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que changement aux formes d'élection du président, et d'en faire pour sa part dans l'administration.

Déja en effet, son cabinet, c'est-à-dire le ministère, était changé; il avait renvoyé tous ceux qui en faisaient partie sous M. Adams, et mis à leur place ceux de ses amis qui l'avaient le mieux servi dans les élections. Ainsi, M. Martin Van Buren fut nommé secrétaire d'état; S. D. Ingham, secrétaire de la trésorerie; John H. Eaton, secrétaire de la guerre; John Branck, secrétaire de la marine; J. M. Pharson Berrien, procureur-général; J. M. Lean, directeur-général des postes.

Presque tous les agens de l'administration à l'intérieur ou à l'étranger furent ainsi renouvelés, sans autre considération que sa préférence et l'intérêt de parti. Il ne voulait pas d'ailleurs qu'on regardât les fonctions publiques comme une propriété; système qui lui fit des partisans, sans doute, mais qui accrut encore la haine de ses adversaires. On en a vu la preuve peu de jours après son installation, dans un dîner offert par les citoyens les plus distingués de Washington, à M. Clay, qui venait d'être remplacé par M. Van Buren dans les fonctions de secrétaire d'état. Pour le venger de sa disgrace, on y porta plusieurs toasts dirigés contre le système ou l'esprit qu'on supposait à l'administration nouvelle; M. Clay lui-même fit un discours, dans lequel on peut prendre une idée des haines qui fermentaient encore dans les partis :

Je me suis opposé à l'élection du nouveau président, disait-il, paree que je ne lui crois ni l'expérience, ni le caractère, ni les qualités requises pour la première magistrature du pays. Je m'y suis opposé parce que son élection n'était que le fruit de la reconnaissance pour des services militaires. Je ne rétracte ni ne modifie mon opinion. J'ai cru voir dans cette élection un triste présage d'an avenir funeste pour notre république naissante. L'histoire du passé avait rempli mon ame de crainte; et certes, cette impression n'est pas effacée par l'histoire contemporaine de notre Amérique. N'est-il pas digne de Témarque, en effet, que sur buit des neuf gouvernemens indépendans de notre hémisphère, huit généraux se soient places ou aient été placés à la tête des affaires. Le général Lavalle a renversé à force ouverte la république de La Plata. Le général Santa-Crux est à la tète de celle de Bolivia. Le colonel Pinto commande au Chili, le général Lamar au Pérou, Bolivar à la Golombie.

• L'Amérique centrale, déchirée par des dissensions intérieures, passe alternativement sous le joug des factions militaires. Au Mexique, Pedrazza, candidat civil de la nation, avait réuni la majorité des suffrages pour la présidence: une insurrection a remis le pouvoir dans les mains du général Guerreiro. Les

canons des forts et les acclamatious de la multitude nous ont appris aussi, le 4 mars, qu'un général était appelé à la tête de notre pays; mais, plus heureux que nos voisins, nous n'avons pas va la violence présider à l'élection. Les formes de notre constitution n'ont pas du moins été violées dans la lutte.

« La majorité de mes concitoyens n'a pas entrevu les mêmes dangers que moi; et, dans le libre exercice de son vote, elle a appelé au pouvoir un chef qui n'a d'autres titres à la présidence que des triomphes militaires.... »

Cependant, après avoir donné un libre cours à son ressentiment, pour des torts qu'il n'avait ni provoqués ni mérités, M. Clay finissait par dire qu'il ne voyait plus dans le général Jackson que le premier magistrat de son pays, et à ce titre il se bornait à desirer que, sous sa présidence, les grands intérêts du pays, au dehors et à l'intérieur, ne fussent pas sacrifiés ; que les institutions demeurassent inébranlables, et que le bonheur de ses concitoyens augmentât de jour en jour.

:

Entre diverses motions qui furent faites dans cette session, il faut distinguer celle du général Smith, qui proposait d'amender la constitution relativement à la durée de la présidence, dont un autre représentant (M. Condict) proposa de fixer le terme à six ans; motion qui fut rejetée par 89 voix contre 82. L'administration de M. Adams n'ayant qu'une courte carrière à finir, laissait à son successeur le soin de présenter les mesures analogues à son système aussi ne s'occupa-t-on que de quelques objets qui affectaient le commerce et la navigation, ou de pourvoir aux plus urgens besoins du Gouvernement. Ainsi il fut passé un bill qui prolongeait le terme dans lequel certaines marchandises pouvaient être exportées avec bénéfice de prîmes. Un second bill a autorisé le président à nommer une commission chargée de constater les indemnités dues à des citoyens américains, pour déprédations commises contre leur commerce par les Français, avant l'année 1808, indépendamment des autres réclamations désignées dans les conventions de 1803 et 1819.

Un autre projet de bill, tendant à abolir toute espèce de droits de tonnage sur les navires américains, avait été adopté par la Chambre des représentans, après des débats fort animés; mais le sénat n'a pas jugé qu'on dût affaiblir les revenus du trésor fédéral,

et a rejeté le projet à la majorité de 7 voix (23 contre 16). Les subsides, ou appropriations pour les divers services, votés séparément pour le premier quartier de 1829 et ceux du reste de l'année, n'ont occasionné que peu de discussions. On ne voulait pas embarrasser l'administration nouvelle par une critique à laquelle elle ne pouvait répondre, et le congrès s'est séparé dans l'attente des effets du système qu'elle allait suivre.

On ne peut mieux apprécier ce système que dans le message envoyé au même congrès, le 8 décembre, à l'ouverture de la 3* session.

