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Si, sans accroître le nombre de voitures au kilomètre, on augmentait la longueur de la ligne, le poids du cuivre entrant dans la canalisation et par suite le coût de celle-ci augmenteraient rapidement; la dépense d'établissement pourrait se trouver très vite majorée de ce fait de 3 à 5 000 fr. par voiture en service. Par contre, si le prolongement de la ligne est tel qu'il puisse être établi tout entier en voie Vignole sur accotement, avec fil aérien supporté par poteaux-consoles, l'économie qui en résultera pourra compenser et au delà le coût du cuivre supplémentaire. Le prix du matériel roulant par voiture en service ne changera pas, à moins qu'on ne puisse diminuer un peu la proportion de la réserve (que nous avions prise égale à 40 p. 100), ce qui amènerait une réduction correspondante sur le coût des remises et installations accessoires. En ce qui concerne l'usine génératrice, la puissance nécessaire par voiture et les frais d'établissement de cette puissance diminuent simultanément quand l'importance de l'installation augmente, sans compter que la réserve peut souvent aussi être réduite.

Si maintenant, la longueur de la ligne ne changeant pas, on augmente l'intensité du trafic, c'est-à-dire le nombre de voitures en service au kilomètre, le prix d'établissement par voiture subit immédiatement une réduction très marquée.

Pour en donner un exemple, reprenons le cas précédent, mais en supposant qu'il y ait 2 voitures en service par kilomètre au lieu d'une seule.

Le coût d'établissement de la voie par kilomètre de ligne ne change pas; par voiture en service, il devient donc moitié moindre.

Celui de la canalisation ne se réduit pas tout à fait autant, parce que nous avons supposé ici qu'on doublait le fil de service, pour augmenter la conductivité de la ligne et supprimer la gène occasionnée par les aiguillages aériens. Les voitures ont encore été comptées à 15 000 fr., mais la proportion de la réserve a été abaissée à 30 p. 100.

Pour l'évaluation de la puissance de l'usine, nous avons admis qu'il faudrait 20 chev. indiqués par voiture en service, plus 50 p. 100 de réserve, soit au total 300 chev., que nous supposons répartis en trois unités1.

En admettant les mêmes prix unitaires que précédemment pour l'usine, les installations accessoires (sauf l'outillage, évalué à 600 fr. par voiture) et les terrains, la dépense d'établissement ressort à 89 000 fr. seulement par voiture en service.

Cette répartition peut ne pas être la meilleure dans tous les cas, notamment si les variations journalières du débit ne sont pas très considérables ou si l'on prévoit à brève échéance une augmentation de trafic suffisante pour motiver l'achat d'un nouveau groupe de machines: il serait alors préférable de n'installer au début que 2 unités de 200 chev. chacune; le prix total d'établissement ne serait pas augmenté proportionnellement, parce que le prix de revient par cheval des machines diminue quand on accroit leur puissance et que l'importance relative des accessoires (tuyauterie, fondations, etc.) se trouverait réduite par suite de la diminution du nombre des unités; en l'espèce, on peut évaluer à 5 ou 6000 francs par voiture la plus-value qui en résulterait. La solution consistant à n'avoir que 2 unités, dont une de réserve, présente d'autre part des avantages pratiques de simplicité (notamment la réduction au minimum de la tuyauterie et des accessoires, où se produisent le plus fréquemment les avaries) qui la fait préférer d'une manière générale par certains ingénieurs jusqu'à 500 chev. environ.

Le troisième cas se rapporte à une ligne de 10 km. de longueur entièrement urbaine, à double voie sur toute sa longueur, et comportant encore 2 voitures par kilomètre de ligne, soit en tout 20 voitures en service.

Nous supposons la voie en rails Broca de 36 kg., encastrés dans une chaussée dont le pavage est assez bon pour permettre le réemploi de la plus grande partie des anciens matériaux; les deux voies sont à l'écartement de 1,10 m. La canalisation électrique est entièrement à suspension transversale, portée tantôt par des poteaux tubulaires en acier et tantôt par des rosaces, avec 3 000 fr. environ de feeders par kilomètre de ligne.

L'installation étant déjà plus importante, nous avons adopté des voitures automobiles de 40 places, coûtant 18 000 fr. l'une, au nombre de 25, y compris 25 p. 100 de réserve.

A raison de 17 chev. indiqués environ par voiture en service et de 50 p. 100 en plus pour la réserve, l'usine comportera une puissance totale de 500 chev., répartie comme précédemment en 3 unités semblables et dont nous évaluons le coût à 575 fr. par cheval pour les machines et 175 fr. pour les bâtiments.

