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du refe avec toute la rigueur dont on use envers les fcélérats reconnus. Dans la nuit, à une heure du matin, on a annoncé aux quatre Députés prifonniers qu'on les envoyoit à Metz, pour y être jugés prévôtalement, attendu qu'ils étoient coupables d'un attroupement illicite. Ceux qui employoient ces termes, n'en connoiffoient pas la valeur. »

« Un Magiftrat du lieu eft venu vifiter ces quatre Députés dans la prifon. M François de Neuf château, l'un des quatre, a repréfenté à ce Magiftrat l'inviolabilité de fa personne, en qualité de Suppléant. Il a fait voir qu'un homme, tel que lui, qui a été décoré des premières places de Magiftrature, qui tient à une Cour Souveraine, comme Confeiller honoraire, &c. ne pouvoit être foumis à la jurisdiction prévôtale, comme les vagabonds & les gens fans aveu. Le Magiftrat auroit dû revendiquer cette affaire pour les Tribunaux ordinaires, vû fur-tout que la dernière Déclaration du Roi, qui attribue à la Maréchauffée la connoiffance des Affemblées illicites, ne fait point Loi dans le reffort du Parlement de Metz. où elle n'a pas été enregistrée. »

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Le Magiftrat a laiffe partir les prifonniers pour Metz. Les quatre Députés, traités en cri minels d'état; gardés à vue, font arrivés, à fix heures du matin, fur la place de Pont-à-Mouffon, ville de Lorraine entre Toul & Metz: c'étoit l'heure du marché. Il étoit trop aifé de faire prendre le change au peuple, & d'infinuer que ces prifonniers étoient des brigands, des coupeurs de blé. Il n'en falloit pas davantage pour exciter du trouble. Heureufement M. François de Neufchâteau a fa répuration faite, depuis longtems, en Lorraine & ailleurs. Sur fe nom feul, on n'a pas pu préfumer qu'il fût à la tête des coupeurs de blé & des brigands. Il auroit dé

pendu de lui plufieurs fois, depuis fon arrêt, de fe faire délivrer par un peuple juftement indi né. Mais il a donné l'exemple de la foumission à l'autorité, ben convainca qu'il étoit, que cett: affaire feroit conûdérée à Metz fous fon vrai point de vue »

En effet, il n'a pas eu befoin de plaider sa caufe; car, avant fon arrivée, M. le Marquis de Bouillé, qui avoit reçu un courrier extraordinaire du Lieutenant de Roi de Toul, avoit condamné la démarche de ce dernier, fur l'expofé de fa lettre même. Ce brave & judicieux Cominandant a fenti le danger de fouffrir que quatre Dé. putés des Communes, dont l'un eft Suppléant, fiffent une entrée ignominieufe dans Metz, & ila expédié des ordres pour les renvoyer paisiblement chez eux, auffitôt qu'on les rencontreroit. Ses fages inte tions ont été parfaitement fecondées par M. Courtois, Prévôt-général, & M. Cofte, Lieutenant de Maréchauffée de Metz. Ce dernier s'eft tenu à une lieue en avant de ce te ville, & a dit à l'efcorre qu'el'e pouvoir repartir pour Toul. Trois de ces prifonniers s'en font retournés à leurs affaires. M. François de Neufchâteau, fe trouvant à une lieue de Metz, y eft venu feul. Il a été invité & accueilli par M. le Marquis de Bouillé, avec la difti ction à laquelle il avoit lieu de s'attendre. Ain donc, au lieu d'être pendu à Metz par les ordres du général, comme le débitoient & efpéroient à Toul les Auteurs de cet attentat ce Député a dîné à la table du général. Cela eft un peu différent. » » Auffi to ché de cette marque de juftice, qu'il avoit dû être fenfible à l'ava ie infâme qui l'avoit précédée, M. François de Neufchâteau n'a demandé à le Commandant de la Provi ce, d'autre reparation contre le Licute ant de Roi de Toul, que l'agrément de tenir de nouveau

flé rie

l'Affemblée très-innocente & très - légale que ce Li utenant, de Roi avoit difperfée avec tant d'imprudence. On a remarqué ce trait de modération. Il répond à tout le reste de la conduite de M. François de Neufchâteau; mais on doute que les Communes du Bailliage de Toul fe réduitent à fi peu de cho'e, pour l'nfulte faite à tout le Peuple, dans la perfonne de fes Repréfentans »

