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blable à une cédule de justice de paix, il peut être rendu en la chambre du conseil, sans inconvénient.

75. La femme séparée de corps ne peut pas ester en justice sans autorisation, soit de son mari, soit de la justice. (Art. 245 et 218, C. C.)

« L'effet de la séparation de corps, dit M. DURANTON, t. 2, p, 420, no 453, donne bien à la femme le droit d'avoir une habitation distincte de celle de son mari, et elle entraîne la séparation de biens; mais la femme n'est pas moins soumise à la puissance maritale, pour tout ce qui n'a pas été détaché de cette puissance par la loi. Or, nulle part il n'est dit que la femme séparée de corps a le droit d'ester en jugement sans être autorisée. L'art. 1449, C. C., dit au contraire qu'elle ne peut aliéner ses immeubles sans le consentement de son mari, ou à son refus, l'autorisation de la justice; il la met sur la même ligne que la femme séparée de biens seulement. »

Mais l'art. 1449 dit que la femme séparée de corps ou de biens reprend la libre administration de ses biens, et peut disposer de son mobilier, et l'aliéner; il faut alors faire une distinction; nous pensons qu'elle a le droit d'intenter en justice toutes actions mobilières sans autorisation, mais que cette faculté ne s'étend pas aux actions immobilières. Voy. M. MERLIN, Rép., t. 1, v° Autorisation maritale, sect. 7, p. 514.

76. La femme, dans sa requête en autorisation, doitelle constituer un avoué?

Nous ne pensons pas, dit M. CARRÉ, t. 3, p. 217,no 2922, que le ministère des avoués soit de rigueur en cette procédure; cependant, ajoute-t-il, les parties peuvent en coastituer, si elles le jugent convenable; telle est aussi l'opinion de M. D. C., p. 539 et 540.

77. Une femme a besoin d'autorisation pour ester en justice, lorsque l'absence de son mari est déclarée.

M. CARRÉ, t. 3, p. 220, no 2924, soulève cette question, parce que, dit-il, on a soutenu devant lui que l'art. 863 ne pouvait jamais recevoir son application, il ne partage point cette opinion, et pense que la femme d'un individu absent a besoin d'autorisation, lorsqu'elle veut aliéner, hypothéquer ou former une action immobilière.

Cette interprétation de l'art. 863 peut d'autant moins être contestée, qu'elle est fondée sur le texte même de l'art. 154, duquel argumentent les partisans de l'opinion contraire : La femme a le droit d'administrer, sans autorisation alors, puisque ce droit lui est conféré par la loi, mais elle ne peut sortir des bornes de cette administration sans une autorisation préalable, puisque l'art. 124, C. C., ne dit pas le contraire, et que l'art. 863, C. P. C., l'exige.

78. Celui qui a subi une peine afflictive ou infamante, peut-il, après l'expiration de sa peine, autoriser sa femme à ester en justice? (Art. 221, C. C.)

Oui, pense M. DURANTON, t. 2, p. 454, no 507, attendu, dit il, que le condamné peut, après avoir subi sa peine, ester en jugement et faire des contrats; qu'on ne voit nulle part qu'il ait perdu la puissance maritale, et que l'art. 28 du Code civil détermine les incapacités dont il reste frappé, incapacités qui ne s'étendent pas à l'autorisation maritale.

Cependant M. DELVINCOURT a embrassé l'opinion contraire; et, pour soutenir son opinion, il professe que ces mots, pendant la durée de la peine, sont une addition inutile; car, dit-il, d'un côté, toute peine afflictive est infamante, et l'infamie accompagne le coupable pendant toute sa vie.

Au contraire, nous croyons que cette addition doit enlever toute difficulté, parce que d'abord une incapacité, comme nous l'avons souvent dit, doit être écrite dans la loi en termes formels, et que la conduite et la moralité du condamné souvent semblent faire disparaître le souvenir de l'infamie! ce serait, en quelque sorte, briser sans motifs le lien conjugal, qu'une épouse fidèle aurait toujours considéré comme un lien sacré et indissoluble.

79. Le mari peut autoriser sa femme, quoiqu'il soit pourvu d'un conseil judiciaire. (Art. 215, 509 et 5.13, C. C.)

M. DURANTON, t. 2, p. 454, no 506, tout en soutenant que cette décision n'est guère en harmonie avec le principe, que celui qui est incapable ne peut conférer à un autre une capacité qu'il n'a point, pense que la loi est formelle, dès lors qu'elle ne fait exceptiou que pour l'interdit.

