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57. Il n'y a pas solidarité entre plusieurs cogérants qui se sont divisé l'administration d'un patrimoine. Cela résulte implicitement de la loi 26, h. t. Il en serait autrement en cas de quasi-délit indivisible comme s'il était impossible de déterminer la part de chacun d'eux dans la gestion.

§ 3 Des obligations du dominus et de l'actio neg. gest.

contraria..

58. Les obligations du dominus sont analogues à celles du mandant; comme le mandant, le dominus qui retire un avantage de la gestion doit indemniser celui qui a créé cet avantage. La gestion d'affaire consiste à rendre un service gratuit mais le gérant doit nécessairement rentrer dans ses débours. Si le mandataire a fait quelque dépense dans l'intérêt du mandant il peut se faire indemniser de cette dépense alors même que le mandat aurait été donné inconsidérément et que l'accomplissement du mandat n'aurait point tourné à l'avantage du mandant. Le negotiorum gestor ne peut se faire indemniser de ses dépenses que s'il a fait quelque chose d'utile; is qui utiliter gessit negotia habet obligatum dominum negotiorum. Le negotiorum gestor doit aussi être indemnisé des engagements contractés dans l'intérêt du dominus. On n'exige pas que les dépenses soient des dépenses nécessaires. Cela n'est exigé que si le dominus negotiorum est un pupille. (L. 47. de sol.) Pour pouvoir exercer contre le pupille l'actio neg. gest. contraria avec toute son efficacité, il suffit en principe que la gestion ait pu être jugée utile; il n'est pas nécessaire que l'utilité de la gestion subsiste encore au moment où la gestion prend fin et où le gérant se retourne vers le maître. Mais hâtous-nous de dire que le gérant n'est point juge de l'utilité de sa gestion. Il ne suffirait pas qu'il eût cru que cette chose était utile, si en réalité le maître ne l'aurait point faite parce qu'il entendait autrement son intérêt. La gestion d'affaires, nous l'avons dit, est basée sur une présomption de mandat. Il faudra pour juger de l'utilité de l'affaire apprécier si le maître eût donné mandat de faire. A cet effet, le gérant devra en s'immisçant dans le patrimoine d'un tiers s'inspirer des règles d'administration suivies par le dominus et y conformer sa gestion. Ainsi, si le gestor restaure une maison en ruines que le maître avait abandonnée, il ne pourra point contraindre le maître à lui tenir compte. d'une dépense onéreuse qu'il n'aurait point faite. (L. 10. D. h. t ) Mais dès que l'avantage d'une opération est acquis au patrimoine du dominus, la créance du negotiorum gestor est née

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et si l'utilité vient à disparaître, la perte de l'avantage créé est sans influence sur l'existence du droit de créance du gestor, à moins cependant que la perte de l'avantage ne soit imputable au gestor (L. 22 D. h. t.).

Nous disons le dominus est seul juge de l'utilité de la dépense au point de vue du genre de dépense et aussi au point de vue du quantum de la dépensc. Ce n'est point faire une chose utile que de faire quelque chose hors de proportion avec les facultés du dominus. L'obligation du dominus est restreinte à ce qui dans la dépense faite s'applique à l'utilité; ce qui excède tombe dans la classe des dépenses voluptuaires pour lesquelles le gestor ne peut avoir aucun recours contre le dominus (L. 27 h. t. L. 31, § 4 h. t.).

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59. Nous nous sommes prononcés sur l'étendue du recours exercé par le gestor contre le dominus. Le principe posé ci-dessus comporte une dérogation en ce qui concerne le pupille.

Voici à ce sujet la règle posée dans la loi 37 D. h. t. Litis contestatæ tempore quæri solet, an pupillus locupletior sit ex ea re factus cujus patitur actionem. Le pupille n'est tenu que in quantum locupletior factus est. C'est pourquoi l'utilité de la gestion s'apprécie ici, non au moment où l'utilité a été créée, mais au moment de la litis contestatio. Cujas critique cette décision, mais il nous paraît difficile d'en faire aussi bon marché qu'il le propose au mépris des textes les plus affirmatifs. Il en est autrement des dépenses nécessaires faites pour le pupille (L. 47 D. de sol.). Cette décision ne contredit par le principe que le pupille n'est tenu que in quantum locupletior factus est. Quand il s'agit d'une dépense nécessaire, le texte traduit ainsi le résultat hoc ipso quo non est pauperior factus, locupletior est » . Une chose était nécessaire, le tuteur devait faire la dépense. Un autre fait cette dépense pour lui. Le pupille s'est enrichi du prix de cette chose. Il est juste pour rétablir l'équilibre qu'il tienne compte à celui qui a fait la dépense des avances par lui faites sans qu'on ait à distinguer si la chose a péri, car la perte de la chose ne peut pas être mise au compte de celui qui a fait la dépense, comme si la dépense n'était pas nécessaire.

