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La décomposition des feuilles n'ayant généralement lieu qu'au bout de trois ans au moins, et souvent, sur les terrains secs par exemple, au bout d'un temps beaucoup plus long, chaque délivrance comprend nécessairement au minimum le produit de trois années. Si donc la feuillée est soumise à un aménagement quinquennal, les concessionnaires enlèveront les trois cinquièmes au moins des feuilles mortes, et non pas seulement le cinquième, comme on pourrait le croire.

Les inconvénients de la délivrance des feuilles variant par suite d'un grand nombre de circonstances dont nous avons énuméré les principales, il s'ensuit qu'il n'est pas logique de soumettre une forêt et encore moins toutes les forêts d'une contrée à un aménagement identique.

Les cantons à délivrer ne doivent pas être assis de proche en proche et aussi régulièrement que les coupes d'un taillis. Tel massif doit être interdit à jamais, tel canton peut être abandonné aux concessionnaires plus fréquemment que son voisin.

Ce sont là, croyons-nous, les divers principes qui doivent servir de base à la réglementation de l'enlèvement des feuilles mortes dans les contrées où il est impossible de supprimer complétement et sur-le-champ cet usage. Pour les appliquer d'une manière rationnelle, on comprendra facilement qu'il est nécessaire de faire pour chaque forêt un parcellaire analogue à celui qui sert de base aux opérations d'aménagement.

Il nous reste encore à faire connaitre l'importance qu'a pris l'enlèvement des feuilles mortes, dans la contrée de France où cette opération est plus particulièrement passée dans les usages agricoles; la nature et l'étendue des besoins auxquels l'engrais végétal doit satisfaire; les dispositions actuellement en vigueur pour réglementer la délivrance de cet engrais, et enfin les moyens qui nous paraissent les plus propres à rendre la litière forestière inutile aux habitants des campagnes. Nous en ferons l'objet d'un second article. A. F. D'HÉRICOURT.

DE LA POSSIBILITÉ DANS LES FORÊTS DE FUTAIES.

POSSIBILITÉ BASÉE SUR LE DIAMÈTRE DES ARBRES.

I

Dans les coupes de taillis (1), la régénération étant assurée par les

(1) On appelle taillis les forêts destinées à se reproduire principalement par les rejets des souches et des racines. Les bois y sont exploités à un âge peu avancé et compris le plus souvent entre quinze et trente ans.

On nomme futaie la forêt destinée à produire plus particulièrement des bois de fortes

rejets des souches des arbres livrés à l'exploitation, il n'y a généralement que peu de précautions à prendre pour garantir la reproduction du massif exploité. Il est rationnel en ce cas d'enlever en une seule fois tous les produits de la coupe, et de baser leur quotité sur la contenance, les surfaces égales de quelque étendue donnant, le plus souvent, des produits sensiblement égaux. Aussi, la détermination de la possibilité (1), dans les forêts soumises à ce mode de traitement, est-elle une opération trèssimple, qui consiste ordinairement à diviser la série (2) d'exploitation en autant de surfaces égales qu'il y a d'années dans la révolution (3) adoptée; chacune de ces surfaces forme la coupe ou contenance exploitable en un an, et comme elles sont exploitées successivement et continùment dans tout le cours de la révolution, la première exploitée a de nouveau atteint l'âge d'exploitabilité, quand toute la série est épuisée,

Ainsi, par exemple, une forêt ou série de 200 hectares, dont l'âge d'exploitabilité serait fixé à vingt ans, pourrait êre divisée en vingt coupes de 10 hectares chacune, et fournirait ainsi chaque année à l'exploitation, pendant un temps illimité, 10 hectares de l'âge de vingt ans,

Cette manière de fixer la quotité des exploitations annuelles est ce qu'on appelle la possibilité par contenance.

Ce mode de possibilité qui, par sa simplicité, la facilité d'exécution et la régularité des opérations, a quelque chose de séduisant, était également appliqué aux forêts de futaie sous l'ancien régime connu sous le nom de tire-et-aire. Mais le mode à tire-et-aire, en ce qui concerne les futaies, est généralement abandonné aujourd'hui; s'il conserve encore quelques dimensions, et à se régénérer par la semence. En général, cette régénération doit s'opérer par les graines tombant naturellement des arbres, et ce n'est que par exception qu'elle a lieu artificiellement. (MM. LORENTZ et PARADE, Cours de sylviculture.) (1) On entend par possibilité la quotité des matières qu'on peut retirer annuellement d'une forêt, sous la condition d'en maintenir la production constante; résultat que l'on désigne par le terme de rapport soutenu. (Idem.)

