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constitution par acte, serait obligé de lever à ses frais un jugement dont le retrait serait souvent très dispendieux, et se trouverait ainsi trop sévèrement puni de sa négligence.

» Mais lorsque le jugement qui intervient de suite est définitif, continue M. CARR., p. 207, n. 391, est-il besoin que l'avoué réitère sa constitution? On peut dire qu'il devient inutile, et par conséquent frustatoire, d'exiger la notification d'un acte d'occuper dans une instance terminée par jugement définitif; mais nous répondons qu'il faut bien justifier de la constitution d'un avoué pour la rédaction des qualités, et les suites à faire concernant l'exécution. Si l'avoué ne réitérait pas sa constitution, il faudrait bien lever le jugement qui lui en décerne acte: autant vaut done qu'il la réitère. »

109. Comment se fait la révocation de l'avoué?

110. Peut-on prouver par témoins la révocation de l'avoué?

La révocation se fait par un acte dans lequel l'avoué, que la partie charge d'occuper à la place de celui qu'elle avait constitué d'abord, déclare que cette dernière révoque celui-ci et qu'il se constitue à sa place. Cet acte doit être signifié tant à l'avoué révoqué qu'à ceux avec lesquels la partie se trouve en instance. ( Voy. MM, POTHIER, Tr. du Mandat, chap. 5, no 141; D. C., p. 72; Haut., p. 84, et CARR., t. I, p. 205, no 385.)

Mais il est certain que, sans commencement de preuve par écrit, la preuve de la constitution de l'avoué ni de sa révocation ne peut être admise. (Voy. MM. DUPArc-PoulLAIN, t. 9, p. 297; et CARR., t. I, p. 205, no 386.)

111. Les procédures faites contre un avoué qui auroit cessé d'occuper autrement que par révocation, par exemple pour cause de décès, de démission, inter

diction ou destitution, seraient-elles valablement faites contre lui jusqu'à son remplacement, comme dans le cas de la révocation?

L'art. 75, C. P. C., est conçu en termes limitatifs, et M. CARRÉ, t. 1, p. 205, no 387, estime, en conséquence, qu'en tous les cas ci-dessus posés, les procédures seraient arrêtées et qu'il faudrait, avant tout, assigner en constitution de nouvel avoué, pour les continuer avec celui qui serait institué. C'est aussi ce qui nous paraît résulter des dispositions de l'art. 344, C. P. C.

RODIER, sur l'art. 26 de l'ordonnance, avait professé cette opinion.

112. L'avoué qui, ayant obtenu la distraction à son profit, néglige de faire ses diligences contre la partie condamnée, peut-il, en cas que celle-ci soit devenue insolvable, exercer contre son client l'action directe que lui donne l'art. 133, C. P. C.?

La distraction n'ôte pas à l'avoué l'action directe qu'il a contre son client pour la répétition de ses frais, dit M. PIG., t. 1, p. 546, soit que celui qui y est condamné devienne insolvable, ou de difficile discussion, soit que l'avoué aime mieux s'adresser à son client : la raison est, que la distraction n'est pour l'avoué qu'une sûreté et une facilité de plus pour être payé, de même que la validité d'une saisie-arrêt n'est, pour le créancier qui a formé cette saisie, qu'une sûreté pour le paiement de sa créance, laquelle ne l'empêche pas de poursuivre son débiteur directement, s'il ne veut ou ne peut poursuivre ceux entre les mains de qui est formée cette saisie-arrêt.

Cependant, MM. F. L., vo Jugement, t. 3, p. 162, et CARR., t. 1er, p. 320, n° 569, donnent, et avec raison, moins de latitude à la distraction suivant les circonstances, l'avoué pourrait être déclaré non recevable à exer

cer son recours contre son client, s'il ne justifiait pas de poursuites faites infructueusement contre la partie qui a succombé; il est juste que, dans le cas où l'insolvabilité de celui-ci ne serait notoirement survenue qu'à une époque postérieure à celle où l'avoué pouvait utilement exercer ses droits, lui seul supporte une perte qui ne proviendrait que de sa propre négligence, et que son client eût put prévenir,si l'avoué n'avait pas obtenu la distraction; mais il faudrait prouver qu'il y a eu une faute vraiment imputable à la négligence de l'avoué. — Voy. suprà, n 20.

113. Lorsque la partie qui a été condamnée aux dépens dont l'avoué a obtenu la distraction, se trouve créancière de celle au profit de qui ils ont été adjugés, peut-elle opposer la compensation à l'avoué?

