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lité de François et avec elle la jouissance des droits civils qu'après avoir résidé en France, pendant dix ans, à partir de l'époque où il aura obtenu du souverain des lettres de relief, de manière que, sous ce rapport encore, il est d'une condition pire que l'étranger qu'on admet à la jouissance des droits civils en France, dès l'instant qu'il y fixe son domicile en vertu de l'autorisation du Roi. C'est ainsi que l'article est expliqué par les commentateurs. Voyez M. Malleleville, Analyse raisonnée, tome 1er, p. 39, de Lassaulx, Introduction à l'étude du Code civil, p. 58.

Je doute cependant si c'est là le vrai sens de la loi.

Je conviens qu'un François déchu de son titre pour avoir pris du service militaire chez l'étranger ou pour s'être affilié à une corporation militaire étrangère, ne peut rentrer en France qu'avec l'autorisation du gouvernement: je conviens qu'il ne recouvre la qualité de François qu'en remplissant les conditions imposées à l'étranger pour devenir citoyen: mais où est-il écrit que, pendant les dix années de stage politique, il ne jouira point des droits civils?

431. Nous avons vu comment s'acquiert ou se perd la qualité de François : nous avons vu aussi comment s'acquiert la jouissance des droits politiques, ou pour parler en d'autres termes, comment on devient citoyen françois. Maintenant il nous reste à examiner quelles sont les causes qui enlèvent la jouissance des droits politiques. In

terrogeons à cet égard la constitution de l'an 8. La qualité de citoyen françois (dit l'art. 4) se perd, Par la naturalisation en pays étrangèr; Par l'acceptation de fonctions ou de pensions offertes par un gouvernement étranger;

Par l'affiliation à toute corporation étrangère qui supposeroit des distinctions de naissance (1),

Par la condamnation à des peines afflictives ou infamantes.

L'art. 5 de la constitution continue en ces termes : « L'exercice des droits de citoyen françois est suspendu, par l'état de débiteur failli, ou d'héritier immédiat détenteur à titre gratuit de la succession totale ou partielle d'un failli; Par l'état de domestique à gages, attaché au service de la personne ou du ménage;

Par l'état d'interdiction judiciaire, d'accusation ou de contumace.

432. La constitution de l'an 8 ne dit rien à l'égard de l'établissement fait, en pays étranger, sans esprit de retour de là naît la question de savoir si un établissement de cette espèce qui entraîne la perte de la qualité de François, aux termes de l'art. 17 du Code civil, fait aussi perdre le titre de citoyen?

Il est facile de résoudre cette question de droit public: qu'on se rappelle qu'on ne peut avoir

(1) Voyez mes explications sur l'art. 17 relativement aux corporations étrangères qui exigent des distinctions de nais

sance.

la jouissance des droits politiques sans avoir, en même temps, la qualité de François à laquelle est inhérente la jouissance des droits civils or, si la qualité de citoyen françois renferme essentiellement celle de François, la première qualité doit disparoître, lorsque la seconde se perd; il est impossible qu'elle y survive.

433. L'article finit par dire : le tout sans préjudice des peines prononcées par la loi criminelle contre les François qui ont porté ou porteront les armes contre leur patrie.

Le Code pénal, art. 75, menace de la peine de mort tout François qui portera les armes contre la France, et prononce la confiscation de ses biens.

Ces peines sont applicables aux François même naturalisés en pays étranger avec l'autorisation du gouvernement. Cela est ainsi décidé par un décret en date du 26 août 1811.

Le François naturalisé ou non, ne peut donc jamais porter les armes contre sa patrie; jamais il ne peut s'exposer à faire couler le sang de ses premiers concitoyens.

ROYAUME DE FRANCE.

434. Le traité de paix conclu entre les puissances alliées et le Roi de France contient un article additionnel par lequel il est décidé « que les décrets portés contre des sujets françois ou réputés François, étant ou ayant été au service de sa majesté I. et R. apostolique, demeureront sans effet, ainsi que les jugemens qui ont pu être rendus en exécution de ces décrets. »

Dans un autre article additionnel au même traité, on trouve une disposition semblable à l'égard des François ou réputés François qui étoient ou avoient été au service de la Prusse. Voyez encore un avis du Conseil d'état du 19 juin 1814.

434 bis. Une ordonnance du 16 décembre 1814, enjoint aux militaires françois de tous grades qui ont pris du service à l'étranger, sans autorisation spéciale, de rentrer avant le 15 avril 1815, et de justifier de leur retour, à peine de perdre la qualité de François, et sans préjudice des peines établies par le Code pénal, s'ils portoient

les armes contre la France.

SECTION II.

De la Privation des Droits civils par suite de condamnations judiciaires.

ARTICLE 22.

Les condamnations à des peines dont l'effet est de priver celui qui est condamné, de toute participation aux droits civils ci-après exprimés, emporteront la mort civile.

435. En admettant le systême de la mort civile, nos législateurs n'ont fait que suivre les traces des Romains et de toutes les nations policées. On a reconnu par-tout que celui-là doit être retranché du corps social qui s'est rendu indigne d'y appartenir par les crimes dont il s'est

souillé,

1

Je viens de dire que notre article est l'expression du Droit romain; en effet, la loi 2, D. de Pœnis porte: Rei capitalis damnatum sic accipere debemus, ex quá causá damnato, vel mors, vel etiam civitatis amissio, vel servitus contingit.

436. La mort civile, image de la mort naturelle, emporte la perte de tous les droits civils: on ne peut être considéré comme mort à l'égard d'un objet et comme vivant à l'égard d'un autre; il seroit absurde qu'un homme fût exclu de certains droits civils comme mort et qu'il jouît des autres droits civils comme vivant; on ne meurt pas à demi.

Il peut cependant arriver que le législateur imprime à une peine l'effet d'exclure le condamné de certains droits civils seulement. Mais alors, comme on l'a observé, elle n'établit pas une véritable mort civile, elle ne crée qu'une mort civile imparfaite. Locré, p. 371.

La règle ci-dessus exprimée que la mort civile proprement dite entraîne la privation totale des avantages conférés par la loi positive, n'est pas tellement inflexible qu'on ne puisse la soumettre à aucune modification, puisque l'art. 25 du Code nous apprend par une disposition textuelle que l'homme banni de la société civile n'est pas moins capable de recevoir une pension alimentaire par donation entre-vifs ou par acte de dernière volonté.

437. A réfléchir que la mort civile laisse à ceux. qui en sont frappés la jouissance des droits que

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