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CHAPITRE II

TYPES DE VOIE

Généralités Les voies ferrées électriques établies sur plateforme séparée se traitent absolument comme des voies de chemins de fer à vapeur. Mais nous sortirions de notre cadre en décrivant celles-ci, et, pour tout ce qui les concerne, nous renvoyons aux traités spéciaux'. Nous croyons utile, au contraire, de donner quelques indications générales relativement à l'établissement des voies ferrées sur le sol des voies publiques, parce qu'il n'existe pas d'ouvrage qui les décrive aussi complètement que les précédentes ce problème est du reste celui qui se rencontre le plus fréquemment dans la pratique actuelle et aussi celui qui offre le plus de difficultés, en raison de l'encastrement des rails dans la chaussée et de la circulation des voitures ordinaires sur la voie ferrée. Les frais d'entretien d'une voie mal établie et les frais supplémentaires de traction auxquels elle donne lieu pèsent ensuite lourdement sur l'exploitation d'un tramway, et, dans les grandes villes, le défoncement continuel des rues occasionné par les réparations constitue une gène absolument inadmissible.

Au début de la traction électrique, les Américains ont essayé d'appliquer le nouveau mode de propulsion à des tramways à chevaux sans changer les voies existantes. Mais les automobiles électriques, plus lourdes que les anciennes voitures, marchant à une allure plus rapide, soumettaient les rails à une fatigue incomparablement plus grande, se traduisant par une usure et une défor

Notamment au Cours de Chemins de fer de M. Bricka et au Trailé des Chemins de fer de M. Humbert.

mation prématurées, surtout aux joints; les moindres défauts de la voie étaient immédiatement mis en évidence et empirés. La voie ferrée, ainsi détériorée, réagissait à son tour sur les voitures, les soumettant à des trépidations et des cahots qui mettaient bientôt tous les organes, électriques et mécaniques, hors de service.

On dut remplacer ces voies insuffisantes par d'autres établies plus solidement. Mais en même temps les constructeurs de matériel roulant et de moteurs, préoccupés d'accroître la durée de leurs appareils, en renforçaient les différentes parties, ajoutant ainsi au poids qui intervient dans le martelage de la voie, de sorte que les voies renforcées se trouvèrent encore trop faibles.

De proche en proche, chaque progrès du matériel roulant entraînant un progrès corrélatif de la voie, et inversement, le poids des rails est passé de 15 à 30, puis à 40 et 50 kg. L'accroissement de dépenses qui en est résulté n'a pas toujours suffi à supprimer tout inconvénient, car il faut un système d'éclissage exceptionnellement robuste pour résister au martelage répété produit par les automobiles électriques. On a été conduit dans les grands réseaux à adapter des éclissages renforcés, avec des rails encore plus lourds, dont l'emploi est d'ailleurs justifié par des considérations de conductibilité électrique.

Bien que meilleures chez nous qu'en Amérique, les voies de tramways établies pour la traction animale ne peuvent, en général, servir pour la traction électrique. Exception doit être faite seulement pour certaines voies auxquelles des circonstances locales. particulières ont conduit à donner de prime abord une résistance plus grande qu'il ne serait nécessaire pour le trafic du tramway considéré seul. En tout cas, la seule condition spéciale à remplir par une voie ferrée destinée à une exploitation électrique, c'est d'être aussi robuste et aussi bien établie que possible.

§ 1. VOIES EN ACCOTEMENT

Les voies de tramways ne présentent de particularité notable que si elles sont noyées dans la chaussée.

Dans les parties en accotement et par suite inaccessibles aux voitures ordinaires, on peut en effet employer les mêmes types

de rails que sur les chemins de fer secondaires parcourus par des trains légers.

La voie Vignole, très économique à la fois comme construction. et comme exploitation, convient parfaitement dans ce cas, à condition de ne pas prendre un profil trop faible. Un rail de 20 kg. au moins le mètre courant, avec des éclisses pesant 5 kg. la paire, posé sur des traverses espacées de 0,80 m. en voie courante et de 0,60 m. aux joints et aux supports voisins (soit une pose de 12 traverses par longueur de 9 m.), est d'une solidité suffisante pour permettre de marcher à la vitesse limite de 20 km. à l'heure fixée par nos règlements d'administration publique.

La figure 29 montre un exemple de voie de ce genre (Aix-la

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Coupes longitudinale et transversale d'une voie en rails Vignole
Aix-la-Chapelle).

