Page images
PDF
EPUB

dés dont il s'agit pourront être simultanément appliqués sur la même pièce, et si l'action de l'un ne détruira pas celle de l'autre. Cette question mérite d'être examinée.

[ocr errors]

Propriétés vénéneuses de l'if. M. Charles Morel adresse à la Société impériale d'horticulture une communication sur les propriétés toxiques des feuilles et des bourgeons de cet arbre. Une controverse sur ce sujet existe aujourd'hui en Angleterre; on cite un grand nombre de chevaux et de bestiaux qui seraient morts peu d'heures après en avoir mangé. Leur autopsie démontrait qu'ils avaient succombé à la suite d'une violente inflammation d'estomac. Quelques personnes prétendent que les produits de cet arbre sont inoffensifs, excepté, peut-être, lorsqu'ils sont à l'état sec; d'autres, en très-grand nombre, en affirment les propriétés vénéneuses, que les branches soient vertes ou desséchées.

Quel que puisse être le degré de puissance de ce poison, nous croyons utile de le signaler; les ifs sont assez communs dans les jardins pour que nous nous fassions un devoir de prémunir les personnes qui en possèdent contre les dangers qu'ils peuvent présenter. M. Orfila, qui a fait avec soin des expériences sur les feuilles de l'if, a obtenu des résultats contradictoires qui l'ont porté à conclure que leur vertu toxique variait suivant l'âge de la plante et la position dans laquelle elle avait végété.

ERRATUM.

Par suite d'une erreur commise dans la composition du numéro des Annales forestières de janvier 1858, le personnel de l'administration et de l'enseignement à l'Ecole forestière de Nancy contient quelques inexactitudes qui doivent être réparées ainsi :

M. Nanquette est professeur d'économie forestière et inspecteur des études. M. Bagneris, également inspecteur des études, est répétiteur du cours d'économie forestière.

Les adjudants de surveillance sont : MM. Vendredi et Santigny.

Nous avons omis la liste par ordre de mérite des élèves de l'Ecole forestière appartenant à la 1re division et formant la promotion de 1856. Nous nous empressons de réparer cette omission.

[blocks in formation]

DE L'ENLÈVEMENT DES FEUILLES MORTES

DANS LES FORÊTS.

(Suite et fin.)

II.

C'est surtout dans le département du Bas-Rhin que l'enlèvement des feuilles mortes a pris un développement considérable, et par suite inquiétant. On assure que de temps immémorial les cultivateurs de ce pays sont habitués à demander aux forêts le complément d'engrais qui leur est nécessaire pour fumer leurs terres. Quoi qu'il en soit de cette assertion, i est très-probable qu'il y a quelques siècles, lorsque le territoire comprenait de vastes étendues boisées, lorsque les populations, plus clair-semées, se livraient à une culture beaucoup moins épuisante qu'aujourd'hui, la feuillée ne pouvait présenter des inconvénients bien sérieux. Elle n'a été pratiquée sur une grande échelle et ses effets n'ont commencé à se manifester d'une manière sensible qu'à la fin du siècle dernier, avec l'introduction dans les assolements des plantes industrielles telles que la garance, le houblon, le tabac, le colza.

On l'a dit bien souvent, une contrée qui exporterait ses produits pendant une période d'années plus ou moins longue, sous forme de viande, de céréales, de tabac, de graines de colza, de racines de garance, perdrait peu à peu sa fertilité et deviendrait à la longue stérile, si elle ne recevait par la voie du commerce ou de toute autre manière l'équivalent des substances prélevées sur le sol et qui n'a pu lui être restitué par le fumier obtenu sur place. La Virginie, qui forme l'un des Etats du sud de l'Union américaine, est une preuve bien frappante de la vérité de ce théorème agronomique. Lorsque les Anglais vinrent la coloniser, il y a deux siècles environ, son sol était d'une fertilité admirable; aussi les colons se livrèrentils tout d'abord avec ardeur à la culture des plantes épuisantes, et principalement à celle du tabac, sans prendre la peine de restituer à la terre l'énorme quantité de principes nutritifs qu'ils lui enlevaient par les récoltes. Il arriva ce qu'il était du reste facile de prévoir. Le sol s'appauvrit insensiblement, mais d'une manière continue, et aujourd'hui presque toutes les cultures de l'Etat de Virginie sont abandonnées. Cette contrée, si renommée autrefois pour sa fertilité, ressemble maintenant à une immense Jachère.

