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permis d'attaquer les jugements, et qu'il a fixé les délais pendant lesquels seuls, lesdits moyens peuvent être employés; qu'au nombre de ces moyens, n'est point la demande principale en nullité de jugements, lorsque ceux-ci ont été rendus par des juges autres que les arbitres; qu'ainsi, la Cour de Toulouse a introduit un nouveau moyen d'attaquer les jugements, en accueillant une demande principale en nullité contre un jugement, et qu'elle a violé les lois citées, puisque celle de 1790 ne donnait que trois mois pour relever l'appel, et que, faute d'appel, dans le délai utile, celle de 1667 avait donné au jugement du 2 thermidor an xi, l'autorité de la chose jugée ; Casse.»

43. Lorsque, pendant l'instance d'appel, une femme contracte mariage, ne fait point notifier son changement d'état, et continue d'ester en justice en sa même qualité, ses adversaires ne sont pas tenus d'appeler le mari dans l'instance; par conséquent ce dernier ne peut former tierce-opposition à l'arrêt.

44. Mais lorsque, dans le cours de la procédure de première instance, la femme qui contracte mariage ne fait pas non plus notifier son changement d'état, mais dans les actes postérieurs prend le nom de son nouveau mari, ses adversaires sont obligés, lorsqu'ils interjettent appel, d'assigner le mari pour autoriser sa femme.

45. Pour que les juges puissent s'écarter de l'opinion des experts, il faut qu'ils déclarent formellement que leur conviction s'oppose à ce qu'ils l'adoptent.

La première question n'est décidée que par le premier arrêt, la seconde ne l'est que par le second arrêt. Leur solution reposant sur les mêmes principes, nous avons

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cru utile de les réunir. La troisième question n'est jugée que par le second arrêt.

PREMIÈRE ESPÈCE. Les héritiers Miette avaient formé contre la dame Thaubois, veuve Thiers, une demande dont ils furent déboutés en première instance. Ils interjetèrent appel devant la Cour de Douai. Pendant l'instance d'appel, la dame Thaubois épousa le sieur Delair; mais elle ne fit pas signifier à ses adversaires son changement d'état, et continua de procéder comme veuve Thiers. Le jugement fut infirmé, et le sieur Delair attaqua cet arrêt par tierce-opposition, parce qu'il n'y avait pas été appelé, et que sa femme n'avait pu y figurer sans lui ou sans son autorisation. La Cour de Douai le déclara non recevable; il se pourvut en cassation, et, le 10 décembre 1812, arrêt de la section des requêtes, qui rejeta, en ces termes, son pourvoi : - « LA COUR, attendu que, pour être reçu à former tierce-opposition, il faut que l'opposant ait dû être appelé lors du jugement qu'il attaque ; qu'il est vrai que ceux qui intentent un procès doivent s'assurer de la capacité de la personne qu'ils poursuivent, et veiller à ce que les formalités prescrites pour la validité des jugements soient remplies, mais il est constant, en fait, dans l'espèce, que, non-seulement lorsque les héritiers Miette ont assigné Amélie Thaubois au tribunal d'Arras, mais encore lorsque l'instance d'appel s'est engagée devant la Cour d'appel de Douai, ladite Amélie, veuve de JoachimFrançois Thiers, n'avait pas encore contracté son second mariage d'où il résulte que les deux instances avaient été régulièrement introduites contre une personne qui avait la capacité d'ester seule en jugement; que si elle passa à de secondes noces avec le demandeur, pendant l'instance d'appel, elle ne notifia point son changement d'état à ses adversaires; elle continua toujours de procéder en qualité de veuve, et le demandeur, qui ne pou

vait ignorer le procès que sa femme suivait, ne fit, conjointement avec elle, aucune reprise d'instance, et ne se présenta point; que, d'après les dispositions de l'art. 345, C. P. C., et dans les circonstances particulières que, l'affaire présente, le changement d'état, non notifié, d'Amélie Thaubois, n'a pu imposer aux héritiers Miette l'obligation d'appeler son mari, ni d'empêcher la continuation des procédures; - Rejette. »>

DEUXIÈME ESPÈCE. Les héritiers du sieur Devinck assignèrent sa veuve pour procéder à la vérification de l'écriture d'un testament fait en sa faveur; tandis que le procès était pendant en première instance, elle épousa le sieur Vandercolm, et dans les actes ultérieurs de la procédure, elle prit le nom de son nouveau mari; toutefois, elle ne notifia pas son changement d'état. Le jugement qui intervint lui fut favorable. Les héritiers interjetèrent appel, mais ne mirent point en cause Vandercolm; il n'assignèrent que sa femme, et plaidèrent contre elle, sans qu'elle fût autorisée.

