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de cassation, sur un second pourvoi dont a été objet le jugement rendu par le tribunal de renvoi, cette cour n'a pas hésité à reconnaître que, lorsque l'adjudicataire d'une fourniture à faire à une municipalité cède son droit à un tiers, conformément à une clause du cahier des charges et avec l'agrément de l'autorité municipale, il n'est pas dû de nouveau droit d'adjudication, mais un droit de cession mobilière sur le prix du transport (Rej.,

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en

55 du cahier des charges du marché pour l'éclairage de la ville de Paris, Cuoq, adjudicataire, avait le droit de céder son marché, mais ne pouvait le faire qu'avec le consentement formel et par écrit du préfet de police; Attendu que, par l'arrêté du 6 octobre, le préfet de police a agréé le sieur Costa comme entrepreneur de l'éclairage de la ville de Paris, remplacement du sieur Cuoq; qu'ainsi, cet arrêté n'est autre chose que le consentement à la cession qu'il rend parfaite, et ne peut, par conséquent, être considéré comme un marché nouveau, mais seulement comme la cession même de l'ancien; - Attendu que, aux termes de l'art. 14, no 5, de la loi du 22 frim. an 7, les droits proportionnels sur les ventes et autres transmissions à titre onéreux sont déterminés par le prix exprimé et le capital des charges; - Attendu que, dans la cession dont il s'agit, il n'y a pas de prix exprimé; que, s'il y a des charges qui empêchent que la cession ne puisse être gratuite, ce sont des charges du marché, et non des charges de la cession, et que les dernières peuvent seules servir de base à la perception du droit proportionnel; Attendu qu'ainsi il n'y avait lieu de percevoir aucun droit proportionnel sur l'arrêté du 6 oct. 1830, mais seulement un droit fixe, etc. » — Pourvoi. · Arrêt (après délib. en ch. du cons.). LA COUR; - Vu les art. 4 et 14, no 4 et 69, § 3, no 1, de la loi du 22 frim. an 7 et l'art. 51 de la loi du 28 avril 1816; Attendu que, par adjudication devant le préfet de police, du 13 sept. 1850, Cuoq s'est chargé, pendant neuf ans, de l'éclairage de la ville de Paris, moyennant un prix annuel de 640,100 fr.; - Attendu qu'il résulte de l'arrêté pris par le préfet de police, le 6 oct. 1850: 1° que, par déclaration du 30 septembre, Cuoq a demandé l'autorisation de céder son entreprise à Costa; 2° que, par autre déclaration du même jour, Costa a accepté cette cession; 3° que le préfet de police a admis Costa en remplacement de Cuoq, sous l'obligation de se soumettre à toutes les conditions du cahier des charges de l'adjudication du 13 sept. précédent; Attendu que la convention entre Cuoq, Costa et le préfet de police, authentiquement établie par l'arrêté du 6 octobre, constitue une obligation, passible d'un droit proportionnel d'enregistrement, conformément à l'art. 4 de la loi du 22 frim. an 7, et qu'elle a le caractère d'un marché ou traité auquel s'applique l'art. 14, n° 4, de la même loi qui dispose: «que la valeur de la propriété, de l'usufruit et de la jouissance des biens meubles est déterminée pour la liquidation et le payement du droit proportionnel, ainsi qu'il suit :... 4° pour les marchés et traités, par le prix exprimé, ou l'évaluation qui sera faite des objets qui en seront susceptibles; » — Attendu que le prix de ce marché ou traité est suffisamment exprimé, pour la perception du droit d'enregistrement, dans l'arrêté du 6 octobre, qui n'agrée Costa comme entrepreneur de l'éclairage de la ville de Paris, que parce qu'il se conformera à toutes les clauses de l'adjudication du 15 septembre, au nombre desquelles figure, en premier ordre, le prix fixé annuellement à 640,100 fr.; — Attendu que, suivant l'art. 69, § 3, n° 1, de la loi du 22 frim. an 7, et l'art. 51 de la loi du 28 avril 1816, la quotité du droit à percevoir sur les marchés ou traités de la nature de celui arrêté entre Cuoq, Costa et le préfet de police, est de 1 p. 100, plus la subvention du dixième; -Attendu, dès lors, qu'en declarant que l'arrêté du 6 octobre n'était susceptible que d'un droit fixe d'enregistrement, et en ordonnant, en conséquence, la restitution du droit proportionnel de 1 p. 100 qui avait été perçu lors de l'enregistrement de cet arrêté, le tribunal du département de la Seine a expressément violé les art. 4 et 14, no 4 et 69, § 3, n° 1, de la loi du 22 frim. an 7, ainsi que l'art. 51 de la loi du 28 avril 1816; - Par ces motifs, casse.

Du 13 juill. 1836.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Thil, rap.Laplagne-Barris, 1er av. gén., c. conf.-Teste-Lebeau et Piet, av.

(1) (Enreg. C. Costa.)-LA COUR (ap. dél. en ch. du cons.); Attendu que l'art. 55 du cahier des charges, sur lequel l'adjudication de l'éclairage de la ville de Paris avait été faite, le 13 sept. 1830, au sieur Cuoq, accordait à cet adjudicataire la faculté de céder son entreprise, avec le consentement formel et par écrit du préfet de police; que Cuoq, usant de cette faculté, a cédé son entreprise à Costa, le 29 du même mois de sept.; Que, pour satisfaire à la condition qui lui était imposée par l'art. 53 de son adjudication, il a, par lettre du 30 du même mois, demandé au préfet de police l'autorisation de se faire remplacer par le sieur Costa dans son adjudication ; -- Que, par autre lettre du même jour, Costa a déclaré au préfet accepter la proposition qui lui était faite par Cuoq en Je mettant en son lieu et place, le tout aux charges, clauses et conditions exprimées dans le cahier des charges; - Que Costa, par une seconde lettre du 5 oct. suivant, a rappelé au préfet la cession qui lui avait été faite par Cueq, et a renouvelé la demande qu'il avait adressée à ce fonc

3 déc. 1839 (1); Conf. Cass., 9 juill. 1849, aff. enreg. C. Berncastel, D. P. 49. 1. 252). C'est là, en effet, le caractère de l'acte, et la régie elle-même, acceptant la décision nouvelle de la cour de cassation, en a fait l'objet d'une instruction générale lorsque, plus tard, la question s'est présentée devant elle dans une autre affaire (inst. 21 mars 1842) (2).

