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15 mars 1809, est une autorisation générale, et, par conséquent, insuffisante pour ester en jugement.

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Pourvoi en cassation pour fausse application de l'art. 223 du Code civil; et, le 22 mai 1815, arrêt de la section civile, qui prononce en ces termes la cassation demandée : « LA COUR, vu la loi du 22 frimaire an VII, sur l'enregistrement, et l'art. 223 du Code civil, attendu qu'en fait, il y avait, dans l'espèce, une autorisation spéciale au profit de la défenderesse et défaillante; que cette autorisation résultait, 1o des termes de l'acte du 25 mars 1809, par lequel le sieur Sombret avait autorisé sa femme à ester en jugement dans toutes les affaires qu'elle avait ( du nombre desquelles était celle relative à la contrainte décernée contre elle, à la requête des demandeurs) et pourrait avoir par la suite, expressions qui constituaient tout à la fois une autorisation générale pour les affaires futures, et une autorisation spéciale pour celles engagées à l'époque de cet acte; 2° de la coassistance du sieur Sombret avec sa femme, dans les divers actes de la procédure, notamment dans l'opposition par eux conjointement formée à sa contrainte, le 8 mars 1809, et dans la signification faite à la requête de Sombret, le 15 du même mois, dans laquelle ledit Sombret qualifiie lui-même sa femme d'autorisée à ester en jugement par acte du même jour;— Attendu qu'il résulte de là, qu'en annulant, sous le faux prétexte du défaut d'autorisation suffisante, les poursuites dirigées contre la dame Sombret, à la requête des demandeurs, le jugement du tribunal civil d'Yvetot, du 11 février 1813, a faussement appliqué l'art. 223 du Code civil, et violé, par suite, les articles de la loi du 22 frimaire an vii, sur l'enregistrement, qui servaient de base à ces poursuites ;Casse. »

51. La femme mariée n'a pas besoin d'être autorisée

par son mari à ester en jugement pour défendre sur la demande en dommages-intérêts formée contre elle, comme dénonciatrice calomnieuse. (Art. 215 et 216, C. C.)

52. L'accusé tenu de former sa demande en dommages-intérêts contre son dénonciateur avant le jugement, peut la former valablement après la déclaration du jury, qui ne fait pas partie du jugement. (Art. 359, C. I. C.) ·

53. L'accusé peut valablement conclure à ces dommagesintérêts contre son dénonciateur par simple réquisition et sans citation préalable, lorsque ce dernier se trouve présent à l'audience comme témoin. 54. La femme coupable de dénonciation calomnieuse peut être condamnée par corps au paiement des dommages-intérêts.

La veuve Lesques, femme Roger, dénonça au ministère public, Colombe Moulin, sa domestique, comine coupable de vol. Le 14 mars 1816, l'affaire fut portée devant la Cour d'assises de Montpellier, et la veuve Lesques, qui avait été assignée à la requête du ministère public, pour renouveler sa déclaration devant la Cour, se référa à sa dénonciation. Le même jour, le jury déclara Colombe Moulin non coupable du vol dont elle était accusée. Immédiatement après cette déclaration, et avant que M. le président eût prononcé l'arrêt d'acquittement, l'avoué de l'accusée conclut contre la dame Roger, à 20,000 francs de dommagesintérêts. Sur cette demande, la Cour donna défaut contre la veuve Roger qui ne se trouvait point alors à l'audience, et renvoya les parties devant un juge-commissaire, nommé ad hoc, pour recevoir leurs déclarations et leurs moyens de défense respectifs. Aussitôt après, la Cour prononça l'ac

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quittement de Colombe Moulin, et ordonna sa mise en liberté. Celle-ci, par acte extrajudiciaire du 16 du même mois de mars, fit assigner la dame Roger à comparaître devant le juge-commissaire chargé de les entendre, et lui fit en même temps laisser copie des conclusions qu'elle avait prises contre elle. La dame Roger prétendit que Colombe Moulin était non recevable dans sa demande, en ce qu'elle ne l'avait point formée avant le jugement, puisque la déclaration du jury n'est que le jugement même, puis elle défendit au fond. Le 26 mars 1816, la Cour d'assises rejeta la fin de non-recevoir en ces termes: COUR, considérant que la dame Lesques, actuellement femme Roger, a été amenée devant la Cour d'assises, par la seule voie légale, pour mettre un dénonciateur en présence de celui qu'il accuse, et pour fournir en même temps à ce dernier les moyens de réclamer les dommages qui peuvent résulter d'une dénonciation fausse et calomnieuse, et à l'autre, ceux de se prémunir contre la condamnation qui peut intervenir à la suite de cette déclaration; qu'aucune des règles prescrites pour valider en la forme, la demande portée devant les tribunaux civils, n'est exigée par la loi, lorsqu'il s'agit d'une demande en dommages, formée devant la Cour d'assises, et qu'il suffit que celle-ci soit faite de la part de l'accusé contre son dénonciateur, lorsqu'il est connu avant le jugement; que le Code d'instruction criminelle, en séparant le titre de l'examen, devant la Cour d'assisses, de celui du jugement, et en classant les articles relatifs aux demandes en dommages dans le dernier, a suffisamment indiqué à quelle époque ces demandes doivent avoir lieu; qu'îl est de fait, que Colombe Moulin, en demandant des dommages contre la veuve Lesques, immédiatement après la lecture de la déclaration du jury, a accompli le vœu de la loi, et formé la demande avant le jugement, qui a consisté dans l'ordonnance d'acquit, qui

