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rures, d'azotates ou de sulfates deux électrodes de fer soumises à une différence de potentiel de 1/10 de volt pour constater une attaque électrolytique de la plaque positive. La limite ne peut donc être fixée qu'empiriquement.

En mesurant à l'aide d'un milliampèremètre le courant qui passe entre deux électrodes de fer plongées dans la terre humide et soumises à une différence de potentiel de 2 à 5 volts par exemple, on constate que le courant, d'abord assez sensible, va en diminuant progressivement avec le temps et finit par devenir presque négligeable. Cela tient à ce que la terre se sature peu à peu des produits de la décomposition au voisinage des électrodes et donne lieu ainsi à une polarisation qui ne se produit pas sensiblement dans une cuve pleine d'une dissolution des mèmes sels où les produits de la décomposition se diffusent plus aisément. C'est là un effet très favorable qui vient heureusement réduire les dangers de l'électrolyse tant que le voltage ne dépasse pas les chiffres ci-dessus; si le composé résultant de l'électrolyse est isolant, comme c'est le cas, par exemple, lorsque l'attaque d'une conduite de plomb donne lieu à un enduit de carbonate, l'attaque est encore plus restreinte.

Il est difficile de préciser davantage ces considérations, parce que les sels du sol sont variés et la décomposition de leurs mélanges extrêmement complexe. On peut cependant admettre comme une donnée empirique que jusqu'à 5 volts les dangers d'attaque par dérivation de courant entre deux masses voisines d'au moins 0,30 m. sont négligeables '.

Dès qu'il y a quelques points plus exposés, il suffit d'augmenter la résistance du sol, par intercalation de traverses créosolées ou de cloisons bitumées, par exemple, pour parer à tout danger.

C'est probablement en s'inspirant de considérations de ce genre qu'en Angleterre le Board of Trade a imposé aux compagnies de tramways de ne pas dépasser une différence de potentiel de 7 volts

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La résistance spécifique de la terre descend rarement au-dessous de 5 000 ohmscentimètres; une différence de potentiel de 2,5 volts à 0,50 m. de distance correspond 0.05 à 0,05 volt à 0,01 m. et par suite à une densité de courant maxima de 10-3 amp. 5000 par cm2. Il faudra donc pour faire passer 1 amp.-h. par cm3, c'est-à-dire pour produire une attaque sensible, 100 000 heures ou 20 ans à raison de 5000 heures par an.

entre les points de la voie de retour les plus éloignés et l'usine; ce chiffre de 7 volts est fixé un peu au sentiment. En France, le Comité d'Électricité du ministère des Postes et Télégraphes a proposé d'abaisser cette limite à 5 volts. Ce chiffre est accepté par les industriels eux-mêmes, qui préfèrent cette règle étroite et empirique à des dispositions plus théoriques, mais plus compliquées et qui laisseraient suspendue sur eux la menace d'avoir à modifier leurs voies après coup au gré de l'administration; il est donc vraisemblable que le ministre des Travaux Publics lui donnera la sanction d'une approbation officielle. Il est considéré déjà, du reste, comme nécessaire à un autre point de vue par le service des Postes et Télégraphes pour limiter les perturbations apportées par les courants de retour aux communications télégraphiques ou téléphoniques dans les villes. Comme l'a fait observer M. Potier dans une remarquable communication', cette limite de 5 volts n'implique pas de difficultés de réalisation inacceptables : tant que la ligne ne dépasse pas 6 à 7 kilomètres de longueur à partir de l'usine, elle exige seulement une voie bien éclissée électriquement; au delà de cette distance, elle demande des feeders et des procédés d'uniformisation dont nous allons parler et qui n'ont rien d'excessif comme complication ni comme dépense.

Le règlement anglais impose aussi une autre règle, c'est que, là où les conduites sont positives, leur excès de potentiel par rapport aux rails ne dépasse pas la f. é. m. d'un élément Leclanché. Si l'on veut suivre l'exemple anglais jusqu'au bout, on devrait donc en France imposer pour cette différence une limite de 1 volt, ce qui paraît également rationnel et plus direct comme effet que la limitation du voltage total; mais le chiffre 2 nous paraît suffisant d'après la note de la page précédente.