2006. Les marchés dont nous parlons ici se forment ordi

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tionnaire pour être agréé comme entrepreneur de l'éclairage à la place, de Cuoq; Que, par cet arrêté du 6 oct., le préfet a agréé Costa comme entrepreneur en remplacement de Cuoq, en le soumettant à toutes les conditions du cahier des charges;-Attendu que les faits et actes précités constituent une simple cession de l'entreprise au profit de Costa et la sub-* stitution de sa personne à celle de Cuoq, comme entrepreneur ; qu'il ne s'est pas formé un nouveau marché entre la ville de Paris et Costa; Que l'adjudication faite à Cuocq a continué d'exister avec toutes ses conditions au profit de Costa, sans aucun changement; Que la ville de Paris n'était pas même partie dans cette cession; - Que; si l'autorité publique a donné son agrément à cette convention, ce n'a été que pour j'exécution d'une clause formelle insérée dans le cahier des charges; Que l'adjudication du 13 sept. 1830 n'étant ni résiliée ni modifiée, un nouveau marché entre la ville et Costa était impossible et sans objet ; Attendu que le droit proportionnel ayant été perçu le 13 oct. 1830 sur l'adjudication du 13 sept. précédent, le même droit ne pouvait être exigé une seconde fois à raison du changement de la personne de l'entrepreneur;- Que le droit auquel la cession consentie par Cuoq à Costa pouvait donner ouverture devait être calculé sur le prix de cette cession, qui formait un contrat nouveau et distinct de l'adjudication, conformément à l'art. 69, § 5, no 1, de la loi du 22 frim. an 7; - Que ce prix étant inconnu, le jugement dénoncé a dû ordonner, comme il l'a fait, que Costa ferait sa déclaration estimative du prix de cette cession; - Qu'il résulte de ce qui précède que ce jugement, en ordonnant la perception d'un droit proportionnel de 2 pour 100 sur ce prix, et la restitution de la somme de 63,569 fr. 90 cent., perçue sur l'arrêté du 6 oct. 1830, sur laquelle le droit de 2 pour 100, à percevoir, d'après la fixation qui en serait faite, serait retenu, n'a violé aucune loi; Rejette.

Du 3 déc. 1839.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Tripier, rap.Tarbé, av. gén., c. conf.-Fichet, Piet et Rigaud, av.

(2) Voici les termes de cette instruction: :-«Suivant une convention da 31 mars 1838, énoncée comme verbale, le sieur Jalras, adjudicataire, par acte du 9 février précédent, de travaux à exécuter pour l'amélioration du port et de la cale de Moissac, a subrogé le sieur Caville dans les droits de cette adjudication, moyennant la somme de 3,500 fr. - Les travaux n'ayant point été exécutés dans le délai convenu, un arrêté de l'autorité administrative ordonna qu'ils seraient effectués en régie, aux risques et périls de l'adjudicataire. Dans cet état de choses, et sur la demande du sieur Jalras, un jugement du tribunal d'Albi, du 26 avril 1839, a condamné le sieur Caville au payement de la somme de 3,500 fr., prix de la subrogation verbale, et déclaré cette subrogation résiliée. - Lors de l'enregistrement du jugement, le receveur a exigé la déclaration estimative des travaux restant à exécuter; il a perçu pour marché le droit de 1 pour 100, tant sur le montant de cette estimation, portée à 55,000 fr., que sur les 3,500 fr. promis par le sieur Caville au sieur Jalras. - Ce dernier a réclamé contre cette perception, en ce qui concernait la valeur estimative des travaux; il a soutenu que la convention du 31 mars 1838 était, non un marché nouveau, mais une cession de marché faite moyennant 3,500 fr., et qu'aux termes d'un arrêt de la cour de cassation, du 3 déc. 1839, le droit proportionnel n'était exigible que sur cette dernière

somme.

>> La question que cette réclamation présentait a fait l'objet de deux arrêts de la cour de cassation, rendus dans la même affaire. Il s'agissait d'un arrêté du 6 oct. 1850, par lequel le préfet de police de Paris avait, d'après le consentement des deux parties, agréé, au nom de la ville, ie sieur Costa comme entrepreneur de l'éclairage, en remplacement du sieur Cuoq, adjudicataire de cette entreprise, suivant procès-verbal du 13 septembre précédent. On avait perçu sur cet arrêté, de même que sur l'adjudication, le droit de 1 pour 100 sur 5,760,900 fr., prix de l'entreprise de l'éclairage pour neuf années. Un jugement du tribunal de la Seine, du 11 déc. 1833, qui décidait qu'aucun droit proportionnel n'était exigible, fut cassé par un arrêt du 15 juillet 1836, inséré dans l'instruction n°1528, $ 1. Cet arrêt declarait « que la convention entre Cuoq, Costa et le préfet de police, authentiquement établie par l'arrêté du 6 oct. 1830, constituait une obligation passible d'un droit proportionnel d'enregistrement, conformément à l'art. 4 de la loi du 22 frim. an 7, et qu'elle avait le caractère d'un marché ou traité auquel s'appliquait l'art. 14, no 14, de la même loi. » Par suite de cette appréciation du caractère de l'acte litigieuxla cour semblait admettre que le droit de 1 pour 100 était exigible sur le prix de l'adjudication du 24 sept. 1850, formant également le prix du traité ou marché passé entre les sieurs Cuoq et Costa et la ville de Paris, at constaté par l'arrêté du préfet, du 6 octobre suivant.

TIT. 1, CHAP. 4, nairement par voie d'adjudication devant les autorités administratives compétentes. Ils ont lieu soit aux enchères publiques, soit par soumissions cachetées. Dans ce dernier cas, l'offre contenue dans la soumission et l'acceptation par l'autorité de l'offre la plus avantageuse constituent deux opérations distinctes, dont la réunion peut seule former le contrat tarifé, quelle que soit d'ailleurs la date de chacune d'elles (déc. min., 2 août 1818, et sol. 5 août 1819). Mais on dirait en vain que chacun de ces actes pris isolément, ne formant pas un contrat, il n'y a pas lieu à percevoir le droit. Le contrat résulte évidemment de l'ensemble, qui ainsi rend le droit proportionnel exigible (délib. 22 mai 1824).— Seulement le droit peut n'être pas actuellement exigible, par exemple, si l'approbation de l'autorité supérieure est nécessaire pour l'exécution du marché. L'approbation à venir forme une condition suspensive du marché: en sorte que le contrat n'étant pas parfait tant que l'approbation n'est pas accordée, il y a lieu de surseoir à la perception d'un droit, qui devient exigible seulement quand la condition s'accomplit (Conf. MM. Championnière et Rigaud, t. 2, nos 1495 et 1495).-C'est ainsi que, d'après le jugement du tribunal de Nantes, en date du 30 mars 1847, le droit ne peut être perçu que sur la minute de l'acte administratif qui régularise les diverses propositions constitutives du marché.-V. suprà, no 2003.

