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en ces termes : -« LA COUR, attendu qu'il est en aveu, au procès, que Smith-Mosse est Anglais de naissance; qu'en le supposant marié avec l'appelante à Dunkerque, en l'an II, cela ne lui aurait pas conféré la qualité de Français; que rien ne justifie de la fixation de son domicile en France; qu'au contraire, l'acte de séparation de biens, du 2 janvier 1800, qui réclame ce prétendu mariage, a été fait à Londres, où l'appelante se dit domiciliée, ainsi que ledit Smith-Mosse, d'après une procuration la plus ample, même à l'effet de plaider qu'elle donna à son père, le 16 frimaire an x, en exécution dudit acte de séparation ; d'où il suit que ledit Smith-Mosse étant étranger, l'appelante ne peut invoquer les lois françaises, comme régulateur de leurs droits civils et matrimoniaux, à l'effet d'exciper du défaut de l'autorisation maritale exigée par le Code civil, pour pouvoir ester en jugement;

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Attendu, d'ailleurs, que l'appelante se trouve avoir été autorisée par la disposition du premier juge, du 1er juin 1811, à ester en jugement en cette cause comme défenderesse, et qu'il est de principe, suivant les lois 3, Cod. de judiciis, et 1" Cod. de ord. judiciorum, que le juge qui est compétent pour statuer sur une demande, l'est, par là même, pour prononcer sur les questions incidentes auxquelles cette demande donne lieu, quoique ces questions, étant prononcées principalement, ne seraient point de sa compétence;

» Attendu que les Codes de procédure ni de commerce ne contiennent aucune disposition obstative à ce que le juge, en l'absence du mari, accorde incidemment à la femme l'autorisation pour se défendre contre les poursuites dirigées à sa charge; -Par ces motifs, sans s'arrêter aux exceptions formées par l'appelante, laquelle, en tant

que de besoin, est autorisée à ester en cette instance d'appel, met l'appellation au néant, etc.»

TROISIÈME ESPÈCE.-Arrêt de la Cour de cassation, section civile, en date du 17 août 1813, au rapport de M. Cassaigne, qui déclare, en ces termes, la compétence du tribunal de commerce, pour autoriser la femme défenderesse: « LA COUR, vu les art. 218, 1123, C. C., et 7 de la loi du 30 ventose an XII, attendu, 1o que si le mari refuse d'autoriser sa femme à ester en jugement, lorsqu'elle est défenderesse, l'art. 218, C. C., donne au juge le droit d'accorder l'autorisation; que le juge dont cet article parle est évidemment le juge saisi de la contestation ; qu'on ne doit point confondre ce cas avec ceux de l'art. 219, relatifs aux femmes qui veulent intenter des actions ou passer des actes; qu'en ces derniers cas, l'autorisation formant l'objet d'une demande principale, c'est au tribunal de première instance qu'il appartient naturellement d'en connaître ; qu'au contraire, lorsque la femme est défenderesse, l'autorisation n'étant qu'une simple formalité, le juge saisi de la contestation peut et doit l'accorder, sans quoi les procédures seraient inutilement multipliées et prolongées, contre le but de la loi, qui est de les simplifier et d'en accélérer l'expédition ; — Casse, etc. n.

NOTA. La question de savoir si un tribunal de commerce, quoique tribunal d'exception, peut donner à une femme mariée l'autorisation d'ester devant lui, a été résolue, unanimement, d'une manière affirmative, parla raison que l'accessoire doit toujours suivre le principal.

Voy. MM, MERLIN, Rép., v° Tribunal de commerce, no 5 bis, tom. 14; vo Autorisation maritale, tom. 16, pag. 107; et v° Sénatus-consulte velléien, § 3, no 4, pag. 398; F. L., vo Autorisation, tom. 1o, pag. 255; CARRÉ, t. 3, p. 213, 29.09, et aux notes; B. S. P., t. 2, p. 666, notes; et

no

DURANTON, Cours de droit français, t. 2, p. 426, no 465

et 466.

Voy. aussi, suprà, l'arrêt du 31 juillet 1810, n.

15.

20. C'est à la partie qui plaide contre une femme, à requérir qu'elle soit autorisée, parce qu'à défaut de cette autorisation, tout jugement obtenu contre elle est nul, et peut être cassé sur la demande de la femme, en tout état de cause. (Art. 215, C. C.)

La dame Demeaux, dont le mari était mort civilement, se pourvut en cassation contre un arrêt qui avait prononcé des condamnations contre elle, sans qu'elle eût été autorisée par justice. Son pourvoi fut admis par la section des requêtes; mais, devant la section civile, on lui opposa qu'elle ne s'était pas fait autoriser à se pourvoir en cassation. Le 26 octobre 1807, la Cour sursit à statuer jusqu'à ce qu'elle eût obtenu l'autorisation nécessaire, suivant en cela sa jurisprudence, fondée sur les nombreux arrêts rapportés suprà, no 3.