En dehors des voies sur lesquelles on peut rencontrer des conduites, par exemple sur les lignes suburbaines, la règle des 5 volts n'a plus de raison d'être et la limitation de la variation de voltage pour ne pas trop augmenter les dérivations à la terre est une affaire de sentiment. Le Comité d'Électricité a proposé de la fixer à 1 volt par kilomètre; mais on pourrait admettre le double sans inconvénient.

1 Bulletin de la Société des Électriciens, mai 1896.

Moyens d'uniformiser le potentiel du réseau de retour. Les moyens propres à uniformiser le potentiel du réseau de retour peuvent se diviser en deux catégories : réalisation d'une conductance élevée pour les voies sur lesquelles circulent les voitures; jonctions convenables avec l'usine. Nous ne pouvons, dans le cadre de cet ouvrage, que les mentionner très sommairement1.

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Bonne conductance des voies. En ce qui concerne les voies, leur conductance dépend à la fois des rails et des jonctions entre rails. Si l'on emploie des rails lourds, comme le demande la stabilité de la voie, ils sont en général très suffisamment conducteurs pour donner de bons résultats, bien que la conductibilité spé

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cifique de l'acier à rails soit ordinairement 8 à 12 fois moindre que celle du cuivre (et non pas 6 fois comme on le dit trop souvent 2).

Les joints jouent trop souvent le rôle principal dans la résistance et l'on fait bien d'en diminuer le nombre, en employant des rails longs, de 10 m. par exemple. Pour assurer la continuité électrique entre rails, les éclisses ordinaires ne suffisent pas, à cause de la rugosité et de l'oxydation des surfaces qui empêchent le contact intime de métal à métal. On améliore ces conditions par l'addition. de jonctions électriques, dont on doit proportionner la section au courant qu'elles ont à porter.

1 Pour plus de détails voir: A. Potier, loc. cit.; A. Lauriol, L'Éclairage Électrique, t. VII, p. 241, 9 mai 1896; A. Blondel, L'Eclairage Electrique, t. VII, p. 97, 18 juillet 1896; Monmerqué, L'Éclairage Electrique, t. VII, p. 5, 30 octobre 1896. Dans ce dernier travail se trouvent des tableaux de chutes de voltage en fonction du nombre des voitures, établis dans des hypothèses plus favorables que les nôtres sur la conductibilité de l'acier des rails.

Il ne faut pas confondre le fer doux et l'acier: la conductibilité de ce dernier se trouve diminuée par tous les corps étrangers, tels que le carbone et le silicium; une très petite quantité de manganèse suffit pour la réduire de moitic. Il est donc bon de vérifier les échantillons de rails à ce point de vue; ils ne devraient pas avoir une résistivité supérieure à 16 ou 17 microhms-centimètres. Mais on ne peut obtenir encore des fournisseurs de garantie à cet égard; du reste, on peut employer des rails plus durs, de conductibilité médiocre, s'ils ont une section suffisante.

TRACTION ÉLECTRIQUE.

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Les jonctions les plus employées jusqu'à une époque récente et dont la plus connue est le joint Chicago» consistent (fig. 22) en un ou mieux plusieurs fils ou tiges de cuivre terminés par des boutons de même métal qu'on force dans des trous percés dans l'âme ou le patin du rail. Au moment où il vient d'être posé, ce joint présente très peu de résistance au contact entre le bouchon et le rail; mais à la longue, si le joint se desserre, les surfaces de contact s'oxydent et la résistance peut augmenter dans de très fortes proportions. On peut, du reste, critiquer le principe même de cette méthode, qui consiste à faire passer de gros courants de fer à cuivre par de petites surfaces non soudées. La section des fils employés est souvent trop petite proportionnellement à celle des rails.