il que le marché soit affranchi de l'enregistrement dans ce cas, ou tout au moins qu'il n'y soit sujet qu'autant qu'il en est fait usage en justice? La difficulté réside ici dans l'appréciation de la loi du 15 mai 1818, dont l'art. 78 est ainsi conçu: « Demeurent assujettis au timbre et à l'enregistrement sur la minute, dans le délai de vingt jours, conformément aux lois existantes: 1° les actes des autorités administratives et des établissements publics portant transmission de propriété, d'usufruit et de jouissance, les adjudications ou marchés de toute nature, aux enchères, au rabais ou sur soumission; 2° les cautionnements relatifs à ces actes.» La régie avait d'abord pensé que ces expressions « marchés de toute nature » devaient être limitées aux marchés par concurrence, et par suite que les marchés conclus de gré à gré n'étaient assujettis à l'enregistrement que lorsqu'on voulait en faire un usage public (dél. 6 avr. 1822) (1).

2008. Mais la cour de cassation a été sur ce point d'un avis différent. Elle a décidé que le traité passé par acte sous seing privé et unilatéral, entre un particulier et le maire d'une ville par lequel le premier se rend entrepreneur de travaux à faire dans l'intérêt de cette ville, doit, comme tout traité forme sur adjudication après enchères, être enregistré sur minute dans les vingt jours de sa date, à peine d'amende du demi-droit en sus; que l'expression marchés de toute nature employée par la loi de 1818, n'admet pas de réserve, et que, d'ailleurs, le marché bien que passé sous seing privé et de gré à gré reçoit un usage public qui l'assujettit à l'enregistrement, par cela seul qu'il a été soumis au préfet pour recevoir son approbation (Cass., 12 mai 1830 (2); Conf. Rej., 22 janv. 1845, aff. Rambaud, D. P. 45. 1. Et la régie s'est conformée à cette doctrine, en l'appli

2007. Au surplus, de ce qu'en général c'est par la voie de l'adjudication aux enchères ou sur soumissions cachetées qu'ont lieu les marchés faits avec les administrations, il ne faut pas conclure que les marchés ne peuvent être formés de gré à gré entre l'administration et l'entrepreneur. C'est ainsi même que les marchés sont conclus dans le cas où, après soumissions faites par divers entrepreneurs, il arrive qu'aucune n'est acceptée. S'ensuit-120).

» Cependant le tribunal de Versailles, à qui l'affaire avait été renvoyée par la cour de cassation, a rendu, le 30 août 1858, un jugement portant que la convention intervenue entre les sieurs Cuoq et Costa n'a pas eu pour effet de créer un nouveau marché entre ce dernier et la ville de Paris; qu'elle constitue une cession ayant pour objet la transmission à titre onéreux d'un droit mobilier incorporel devant procurer des bénéfices; qu'en conséquence, le droit d'enregistrement était dû à 2 pour 100 sur le prix de cette cession, à déclarer par les parties, conformément à l'art. 16 de la loi du 22 frim. an 7. — Le pourvoi de l'administration contre ce jugement a été rejeté par un arrêt de la chambre civile, du 3 déc. 1859, énonçant pour motifs qu'il ne s'est pas formé un nouveau marché entre la ville de Paris et Costa; que l'adjudication faite à Cuoq a continué d'exister avec toutes ses conditions au profit de Costa, sans aucun autre changement; que le droit proportionnel ayant été perçu sur l'adjudication du 15 sept. 1830, le même droit ne pouvait être exigé une seconde fois, à raison du changement de la personne de l'entrepreneur; que le droit auquel la cession consentie par Cuoq et Costa pouvait donner ouverture, devait être calculé sur le prix de cette cession, qui formait un contrat nouveau et distinct de l'adjudication, conformément à l'art. 69, § 5, no 1, de la loi du 22 frim. an 7; que, ce prix étant inconnu, le jugement dénoncé a dû ordonner que Costa ferait sa déclaration estimative du prix de cette cession. Il résulte de cet arrêt que, lorsqu'un entrepreneur cède 'à un tiers le bénéfice d'un marché pour fournitures ou travaux, le droit d'enregistrement est dû seulement sur le prix spécialement stipulé pour celte cession; et que ce droit est celui de 2 pour 100, qui est établi par l'art. 69, § 5, no 1, de la loi du 22 frim. an 7, pour les cessions d'objets mobiliers.

>> En appliquant cette décision à la convention passée entre les sieurs Jalras et Caville, et constatée par le jugement du tribunal d'Albi, du 26 avril 1859, on trouve que le droit de 2 pour 100 est exigible sur la somme de 3,500 fr., prix de la subrogation, ou cession de marché, et qu'il n'y avait pas lieu d'ajouter à ce prix la valeur estimative des travaux restant à exécuter. — La perception a été réduite d'après cette base,

par une solution du 22 juin 1841.»

Du 21 mars 1842.-Inst. de la régie, no 1661.

(1) Espèce : — (N...... C. enreg.) — Délibération : :-« Aux termes de l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818, y est-il dit, pour qu'une adjudication, un marché, soit sujet à l'enregistrement, dans un delai déterminé, sur la minute, il faut qu'il ait été fait aux enchères, au rabais, ou sur soumission. Donner à la loi une autre interprétation serait entraver inutilement toutes les conventions que peuvent faire les communes et les établissements publics. Ce serait, alors que la loi les a assimilés entièrement aux particuliers, les placer dans une position moins favorable et plus pénible, eu les forçant a soumettre à la formalité de l'enregistrement tous les petits marchés, toutes les conventions accidentelles faites dans leur intérêt. Mais par la combinaison des dispositions de la loi du 15 mai 1818 avec celles de la loi du 1 mess. an 12, qui n'ont point été abrogées, l'on

doit poser en principe que, excepté les actes textuellement spécifiés par l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818, tous autres actes des communes et des établissements publics faits avec le concours des particuliers, ne sont assujettis à l'enregistrement que lorsqu'on veut en faire un usage public.»> Du 6 avr. 1822.-Délib. cons. d'adm.

