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poursuivis à raison de faits relatifs à leurs fonctions; que la dévolution immediate aux Cours royales, prescrite par les art. 479 et 483 du C. d'instr. crim., ne serait applicable que si le garde poursuivi l'était à raison de délits commis par lui, à raison de l'exercice de ses fonctions, ou à titre d'officier de police judiciaire; mais que, d'une part, ce n'est point comme coupable d'un délit qu'il est poursuivi; que, de l'autre, l'objet de la poursuite ne se rattache en aucune manière à la qualité d'officier de police judiciaire ?. »

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I Au surplus, tous les faits punissables, qu'ils soient qualifiés crimes, délits ou contraventions par la loi pénale, motivent l'application de la garantie, dès qu'il est constaté qu'ils se rattachent à l'exercice des fonctions. Il faut toutefois en excepter, comme on l'a vu précédemment, 1° les faits de contrebande ou de corruption commis par les préposés des douanes; 2° les faits de concussion commis par les comptables des deniers publies Nous verrons, dans le chapitre suivant, dans quels cas les poursuites mêmes à fins civiles, exercées par les parties lésées contre les agents du gouvernement, doivent donner lieu d'invoquer la même mesure.

↑ Arr. Cass. 7 août 1824 (J. du pal., t. XVI, p. 857), et conf. arr. Cass. 30 juill. 1829, 4 mai 1832, 20 juin et 4 juill. 1834.

L. 28 avril 1816, tit. V, art. 55.

3 Lois des recettes des 17 juill. 1819 et années suiv.

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Le principe de la législation est que l'autorisation de mettre en jugement un agent du gouvernement, ne peut émaner que du gouvernement lui-même1. Mais le gouvernement exprime sa volonté à cet égard par différents organes.

En général, c'est au conseil d'État qu'est déléguée la mission d'apprécier les faits imputés aux fonctionnaires publies, et de décider s'il y a lieu d'autoriser leur mise en jugement l'art. 75 de la loi du 22 frimaire an vi dispose formellement qu'ils ne peuvent être poursuivis qu'en vertu d'une décision de ce conseil. 10 Cette règle, toutefois, admet plusieurs exceptions.

En premier lieu, les administrations de l'enregistrement et des domaines 2, des douanes, des postes, ́des eaux ét forêts 5 et des monnaies 6, ont été invesfies, pour dégager le conseil d'Etat, du pouvoir d'autoriser, en son lieu et place, la poursuite de leurs préposés 7. Le même pouvoir a été attribué aux préfets, à l'égard des percepteurs des contributions 8.

1 Voy. suprà, p. 298.

Arrêté 9 pluv. an x.

3 Arrêté 29 therm. an xi.

Arrêté 9 pluv. an x.

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5 Arrêté 28 pluv. an xt, et ord. 1er août 1827.

6 Arrêté 10 therm. an xi.

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Mais cette délégation est limitée à la seule faculté d'autoriser la poursuite. En cas de refus, l'affaire revient au conseil d'Etat, qui seul a le pouvoir de suspendre l'action judiciaire 1.

En deuxième lieu, la jurisprudence a reconnu au ministère de la guerre le pouvoir d'autoriser la poursuite devant les conseils de guerre des fonctionnaires de l'administration de la guerre inculpés de délits relatifs à leurs fonctions. La Cour de cassation a consacré cette exception en déclarant, 1° à l'égard d'un adjudant d'administration : « qu'aux termes de la loi du 13 brumaire an v, les adjudants d'administration chargés de la gestion des magasins militaires d'habillements sont justiciables des conseils de guerre; qu'il ressort des décrets et ordonnances relatifs à la mise en jugement de ces agents, qu'il appartient au ministre de la guerre d'autoriser ou d'ordonner cette mise en jugement 2. » 2° à l'égard d'un sous-intendant militaire traduit devant un conseil de

guerre pour détournement de fonds: « qu'aux térmes de l'art., 29 de l'ordonnance du 18 septembre 1820, les membres du corps de l'intendance militaire ne peuvent être mis en jugement qu'en vertu d'une décision spéciale du ministre de la guerre 3. » Une troisième exception a lieu à l'égard des agents de l'administration de la guerre qui seraient traduits devant les tribunaux ordinaires comme complices

1 Voy. suprà, p. 280.

2 Arr. Cass. 2 sept. 1842 (Bull., no 225). * Arr. Cass. 26 nov. 1842 (Bull., no 308).

des délits des fournisseurs dans le cas prévu par l'article 432 du C. pén. L'art, 433 de ce Code-porte, en effet, que la poursuite ne pourra être faaite que sur la dénonciation du gouvernement, et la Cour de cassation a jugé que le gouvernement dans ce cas était régulièrement représenté par le ministre compétent1. Or, cette dénonciation du ministre ne remplace-t-elle pas l'autorisation prescrite par l'art. 75 de la loi du 22 frimaire an vi? On peut dire, pour la négative, que la dénonciation et l'autorisation sont deux mesures distinctes; que la première ne s'applique point aux agents, mais au délit seulement; que son but unique est de saisir la justice en déclarant la poursuite utile et opportune; que l'autre a pour objet d'apprécier, à l'égard de chacun des agents individuellement, le caractère des actes incriminés et la gravité des indices. Il nous semble qu'on peut répondre que la garantie ayant pour objet, non de couvrir les agents, mais les actes administratifs, il n'y a plus de raison de l'invoquer quand les tribunaux sont saisis, par une dénonciation du gouvernement lui-même, de la connaissance de faits qui se rattachent à ces actes; que toute procédure criminelle est indivisible, et que, dès que la justice est saisie du délit, elle a droit et action sur tous les complices quels qu'ils soient; enfin, qu'il serait étrange que le gouvernement, après avoir décidé la poursuite du délit, fût astreint à se demander à lui-même l'autorisation de mettre en jugement ses auteurs; que si

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* Arr. Cass. 29 aodt 1846 (Bull., n. 226), et suprà, p. 144.

cette autorisation n'est alors qu'une simple format lité, elle est inutile; que si elle peut amener un con flit entre l'autorité qui la décerne et le gouvernement.a qui a dénoncé le délit, c'est-à-dire entre deux auto-b rités émanant du même pouvoir et obéissant à laol même influence, elle serait absurde 4..

Log in 45 Une quatrième exception peut encore être notée) lorsque la dénonciation d'un délit est faite, non pars un ministre seulement, mais par le chef du gouver• p nement ou par le pouvoir législatif lui-même. L'in-oq jonction d'informer, lorsqu'elle émane de la loi, rend nécessairement inutile l'autorisation du conseil d'Ép tat à l'égard des agents, auteurs ou complices desuo faits dénoncés. Un décret du deuxième jour complém mentaire an XII avait enjoint à la Cour de justice.cris minelle et spéciale de la Seine de connaître des faux, grattages et altérations commis sur les registres due receveur général de la Loire-Inférieure, et au prosco cureur général de poursuivre ses auteurs, fauteurs et ve complices. Deux fonctionnaires, l'un secrétaire gén néral de la préfecture, l'autre adjoint du maire, fu-te rent compris dans la poursuite sans qu'aucune au torisation fût intervenue, Sur leur pourvoi, la Cours de cassation annula les actes de procédure failscanc leur égard, en déclarant que si, dans cette inf jonction de poursuites, il avait été énoncé qu'elles seraient faites contre les auteurs, fauteurs, compli-1 ces et adhérents desdits faux, fussent-ils agents dup

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Voy. en sens contr. ord. cons, d'Ét. 20 juin 1846 (aff. des agents des subsistances de là mariñe de Rochefort).

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