(2) Lorsqu'une forêt est très-étendue, on la divise en plusieurs sections, dont chacune est considérée et traitée comme une forêt séparée. Ces sections portent le nom de séries d'exploitations ou simplement séries.

Chaque série forme un tout complet et indépendant du reste de la forêt. Toutes les parties d'une même série sont destinées à subir le même traitement, et doivent par conséquent se trouver dans des conditions d'homogénéité convenable, tout en présentant des bois d'âges gradués depuis uu an jusqu'à l'âge fixé pour l'exploitation, de manière à pouvoir fournir, pendant toute la révolution, une suite non interrompue de coupes annuelles. On peut aussi, dans certains cas, combiner les exploitations de deux forèts peu importantes, de manière à ne former du tout qu'une seule série.

(3) Le nombre d'années déterminé pour l'exploitation entière d'une série se nomme révolution. Et comme il est de règle de tirer d'une forêt des produits annuels non interrompus, il faut que les parties exploitées au commencement d'une révolution atteignent de nouveau l'âge d'exploitabilité au commencement de la révolution suivante; d'où l'on conelut que la révolution doit être composée d'un nombre d'années égal à l'âge fixé pour l'exploitabilité des bois.

rares partisans, on peut dire que leur nombre diminue de jour en jour, et il est généralement reconnu que les souches des arbres de futaie, au moment de l'exploitation, sont trop vieilles pour fournir les éléments d'un nouveau peuplement; qu'en tout cas les rejets qu'on en obtient exceptionnellement ne sont pas aptes à parcourir une nouvelle révolution de futaie; et que par conséquent il faut demander les éléments de la nouvelle génération, non aux souches des arbres exploités, mais à leur

semence.

De là est née la méthode, dite du réensemencement naturel, qui a pour but non-seulement de ménager et même de créer toutes les circonstances favorables à la production et à la germination des graines, mais encore de protéger les recrus pendant leur première jeunesse, époque où, suivant le tempérament de l'essence, il est plus ou moins utile ou nécessaire de leur ménager l'ombre ou la lumière.

Il n'entre pas dans le cadre de cet article d'exposer ici en détail la méthode du réensemencement naturel. Cette méthode est enseignée dans tous les traités modernes de sylviculture, et notamment dans l'excellent ouvrage de MM. Lorentz et Parade; bornons-nous à rappeler que les conditions qu'elle se propose pour but sont réalisées en enlevant les arbres qui composent le massif à régénérer, non en une seule coupe, comme dans la première méthode, mais successivement, en plusieurs opérations qui portent les noms de coupe d'ensemencement, coupe secondaire et coupe définitive; opérations qui suivent pas à pas les phases de la régénération, en se basant toujours sur les résultats obtenus, et en ménageant toutes les exigences des jeunes repeuplements.

Cette nécessité de conformer les exploitations aux irrégularités de la régénération ne permet pas de régler d'avance ces opérations d'une manière aussi précise que dans les aménagements de bois taillis, et exclut notamment, en partie du moins, la fixation de la possibilité par contenance.

La méthode le plus généralement recommandée en cette circonstance, celle qui paraît réunir au plus haut degré les conditions de simplicité et de certitude, prend pour bases de la possibilité la contenance en ce qui concerne l'exploitation d'un certain nombre d'années nommé période, et le volume en ce qui concerne l'exploitation annuelle.

Suivant cette méthode, on commence par déterminer le nombre d'années rigoureusement nécessaire pour régénérer entièrement et sûrement un massif quelconque, parvenu à l'âge d'exploitabilité, de la forêt ou série à aménager; puis on subdivise la durée de la révolution en parties, ordinairement égales entre elles, aussi petites que possible, mais cependant au moins égales à ce nombre d'années. Ces parties aliquotes de la révolution se nomment périodes.

Ainsi, pour fixer les idées par un exemple, supposons que la durée de la révolution soit de cent ans, et que le temps convenable pour la régénération complète et certaine d'un massif soit de seize ou dix-sept ans, on pourrait adopter vingt ans pour la durée de la période; la révolution serait donc divisée en cinq périodes de vingt ans.

Cette division de la révolution préalablement faite, on opère une division analogue de la forêt ou série à aménager par la méthode indiquée plus haut et en usage, avons-nous dit, dans les aménagements de taillis; c'est-à-dire qu'on divise la surface totale de la forêt ou série en autant de parties qu'il y a de périodes dans la révolution, et qu'on affecte une de ces parties à chaque période. Chacune de ces contenances partielles, représentant la coupe à faire dans la période correspondante, prend le nom d'affectation de période, ou simplement d'affectation.