(2) Espèce: (Enreg. C. Chazournes.)- Le 4 août 1827, le maire de Lyon fit afficher qu'il serait reçu, au secretariat de la mairie, les soumissions de ceux qui voudraient se charger de l'apport et du dépôt de quatre cent mille mètres cubes de terre dans la presqu'île Perrache. —Aucune des soumissions ne fut acceptée. En cet état, le maire, en sa qualité, traita de gré à gré avec le sieur de Chazournes, pour cet objet, au prix de 1 fr. 75 c. le mètre cube. L'art. 8 de ce traité, passé par acte sous seing privé le 20 déc. 1827, porte qu'en cas de contestations, elles seront portées devant le conseil de préfecture, pour y être jugées définitivement, comme s'agissant de travaux publics. L'art. 10 exige que le traité, pour être exécutoire, soit approuvé par le préfet. L'acte est terminé en ces termes: «Fait à Lyon, le 20 déc. 1827, en une seule minute restée au pouvoir du maire, qui en fera délivrer expédition entière au sieur de Chazournes, après l'approbation du préfet. »

Le 22 décembre, ce traité fut approuvé par le préfet; - Mais, n'ayant pas été enregistré sur la minute dans les vingt jours de sa date, le receveur de l'enregistrement de Lyon décerna une contrainte contre le sieur de Chazournes, en payement de 16,652 fr. pour droit et double droit dus, aux termes de l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818 et autres lois de la matière.

Sur l'opposition du sieur de Chazournes, le tribunal civil de Lyon rendit, le 29 juill. 1828, le jugement suivant : -«Considerant que l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818 n'assujettit à l'enregistrement, dans les vingt jours, que les adjudications ou marchés aux enchères, ou au rabais, ou sur soumissions; que cette loi se sert, à la vérité, des mots marchés de toute

nature, mais qu'elle limite ensuite cette disposition par l'addition des

mots qui la suivent;- Considérant que le traité dont il s'agit n'a aucun des caractères qui constituent les marchés dont il est parlé en l'article cite ci-dessus; qu'ainsi, il rentre dans la classe des actes ordinaires sous seing privé, qui ne sont assujettis à l'enregistrement que lorsqu'on veut les produire en justice;-Renvoie de Chazournes des fins de l'action, etc. » Pourvoi. Arrêt (ap. délib. en ch. du cons.). LA COUR; Vu les art. 20, 23 et 42 de la loi du 22 frim. an 7, los art. 78 et 80 de la loi du 5 mai 1818; - Attendu, 1° que ces expression de l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818, « demeurent assujetties au timbr et à l'enregistrement sur la minute, dans le délai de vingt jours, confor mément aux lois existantes, les actes des autorités administratives et des établissements publics, portant transmission de propriété, d'usufruit et jouissance, les adjudications ou marchés de toute nature, aux enchères, au rabais, ou sur soumission, » doivent s'entendre de tous marchés rela tifs à des travaux publics, comme l'étaient ceux énoncés dans l'acte du 20 déc. 1827, qui sont la suite et l'exécution de la soumission, que le parti

TIT. 1, CHAP. 4, quant même au cas où les marchés sont faits en double (délib. 12 mars 1833) (1).

2009. Quant à la cession du marché faite par l'adjudicataire à un tiers, comme elle ne constitue pas une cession de biens immeubles, le droit semble n'en devoir être perçu que sur un acte qui en fasse le titre, et encore lorsque cet acte est soumis volontairement à l'enregistrement ou lorsqu'il en est fait usage en justice ou devant une autre autorité. Cependant la cour de cassation, dans l'arrêt du 3 déc. 1839 (V. no 2005), et la régie, dans l'inst. du 21 mars 1842, rapportée loc. cit., ont déclaré le droit exigible, bien que, dans l'espèce de l'arrêt, la cession eût été soumise au préfet seulement pour recevoir l'approbation de ce fonctionnaire (Conf. Rej., 22 janv. 1845, aff. Rambaud, D. P. 45. 1. 120), et que, dans l'espèce de l'instruction, la convention fût simplement énoncée comme verbale. Dans le premier cas, la solution rentre dans les principes des arrêts des 12 mai 1830 et 22 janv. 1845 (V. no 2008), d'après lesquels la présentation de l'acte à l'autorité supérieure, qui doit l'approuver, constitue l'usage public qui, dans le sens de la loi fiscale, rend le droit exigible; mais, dans le second cas, la perception est contraire aux règles de la loi fiscale, car la mention d'une convention verbale, propre à prouver l'existence de cette convention, ne suffit pas, comme nous l'avons souvent expliqué, pour rendre exigible le droit de la convention, dès que cette mention n'est pas susceptible de constituer un titre.

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2010. La loi de l'an 7 avait fait plusieurs catégories des diverses espèces de baux, pour les assujettir à des droits proportionnels différents. Ainsi, elle avait appliqué le droit de 25 c. par 100 fr. aux baux de pâturage et nourriture d'animaux; aux baux à cheptel et reconnaissance de bestiaux (art. 69, § 1, nos 1 et 2);—aux baux de nourriture de mineurs (même article, §2, n° 5); le droit de 50 c. par 100 fr. aux baux pour nourriture de personnes, lorsque les années sont limitées. Si la durée du bail est illimitée, il équivaut à une constitution de pension, que le § 5, n° 2, soumet au droit de 2 p. 100; Enfin,

le droit de 1 fr. par 100 fr. aux baux à ferme ou à loyer d'une ou de deux années, ou d'un plus long temps, lorsque la durée en est limitée. Ce droit sur les baux à ferme ou à loyer avait été réduit, par l'art. 8 de la loi du 27 vent. an 9, à 75 c. par 100 fr. sur les deux premières années, et à 20 c. par 100 fr. sur le montant des années suivantes.