Il semblerait, au premier coup d'œil, que la partie serait en droit d'opposer la compensation à l'avoué; car ce dernier ne pourrait pas avoir plus de droits que son client, qui ne serait pas fondé à exiger des frais de son adversaire auquel il en devrait lui-même; cette objection a été présentée par MM. POTHIER et D. C.; inais nous répondrons, avec MM. FERRIÈRES, vo Dépens, et CARRÉ, que les frais dont l'avoué demande la distraction sont son travail et ses avances, qui n'appartiennent et ne peuvent jamais appartenir à la partie à qui les dépens sont adjugés; ils appartiennent à l'avoué seul, et il s'ensuit que la partie adverse ne peut pas demander compensation de ce qui lui est dû par la partie de l'avoué avec ce qui n'est dû qu'à celui-ci. Ainsi l'avoué devient, par l'effet de la distraction prononcée à son profit, cessionnaire des dépens, et porteur contre la partie adverse d'une créance qui lui est personnelle, et qui est tellement étrangère à son client, que la taxe est poursuivie à sa requête, que l'exécutoire est donné en son

nom, que la partie ne peut céder à un tiers les dépens qu'elle a obtenus, de même que la partie condamnée ne peut valablement les payer à celle-ci, si l'avoué lui a notifié le jugement qui accorde la distraction (voy. suprà, n° 20), enfin que l'avoué peut user, contre le condamné, de toutes les voies d'exécution autorisées par la loi, et prendre même inscription hypothécaire, en vertu du jugement, et de l'exécutoire quí en est la suite. (D. C., p. 120.)

Ces principes étaient adoptés par les anciens parlements. On trouve dans la jurisprudence civile de Rousseaud de Lacombe, au mot Procureur, part. 2, no 8, un arrêt du parlement de Paris, du 29 mars 1738, qui juge que les procureurs ont droit de demander la distraction des frais qu'ils ont gagnés, sans que la partie condamnée puisse opposer la compensation avec d'autres frais à elle précédemment adjugés, La même chose avait été jugée au parlement de Rennes, par un arrêt du 23 février 1724, rapporté dans le Journal des audiences de cette Cour, t. 1, ch. 49.

M. POTHIER, lui-même,a fini par rendre hommage à cette jurisprudence, fondée sur une grande raison d'intérêt public qui doit prévaloir sur les subtilités du droit; si, en effet, un avoué qui est obligé de faire des avances considérables pour défendre une partie pauvre, n'avait pas l'assurance de s'en faire rembourser, et avait à craindre une compensation qui lui enlevât ce qui lui est légitimement dû, les intérêts du malheureux pourraient en souffrir. Ces appréhensions ne sont peut-être pas fondées; mais si l'on doit exiger des avoués de la probité et de l'exactitude dans leurs fonctions, la loi doit aussi leur assurer une protec

tion efficace, lorsqu'ils se sont acquittés de leurs obligations.

Les mêmes principes doivent-ils être appliqués, lorsque le jugement condamne chacune des parties aux dépens sur différents chefs?

cas,

Nous ne doutons pas, dit M. CARRÉ, que, dans ce la distraction au profit de l'avoué n'empêchât la compensation de s'opérer. POTHIER, dans son Traité du Mandat, avait embrassé l'opinion contraire; mais à la suite de son Traité du Contrat de mariage, sous le titre d'Observation sur un endroit de mon Traité du Contrat du mandat, ce savant jurisconsulte fait observer que la Cour d'Orléans n'avait pas adopté son opinion, et n'avait pas cru devoir restreindre la faveur dela distraction.

Voy. MM. POTHIER, Traité du mandat, n, 137, et Traité du Contrat de mariage, in fine; PIG., t. 1, p. 545; MERLIN, Rép., vo Distraction de dépens, t. 3, p. 728; D. C, p. 117 et 120; CARR., t. 1, p. 319 et 320, et B. S. P., t. 1, p. 72, note 22, no 2.

114. L'avoué qui a postulé pour la partie, est-il par cela même autorisé, sans nouveau pouvoir, à interjeter appel du jugement rendu contre elle?

M. MERLIN Soutient, Q. D., vo Appel, t. 1, p. 86, qu'en thèse générale, le procureur ad lites qui a été chargé de la poursuite d'une affaire jusqu'au jugement définitif, a qualité pour appeler de ce jugement; que cette qualité dérive de celle de dominus litis, qu'il acquiert par la contestation en cause, et qu'il conserve tant que le procès, quoique terminé par le juge devant lequel il l'a instruit n'est pas dévolu au tribunal d'appel.

Mais M. PONCET, Traité des jugements, t. 1, p. 496,

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