MARS 1858.-4o SÉRIE.-T. IV.

T. IV.-5

Ainsi, quel que soit le système adopté, il y a toujours un déficit d'engrais. Ce déficit est aussi petit que possible quand, dans l'assolement, on fait une large part à la culture des plantes fourragères; il augmente avec la sole des céréales, enfin il atteint son maximum quand la culture des plantes industrielles devient prépondérante, parce que dans ce cas presque tout le produit de la récolte est exporté. L'effet de cette dernière culture est analogue à celui qui résulte de l'enlèvement simultané dans une forêt de toute la production ligneuse et foliacée. Quelques chiffres que nous trouvons dans une brochure publiée par M. de Baudel, membre du Conseil général du Bas-Rhin, nous paraissent de nature à donner une idée suffisante de l'importance du déficit d'engrais dans ce département. La banlieue de la ville de Haguenau, qui comprend une étendue de 1,451 hectares, produit surtout du colza et du houblon. La sole des céréales et des plantes fourragères y est très-restreinte. La quantité de fumier obtenu sur place s'élève, tout compris, à 14,639 tonnes de 1,000 kilogrammes. D'un autre côté, il paraît constant que 40,000 tonnes environ sont nécessaires pour conserver le sol en bon état de fertilité, pour y maintenir le rapport soutenu, comme disent les forestiers, de telle sorte que, si les chiffres de M. de Baudel sont exacts, le déficit ne s'élèverait pas à moins de 25,361 tonnes de fumier, chiffre énorme, et qui démontre d'une manière éclatante, non pas comme le prétend l'auteur de la brochure, que l'on ne peut raisonnablement refuser de l'engrais à des gens qui en ont tant besoin, mais bien que l'assolement adopté par les cultivateurs de Haguenau est radicalement vicieux.

Nous sommes loin de prétendre que la culture des plantes industrielles soit mauvaise en soi et qu'il faille y renoncer d'une manière absolue. Ce que nous soutenons, c'est qu'il ne faut pas lui faire la part trop grande, et que l'on doit, dans tous les cas, en proportionner l'étendue à la quantité d'engrais que l'on peut fabriquer ou acheter. C'est ainsi du moins que l'ont compris les Flamands qui, comme chacun sait, sont passés maîtres en agriculture et que nos cultivateurs du Bas-Rhin devraient bien prendre pour modèles. Eux aussi cultivent les plantes industrielles, la betterave, le colza, le lin, le pavot, mais ils prennent en même temps toutes les mesures nécessaires pour fabriquer ou importer la plus grande masse possible de fumier et d'engrais. Si les Flamands avaient négligé la culture des céréales et des plantes fourragères, s'ils n'avaient pas daigné s'occuper de la manipulation et de la conservation de leurs fumiers, s'ils n'avaient pas fait venir des départements voisins ou de l'étranger l'engrais qui leur manque, sous forme de chiffons de laine, de noir animal, de cendres de tourbe, de guano, il y a longtemps que les riches plaines qui entourent les villes de Douai, de Lille et de Valenciennes seraient épuisées.

Nous serions grandement étonné si un bon cultivateur du département du Nord, venant s'établir dans les campagnes de l'Alsace, s'amusait, comme les gens du pays, à råteler des feuilles mortes dans les forêts voisines de sa ferme et à les entasser dans de vieilles toiles à paillasse pour les transporter dans ses étables. Il ferait sans nul doute sa litière ailleurs qu'au bois; il ne vendrait ni son fourrage ni ses pailles; il ne laisserait pas perdre une goutte de son eau de fumier; il emblaverait certainement une moins grande surface que ses voisins en houblon, en tabac, en garance, mais en revanche son grenier serait mieux rempli que les leurs de trèfle, de luzerne et de gerbes de blé. En un mot, notre Flamand adopterait un système diamétralement opposé à celui qui est aujourd'hui en vigueur chez les Alsaciens et qui a déjà produit de si funestes résultats.

Ce qu'on est surtout en droit de reprocher à ces derniers, c'est de ne tenter aucun effort sérieux pour augmenter la masse de leurs engrais animaux. Ainsi, nous lisons dans un rapport adressé par le préfet du BasRhin au Conseil général, pendant la session de 1856, que les habitants de l'arrondissement de Saverne n'ont pas même la quantité de bétail nécessaire pour consommer le peu de fourrages qu'ils produisent. Ce n'est donc malheureusement pas en viande, comme le prétend M. Barral, que les feuilles de nos forêts sont transformées.