Les installations accessoires ont été estimées à raison de 3 500 fr. par voiture en service pour les bâtiments et 800 fr. pour l'outillage, les terrains à 15 fr. le mètre carré et les frais généraux à 20 p. 100, comme dans le cas précédent. On arrive ainsi au total de 110 000 fr. par voiture en service.

Enfin, comme dernier exemple, nous avons pris un réseau de 20 km. de longueur, à double voie, avec 60 voitures en service, desservant une ville importante.

La voie est en rails Broca de 44 kg. et la chaussée pavée doit être en partie refaite.

Les fils aériens sont suspendus partie à des câbles transversaux, partie à des consoles doubles, les supports étant en tout cas constitués par des poteaux tubulaires en acier comportant une certaine ornementation; nous supposons de plus que l'alimentation de la ligne exige 7 000 fr. de feeders par kilomètre. Le matériel roulant se compose de 75 voitures automobiles (y compris 25 p. 100 de réserve) de 50 places, à 20 000 fr. l'une.

A l'usine génératrice, il faudra environ 14 chev. indiqués par voiture en service, plus 50 p. 100 de réserve, soit au total 1 200 chev. répartis en 3 unités de 400 chev., dont nous avons évalué l'installation à 525 fr. par cheval pour les machines et 150 fr. pour les bâtiments.

En comptant 4 500 fr. par voiture en service d'installations accessoires (dont 1000 fr. pour l'outillage), 1 700 fr. de terrains (à 20 fr. le mètre carré) et ajoutant 20 p. 100 pour les frais généraux, on arrive au prix total de 107 000 fr. par voiture en service.

DÉPENSES D'EXPLOITATION

Prix unitaires. - En ce qui concerne les dépenses d'exploitation, les chiffres moyens ci-après peuvent servir de base à évaluation sommaire telle que celle que nous avons en vue :

Le coût de production de l'énergie nécessaire à la propulsion des voitures varie dans d'assez larges limites suivant les conditions locales, le taux des salaires, le prix du charbon, l'importance de l'installation, la vitesse des voitures, et aussi suivant un facteur plus difficile à préciser, l'habileté des mécaniciens, qui influe notablement sur la consommation d'énergie par voiture-kilomètre. Pour fixer un peu les idées, nous admettrons pour les salaires du personnel de l'usine les chiffres suivants, qui se rapprochent sensiblement de la moyenne des prix payés en France, hors Paris : à 9 fr. par jour. 5 à 6

Contremaître électricien

Machinistes.

Chauffeurs

Manoeuvres

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7

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Étant donné les conditions de vitesse et de rampes admises dans les exemples qui suivent, on peut raisonnablement assigner aux machines une consommation de charbon comprise entre 3 kg. et 1,5 kg. par voiture-kilomètre, suivant le nombre des voitures en service. Quant au prix du charbon, qui varie en France de 15 à 30 fr. la tonne rendue à l'usine, nous le supposerons égal en moyenne à 25 fr., car le chiffre inférieur ne s'applique qu'aux exploitations situées d'une façon exceptionnellement avantageuse, à proximité de houillères, et il faut tenir compte en outre de ce que le prix du combustible est généralement grevé dans les villes de frais accessoires d'octroi, de camionnage, etc.

Le salaire du personnel de conduite des voitures est naturellement plus élevé dans les grandes villes que dans les petites. En général, sauf dans les centres très importants, il est compris entre 4 et 5 fr. par jour. Pour la durée ordinaire d'un service de tramway, c'est-à-dire 15 à 18 heures par jour, on compte 3 mécaniciens pour 2 voitures, soit une dépense de 0,04 à 0,05 fr. par voiture-kilomètre pour un parcours journalier moyen de 150 km. Cet élément de dépense s'élève rapidement quand le parcours journalier diminue.

La visite, le nettoyage et le graissage du matériel roulant ne coûtent ordinairement pas plus de 0,02 fr. par voiture-kilomètre. Pour l'entretien et les réparations du matériel roulant, on peut

compter, dans des conditions de service moyennes et avec un entretien soigné, sur une dépense maxima de 0,04 à 0,05 fr. par voiture-kilomètre, y compris tous les frais de fournitures (charbon de forge, huile pour machines, éclairage et chauffage des ateliers, entretien de l'outillage, etc.) et de main-d'œuvre; ces derniers sont, bien entendu, proportionnellement plus forts dans les petites installations que dans les grandes, où le travail peut être plus spécialisé et l'atelier pourvu de tous les dispositifs propres à économiser la main-d'œuvre, mais l'augmentation sera en général compensée par le taux plus élevé des salaires dans les villes où sont situées ces grandes installations.