60. En ce qui concerne les obligations du dominus, notamment quand il s'agit d'un pupille, c'est le commencement de la gestion qu'il faut considérer. Paul propose une distinction d'après laquelle les affaires gérées pour le pupille doivent être envisagées d'une manière distincte selon que le gérant a eu ou n'a pas eu connaissance du changement d'état ou s'il a agi alio animo (L. 15 D. h. t.).

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61.- La loi 2 h. t. formule ainsi les obligations du dominus à l'égard du gérant. Il doit l'indemniser « quidquid utiliter in rem ejus impenderit, vel etiamsi se in rem absentis alicui obligaverit. Ce qui est ainsi résumé par la même loi « quidquid eo nomine vel abest ei (gestori) vel abfuturum est. »

En principe le juge de l'action directa doit établir le compte des indemnités dues au gérant et décharger d'autant sa dette à l'égard du dominus, « si quocumque modo ratio compensationis habita non est a judice, potest contrario judicio agi ».

Le gestor n'a aucune action pour le remboursement des dépenses voluptuaires (L. 27); même pour les dépenses nécessaires ou utiles, il ne peut réclamer que ce qui représente le coût exact de la chose, tant pis pour lui s'il a payé trop cher ou s'il a trop dépensé (L. 25 D. h. t.). A fortiori ne peut-il point réclamer une somme qu'il aurait payée indùment pour le compte du dominus (L. 23 D. h. t.) c'est sa faute, « sibi imputari debet. ».

Les sommes avancées par le gérant d'affaires, lorsque l'affaire a été utilement gérée, sont productives d'intérêts. (L. 19, § 4. D. h. t.)

62.En ce qui touche les obligations contractées par le gérant, le maître doit se substituer au gérant vis-à-vis des créanciers, mais il peut aussi se borner à promettre de venir défendre le gérant en justice et de désintéresser à ce moment les créanciers. (L. 45. De mand.)

En principe, ceux qui sont devenus créanciers du gérant à l'occasion de sa gestion n'ont action que contre le gérant et point contre le maître.

Les actions institoires et exercitoires avaient été étendues au mandat, mais il ne saurait être question de les étendre également à la gestion d'affaires. Nous trouvons cependant un texte (L. 31 pr.) duquel il résulte que l'action neg. gest. était donnée ad exemplum institoriæ actionis à celui qui avait prêté de l'argent à un mandataire chargé d'emprunter et au fidéjusseur qui avait accédé à l'obligation contractée par le mandataire. Il est à remarquer que le tiers devenu créancier avait, en prêtant de l'argent au mandataire chargé d'emprunter, joué le rôle d'un gérant d'affaires; mais on lui donne action contre le mandant ad exemplum institoriæ actionis, parce que l'auteur de l'acte juridique, c'est-à-dire celui qui avait contracté l'emprunt était un mandataire. Il en serait autrement si celui qui avait emprunté n'eût été qu'un gérant d'affaires. La même action est donnée au fidéjusseur qui a

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cautionné la dette contre le mandant. On ne dit pas que le procurator ait été chargé de faire intervenir un fidéjusseur, mais le mandat d'emprunter implique l'ordre de faire intervenir un fidéjusseur si le prêteur l'exige, et par suite le mandataire a pu valablement obliger le mandant envers le fidéjusseur. Voir L. 10, § 5. D. Mandati vel contra.

Il s'agit pour le créancier comme pour le fidejusseur de l'action negotiorum gestorum dans notre texte de la loi 31 pr. Cette désignation est plus exacte en ce qui touche le fidéjusseur que le créancier, car ce dernier avait l'action née du

contrat.