Ainsi, dans le cas précédemment choisi, et en supposant qu'il s'agit d'une série de 500 hectares, la surface totale serait divisée en cinq affectations de 100 hectares, représentant chacune la partie à exploiter pendant la période de vingt ans à laquelle elle serait affectée.

Ainsi encore, et pour préciser davantage la question, la révolution étant supposée commencer en 1861 pour finir en 1960, la première période embrasserait les vingt années de 1861 à 1880, et, pendant cette durée, les exploitations des massifs en coupes de régénération ne devraient pas dépasser les limites de la première affectation, c'est-à-dire des 100 hectares affectés à cette période.

De même, pendant la deuxième période commençant en 1881 pour finir en 1900, les exploitations en coupes de régénération devraient absorber et ne pas dépasser les 100 hectares formant la deuxième affectation.

Et ainsi de suite pour les autres affectations et pendant les autres périodes.

Remarquons que lorsqu'on arrive ainsi à la fin de la dernière période, les bois de la première affectation ont de nouveau atteint l'âge d'exploitabilité, et que les exploitations étant reprises dans cette affectation pour suivre le même ordre que dans la première révolution, il s'établit une gradation d'âges et un roulement régulier des exploitations qui ont pour effet de fournir à perpétuité des massifs de l'àge adopté pour l'exploitabilité. Lorsqu'on a ainsi déterminé les affectations ou coupes de chaque période, ce qu'on pourrait appeler la possibilité périodique, il reste à fixer, dans chaque affectation, la quotité des produits à enlever chaque année, c'est-à-dire la possibilité annuelle. Ce travail s'effectue ordinairement au commencement de chaque période pour l'affectation arrivant en cours de régénération.

Nous avons déjà dit que la nécessité de conformer les coupes aux irrégularités de la régénération ne permet pas de les fixer d'avance par la méthode que nous avons indiquée pour les taillis et pour la possibilité périodique; c'est alors qu'on fait usage de la possibilité par volume.

Le plus souvent on opère de la manière suivante :

Tous les arbres de l'affectation sont comptés, mesurés et cubés, ce qui permet d'évaluer leur volume total au commencement de la période. -Pour avoir le volume entier qui doit être exploité dans le cours de la période, il reste à y ajouter leur accroissement probable jusqu'au moment de leur exploitation.

On suppose à cet effet: 1° que cet accroissement sera égal à celui que prendraient ces arbres, si on les laissait croître tous jusqu'à l'année milieu de la période; 2° que ce dernier accroissement serait égal à celui qu'ont pris les mêmes arbres pendant les dernières années écoulées et en nombre égal à la moitié de la période. C'est-à-dire qu'en mesurant sur la tige des arbres l'épaisseur des dernières couches annuelles, on évalue l'accroissement pris en dernier lieu pendant un nombre d'années égal à la moitié de la période, et on admet que cet accroissement est égal à celui que prendra toute l'affectation lorsqu'elle sera exploitée d'une manière continue et par annuités d'un vingtième dans tout le cours de la période de vingt ans.

En ajoutant au cube existant au commencement de la période l'accroissement probable calculé de la manière que nous venons d'indiquer, on obtient le volume total à exploiter pendant la période, et en divisant ce volume total par le nombre d'années de la période, on obtient le volume à exploiter annuellement, résultat qu'on désigne sous le nom de possibilité par volume.

Cette opération terminée, les agents chargés des exploitations annuelles restent libres de diriger leurs opérations suivant les indications de la nature et de leur expérience. Leur premier soin doit être de propager le plus tôt possible les coupes d'ensemencement sur toute l'étendue de l'affectation; mais toutefois en les subordonnant toujours aux besoins des repeuplements obtenus. Ils n'ont d'autres limites que celles de l'affectation quant à la situation des coupes, et du volume de la possibilité quant à leur quotité. Le résultat à la fin de la période doit être la disparition de toute la vieille futaie, et son remplacement par un peuplement

nouveau.

Si l'on réfléchit à la difficulté matérielle d'évaluer exactement le cube d'un arbre sur pied, et à la rapidité avec laquelle ces évaluations se font toujours dans la pratique, on concevra combien il est difficile que les opérations de détail, faites pour l'assiette des coupes dans le cours de la

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