Dans les arrondissements de Wissembourg, de Saverne et de Strasbourg, la feuille morte est aujourd'hui la base de l'agriculture. Avant tout, la forêt doit satisfaire aux besoins du cultivateur, besoins qui, naturellement, croissent avec l'appauvrissement lent mais continu du sol; les arbres végéteront ensuite comme ils pourront, c'est ce dont on se soucie le moins. Malheureusement, les arbres soumis à un pareil régime végètent fort mal, nous l'avons surabondamment prouvé dans notre premier article, et l'on peut déjà prévoir le moment où l'on ne trouvera plus sur le sol forestier, ni arbres, ni feuilles par conséquent. Peut-être qu'à cette époque le suc cesseur du desservant actuel de Goërsdorf, ou l'agronome qui rédigera, à la place de M. Barral, la chronique du Journal d'agriculture pratique, pour consoler les populations d'un pareil désastre, lancera une vigoureuse philippique contre les agents de l'administration forestière et leur reprochera amèrement d'avoir laissé transformer les montagnes du Bas-Rhin en véritables déserts.

94,991 hectares de forêts tant domaniales que communales sont soumis an régime de la feuillée et exploités, c'est le mot, par les habitants de 361 communes. L'étendue qui leur est délivrée chaque année est d'environ 10,417 hectares (moyenne des dix dernières années). Le préfet désigne les communes appelées à jouir de la concession des feuilles mortes; les agents forestiers, les lieux de ramassage et la quantité de

feuilles qui pourra être enlevée; enfin, c'est à l'autorité municipale qu'il appartient de régler, sur l'approbation du préfet, la distribution des feuilles entre les habitants de chaque commune. Le conservateur peut interdire l'usage du râteau toutes les fois qu'il le juge nécessaire. L'emploi des voitures est toléré, et, de plus, le préfet peut admettre les communes, après instruction régulière de leurs demandes, à la jouissance des feuilles mortes, quand même les agents forestiers auraient constaté la non-possibilité de la forêt. Cette dernière disposition nous paraît particulièrement regrettable, et, sans mettre en doute ni l'esprit d'équité, nj les lumières de l'autorité préfectorale, nous nous permettrons de faire observer qu'elle est assurément peu compétente pour prononcer en dernier ressort sur une question aussi essentiellement forestière.

Dans l'application des règlements dont nous venons d'indiquer les principales dispositions, les agents forestiers, convaincus que la feuillée est un usage funeste qui doit entraîner tôt ou tard des conséquences véritablement déplorables, soutenus par le sentiment du devoir, pénétrés de la responsabilité morale qui pèse sur eux, luttent, avec une énergie et une vigueur dont on ne saurait trop les louer, contre les exigences toujours croissantes, jamais satisfaites, des populations riveraines des forêts. Tous leurs efforts tendent à restreindre la quantité de feuilles enlevées, en diminuant l'étendue des cantons soumis à la feuillée, en proscrivant, autant que possible, l'usage des voitures et du râteau. Malheureusement, ces efforts ne sont pas toujours couronnés de succès. On sait invoquer à propos l'intérêt des classes indigentes, la nécessité de favoriser le développement de l'agriculture, pour faire fléchir la rigueur des règlements dictés par la prudence et la prévoyance des agents. C'est ainsi que sous la pression d'intérêts puissants, opiniâtres, quelquefois sans scrupule, on en est venu à délivrer chaque année aux cultivateurs alsaciens l'énorme quantité de plus de 26,000 voitures de feuilles mortes, représentant un poids de près de 21,000 tonnes, de 1,000 kilogrammes chacune. La presque totalité de ces 21,000 tonnes a été donnée en litière aux bestiaux et a par conséquent rempli l'office de paille. L'expérience ayant démontré que les feuilles mortes constituent par elles-mêmes un très-médiocre engrais, qu'elles se décomposent lentement et avec peine, surtout dans les sols secs et sablonneux, qu'elles renferment peu de principes azotés, il est très-rare qu'on les emploie directement à la fumure des terres.

Mais, au moins, cette masse d'engrais est-elle distribuée exclusivement aux habitants nécessiteux des communes? En a-t-on fait une espèce d'aumône agricole, une sportule analogue à celle que les empereurs romains faisaient distribuer dans certains cas aux citoyens pauvres? Pas le moins du monde. D'après des renseignements statistiques que nous avons sous

« PreviousContinue »