La loi du 16 juin 1824 (art. 1) a fait cesser toutes ces distinctions; et aujourd'hui tous les baux à ferme ou à loyer des

culier avec lequel l'acte est passé par les autorités administratives a faite de les exécuter au prix indiqué dans ledit acte, soit que le public ait ou n'ait pas été appelé à faire de semblables soumissions; - Qu'il suit de là qu'en refusant de reconnaître à l'acte du 20 déc. 1827, passé entre de Chazournes et le maire de la ville de Lyon, les caractères des marchés sur soumission, dont il est parlé dans l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818, le tribunal civil de Lyon a commis une contravention expresse audit article; - Attendu, 2° que l'acte du 20 déc. 1827, quoique passé sous signature privée, n'a pas les caractères de ces sortes d'actes; - Qu'il n'a pas été fait double; qu'il a été passé en une seule minute, qui a dû rester entre les mains du maire, pour en délivrer expédition au sieur de Chazournes, et qu'il n'est devenu obligatoire que par l'arrêté du préfet, mis sur la minute dudit acte, et qu'il l'a approuvé; - Qu'ainsi cet acte a tous les caractères d'un marché sur soumission par acte public; -Attendu, 3° que, dans le cas même où on admettrait, avec le tribunal civil, que le traité dont il s'agit rentre dans la classe des actes ordinaires sous seing privé, il faudrait encore reconnaître que la demande à fin de payement de la somme de 16,652 fr. pour le droit et double droit dus sur le marché, formée par la régie contre de Chazournes, l'avait été régulièrement, puisque, d'une part, il en avait été fait usage devant le préfet du département, pour obtenir de ce fonctionnaire public l'arrêté par lequel il l'a approuvé; - Que, d'autre part, c'est par cet arrêté ayant, aux termes de l'art. 20 de la loi du 22 frim. an 7, les caractères d'acte public, qu'il est devenu obligatoire pour les parties contractantes; - Puisque enfin le maire de la ville de Lyon, qui a traité en cette qualité, qui, en cette même qualité, était resté dépositaire de la minute, ne pouvait pas, aux termes de l'art. 42 de la loi du 22 frim. an 7, en délivrer extrait, copie ou expédition au sieur de Chazournes ou à tous autres, s'il n'avait été préalablement enregistré; - D'où il suit qu'en déchargeant de Chazournes

biens meubles ou immeubles, les baux de pâturage et nourrlture d'animaux, les baux à cheptel ou reconnaissance de bestiaux, et les baux ou conventions pour nourriture de personnes sont uniformément assujettis à un droit de 20 c. par 100 fr., qui se perçoit sur le prix cumulé de toutes les années. Le cautionnement de ces baux est d'un demi-droit (même article). Par les motifs déjà déduits (V. no 1893), nous parlerons ici des baux à nourriture seulement, réservant pour les sections suivantes, où il est traité des Mutations, à titre onéreux, de propriété, d'usufruit ou de jouissance, l'explication des règles relatives aux baux à ferme ou à loyer des biens meubles ou immeubles.

La loi fiscale dénomme, comme on l'a vu, deux espèces de baux à nourriture: les baux à nourriture de personnes et les baux à nourriture d'animaux. Il convient de s'en occuper distinctement.

2011. Baux à nourriture de personnes.—On donnait le nom de bail à nourriture, dans l'ancien droit, au contrat par lequel une personne se chargeait d'en nourrir pendant un certain temps une autre qui lui payait un prix convenu ou lui abandonnait la jouissance de ses biens. Ce contrat n'était point soumis à des règles déterminées; lorsqu'il avait pour objet la nourriture d'un mineur, il pouvait être annulé s'il était onéreux au mineur; lorsqu'il intervenait entre majeurs, il était régi par les stipulations des parties.

2012. Pas plus que l'ancien droit, le code civil n'a tracé des règles sur les baux à nourriture. On a conclu de ce silence qu'il condamne, dans tous les cas, ceux du moins qui ont pour objet la nourriture des mineurs. « Cela résulte surtout, dit Merlin, vo Bail, § 20, no 2, de l'art. 454, qui, en n'autorisant le conseil de famille à régler que par aperçu, lors de l'entrée en exercice de la tutelle, le montant de la dépense annuelle du mineur, paraît faire entendre que cette dépense ne peut être allouée au tuteur que d'après l'état au vrai de la somme à laquelle elle s'élève chaque année. » Et en effet, on remarque que la loi du 16 juin 1824, art. 1, en passant en revue toutes les sortes de baux pour les soumettre à un droit uniforme, n'a pas parlé des baux pour nourriture de mineurs, à la différence de la loi du 22 frim. an 7, dont le n° 5, § 2, de l'art. 69, s'occupait distinctement des baux à nourriture de majeurs et des baux à nourriture de mineurs, et ne soumettait ces derniers qu'à un demidroit, c'est-à-dire à 25 c. p. 100.-Cependant nous devons ajouter, avec M. Merlin, loc. cit., « que si un bail de cette espèce était avantageux au mineur, le preneur serait obligé de l'exécuter: le mineur serait seul recevable à s'en plaindre. » D'où il suit que la régie serait fondée, sous tous les rapports, à percevoir le droit

de la contrainte décernée contre lui le 29 mars 1828, en payement de la susdite somme de 16,652 fr., le tribunal civil de Lyon a, sous tous les rapports ci-dessus énoncés, faussement appliqué l'art. 80 de la loi du 15 mai 1818, et violé tant l'art. 78 de cette même loi que les art. 20, 23 et 42 de la loi du 22 frim. an 7;- Par ces motifs, casse, etc.

Du 12 mai 1830.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Poriquet, rap. Joubert, av. gén., c. conf.-Teste-Lebeau et Guillemin, av.

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(1) Espèce :— (Hospices de Lille C. enreg.) - L'administration des bospices de Lille avait passé des marchés avec divers particuliers pour deg fournitures à faire à ces établissements pendant les années 1829, 1830 et 1831, et ces marchés n'avaient pas été enregistrés. Sur la demande des droits et droits en sus, la commission des hospices a prétendu que les marchés en question, passés à l'amiable et de gré à gré, sans enchères ni rabais, ne devaient étre considérés que comme des actes sous signatures privées, qui ne sont assujettis à l'enregistrement qu'autant qu'on en voudrait faire usage en justice, et qu'ainsi il n'y avait pas lieu de leur appliquer les dispositions de l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818. Une déci sion du ministre des finances, du 10 sept. 1823, a reconnu que les dispositions générales de l'art. 78 de la loi du 15 mai 1818 embrassaient les marchés purs et simples passés de gré à gré par les autorités adminis tratives et les établissements publics. — Dans l'espèce, les marchés mentionnaient qu'ils avaient été faits doubles; mais cette circonstance ne pouvait les soustraire à l'application de la loi de 1818, qui assujettit à l'enregistrement les marchés de toute nature faits par les établissements publics, sans distinction de ceux qui seraient rédigés en simple ou en double minute.

