ont encore produit de 5 à 6 francs en forêt, grâce aux moyens de transport nombreux et économiques offerts sur toute la ligue.

Les mêmes causes ont maintenu les prix dans le Doubs, la Haute-Saône et la Côte-d'Or. Ces trois départements ont fabriqué beaucoup de merrains, très-avantageusement vendus sur tout le cours de la Saône et du Rhône. Quelques demandes pour les constructeurs de Lyon avaient d'abord fait élever outre mesure les prétentions des détenteurs, qui ne voulaient pas vendre leurs beaux chênes au-dessous de 9 francs le décistère en forêt au cinquième déduit. Cette catégorie comprenait les arbres de 1 mètre de circonférence et au-dessus, découpés à 80 centimètres au petit bout. Le prix n'était pas acceptable, et, en effet, les affaires ont été nulles ou à peu près avant l'hiver; puis, la crise financière ayant fait peur à tout le monde, on fut très-heureux, au printemps, de trouver 6 francs du décistère dont on avait refusé beaucoup plus.

Quelques demandes de traverses avaient aussi fait tenir bien haut les

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