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la rendre illusoire, autant qu'il seroit en lui, comme s'il avoit contracté des dettes inconsidé rées, ou fait des donations, etc., pour que ses héritiers fussent privés de ses biens, les actes pourroient être annullés. >>

Ici M. Pigeau se trompe lourdement.

Le jugement de condamnation ne confère aucun droit aux héritiers présomptifs, parce qu'il ne porte aucun changement à l'état de la personne qu'il atteint : il ne lui enlève pas son existence sociale: de là il suit que le coupable peut contracter des dettes inconsidérées ou faire des donations, sans que les héritiers soient admis à se plaindre.

Pendant le procès, l'accusé comme le remarquent les auteurs des Pandectes françoises, t. 2, p. 165, conserve l'exercice de tous ses droits; et cette conséquence est fortifiée par le principe que, jusqu'à la condamnation définitive, la présomption est en sa faveur. Il est toujours présumé innocent jusqu'à la condamnation.

Les auteurs des Pandectes françoises continuent dans les termes suivans:

« L'accusé, pendente accusatione, dit Leprê tre, n'est interdit de l'administration de son bien. Il peut en conséquence recevoir ce qui lui est dû. Il peut vendre et aliéner, soit ses meubles, soit ses immeubles. Il peut enfin faire tous les actes de dispositions à titre onéreux, qui sont permis aux autres citoyens. Nous disons à titre onéreux, parce que les donations faites dans le

même intervalle, sont annullées par la condam nation.

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<< Cependant le Code dit, dans notre article. S2, que le mort civilement ne peut disposer de ses biens, en tout ou en partie, par donation entre-vifs. Quelques personnes en concluront, peut-être, qu'il peut disposer, avant, de cette manière. Ils se fonderant sur la maxime, qui dixit de uno, negat de altero. Il faut bien prendre garde que le Code ne parle dans ce S, que des biens acquis depuis la mort civile. Son effet ayant été de le dépouiller de ceux qu'il avait auparavant, il ne peut plus en disposer d'aucune manière. La maxime invoquée ne peut donc avoir ici aucune application.

Ainsi la loi ne contrarie point l'ancien principe. Il est fondé, comme nous l'avons vu, sur la loi 15, au digeste de Donat. Elle porte: Post contractum capitale crimen, donationes factæ non valent, ex constitutione divorum Severi et Antonini, si condemnatio secuta sit. Cette loi a été reçue et suivie dans le droit françois. Il est bien vrai que son motif a été principalement la faveur du fisc, et de la confiscation: mais, quoique celle-ci n'ait plus lieu, nous estimons principe doit continuer d'être observé; parce qu'il ne faut pas laisser à l'accusé, qui craint la condamnation, le moyen de frustrer ses héritiers, et peut-être, de récompenser ses complices.

que

le

« Si l'on maintient les aliénations faites à prix d'argent, c'est que ces actes sont bien plus fa

vorables; qu'ils ne sont pas aussi aisément suspects; et que l'acquéreur, qui a acheté et payé le prix, mérite, de sa part, la protection de la loi. Si la vente est faite en fraude, si elle n'est qu'une donation déguisée, elle est de même annullée. Elle est censée telle 1o quand elle est générale, et le prix très modique; 2o si l'accusé est resté en possession, et a continué de percevoir les fruits; 3° si la vente est clandestine et faite à vil prix. Enfin, un principe qui milite en faveur de la vente, c'est qu'elle est un acte d'administration ordinaire, caractère

la donation. >>>

que n'a

pas

D'après les principes que j'ai exposés plus haut, le lecteur apercevra sans difficulté ce qu'il y a de vrai dans les explications données par les auteurs des Pandectes françoises.

513. Ce n'est pas à l'autorité administrative, mais à l'autorité judiciaire qu'appartient le droit de juger s'il faut regarder comme nuls ou frauduleux les actes d'aliénation qu'auroit faits un accusé et qui blesseroient les droits du fisc, décret du 10 mars 1807.

514. Des jurisconsultes parmi lesquels on remarque MM. Proudhon, Pailliet, Toullier, estiment que la mort civile commence avec le jour de l'exécution, c'est-à-dire au premier minuit de ce jour.

On motive cette interprétation 1o sur ce qu'il est décidé la mort civile est encourue du que jour de l'exécution et non du moment, ce qui s'accorde avec l'art. 2260, d'après lequel la pres

cription se compte par jours et non par heures. 2o. Sur ce que le jour civil, différent du jour naturel, embrasse tout le temps que le soleil emploie à faire le tour de deux hémisphères.

M. Delvincourt, p. 306, se déclare ouvertement contre cette opinion; il lui paroît certain que la mort civile ne peut être encourue que par l'exécution, et du moment de l'exécution.

Ce dernier systême ne pourroit pas être attaqué avec succès. La mort civile n'a lieu que du moment de l'exécution, tant parce qu'elle est l'effet d'une peine dont elle ne peut devancer l'époque, que parce que la société n'est censée connoître la condamnation du coupable qu'au moment où la sentence s'exécute.

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515. Aux termes de l'art. 36 du Code pénal, l'arrêt qui condamne à la déportation est imprimé par extrait il est affiché dans la ville centrale du département, dans la commune du lieu où le délit a été commis, dans celle où se fait l'exécution et dans celle du domicile du condamné.

M. Pailliet est d'avis qu'à l'égard de la déportation, le jour de l'exécution ne peut être que celui où le condamné a mis le pied sur le sol étranger.

M. Delvincourt, p. 306, paroît très embarrassé sur cette question; il pense que l'exécution est censée avoir lieu du jour de l'affiche de l'arrêt porté par l'art. 36 du Code pénal, ou du jour que l'arrêt est devenu irrévocable, argument tiré de l'art. 35. La première opinion lui paroît préférable par le motif que du moins

il y a une espèce de publicité. Je rends textuellement l'explication qu'on lit dans l'ouvrage de M. Delvincourt.

516. İl n'est pas indifférent de dire que, d'a près le S de l'art. 18 du Code pénal, le gouvernement peut accorder au déporté, dans le lieu de la déportation, l'exercice des droits civils, ou de quelques-uns de ces droits.

517. M. de Lassaulx, p. 59, enseigne avec raison que dans le cas prévu par les décrets du 6 avril 1809 et du 26 août 1811, la mort civile est encourue du jour de l'arrêt, sans distinction entre les arrêts par contumaces et les arrêts contradictoires; parce que la mort civile est ici une peine principale, et que le jugement ne reçoit aucune autre exécution, la confiscation des biens n'étant qu'un effet accessoire de la mort civile.

518. J'ai déjà eu occasion de remarquer que la confiscation des biens d'un condamné a lieu dans certains cas fixés par la loi.

519. Il faut conséquemment tracer quelques règles relatives à la confiscation, que le Code pénal définit l'attribution des biens d'un condamně au domaine de l'état.

520. Elle n'est la suite nécessaire d'aucune condamnation, et elle n'a lieu que dans le cas où la loi prononce expressément, Code pénal, art. 37.

521. Aux termes de l'art. 38 du même Code, la confiscation demeure grevée de toutes les dettes légitimes, jusqu'à concurrence de la valeur des biens confisqués: elle demeure également

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