Du 12 mars 1833.-Délib. cons. d'adm.

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soit d'une convention de l'espèce formée entre majeurs, soit d'une convention ayant pour objet la nourriture d'un mineur.

2013. Mais quel est le droit exigible? Il faut distinguer: si le bail est d'une durée limitée, c'est la loi du 16 juin 1824 qui est applicable, car l'article 1 de cette loi s'occupe nommément de ce cas : le droit exigible alors est celui de 20 c. pour | 100 fr. sur le prix cumulé de toutes les années. Si le bail est à vie ou d'une durée illimitée, la loi du 22 frim. an 7 reste en vigueur, et alors le droit exigible est celui de 2 fr. pour 100 sur le prix cumulé de dix ans dans le premier cas et de vingt ans dans le second (L. précitée, art. 14 et 15, nos 2 et 3, art. 69, § 2, no 5, et § 5, no 2).—Nous avons à déterminer ici les cas dans lesquels peut être exigé le droit de bail à nourriture, les caractères du contrat, les conditions auxquelles le droit devient exigible. Quant aux difficultés de la liquidation dont le mode est déterminé par la durée du bail, elles trouveront leur place dans la deuxième partie de ce chapitre où il est traité des valeurs sur lesquelles le droit proportionnel doit être perçu.

2014. D'après les observations qui précèdent, la quotité du droit sur une convention par laquelle une personne s'oblige à en nourrir une autre est déterminée, non plus par la qualité de majeur ou de mineur de celui qui doit être nourri et entretenu, mais par la durée assignée à la convention. Le bail est-il d'une durée illimitée, le droit est de 2 fr. pour 100; et l'on doit considérer comme tel celui dont on peut indiquer le terme, sans qu'il soit possible de préciser l'instant où le terme sera atteint, comme, par exemple, le bail à vie, le bail fait pour le temps de l'interdiction d'un individu (sol. 4 août 1832) (1).—Le bail est-il d'une durée limitée, le droit est de 20 cent. pour 100 fr.

2015. Mais le bail à nourriture ne procède pas toujours d'une convention; il a parfois sa source dans la loi, soit qu'elle crée une obligation civile, comme dans l'art. 454 du c. civ., soit qu'elle sanctionne une obligation naturelle, comme dans les art. 205 et 301 du même code. Il faut voir en quel sens les actes qui constatent l'accomplissement de ces obligations sont soumis à la loi fiscale, avant d'en venir aux baux à nourriture résultant d'une convention.

2016. Lors de l'entrée en exercice de toute tutelle, autre que celle des père et mère, le conseil de famille doit régler par aperçu et selon l'importance des biens régis, la somme à laquelle pourra s'élever la dépense annuelle du mineur, ainsi que celle d'administration de ses biens (c. civ., art. 454). Cette délibération du conseil de famille renferme-t-elle, dans la partie qui règle la dépense annuelle du mineur, un bail à nourriture dans le sens de la loi fiscale? On s'était d'abord prononcé pour l'affirmative. Mais une instruction générale a pris en considération que la déclaration du conseil de famille ne forme pas un contrat entre le mineur et son tuteur; que dès lors elle ne peut donner ouverture à un droit établi pour un contrat particulier; et que le seul droit exigible est un droit fixe (inst. gén. du 3 fruct. an 13, n° 290, § 23).

2017. Par identité de raison, 1 semble que le droit proportionnel ne devrait pas non plus être perçu sur une délibération autorisant le tuteur d'un interdit à employer la totalité du revenu aux dépenses qu'exige la tutelle. L'obligation de nourrir l'interdit avec le revenu dérive de la tutelle que la loi n'assujettit à aucun droit; elle ne constitue pas le bail à nourriture. C'est pour cela qu'une décision du ministre des finances, du 9 mars 1813 (V. Journ. de l'Enr., art. 4579), a reconnu que le droit de bail à nourriture n'était pas exigible dans ce cas. Mais la même décision a déclaré que la délibération donne ouverture au droit de vente mobilière, en se fondant sur ce qu'elle dispense le tuteur de rendre compte. En ce point, la décision a été justement critiquée. << Loin que le conseil de famille cède, vende et transporte le re

(1) Espèce: - (N... C. enreg.) - Un acte du 9 mars 1832 portait obligation de payer chaque année, par trimestre et d'avance, une somme de 450 fr., pour subvenir à tous les besoins d'un interdit en état de démence, tant que durerait l'interdiction. Le receveur perçut le droit de 2 p. 100 sur le prix cumulé de dix années. Une demande en restitution a été formée. On prétendait qu'il n'était dû que le droit de 20 cent. pour 100 fr. sur le prix d'une année multiplié par dix, d'après l'art. 69, 62, no 5, de la loi du 22 frim. an 7, et de l'art. 1 de la loi du 16 juin 1824. Mais la loi de 1824 ne réduit le droit à 20 cent. pour 100 fr.

venu au tuteur, disent MM. Championnière et Rigaud, t. 2, no 1506, il lui ordonne d'en employer la totalité aux dépenses de la tutelle. La dispense de rendre compte n'est pas l'autorisation de s'approprier; la perception ne s'établit que sur les droits créés par les actes et non sur l'abus qui peut en être fait et qu'on ne supposa pas. »

2018. Quant à l'obligation alimentaire reconnue et sanctionnée par la loi civile dans certains cas, comme dans les art. 205 et 301 c. civ., ceux à qui elle est imposée peuvent l'accomplir volontairement ou ils peuvent y être contraints judiciairement. L'acte civil ou l'acte judiciaire qui intervient dans ce cas, n'est prévu nommément dans aucune disposition fiscale et l'on peut dès lors se demander s'il ne doit pas rentrer dans la disposition relative aux baux à nourriture? La doctrine de la régie, sur ce point, diffère suivant que l'acte constatant ou réalisant l'obligation est civil ou judiciaire.