Le lecteur y remarquera, au milieu des assurances données sur l'intention de maintenir les relations amicales avec toutes les puissances, une prédilection marquée pour l'Angleterre, un ton d'aigreur dans les réclamations à exercer contre la France, et la justification de la reconnaissance de don Miguel.

Dans sa revue d'administration intérieure, le nouveau président appuie fortement sur l'intention de faire réformer les lois électorales, de manière à ce que l'élection du président soit l'ouvrage de la majorité du peuple des états; il voudrait que les représentans ne pussent être promus à des fonctions publiques salariées, s'ils devaient concourir à l'élection : il développe ses principes sur l'inconvénient de la permanence des mêmes individus dans des fonctions publiques.

Quant au système à suivre entre les intérêts de l'agriculture, de l'industrie et du commerce, il n'hésite pas à regarder les premiers comme les plus importans, et il annonce qu'il aura quelques changemens à proposer au dernier tarif, qui n'a pourtant été ni si préjudiciable à l'agriculture qu'on l'avait craint, ni si favorable à l'industrie qu'on l'avait espéré.

L'état des finances offrait dans les recettes comparées aux dépenses, un déficit occasionné par l'augmentation de la somme destinée au rachat de la dette nationale (on avait racheté cette année 12,405,005 doll. en capital): d'ailleurs ce déficit devait être couvert par le surplus laissé l'année dernière au trésor.

Les recettes de l'année courante étaient estimées à 24,602, 230

doll., et les dépenses à 26,164,595 doll.; mais au moyen du surplus de l'année dernière (5,972,435 doll, 81 cent.), il devait encore rester au 1o janvier 1830, une balance de 4,410,070 doll. 81 cent., et la dette nationale devait être réduite à la même époque, à 48,565,406 doll. 50 cent.

Le reste du message n'est pas moins intéressant à consulter: il traite des pouvoirs des états particuliers de l'Union dans leurs rapports avec le gouvernement central, et de la difficulté de concilier l'indépendance des premiers avec l'autorité fédérale, surtout dans la perception ou l'application des branches du revenu applicables à des communications entre les états, ou à des travaux d'utilité commune, tels que les routes, etc. En somme, le nouveau président pense que le gouvernement central doit entrer le moins possible dans les affaires des états, et leur laisser tout ce que la constitution fédérale ne lui a point spécialement réservé.

On est étonné de voir dans le message des plaintes amères sur les créances arriórées du trésor, provenant de droits de donanes non acquittés, sur l'impunité de la contrebande, sur les fraudes commises par l'incapacité, la négligence et même l'improbité des agens ou fonctionnaires publics. Le général Jackson se promet de faire des enquêtes et des réformes sévères : il n'excepte guère de ́ses censures que l'administration militaire et maritime, où il indique pourtant des réformes à faire, et propose de discontinuer la construction des vaisseaux de premier et deuxième rang, comme plus coûteuse qu'utile.

Des difficultés d'une nature grave s'étaient élevées dans quelques états de l'Union à l'occasion des tribus indiennes qui s'y trouvent encore enclavées. Une d'elles s'était formée l'année dernière en état indépendant dans l'intérieur de la Géorgie et de l'Alabama. Ces gouvernemens ont voulu s'y opposer par la force: il en est résulté des hostilités ou plutôt des massacres. Les Indiens ont invoqué l'appui du pouvoir fédéral. La question était de savoir si les états particuliers peuvent souffrir cette érection de petites républiques indiennes dans leur sein, et si le gouvernement de l'Union doit leur donner sa protection. Le président Jackson n'hé

site pas à se prononcer pour les états. Il soumet à la législation fédérale un projet de rejeter tous les Indiens sauvages encore enelavés dans les états au delà et à l'ouest du Mississipi, ou de les soumettre dans l'intérieur aux lois des états dont ils feraient alors partie, et où ils pourraient conserver les terres que leur industrie a déja mises en valeur, mais non celles où ils ne font que chasser ou passer. Dès son entrée en fonctions le président avait écrit aux Indiens Creeks et Cherokees, qu'il appelle ses enfans rouges, pour les inviter à quitter un pays où ils ne pouvaient plus ni chasser ni vivre en paix avec les blancs. Il ne doutait pas d'ailleurs qu'ils ne finissent par avoir le sort des peuplades indigènes des états du Nord, et déja en effet un grand nombre s'étaient transportés dans le désert au delà du grand fleuve, et on croit qu'il ne restait guère que 55,000 Indiens encore sauvages (1) dans les états du Sud.

HAÏTI.

On ne trouve à relever ici que le discours du président Boyer à l'ouverture de la session législative (17 août). Les embarras qu'il annonce dans les finances de l'état et dans ses négociations avec la France n'ont pas diminué.

ÉTATS MEXICAINS.

Nous arrivons sur une terre livrée depuis vingt ans aux révolutions. Il est nécessaire de se reporter aux événemens des dernières années pour apprécier ceux que nous avons à rapporter.

De tous les partis qui divisaient la population du Mexique, celui des anciens Espagnols était le moins nombreux et le moins redoutable. Borné à quelques propriétaires riches de ces grands domaines (haciendas) où ils étaient comme des victimes qui attendent le moment du sacrifice; à quelques prêtres réguliers ou séculiers déja dépouillés de leur fortune, sans lumières, sans influence sur un peuple où la religion n'est réellement que le masque des pas

(1) Savoir les Cherokees 10,000, les Creeks 20,000, les Chickasaws 4,000 et les Choctaws 21,000.

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