Chapelle). Cette voie a 1 m. de largeur; elle est constituée par des rails de 20 kg. posés sur traverses métalliques et pèse 60 kg. par mètre courant.

Le rail Vignole est très employé aux États-Unis, non seulement sur les lignes à plate-forme séparée ou sur accotement, mais même, depuis quelques années, dans les chaussées empierrées et parfois dans les chaussées pavées : on sait que les municipalités américaines attachent moins d'importance que les nôtres aux questions de voirie, et du reste, au point de vue de la viabilité, ce rail constitue un progrès réel relativement au rail à gradin dont nous parlerons plus loin.

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Lorsque la voie est établie en chaussée, elle ne doit présenter

aucun obstacle au passage des véhicules ordinaires; dans ce cas, les règlements européens prescrivent en général l'emploi de rails, soit à gorge, soit accompagnés de contre-rails.

Nous allons passer sommairement en revue les principaux types de voies de l'un et l'autre genre.

Il y a deux cas à distinguer, suivant que la voie est établie sur une chaussée pavée ou sur une chaussée empierrée.

Voies sur chaussée pavée. Dans les chaussées pavées, on emploie indifféremment la voie à ornière ou la voie à contre-rails. 1° Rails à gorge. Ces rails sont caractérisés par une ornière ménagée au laminage dans le champignon et servant au passage du boudin des roues.

Nous ne mentionnons que pour mémoire les anciennes voies à gorge du système dit américain, formées de rails plats reposant sur des longrines en bois, car elles tendent de plus en plus à disparaître. Elles ont rendu d'excellents services dans l'exploitation animale, mais ne satisfont plus aux exigences de la traction mécanique. Nous laissons également de côté tous les systèmes de rails à ornière comprenant plusieurs parties, pour arriver immédiatement au plus répandu des types actuels, au rail dit « rail-poutre », formé d'une seule pièce et qui, sous différentes dénominations, avec des profils et des modes de pose assez variables, est appliqué sur plus des deux tiers des tramways électriques urbains existant en Europe.

Voies Broca, Phoenix, etc... - Ce rail, qui est représenté en France par le type Broca, à l'étranger par les types Phoenix, de Hoerde, de Dick, Kerr and Co., etc., possède en effet de sérieuses qualités. D'abord, il est, comme nous l'avons dit, d'une seule pièce, ce qui simplifie l'éclissage, facilite la pose et rend l'entretien aussi peu onéreux que possible. Ensuite, contrairement à ce qui a lieu dans les voies avec rails et contre-rails, toute la section de la poutre concourt à la résistance lors du passage des véhicules de tramways.

Au début, certains constructeurs jugeaient utile de donner de

1 D'après M. D. K. Clark (Tramways, their construction and working, 2e édition), le rail à patin et à gorge aurait été inventé et breveté par M. Charles Burn en

la base aux rails-poutres en les assemblant sur des plaques de tôle plus ou moins grandes, ou en les plaçant sur des cloches ou des traverses. On les pose aujourd'hui, à peu près partout, directement sur la fondation de la chaussée, constituée suivant les cas, soit par une couche de sable ou de ballast, soit par du béton. En donnant ainsi au rail un appui continu, on réduit les flexions au minimum et on assure au système une supériorité incontestable sur toutes les voies à supports isolés, au point de vue du roulement des voitures et de la conservation de la voie. Il n'y a guère

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Pose sur béton dans le pavage en pierre.

Coupes transversales de la voie Broca dans différentes natures de pavage.

que lorsque le sous-sol est très mauvais el que des tassements sont à craindre qu'on a parfois recours à la pose sur traverses; encore n'est-elle presque jamais employée dans les chaussées pavées, car les traverses sont peu compatibles avec une bonne tenue du pavage, comme nous le rappelons plus loin à propos des voies sur traverses proprement dites; on recourt plutôt, dans ce dernier cas, à la fondation en béton.

Il existe une assez grande variété de voies à rails-poutres.

La voie Broca, la plus connue chez nous, est constituée par un

octobre 1860, puis réinventé par M. Achille Legrand, de Paris, en janvier 1877. Les premières applications du rail Broca datent de 1878. C'est à peu près à la même époque qu'ont été posés en Angleterre les premiers rails de cette espèce (rails Gowans).

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