2019. Dans le cas où il y a obligation légale de fournir des aliments, et notamment dans le cas des art. 205 et 301 c. civ., la régie reconnaît qu'on ne peut prétendre que le jugement qui condamne à les payer soit rendu sur une convention verbale ou sur un titre susceptible d'être enregistré: ainsi, le droit de condamnation est seul exigible, et l'on ne peut percevoir en outre celui de titre, c'est-à-dire dans l'espèce, celui de bail à nourriture. Ainsi se prononce l'inst. gén. du 28 juill. 1808, no 390, dont le § 7 est conçu en ces termes : « On a prétendu que les jugements rendus dans les cas prévus par ces deux art. (205 et 301 c. civ.), prononcent des condamnations sur des conventions sujettes à l'enregistrement, sans énonciation de titres enregistrés; qu'ils rentrent dans les dispositions de l'art. 7 de la loi du 22 frim. an 7, et qu'ainsi ils sont susceptibles d'être enregistrés sur la minute. L'obligation où sont les enfants de nourrir leurs père et mère, est fondée sur les droits de la nature, et le titre des ascendants dérive des principes que le code civil n'a fait que consacrer, en rappelant aux enfants des devoirs que la reconnaissance leur impose; la loi faisant également le titre de celui des époux, qui obtient la pension, il en résulte que dans l'un et l'autre cas, le droit d'enregistrement n'est exigible que sur l'expédition du jugement, et qu'il doit être réglé à raison de 50 c. p. 100 fr. sur le capital au denier dix de la pension qu'il adjuge. »

2020. Mais la solution n'est plus la même à l'égard des acles volontaires par lesquels celui qui doit des aliments s'oblige à les payer. La régie, dans ce cas, distingue: si l'acte contient l'obligation d'acquitter annuellement une somme convenue pour tenir lieu des aliments, il est alors considéré comme bail à nourriture et on doit percevoir le droit déterminé pour cette espèce de convention; si l'acte ne contient que la déclaration, par les débiteurs, qu'ils se soumettent à remplir les obligations que la loi impose, mais sans détermination de sommes, il n'est dù que le droit fixe de 1 fr. Telles sont les décisions contenues dans une autre inst. gén. du 18 sept. 1809, no 450.- Nous ferons seulement remarquer que les motifs mêmes qui ont amené à l'affranchissement du droit de titre dans l'hypothèse précédente, auraient dû, dans l'hypothèse actuelle, amener à l'affranchissement du droit proportionnel dans toutes les situations. Soil que les aliments aient été déterminés par une convention amiable, soit qu'ils aient été fixés par jugement, le titre du créancier est véritablement dans la loi. Cette considération, la seule sur laquelle se fonde l'instruction du 28 juill. 1808 pour déclarer le droit de condamnation seul exigible sur le jugement qui condamne à fouruir des aliments et écarter la perception d'un droit de titre, on ne comprend pas que l'instruction du 18 sept. 1809 ne l'ait pas également invoquée pour décider que, dans tous les cas, la convention amiable ne doit donner ouverture qu'à un droit

que lorsque le bail est limité, et alors la perception s'établit sur le montant des années réunies. Or ce mode de liquidation est absolument impossible, puisque, dans l'espèce, l'interdiction doit durer autant que sa cause, et que la durée de cette cause est inconnue. Il s'ensuit que le bail est pour tout le temps de l'interdiction; que la durée du bail à nourriture étant, comme on l'a déjà dit, illimitée, il est soumis au droit de 2 p. 100, d'après l'art. 69, § 2, n° 5, et § 5, n° 2. La perception faite sur l'acte du 9 mars 1852 est donc régulière.

Du 4 août 1852.-Solution de la régie.

fixe, comme honoraire de la formalité, et non pas à un droit proportionnel sur une obligation que la convention ne crée pas, mais qu'elle règle. Par là, d'ailleurs, la régie eût évité la distinction qu'elle établit entre le cas où les sommes sont déterminées et celui où elles ne le sont pas, distinction sans aucune base solide dans les principes de la loi fiscale, puisque, d'après l'art. 16 de la loi du 22 frim. an 7, l'indétermination de sommes ne suffit pas pour écarter la perception du droit proportionnel d'un acte qui en serait passible si les sommes étaient déterminées (V., en ce sens, MM. Rigaud et Championnière, t. 2, n° 1511).

2021. Néanmoins, bien que l'instruction du 18 sept. 1809 paraisse contraire aux principes de la loi fiscale, la régie en a maintenu les prescriptions, en les conformant même dans l'application, aux nouvelles bases établies par la loi du 16 juin 1824, relativement au droit sur les baux. En effet, l'instruction du 18 sept. 1809, arrêtée sous l'empire de la loi de l'an 7, qui avait tarifé distinctement les baux à nourriture de majeurs et les baux à nourriture de mineurs, ces derniers n'étant soumis qu'à un demidroit, l'instruction du 18 sept. 1809 avait admis que les actes volontaires par lesquels ceux qui devaient des aliments s'obligeaient à les payer, seraient toujours considérés comme baux à nourriture de mineurs et passibles seulement du demi-droit, c'està-dire de 25 c. pour 100 fr., parce que, disait-on, « la vieillesse ayant quelquefois plus besoin que l'enfance, et ne méritant pas moins d'égards, il est conforme à la nature des choses et à l'intention de la loi de ranger dans la même classe, quant aux droits, les actes qui assurent des aliments aux pères et mères, et ceux par lesquels on garantit la nourriture des enfants » (V. Dict. de l'enreg., v° Aliments, no 5).- Depuis la promulgation de la loi du 16 juin 1824 dont l'art. 1 a tarifé tous les baux à 20 c. pour 100 en y comprenant les baux à nourriture, sans distinguer les baux à nourriture de mineurs et les baux à nourriture de majeurs, a prétendu qu'aux termes de l'instruction du 18 sept. 1809, c'est encore le demi-droit, c'est-à-dire 10 c. pour 100 fr., qui doit être perçu sur l'acte par lequel des enfants s'obligent à payer annuellement à leur père une somme déterminée pour tenir lieu d'aliments. Mais la régie a décidé qu'un tel acte, aujourd'hui, est sujet au droit de 20 c. pour 100 fr. établi par l'art. 1 de la loi du 16 juin 1824 (sol. 20 sept. 1830) (1).

on

2022. Enfin, on peut encore placer dans la catégorie de baux à nourriture procédant de la loi, les obligations résultant de placements volontaires ou ordonnés d'office par l'autorité publique dans les établissements publics d'aliénés. D'après les art. 27 et 28 de la loi du 30 juin 1838, les dépenses d'entretien et de nourriture sont à la charge soit des personnes placées, soit de ceux auxquels l'art. 205 c. civ. reconnaît qu'il peut être demandé des aliments, soit enfin du département ou de la commune du domicile de l'aliéné. Quand le placement est ordonné d'office et quand les dépenses sont à la charge du département ou de la commune, il n'y a pas d'engagement, et l'on comprend qu'il n'y