L'entretien et les réparations de la canalisation électrique coùtent rarement plus de 0,005 fr. par voiture-kilomètre.

Quant à l'entretien et aux réparations de l'usine, on peut les évaluer d'ordinaire au taux de 5 p. 100 du prix d'établissement pour les machines et de 3 p. 100 pour les bâtiments.

Au total et à titre d'indication générale, nous pouvons dire que pour la somme des dépenses précédentes, comprenant l'entretien et le fonctionnement de l'usine, du matériel roulant et de la canalisation électrique, et les salaires du personnel de conduite des voitures, c'est-à-dire ce qu'on appelle généralement les frais de traction, les grandes compagnies de construction garantissent d'ordinaire un chiffre inférieur à 0,25 fr. par voiture-kilomètre 1.

A cette somme il faut ajouter d'abord les dépenses de nettoyage et d'entretien de la voie ferrée, qui peuvent varier de 0,01 à 0,04 fr. par voiture-kilomètre, suivant la nature du revêtement, l'intensité de la circulation des voitures ordinaires dans les rues empruntées par le tramway, etc. (non compris, bien entendu, les enlèvements de neige et autres imprévus); ensuite l'entretien et les réparations des installations accessoires, qui ne coûtent, d'or

Les lignes électriques les plus anciennes étant de création relativement récente, on ne sait pas encore au juste si les dépenses d'entretien des diverses parties d'une installation de traction électrique n'augmenteront pas notablement à mesure que le matériel vieillira. Il est permis de croire que l'usure du matériel aura pour contrepartie une expérience plus grande du personnel appelé à s'en servir, qui aura pour effet de diminuer les causes d'avarie. On fera bien néanmoins de ne pas se fier à des évaluations par trop optimistes et c'est intentionnellement que nous avons donné d'une manière générale des chiffres plutôt un peu forts.

dinaire pas plus de 3 p. 100 par an de leur prix d'établissement; puis les frais de perception et de trafic, comprenant d'abord les frais de billets, les salaires du personnel des bureaux d'attente, des aiguilleurs, contrôleurs, etc., dont l'ensemble peut varier, suivant l'organisation de l'exploitation, entre 0,01 et 0,015 fr. par voiturekilomètre, et les salaires des receveurs des voitures, qui atteignent en général le même chiffre que ceux des mécaniciens; enfin, les frais généraux, embrassant les frais d'administration, de bureau et d'annonces, les loyers, les frais de contentieux, les impôts et redevances, les indemnités pour accidents, les assurances, les frais divers, dont l'importance totale est très loin d'être négligeable, mais sur lesquels règne toujours une assez grande incertitude, car ils dépendent essentiellement de la direction générale de l'entreprise, de l'expérience et de l'intelligence des chefs et autres circonstances absolument indépendantes du mode de traction; on peut toutefois dire qu'en général, dans une exploitation bien conduite d'une certaine importance, les frais généraux ne doivent pas excéder 0,08 fr. par voiture-kilomètre; pour une petite ligne, ils peuvent facilement dépasser 0,10 fr.

Aux dépenses précédentes, qui constituent les dépenses d'exploitation proprement dites et varient suivant la perfection de l'installation, sa plus ou moins bonne administration et les prix locaux de main-d'œuvre et de fournitures, viennent enfin s'ajouter des charges fixes, dépendant de l'importance du capital engagé et de la durée de la concession.

D'après la jurisprudence actuelle, toutes les installations fixes, c'est-à-dire la voie ferrée et ses dépendances, les bureaux d'attente et de contrôle, les installations servant à la production et au transport de l'énergie électrique, doivent faire retour gratuitement à l'autorité concédante en fin de concession; seuls, les objets mobiliers, tels que le matériel roulant, l'outillage des ateliers, le mobilier des stations, restent la propriété de la compagnie exploitante et peuvent lui être rachetés en totalité ou en partie pour leur valeur en fin de concession; mais, ce rachat n'étant que facultatif, on fera bien, pour se donner une marge de sécurité, d'amortir la totalité du capital dans la durée de la concession, qui est ordinairement en France de 50 à 60 ans, soit au taux de 0,6 à 0,9 p. 100

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