devait suivre cette déclaration, et qui effectivement n'a été prononcé qu'après avoir entendu la réclamation que Colombe Moulin a faite, par l'organe de son avoué, contre la veuve Lesques.”—Puis, décidant au fond que la dénonciation était fausse et calomnieuse, elle condamna, par corps, la femme Roger, à 10,000 francs de dommages-intérêts.

La femme Roger se pourvut en cassation, 1° pour contravention aux art. 358 et 359, C. I. C., parce que Colombe Moulin n'avait formé son action qu'après le jugement, et parce qu'elle ne l'avait pas légalement mise en cause; 2° pour violation de l'art. 215, C. C., parce qu'elle ne pouvait valablement ester en justice, sans autorisation; 3° pour violation de l'art. 2066, C. C., et fausse application de l'art. 52, C. P. C., parce qu'une femme n'était pas contraignable par corps.

Le 31 mai 1816, la Cour de cassation, section criminelle, par arrêt au rapport de M. Odier-Massillon, rejeta en ces termes ces moyens : « LA COUR, attendu, sur le premier moyen, que la loi ne donne pas la qualification de jugement à la déclaration du jury, mais seulement à l'acte émané du magistrat qui fait application de la loi au fait constaté par le jury; d'où il suit que Colombe Moulin ayant formé une demande en dommages-intérêts, immédiatement après la lecture de la déclaration du jury, et avant que le président eût prononcé l'acquittement, elle s'est conformée à la loi, et a fait sa demande avant le jugement; — Attendu que la loi n'ayant prescrit aucune forme particulière, pour les demandes en dommages-intérêts que l'accusé doit porter devant la Cour d'assises contre son dénonciateur, lorsqu'il est connu avant le jugement, l'intervenante a été autorisée a la former par une simple réquisition à l'audience:- Attendu sur le deuxième, moyen, que la dame Roger ayant été assignée pour assister

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aux débats en qualité de dénonciatrice, et y ayant comparu, ou aurait pu la considérer comme toujours présente jusqu'au jugement, et que la Cour d'assises aurait pu statuer sur les dommages-intérêts en la même audience où l'acquittement de l'accusée a été prononcé; que, néanmoins, elle a voulu fournir à la dame Roger le moyen de faire ses observations en cette demande, et qu'elle n'a rendu le jugement définitif qu'après que la dame Roger a eu developpé toutes ses exceptions et sa défense, tant devant un commissaire-rapporteur nommé à cet effet, qu'à l'audience de ladite Cour;-Attendu qu'aucune loi n'exige que la femme mariée soit autorisée par son mari à ester en jugement pour défendre sur la demande en dommages-intérêts formée contre elle, comme dénonciatrice, pour cause de calomnic; Attendu, sur le troisième moyen, que la Cour d'assises ayant jugé que la dénonciation faite par la dame Roger était non-seulement fausse, mais encore calomnieuse, il n'y a pas eu lieu à l'application des règles établies par l'art. 2066 du Code civil pour les affaires purement civiles; Rejette.»>

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OBSERVATIONS.

M. MERLIN, Rep., t. 16, vo Autorisation maritale, sect. 7, n° 18, ne partage point l'opinion que la Cour de cassation a émise sur la première question :

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Qu'il nous soit permis de douter, dit ce jurisconsulte, que la question fût encore jugée de même si elle venait à se représenter. En effet, il ne s'agit pas de savoir s'il y a une loi qui exige spécialement l'autorisation du mari ou de la justice pour que la femme puisse défendre à la demande en dommagesintérêts qui est formée contre elle, pour cause de dénonciation calomnieuse, et incidemment, au procès criminel auquel la dénonciation a donné lieu, mais bien de savoir si l'on peut appliquer à ce cas l'exception que fait l'ar

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