L'action de gestion d'affaires ad exemplum institoriæ actionis sera donnée contre le mandant, alors même que la somme empruntée n'a point tourné au profit du mandant.

En dehors du cas spécial où un rapport de mandat existait entre le dominus et l'auteur de l'acte juridique passé avec des tiers, ces derniers n'avaient, à raison des actes passés avec un gérant d'affaires, que l'action de in rem verso contre le dominus. Cela résulte de la loi 7 (Quod cum eo 1.) (1). Nous supposons pour cela que le tiers a connu la qualité de gérant d'affaires en vertu de laquelle agissait celui qui s'est obligé. L'action de in rem verso sera plus ou moins étendue selon que le maître a ratifié ou n'a pas ratifié l'acte du gérant.

S'il y a ratification l'action de in rem verso est donnée in solidum comme si l'acte fait spontanément avait été ordonné. S'il n'y a pas ratification, le tiers, en agissant, doit prouver l'utilité de la gestion. Toutefois si l'entreprise avait un caractère d'utilité, si le gérant a commis une faute dans l'accomplissement de l'acte, le tiers doit réparation de la faute. Dans ce cas, le dominus fera diminuer l'in rem versum du montant du dommage résultant de sa faute. Au contraire, s'il s'agissait d'un mandat, la faute du mandataire ne nuirait pas au tiers. Au surplus, il y a lieu d'envisager l'avantage qui est résulté pour le maître, de l'opération faite par le gérant au moment où elle a été réalisée et non seulement ce qui subsiste au jour · de la litis-contestatio. Cela résulte nettement de la loi 3 § 7, (de in rem verso. D) C'est à tort qu'on propose de rattacher l'action de in rem verso à l'idée d'un enrichissement sans cause donnant lieu à une condictio sine causa. L'action de in rem verso doit être rattachée à l'actio neg. gest. contraria de laquelle

(1) On peut conclure de ce texte, de date relativement récente, que ce n'est que par un développement tardif que ce progrès se réalisa, et que les tiers durent d'abord n'avoir aucune voie de recours contre le dominus à raison des actes passés avec un gérant d'affaires.

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elle se rapproche le plus au point de vue des effets qu'elle produit.

D'après la loi 43 h. t., celui qui avait entrepris la gestion sur un simple avertissement de l'esclave, avait contre le maitre l'action de gestion d'affaires. Mais, s'il s'était déterminé à raison du mandat donné par l'esclave, il pouvait agir de peculio ou de in rem verso.

TROISIÈME PARTIE

De la Ratification par le Dominus des actes.
du gérant d'affaires.

63. La gestion d'affaires repose sur une présomption de mandat. Nous avons vu que cette présomption peut être anéantie par la manifestation d'une volonté contraire ou être définitivement acquise d'une manière incontestable par la ratification émanée du dominus.

La ratification est l'approbation donnée après coup par le maître à ce que le negotiorum gestor a fait pour son compte. Elle peut être expresse ou tacite, aucune forme n'est exigée pour sa validité; d'autre part le gérant d'affaires demeure étranger à cet acte purement unilatéral. Aussi, sa capacité n'exerce-t-elle aucune influence sur la validité de la ratifica

tion.

Lorsque toutes les conditions requises pour la gestion d'affaires se rencontrent, la ratification ne fait que fixer d'une manière certaine les obligations du dominus à l'égard du gérant, dès lors le maître ne peut plus critiquer l'utilité de la gestion, il demeure en outre obligé par tous les actes passés par le gérant (L. 9. D. h. t.), alors même que le gérant est sorti du cercle des actes d'administration. Ainsi lorsqu'un co-héritier a vendu la chose commune, son co-héritier, s'il ratifie la vente, peut réclamer sa part du prix par l'actio neg. gest. (L. 19. C. h. t.) (1).

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64. La ratification présente un autre intérêt dans le cas où la gestion d'affaires ne remplit pas toutes les conditions

(1) Lorsque le gérant a fait quelque chose d'insolite, le maître doit ratifier l'ensemble de la gestion ou s'abstenir. Il ne peut pas ratifier ce qu'il y a d'avantageux et désapprouver ce qui ne l'est pas. «< Pensare lucrum cum damno debet. » L. 11. h. t.

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