L'emploi de ces jonctions doit toujours être complété par l'addition de fils de connexion de rails à rails et de voies à voies pour assurer plus complète

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ment la continuité du retour en cas de rupture de l'un des joints. On a aussi employé des fils supplémentaires courant parallèlement aux voies et reliés de loin en loin aux précédents; mais cette adjonction coûteuse est abandonnée aujourd'hui presque partout, parce que ces fils n'ajoutaient presque rien à la conductance totale et étaient vite détruits par l'électrolyse. Mieux vaut mettre en double ou en triple les fils de jonction ordinaires.

Les fils employés pour les jonctions et connexions ont en général 8 à 10 mm. de diamètre. Il ne faut pas, en général, que le courant y dépasse 2 amp. par mm2 de section ni 1/5 d'amp. par mm2 de surface de contact avec le rail. Des résultats bien meilleurs et surtout plus durables sont donnés par des joints plus modernes comportant de larges surfaces brasées ou amalgamées. Il faut citer en particulier l'amalgame Brown-Edison, qui a reçu de nombreuses applications. C'est un composé secret à base de mercure et de sodium, qui peut être employé soit liquide, soit à l'état de pâte plastique, et qui jouit de la propriété de donner à la surface du fer et du cuivre des alliages brillants et inoxydables. On peut l'employer en perçant deux godets dans le patin du rail et y plongeant les extrémités d'un pont en cuivre serré entre l'éclisse et les rails (joint Brown) ou en serrant entre l'éclisse et les rails, préalablement frotté d'amalgame liquide, une plaque de liège contenant deux tampons d'amalgame plastique (joint Edison-Brown) (fig. 23). Avec ce système, les fils de sûreté paraissent inutiles.

Un autre procédé, très séduisant, consiste dans la soudure des rails suivant

les méthodes exposés en détail au chapitre III. Les avis sont assez partagés sur la valeur de la conductibilité obtenue, surtout en ce qui concerne la soudure par coulage de fonte en fusion; mais il semble bien qu'avec une exécution soignée on puisse arriver à un résultat satisfaisant. Néanmoins nous ne croyons pas que ce procédé possède au point de vue de la conductance électrique une supériorité bien nette sur le précédent; il présente en tout cas un défaut sérieux, c'est qu'il donne parfois lieu en hiver à des ruptures de rails, qui sont suivies d'un écartement des tronçons supprimant la continuité du circuit et sont longues à réparer. La soudure des rails ne saurait donc dispenser de l'emploi de fils d'interconnexion de forte section, reliant les rails de loin en loin; elle est, par suite, peu économique à ce point de vue et ne peut trouver sa justification que dans les considérations mécaniques développées précédemment au chapitre III.

Avec une voie bien jointée, on peut, sans autre dispositif, atteindre une distance de 5 ou 6 km. à partir de la station, même avec un trafic assez intense.

Au delà de cette distance, il est très peu économique d'augmenter la conductance des voies par adjonction de câbles conducteurs en cuivre mis en parallèle. Cela serait du reste tout à fait irrationnel, car, l'acier coûtant moins cher que le cuivre à conductance égale, il serait toujours préférable de forcer la section des rails, ce qui donnerait en même temps une voie plus solide.

Lorsque la conductance de la voie seule est insuffisante pour assurer une chute de potentiel au plus égale à 5 volts, on doit donc recourir aux artifices suivants, dont l'emploi s'impose, du reste, toutes les fois que le réseau affecte une forme maillée un peu complexe.

Distribution par feeders. Une distribution de retour de tramway devant obéir aux mêmes principes que les deux circuits de distribution d'un réseau de lumière, on appliquera exactement les mèmes procédés que pour ceux-ci, c'est-à-dire qu'on reliera les voies aux machines génératrices par un réseau de feeders ou gros câbles rayonnant autour de la station.

La figure 24 représente schématiquement les étapes qui ont été lentement parcourues par les ingénieurs de traction dans l'emploi des voies comme conducteurs avant d'en arriver à cette conception si simple que le réseau d'un tramway n'est qu'un cas particulier des distributions d'énergie et doit être muni de feeders: dans la première période, s'étendant jusqu'en 1889 environ, rails imparfaitement reliés, plaques de terre abondantes, circuit de retour assi

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