(1) Espèce: (L... C. enreg.) - Le 21 juin 1829, acte notarié portant constitution par les enfants de la dame veuve L..., pour lui tenir lieu d'aliments, d'une pension annuelle et viagère en denrées estimées à la somme de 233 fr. Le receveur n'avait perçu que 10 c. par 100 fr. sur le capital au denier dix de cette pension; mais cette perception a été relevée comme insuffisante par un employé supérieur, et la régie a été appelée à prononcer. Elle a reconnu que l'art. 1 de la loi du 16 juin 1824, en établisant une nouvelle quotité de droit pour les baux de toute espèce sans distinction, a abrogé toutes les dispositions antérieures relatives à ces actes; que cet article, qui comprend les baux à nourriture de personnes, n'a point reproduit la distinction précédemment adoptée par la loi du 22 frim. an 7, à l'égard des baux à nourriture de mineurs; que, d'ailleurs, cette dernière loi, en énonçant que les baux de l'espèce ne payeraient que demi-droit, ajoutait que ce demi-droit était de 25 c. par 100 fr.; qu'ainsi la loi du 16 juin 1824, loin de détruire la faveur accordée aux baux à nourriture de mineurs, l'a encore augmentée, puisqu'elle ne lés assujettit, comme tous les autres baux, qu'au droit de 20 c. par 100 fr. sur le prix cumulé de toutes les années; qu'au surplus la décision du ministre des finances, qui assimile, pour là quotité du droit, aux baux à nourriture les actes portant constitution de pension par les enfants, au profit de leurs père et mère, doit continuer d'être exécutée. En conséquence, la régie a décidé que les actes de cette espèce sont, de même que les baux à nourriture de mineurs, sujets au droit de 20 c, par TOME XXI.

ait pas lieu à la perception d'un droit proportionnel. En est-il de même dans le cas de placement volontaire, lorsque la demande d'admission dans l'établissement public, faite par les représentants ou par la famille de l'aliéné, doit contenir, d'après une formule prescrite par les préfets, l'engagement de payer la pension aux prix et conditions fixés? La régie s'est prononcée pour l'affirmative, dans une instruction spéciale du 22 mai 1845 (V. D. P. 45. 3. 147). Nous n'insisterons pas davantage sur les baux à nourriture procédant de la loi. Passons à ceux qui résultent d'une convention spéciale.

2023. Le bail à nourriture, dans ce cas, est un contrat à titre onéreux: il doit donc essentiellement contenir un prix. Il en résulte que toute convention pour nourriture, dans laquelle celui qui prend l'obligation d'entretenir une personne ne reçoit rien d'équivalent, prend nécessairement le caractère de libéralité, alors même que la convention emporte certaines charges, et donne ouverture au droit de donation et non à celui de bail. Dans cette catégorie se placent les conventions si fréquentes par lesquelles les père et mère s'engagent à loger, nourrir et entretenir les futurs époux et leur famille. Nous y reviendrons, en traitant des mutations entre-vifs à titre gratuit.

2024. Toutefois, même lorsque l'engagement de nourrir constitue incontestablement une convention à titre onéreux, ce n'est pas à dire qu'elle doive toujours être considérée comme ayant pour objet un bail à nourriture. Il faut, pour qu'elle ait ce caractère, que l'obligation de celui qui s'engage à nourrir soit dominante, de telle façon qu'on ne puisse pas douter que c'est un bail à nourriture qui a été dans l'intention des parties et non une autre convention.

2025. Ainsi, on lui assignera justement ce caractère lorsqu'une somme d'argent sera stipulée en échange de la nourriture et de l'entretien. Il a été décidé, en ce sens, que la convention par laquelle une religieuse est admise dans une communauté moyennant l'apport d'une somme déterminée, constitue un bail à nourriture à vie passible à ce titre du droit proportionnel de 2 pour 100, et non une société (trib. de Valence, 10 août 1842) (2); ce qui est fort juste dès que les droits stipulés au profit de la religieuse, ne consistent que dans les aliments et l'entretien, mais ce qui cesserait d'être vrai, si la religieuse acquérait, en outre, un droit de co-propriété dans la communauté, parce qu'alors il faudrait supposer l'existence d'un fonds commun et considérer dès lors l'acte comme constituant une société. C'est ce que nous verrons en traitant des indivisions et des partages.

2026. De même encore, on assignera à la convention le caractère de bail à nourriture quand la personne qui s'engage à nourrir recevra, en équivalent, une valeur mobilière ou une créance. « La cession d'une créance, disent justement les auteurs du Dict. de l'enreg., v° Bail à nourriture de personne, no 8, pour prix de la nourriture à vie, n'influe point sur la perception. Il en résulte toujours un bail à nourriture, d'une durée illimitée; el, en supposant qu'on donnât à l'acte le nom de constitution de pen

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100 fr., établi par l'art. 1 de la loi du 16 juin 1824 pour les baux en général. Du 20 sept. 1850.-Sol. (2) Espèce (Monnier C. enreg.) - Par acte du 26 fév. 1840, la dame Monnier, supérieure d'une communauté légalement autorisée, est convenue avec la dame Vincendon, religieuse professe, que, moyennant une somme de 6,000 fr., que celle-ci s'oblige à payer, elle ferait partie de la congrégation et participerait aux droits et prérogatives qui y sont attachés. Une contrainte en payement du droit de 2 pour 100 sur l'acte considéré comme bail à nourriture d'une durée illimitée, ayant été décernée. les dames Monnier et Vincendon y ont fait opposition, par le motif que la convention constituerait une société. - Jugement. LE TRIBUNAL; Allendu que l'acte du 26 fév. 1840, sainement entendu, ne constitue qu'un bail à nourriture, ou, si l'on veut, un contrat de rente viagère; qu'il est impossible d'y rencontrer un contrat de société, puisque, dans aucun cas, il ne doit intervenir de liquidation entre les contractants; que, considéré sous le point de vue sous lequel il doit être apprécié, il est passible du droit de 2 pour 100, conformement à l'art. 69 de la loi du 22 frim. an 7; - Par ces motifs, le tribunal, sans s'arrêter à l'opposition des dames Monnier et Vincendon, dont elles sont déboutées, les condamne à payer à la régie la somme de 126 fr. 50 c., pour supplément de droit; les condamne, au surplus, aux dépens.

-

Du 10 août 1842.-Trib. civ. de Valence.

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