» A fon retour, M. François de Neufchâteau a été reçu dans Pont-à-Mouffon & à Toul, comme on devoit recevoir le martyr du Patriotifme, & un Député fuppléant, dont la perfomme eft fous la fauve-ga de de la Nation, Son arrivée à Toul a occafionné une de ces fê es imprévues, qui ne font point commandes, qui émanent, en quelque forte, du mouvement de tous les coeurs, & qui tranfportent toute une Ville d'enthoufiafme & de joie. »

» Cet évèrement, fi différent de ceux qui fe paffent ailleurs, auroit été le premier qui eût troublé la tranq: illité, dans laquelle M. le Marquis de Bouillé af maintenir jufqu'ici le Département des Trois Evêch ́s : de moindres étincelles ont allumé de grands in endies. On ne fauroit trop louer la conduite de ce digne Officier-général. »

P. S. Le 13, la novelle Affemblée des Commures du Bailliage de Toul, s'eft t nue au même lieu ù elle avoit été troublée, outrage, difperfée huit jours auparavant. Le Procès-verbal de certe Affemblée a être publié. I paroît que le Lieutenant de Roi de Toul s'eft laiff conduire, dans cette affaire, par des gens qui l'ont trompé, & qui font connus.

Voici la lettre écrite par MM. de l'Hôtel-de-Ville de Paris, à MM. les

Volontaires-Patriotes d'Elbeuf. Elle n'a pu être placée l'Ordinaire dernier.

que

MESSIEURS,

« Recevez le témoignage de reconnoissance la Ville de Paris doit au courage qui Vous a fait braver les plus grands dangers, pour assurer sa subsistance; elle sent vivement toutes les obligations qu'elle vous a, et son seul regret est de ne pas avoir d'expressions assez énergiques pour rendre tous les sentimens dont elle est pénétrée. Au récit de vos braves Députés, les larmes ont coulé de tous les yeux. L'Assemblée, frappée toura-tour d'admiration et de terreur, a partagé tous vos dangers et toutes vos sòllicitudes. Elle s'est empressée de députer à l'Assemblée Nationale pour s'assurer des moyens de procurer à votre brave Compagnon, M. Guilbert, la liberté dont vous savez tous faire, Messieurs, un si noble usage. Ses vœux sont remplis; il est rendu à sa famille, à ses amis et à sa Patrie. Daignez l'assurer, Messieurs, que l'Assemblée des Représentans de la Commune de Paris a frémi de ses dangers, et qu'elle n'auroit rien négligé pour vous prouver qu'elle ne se borne pas à une admiration stérile, et qu'elle sait voler au secours de ceux qui veulent bien s'exposer au danger pour elle. Recevez, Messieurs, tous en général, et chacun es particulier, l'assurance d'une éternelle gratitude; et soyez les interprètes des sentimens auprès d'un Chef, M. Carbonnier, qui sait joindre la prudence

à la bravoure, et qui est si digne de vous

Commander. »

Vos tres-humbles et trèsobéissans serviteurs,

Signés, BAILLI, Maire; MOREAU DE SAINTMERY, DELAVIGNE, Présidens; BROUSSE DES FAUCHERETS, Secrétaire.

Paris, le 8 Août 1789:

L'anecdote consignée dans la lettre que l'on va parcourir, offre une singu larité physique, parfaitement certaine, dont le récit fera diversion un instant, à ceux, trop sérieux, dont nous entretenons nos Lecteurs depuis un mois.

A MONSIEUR Le Rédacteur du Mercure.

« Trouvez bon, Monfieur, que je vous demande une petite place pour la lettre dont j'ai l'hon» neur de vous envoyer copie, dans le propre » ftyle naïf de l'honnête Régiffeur qui me l'écrit » de lui-même, & de fa main, deux jours après » l'accident qu'il rapporte. »

A Fougères, près Blois, ce vendredi 31 juillet 1789. MONSIEUR,

« Il eft arrivé un grand malheur au château mardi dernier (28), à une heure après midi, le temps étant noir seulement par gros carreaux mêlés de blanc; il a fait un fi fameux coup de tonnerre, qu'il eft tombé fur la grande tou a fait une rote depuis le plomb d'en haut, du côté d la faye, de la largeur de deux pieds & d

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