Les conséquences de cette opinion peuvent être bien funestes à la femme; car lorsque le mari est interdit pour cause d'imbécillité, de fureur ou de démence, il est probable que si, malgré cela, il avait le pouvoir d'autoriser sa femme, ce ne serait pas lui qui chercherait à lui faire dissiper sa fortune; mais celui qui est pourvu d'un conseil judiciaire, pour cause de prodigalité par exemple, engagera d'autant plus sa femme à dissiper son patrimoine en folles dépenses, que lui-même n'aura plus le loisir de satisfaire ses goûts avec ses propres biens. Il est donc plus. dangereux d'accorder le pouvoir d'autorisation à un individu pourvu d'un conseil judiciaire, qu'à un interdit.

Si cette réflexion ne suffit pas pour faire prononcer une incapacité contre le mari pourvu d'un conseil judiciaire, elle doit au moins conduire à penser que le Code présente à cet égard une lacune que l'intérêt des femmes prescrit aux législateurs de faire disparaître.

104 AUTORISATION DES FEMMES MARIÉES.

80. La femme a-t-elle besoin d'autorisation pour faire des actes extrajudiciaires?

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Le silence du Code sur cette importante question a laissé beaucoup d'incertitude sur sa solution : « Les actes extrajudiciaires, dit M. B. S. P., t, 2, p. 667, n° 2, n'étant point indiqués par les termes ester en jugement, de l'art. 215, il semble que la femme puisse les faire par elle-même; néanmoins, comme l'art. 219 prescrit indirectement l'autorisation lorsqu'il s'agit de passer un acte, et que ces derniers termes désignent ordinairement une obligation, on devrait restreindre la décision précédente aux seuls actes extrajudiciaires, qui ne produisent point d'engagement.. Cette distinction est très juste, mais présente encore beaucoup de vague; car cette limite serait, dans un grand nombre de cas, bien difficile à fixer; cependant, les auteurs pensent généralement que la femme peut faire tous les actes qui ne sont pas, à proprement parler, actes judiciaires, c'est-à-dire, qui ne mènent pas directement à un jugement; ainsi, elle pourrait faire des protêts, des oppositions, des saisies-arrêts et tous actes conservatoires, sans pouvoir en suivre l'effet. Cette opinion. nous paraît devoir être adoptée, quoiqu'elle ne soit pas aussi précise qu'on le désirerait. Les art. 940 et 2194, contiennent bien l'énonciation de certains actes que la femme peut faire sans autorisation; mais on ne pourrait raisonnablement appliquer à ces deux articles la maxime, inclusio unius est exclusio alterius.

Voy. MM. DELVINCOURT, t. 1er, p. 232, note 8; D. C., p. 538; et DURANTON, t. 2, p. 428, no 469.

81. Indication des auteurs qui ont parlé de l'autorisation des femmes mariées.

Les auteurs qui se sont le plus étendu sur cette matière:

sont MM. DURANTON, dans son excellent Cours de droit civil, pages 396, 415 et suiv.; MERLIN, Rep., t. 1er, p. 488 et suiv., vo Autorisation maritale, et t. 16, p. 88, 101 et suiv.; et CARRÉ, t. 3, p. 212 et suiv., no 2909 et suiv.

Voy. aussi MM. TOULLIER, t. 2, pag. 11, 16 et suiv.; DELVINCOURT, Cours de droit civil, t. 1er, p. 75 au texte, et 332 et suiv. des notes et explications; F. L., v° Autorisation des femmes mariées, t. 1, p.253 et suiv.; PIG., t. 1er, p. 83, art. 10, et t. 2, p. 376; B. S. P., t. 2, p. 664 et suiv, ; HAUT., p. 480; D. C., p. 536; Lep., Questions, p. 573, et Style, p. 720; THOм. DESм., p. 315; BIRET, Traité des Nullités, t. 1, p. 124; DELAPORTE, t. 2, p. 401 ; et Coмм., t. 3, p. 100.

AVOCAT.

ON donne ce titre à celui qui, ayant rempli les conditions exigées par les lois, se consacre à éclairer ses concitoyens sur leurs droits, et à les défendre devant les tribunaux, soit de vive voix, soit par écrit.

Ainsi que l'observent les rédacteurs du Répertoire de jurisprudence, la profession d'avocat était bien plus cultivée et plus honorée chez les anciens peuples, qu'elle ne l'est de nos jours. Dans les divers états de l'Europe, à Rome, et dans la Grèce, la discussion des grandes affaires politiques était confiée aux avocats. S'ils recevaient ainsi un hommage précieux de la confiance de leurs concitoyens, c'est par un travail opiniâtre et par un zèle à toute épreuve qu'ils devaient chercher à s'en rendre dignes: Magna est admiratio copiosè sapienterque dicentis; quem qui audiunt, intelligere etiam et sapere plus quàm coeteros arbitrantur. (Cic. de Off., lib. 2, chap. 14.) Sans doute il pouvait avoir une telle confiance dans les ressources de son art, celui qui, à peine âgé de vingt-sept ans, sut défendre Roscius. contre le crédit et la puissance de Sylla.

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