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vin qui renouvelaient leurs plaintes contre le régime des lois sur les boissons et sur les douanes, et qui trouvèrent dans M. Gauthier un éloquent défenseur.

La plupart de ces pétitions ont été renvoyées aux ministres compétens ou déposées au bureau des renseignemens, et quelques autres, comme celle des électeurs de Metz, écartées par l'ordre du jour. Des résolutions semblables ont été prises sur diverses réclamations qui se reproduisent à chaque session comme celles du colonel Simon Lorière, et du capitaine Lafontaine, sur leur radiation des contrôles de l'armée, et celles qui concernent l'arriéré de la Légion-d'Honneur et la suppression de la retenue sur les traitemens militaires, réclamation qui a motivé une proposition spéciale de M. Sébastiani, rejetée en comité secret (23 mars), mais à laquelle le ministère semblait s'être réservé de faire droit luimême.

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On ne peut s'arrêter sur cette partie des débats législatifs qui n'offre qu'un intérêt de circonstance, d'individualité ou des questions déja débattues et restées encore sans solution. Mais ce qu'il importe de rappeler ici, c'est que dans la Chambre des pairs, où le secret des séances rend l'abus du droit de pétition sujet à moins d'inconvéniens que dans celle des députés, il fut fait néanmoins, par M. le baron Mounier, une proposition tendant à modifier le règlement de la noble Chambre, de telle sorte qu'aucune pétition n'y pût être rapportée qu'autant qu'elle aurait été présentée par un pair. Cette proposition prise en considération ( 15 avril), une commission a été chargée de l'examiner (25 mai); mais elle n'a pas eu de résultat dans le cours de cette session.

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CHAPITRE III.

Loi sur la pêche flaviale. — Prorogation du monopole des tabacs. - Projet de loi sur le duel présenté et discuté à la Chambre des pairs.

Le premier projet de loi qui occupa la Chambre, des députés fut le code de la pêche fluviale, dont M, Mestadier dans son rapport au nom d'une commission spéciale (6 mars), proposait l'adoption, sous la réserve de quelques amendemens,

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Ce code, composé de 86 articles et qui avait subi les modifications indiquées l'année précédente par la Chambre des pairs (Voy. l'Ann. histor, pour 1828, page 83) établissait La définition des rivières navigables et flottables; l'étendue du droit de pêche et sa connexité avec la propriété du fond du cours d'eau; le droit des riverains à cette propriété sur les rivières non navigables; la yalidité des prétentions des tiers au droit de pèche; la répression des faits qui nuisent au repeuplement des rivières; le système d'exploitation de la pêche qui appartient à l'état; la poursuite d'office des délits de pêche commis au préjudice des particuliers; enfin la classification des délits et des peines.

Il s'agissait, comme on voit, de même que dans le code forestier adopté l'année dernière et auquel le nouveau projet se rattachait en beaucoup de points, d'une matière spéciale d'économie publique digne sans doute d'appeler l'attention du gouvernement, mais qui entièrement étrangère à la politique ne pouvait amener que des discussions arides et sans intérêt pour l'histoire. On se bornera donc à remarquer que dans le cours des débats dont cette loi a été l'objet et qui ont occupé six séances (du 9 au 16 mars) la Chambre a encore ajouté aux amendemens de la commission quelques modifications ou dispositions nouvelles dont la plus importante, proposée par MM. Demetz et Alex. de Noailles (art. 3), a eu pour objet de faire précéder d'une enquête de commodo et incommodo l'ordonnance royale qui déclare navigables ou flottables les cours d'eau non encore classés comme tels.

Quant au mode de constater les contraventions et de les poursuivre, la loi nouvelle se référait au code forestier, et il n'a rien été innové à cet égard.

En général, il s'était élevé peu d'objections sérieuses; on s'ac→ cordait à reconnaître l'utilité comme la convenance de l'ensemble de la loi; les dissentimens ne portaient guère que sur des détails: aussi n'ont-ils point influé sur le sort du projet qui a réuni presque tous les suffrages des membres qui participèrent au scrutin (249 voix contre 18.)

Il en a été de même à la Chambre des pairs, où ce projet, longuement débattu dans la discussion de l'année dernière, n'occupa qu'une seule séance (7 avril) et fut adopté à une forte majorité (125 contre 10.)

Le projet de loi relatif à la prorogation du monopole des tabacs, présenté à la Chambre des députés, le 10 février, quoiqu'en apparence également dépourvu d'intérêt politique, mérite toutefois, par son importance financière, d'occuper une place dans l'histoire de la session.

