Page images
PDF
EPUB

pellent ordinaria litis, il n'y auroit évidemment à consulter que la loi du temps où le juge prononce sur la contestation dont le sort dépend du sort de ce fait; cela résulteroit du principe enseigné par tous les auteurs, et consacré par l'arrêté du gouvernement du 5 fructidor an 9, que tout ce qui touche à l'instruction des affaires, tant qu'elles ne sont pas terminées, se règle d'après les formes nouvelles, sans blesser le principe de non-rétroactivité que l'on n'a jamais appliqué qu'au fond du droit.

«Mais le mode de preuve d'un fait contesté ne tient pas précisément à la forme de procéder; il tient à ce que les jurisconsultes appellent decisoria litis; il influe nécessairement sur le fond; car telle partie triomphera, si elle peut prouver ce fait, soit par témoins, soit par une présomption purement humaine; et elle succombera si elle ne peut pas le prouver, soit de l'une, soit de l'autre manière. C'est donc à la loi du temps où les parties rapportent le fait contesté, que l'on doit uniquement s'attacher pour en déterminer le mode de preuve. » Voyez arrêt de la Cour de cassation du 22 mars 1810 dans la Jurisprudence du Code, tome 15, p. 369, et un arrêt de la même Cour, du 8 mars 1811, rapporté dans le Répert. de jurispr. aux mots Commencement de preuve, p. 486. Voyez aussi M. Chabot, aux mots Preuve testimoniale.

66. Les conventions synallagmatiques sous seing-privé doivent être faites en double ou en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un

intérêt distinct et séparé : l'art. 1325 du Code civil le veut ainsi; et cela pour une très bonne raison. Si la convention synallagmatique étoit constatée par un seul original, il seroit au pouvoir de la partie à laquelle l'original auroit été remis de réclamer l'exécution de l'engagement ou de le rendre illusoire en détruisant l'acte qui sert à le constater: à défaut de plusieurs originaux, les deux parties ne seroient donc pas également enchaînées à l'exécution du contrat.

Faudra-t-il appliquer la règle de l'art. 1325 du Code civil à une convention synallagmatique sous seing-privé, passée antérieurement à sa promulgation, sous une coutume dont les dispositions n'exigeroient point de double écrit ? On doit répondre négativement.

Il seroit injuste de priver les parties des avan tages conférés par un contrat ancien pour ne l'avoir pas fait revêtir d'une forme légalement inconnue à l'époque de sa confection.

C'est l'avis de M. Proudhon, p. 22.

67. Quid, si une personne vient à décéder sous le Code civil, après avoir fait, sous la législation préexistante, un testament dans les formes alors indispensablement exigées? Ce testament est-il valable, soit par rapport à la forme, soit par rapport au fond de la disposition?

La validité du testament, par rapport à la forme, est actuellement un véritable adage en jurisprudence : un acte est réglé à cet égard par la loi régnante au moment de sa confection, le principe de non-rétroactivité n'ayant jamais été appliqué qu'au fond du droit.

C'est en respectant ce principe, comme l'observe M. Proudhon, p. 20, que, par un avis du Conseil d'état en date du 2e jour complémentaire an 13, approuvé le 4, il a été décidé que les grosses des contrats délivrées avant le sénatus-consulte du 28 floréal an 12, peuvent être mises à exécution sous la formule exécutoire dont elles ont été revêtues au moment de leur confection, sans qu'il soit nécessaire d'y ajouter la nouvelle formule prescrite par l'art. 141 du sénatus - consulte. Voyez Répert. de jurispr. Exécution parée, § 3.

Il faut bien distinguer dans tous les actes. de la vie civile, dit M. Merlin, ce qui tient à leur forme purement probante d'avec ce qui est relatif à la capacité requise pour les faire, et au fond de leurs dispositions..

Pour tout ce qui concerne la capacité des parties, et le fond des dispositions, il est de principe qu'on doit s'attacher principalement aux lois qui existent au moment où naît et s'acquiert le droit dérivant des actes.

Ainsi, pour savoir si un testateur a pu disposer, et s'il n'a pas transgressé les bornes légitimes, on doit consulter la loi du jour où il est décédé, parce que c'est de ce jour seulement qu'a pu naître le droit de ses héritiers institués ou de ses légataires.

Mais pour tout ce qui tient à la forme purement probante, il n'y a et il ne peut y avoir d'autre loi à suivre que celle du lieu et du moment où l'acte se passe; une fois l'acte passé,

la forme probante dont il est revêtu, lui assure son effet, et cet effet est indivisible, l'observation de cette forme et le droit de faire preuve de tout ce que l'acte contient, étant deux corrélatifs inséparables l'un de l'autre.

M. Chabot, Questions transitoires, tome 2, au mot testament, S 1er, M. Pailliet, Manuel de droit françois, ont raisonné dans le même sens.

68. Des époux se sont unis sans avoir fait de contrat de mariage sous l'empire d'une coutume attributive du droit d'usufruit ou d'autres avantages matrimoniaux au profit du survivant des conjoints: la dissolution du mariage par la mort de l'un des époux s'opère postérieurement à l'émission du Code : quels seront les droits de l'époux survivant?

Si des époux mariés sous une ancienne coutume avoient fait un contrat anténuptial par lequel ils eussent accordé au survivant l'usufruit des biens appartenant au prédécédé, point de doute que le survivant ne fût appelé à jouir de cet usufruit, bien que la dissolution du mariage se fût opérée depuis le Code : les conventions sont sacrées, elles tiennent lieu de loi à ceux qui les ont souscrites.

Or, les époux en s'unissant sans avoir fait de contrat de mariage, sont censés avoir adopté et pris pour base de leurs droits comme de leurs obligations respectifs, les dispositions de la coutume: s'ils ont gardé le silence, s'ils n'ont pas dicté leurs volontés dans un contrat de mariage, c'est qu'ils savoient que la coutume in

terprétative de leur volonté, parloit suffisamment pour eux de là naît un contrat tacite dont les effets, d'après la règle, eadem vis est taciti quàm expressi ne peuvent être altérés, sans donner à la loi un effet rétroactif, sans dépouiller les époux de la jouissance des avantages conférés par la coutume sous la foi de laquelle ils ont consenti à partager le fardeau du mariage aussi la doctrine universelle de tous les interprètes et la jurisprudence des tribunaux et Cours garantissent, dans ce cas, à l'époux survivant la jouissance des avantages statutaires.

69. Plusieurs coutumes accordoient à l'époux survivant la propriété des meubles appartenant à l'époux prédécédé, et l'on sait que les rentes avoient presque par-tout la nature d'immeubles: je suppose que des époux se soient liés sous une coutume qui rendoit le conjoint survivant propriétaire des meubles laissés par le conjoint prédécédé je suppose que cette coutume ait classé les rentes parmi les biens immeubles : je suppose encore que les personnes mariées sous son empire aient fait des acquisitions de rentes, soit avant, soit depuis la loi qui les a mobilisées, et qu'enfin la dissolution du mariage arrive sous le Code: ces rentes formeroient-elles la. propriété de l'époux survivant?

M. Chabot, Questions transitoires, tome 1er, aux mots Droits matrimoniaux, soutient la négative, et avec raison.

Car, pour déterminer la nature d'un bien

« PreviousContinue »