La dame Demeaux obtint de justice l'autorisation requise, et reproduisit ses moyens devant la section civile, qui, le 29 mars 1808, prononça, en ces termes, la cassation demandée : - « LA COUR, vu l'art. 221, C. C., et attendu que la femme Demeaux étant dans le cas prévu par cet article, n'a pu ester en jugement sans y être autorisée par la justice; que ce moyen d'ordre public n'a pu être couvert par la négligence que cette femme a mise à se faire autoriser; que, d'ailleurs, tous ceux qui intentent un procès doivent s'assurer de la capacité de la personne qu'ils poursuivent, et veiller à ce que les formalités prescrites pour la validité des jugements soient remplies; qu'ainsi la femme Demeaux n'ayant pas requis l'autorisation sans laquelle elle était inhabile à se défendre, c'était à sa partie adverse à la provoquer, ou aux juges à la don

ner d'office; qu'en s'écartant de ces principes, le tribunal de Châteaudun a violé l'article ci-dessus cité; Casse et annule le jugement rendu le 18 ventose an xi, par le tribunal de Châteaudun. >>

NOTA. Les principes consacrés par cet arrêt ont été adoptés par tous les auteurs et n'est-il pas trop évident, en effet, que si cette nullité, dans ce cas, n'était pas d'ordre public, la femme pourrait, quand elle le jugerait convenable, plaider sans autorisation? La force des choses veut donc expressément, qu'en tout état de cause la femme puisse être relevée de sa propre faiblesse. Voy. MM. Merlin, Rép., v Autorisation maritale, section 8, t. 1er, p. 527, et tom. 16, vo cod., p. 89; DELVINCOURT, t. 2, p. 334, HAUT., p. 485 et 486; CARR., t. 3, p. 214 et 215, no 2911 et 2912; et B. S. P., t. 2, p. 665, note 6, no 1o, et p. 667, n 3.

21. La femme mariée, autorisée à ester en jugement peut, sans nouvelle autorisation, se présenter devant le bureau de paix pour y tenter la conciliation. (1)

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Cette question ne devait pas être résolue d'après les dispositions du Code de procédure, dans l'espèce qui y a donné lieu, mais sa solution serait la même si elle se représentait aujourd'hui.

A la vérité, l'art. 48 du Code, en assujettissant à cette formalité toute demande introductive d'instance entre personnes capables de ransiger, paraît supposer que les femmes sont dispensées de ce préliminaire, puisqu'elles sont incapables de transiger.

Mais la comparution devant le bureau de paix ne peut être ainsi considérée, qu'autant que la conciliation s'en est ensuivie, et que les parties ont transigé sur les contesta

(1) Voy. MM. HAUT., p. 484, et B. S. P, t. 2, p. 667, note 1.

tions élevées entre elles. Dans ce cas seulement, on peut dire que la femme a besoin d'une autorisation spéciale du mari pour se concilier. Au contraire, lorsque l'essai de conciliation est resté sans effet, il ne doit plus être considéré que comme une formalité judiciaire que remplit valablement la femme autorisée à ester en justice. (COFF.)

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Jugement du tribunal civil de Toulouse, qui annule en ces termes un procès-verbal de non conciliation dressé entre le sieur Piette et la femme Deyner:—«Attendu qu'aux termes de l'art. 16 de la loi du 6 mars 1791, on ne peut comparaître au bureau de paix, ni tenter la conciliation, sans avoir la capacité de transiger; que la femme Deyner, simplement autorisée à ester en jugement, ne l'était pas à transiger, ni par conséquent à se concilier, et que, par une autre conséquence, elle avait illégalement et nullement tenté la conciliation, etc. »>

Pourvoi en cassation, pour fausse application de l'art. 16 de la loi du 6 mars 1791, et violation de l'art. 218, C. C. Le pourvoi a été accueilli en ces termes par un arrêt du 3 mai 1808, rendu au rapport de M. Zangiacomi, et sur les conclusions conformes de M. Lecoutour : « Vu l'article 218, C. C., et l'article 16 de la loi du 6 mars 1791; considérant que la femine Deyner était autorisée, aux termes de l'article 218, C. C., à ester en jugement; que cette autorisation renfermait évidemment celle de faire

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tous les actes, de remplir toutes les formalités que le procès-verbal rendait nécessaires; que si la comparution au bureau de paix, et la conciliation qu'elle y a tentée, avaient opéré une transaction entre les parties, il ne se fût plus alors agi d'un procès, mais d'un contrat, qui, aux termes des articles 217 et 219, C. C., n'aurait pu être passé par la femme Deyner, sans une autorisation spéciale; que, dans l'espèce, l'essai de conciliation qui a eu lieu entre les parties, n'ayant été suivi ni de trans

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