L'impôt sur les tabacs fait rentrer annuellement 45 millions de produit net au trésor. La loi du 17 juin 1824 l'avait maintenu pour cinq ans, et l'on était arrivé à l'époque où l'assentiment des deux Chambres était nécessaire pour que la perception fût continuée. Aussi le ministre des finances avait-il présenté, dès le 10 février, à celle des députés, un projet de loi tendant à proroger cet impôt jusqu'au 1er janvier 1837. Il déclarait, dans l'exposé des motifs de cette prorogation dont le long terme excita d'abord quelques murmures, qu'il ne connaissait aucun moyen d'obtenir, par d'autres voies que celles que l'on suivait actuellement, plus du tiers du produit actuel, et qu'après un examen approfondi le gouvernement avait reconnu que la consommation du tabac étant la plus imposée de toutes, il serait impossible d'assurer la rentrée d'un pareil impôt si la matière qui doit le supporter, au lieu d'être confiée exclusivement à la garde des agens du gouvernement, devait passer à des mains intéressées à payer la moindre taxe possible. En un mot, la nécessisé d'une rentrée que le trésor ne pourrait remplacer, la na

ture de l'impôt facile à supporter pour chacun, celle de la consom mation elle-même, la dernière qu'il faudrait songer à dégrever, étaient aux yeux de S. Exc. autant de considérations qui faisaient du tabac la base de perception la plus productive et la plus légitime.

Cependant ce projet de loi rencontra de fortes objections dans le sein de la commission au nom de laquelle M. de Cambon porta la parole (9 mars). Ce n'était pas seulement, quant à l'autorisation de prélever un droit plus ou moins élevé sur une matière imposable, que la commission s'était montrée scrupuleuse; mais en ce qu'il s'agissait d'un privilége exclusif à concéder au gouvernement, et dont l'effet devait être d'interdire l'exercice d'un droit inhérent à la propriété et de gêner la liberté de l'agriculture, aussi bien que celle du commerce.

Par la loi du 28 avril 1816, dont celle-ci était la conséquence, la culture du tabac était prohibée dans soixante-dix-huit départemens, et autorisée, sous quelques restrictions, dans huit autres. Était-ce là de l'égalité constitutionnelle, et n'y avait-il pas violation des articles ret g de la Charte? L'honorable rapporteur n'hésitait pas à reconnaître qu'en ce point la disposition proposée manquait de fondement légal. C'était donc seulement comme mesure de nécessité qu'elle devait être envisagée, et toute la question se réduisait à reconnaître si cette nécessité était suffisamment établie.

Ici M. de Cambon se livrait à une discussion développée sur les moyens d'arriver à la réalisation de l'impôt sans recourir au système de monopole et contestait à cet égard les assertions du ministre des finances; toutefois il concluait avec la commission qu'il y avait lieu d'adopter le projet de loi, mais en réduisant au 1er janvier 1833 la prorogation demandée jusqu'au 1er janvier 1837.

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Dans la discussion qui s'ouvrit sur ce projet (17 mars) il se manifesta même de la part des députés des départemens admis au privilége, une très forte opposition.. On blámait le monopole comme une atteinte portée au droit commun, au commerce et à l'industrie; on demandait qu'une commission d'enquête fût nommée, à l'effet d'examiner la question et d'en faire son rapport à la

Chambre (MM. de Brigode et Charles Dupin ); on s'étonnait qu'un ministère qui voulait rentrer dans l'ordre légal maintînt le monopole, nuisible d'ailleurs au perfectionnement des produits comme à celui des procédés de fabrication, et l'on prétendait prouver que, dans les temps où l'exploitation était libre, le gouvernement avait trouvé dans les développemens de l'industrie une ample compensation de l'impôt abandonné (M. de Gouves de Nuncques).

M. Bacot de Romand, directeur-général des contributions indirectes, opposait à ces objections et au rapport de la commission elle-même des explications d'où il concluait en substance que, sous le régime des taxes et de la culture limitée, il n'est pas possible de faire produire à l'impôt du tabac au delà de 14 ou 15 millions; que tout impôt qui admet la culture illimitée ne saurait dédommager des frais et des rigueurs qui y sont attachés; et qu'enfin le régime actuel était le seul à l'aide duquel ont pût concilier les avantages de la culture nationale et la conservation d'un revenu de 45 à 46 millions.

Parmi les orateurs qui furent encore entendus contre la loi, M. Cunin Gridaine s'attachait à démontrer que le régime libre amènerait par des voies légales des résultats tout aussi profitables pour les intérêts du trésor; M. Benjamin Constant établissait que le gouvernement fabrique toujours plus mal et plus cher que les parti-. culiers; que le monopole tue la production, et que cette hostilité contre la production était menaçante pour toutes les industries. Il rappelait ces paroles de M. Roy, aujourd'hui ministre des finances à la Chambre des pairs (en 1825) : « Que si le trésor a besoin « d'une subvention annuelle, c'est sur la généralité des contribua

<bles qu'il doit la prendre; c'est la concurrence qui fait la pros« périté du commerce et de l'industrie; le monopole ne tend qu'à la « détruire. >>

MM. Raynouard de Bussières, Durand d'Elcourt, parlèrent dans le même sens; mais d'autres orateurs soutenaient à l'appui de la prorogation demandée que, dans l'intérêt des contribuables et en présence des réclamations qui s'élevaient contre les impôts du sel, des boissons et de la loterie, rien ne paraissait plus utile qu'une

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