Les experts qu'on avait nommés pour procéder à la vérification du testament n'avaient pas été unanimes; deux croyaient à la sincérité de l'acte, le troisième la mettait en doute.-LA COUR, considérant que l'inspection qu'elle avait faite de toutes les pièces confirmait à cet égard l'opinion de ce dernier expert, annula le testament.

La veuve Devinck, femme Vandercolm, se pourvut en cassation, 1o pour excès de pouvoir et contravention à l'art. 323, C. P. C.; 2° pour contravention à l'art. 215, C. C., relatif à l'autorisation des femmes mariées.

Le 7 août 1815, la Cour de cassation, section civile, au rapport de M. Carnot, prononça en ces termes la cassation demandée : — « LA COUR, attendu que l'art. 323, C. P. C., n'autorise les tribunaux à s'écarter de l'avis des experts, que lorsqu'ils ont la conviction personnelle que les

arbitres se sont trompés, et que, dans l'espèce, la Cour de Douai, qui a fait prévaloir l'opinion solitaire d'un des experts, n'a pas déclaré qu'elle se décidait d'après sa propre conviction, mais seulement sur ce que l'expert dont elle adoptait l'opinion semblait rendre la question incertaine ; Attendu que Marie-Pétronille Mesmaker était sous la puissance de Jacques Vandercolm, son mari, lorsque les défendeurs la firent citer pour plaider sur leur appel, et qu'elle y a procédé sans avoir été autorisée de son mari, ni de la justice; Casse.

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OBSERVATIONS.

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Quoique la solution donnée par ces deux arrêts soit différente, il est sensible, cependant, qu'elle part du même principe. Tant que les adversaires de la femme n'ont pas appris par les actes de la procédure son changement d'état, ils ne peuvent assigner un mari, qu'ils ne connaissent pas, pour autoriser une femme dont rien ne peut leur faire légalement soupçonner l'incapacité. D'ailleurs, l'art. 345, C. P. C., dispose que le changement d'état des parties n'empêchera pas la continuation de la procédure; ainsi, quand bien même la femme eût notifié son mariage, elle n'en eût pas moins eu qualité pour procéder seule et sans autorisation de son mari, et elle n'eût pas pu attaquer le jugement pour défaut d'autorisation (voy. no 71.). Son mari, qui n'avait pas plus de droits qu'elle, ne le pouvait pas davantage, et, par conséquent, la voie de la tierceopposition lui était interdite.

Mais les circonstances dans lesquelles a été rendu le second arrêt sont bien différentes : d'abord, les actes de la procédure mentionnaient le nom du mari, et ensuite, l'instance s'étant trouvée terminée par le jugement, l'art. 345 était devenu inapplicable; car, l'appel constituant une seconde instance, distincte de la première, les parties

rentraient sous l'empire des règles générales, et les adversaires de la femme se trouvaient obligés de la faire autoriser. Il n'y aurait même alors aucune exception pour le cas où la femme ferait connaître son changement d'état, parce que c'est à ceux qui introduisent une instance contre une femme, ou un mineur, à s'assurer de leur capacité pour ester en justice.

Ces principes sont professés par tous les auteurs. Voy. MM. MERLIN, Rép., vo Autorisation maritale, t. 16, p. 93; LOCRÉ, Esprit du Code de proc. civ., t. 2, p. 9; PAILLET, Manuel, p. 55, note 10; BIRET, t. 1er, p. 133; B. S. P., p. 605, no 4; Delvincourt, t. 1er, p. 333; et DURanton, t. 2, p. 421 et 422, n° 457 et 458. Voy. aussi suprà, no 25. 46. Une femme mariée peut, avec l'autorisation de son mari, aliéner ses immeubles pour tirer son mari de prison; elle n'a pas besoin de l'autorisation de la justice. (Art. 217, 218, 222, 1426 et 1427, C. C.)

La dame Burghoffer, avec l'autorisation de son mari, et pour le tirer de prison, vendit quelques-uns de ses immeubles personnels, dont elle céda le prix aux créanciers qui l'avaient privé de sa liberté. Quelque temps après, la dame Burghoffer réclama contre la validité de ces actes, prétendant qu'elle eût dû être autorisée par la justice, aux termes de l'art. 1427, C. C. Sa demande en nullité fut successivement rejetée par le tribunal de première instance et par la Cour d'appel de Colmar. Le 8 décembre 1812, elle se pourvut en cassation contre l'arrêt de cette Cour, pour violation de l'art. 1428, et fausse application des articles 219 et 222, C, C.; mais le 8 novembre 1814, la Cour de cassation, section civile, au rapport de M. Zangiacomi, rejeta son pourvoi en ces termes : — « LA COUR, considérant qu'aux termes des art. 217, 218 et 222, C. C., l'autorisation dont la femme a besoin pour contracter ne

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