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lenees exercées par les préposés, il y a présomption, jusqu'à preuve contraire, que l'agent ne l'a pas commis dans l'exercice de ses fonctions, et par conséquent, tant que cette preuve n'est pas rapportée, peut être poursuivi et mis en arrestation sans autorisation 1.

L'autorisation prescrite par l'art. 75 de la loi du 22 frimaire an vii, est une exception d'ordre public : dictée, en effet, par une raison politique, établie pour assurer l'indépendance de la marche du gouvernement, pour protéger l'autorité administrative contre les empiétements de l'autorité judiciaire, il est évident que cette mesure tient aux principes mêmes de notre droit public. Elle doit done, dans tous les cas où la loi l'exige, être appliquée à peine de nullité des poursuites, et cette nullité peut être prononcée, en tout état de cause, et même d'office 2.

-- Il 'a été décidé, conformément à ce principe : 1° « que la garantie donnée aux fonctionnaires publics n'est pas une exception dilatoire qui doive, aux termes de l'art. 186 du Cod. de procéd. civ., être proposée avant toute exception au fond, mais est une exception d'ordre public, qui peut être proposée en tout état de cause et même relevée d'office par les tribunaux 3; 2° « que cette garantie ayant

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1 Arr. Cass. 12 mars 1813 (J. du pal., t. XI, p.

? Mangin, n° 267.

198).

3 Arr. Cass. 11 mars 1837 (Dev., 1837, 1, 311); Colmar, 13 juin 1835 (J. du pal., t. XXVII, p. 308).

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été établie par des motifs d'ordre public, le fonctionnaire qui a omis de s'en prévaloir en première instance peut encore en exciper en appel; que le tribunal qui prononce sur une action engagée contre un agent du gouvernement, à raison des délits relatifs à ses fonctions, avant que la poursuite aît été Autorisée, commet un exces de pouvoir qui rend son jugement nul1; » 3° « que l'incompétence ́ du tribunal est absolue comme étant fondée sur un

principe d'ordre public, de sorte que, quand l'agent inculpé ne l'aurait pas proposée, il serait recevable à s'en prévaloir pour la première fois sur son pourvoi2; 4° « qu'en excipant de sa qualité d'agent du gouvernement, et en soutenant que le fait qui lui était reproché avait étë' par lui commis dans l'exercice de ses fonctions, le prévenu avait soulevé une exception préjudicielle d'ordre public; que le tribunal, ayant reconnu cette exception fondée, devait par suite surseoir à statuer au fond sur l'appel dont il était saisi, jusqu'à ce que cette autorisation fùt rapportée par le ministère public 3. »

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Ainsi, dès que la qualité de l'agent apparaît aux yeux des juges, la procédure est suspendue et le tribunal doit surseoir, à quelque phase qu'elle soit parvenue, jusqu'à ce que le conseil d'Etat ait statué. Suit-il de la que la chambre du conseil ou la chambre d'accusation ne puissent, en appréciant les élé

Arr. Rennes, 15 déc. 1832 (J. du pal., t. XXIV, p. 4664).t . 362).reiningar'i 3 Arr. Cass. 30 août 1833 (J. du pal., t. XXV, p. 864).

2 Arr. Cass. 9 févr. 1809 (J. du pal., t, VII, p.

CHAP. III. DE LA MISE EN JUGEMENT DES FONCT. PUBL., § 166. 437 -mordonolol,9dang sabio habitent zoj g

n'y a lieu à suivre

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ments de la poursuite, déclarer immédiatement qu'il lieu à suivre? Cette déclaration suppose l'appréciation des charges, et elles ne peuvent procéder à cette appréciation; elle e suppose la possibilité d'une déclaration contraire, d'une mise en prévention, et elles sont incompétentes pour la prononcer. Il suit de là que régulièrement elles ne peuvent prendre aucune décision sur le fond de la poursuite, même pour décider que cette poursuite n'est pas fondée. Une information préparatoire avait été faite sur un crime de corruption imputé à un garde forestier. Le procureur général, jugeant cette imputation calomnieuse, avait requis la chambre d'aceusation de déclarer n'y avoir lieu à suivre. Cette chambre pensa que cette décision excédait son pouyoir, et elle déclara qu'il n'y avait lieu à statuer sur le réquisitoire. La cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre cet arrêt « Attendu que, sur une prévention de cette nature, la chambre d'accusation ne pouvait pas décider la question de savoir si ou non il y avait des charges suffisantes pour prononcer la mise en accusation, parce que, d'après les art. 3 du décret du 9 août 1806, et 75 de la loi du 22 juin an 8, il ne lui avait pas été permis de prononcer la mise en accusation avant qu'on eût obtenu du gouvernement l'autorisation de poursuivre le garde forestier 1. Mais si la chambre du conseil ou d'accusation, sans s'arrêter à cette exception, et entraînée par l'insuffisance des charges, se hâte de rendre une dé

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♦ Arr. Cass. 8 mai 1824 (J. du pal., t. XVIII, p. 687).

claration de non-lieu, cette déclaration, bien qu'irrégulière, demeurerait acquise à l'inculpé; car il n'y a plus dans ce cas d'intérêt, ni pour l'administration ni pour l'agent, à invoquer, sous le prétexte que l'autorisation devait précéder la poursuite, la nullité d'une décision qui déclare que cette poursuite n'aura pas lieu.

Par la même raison, et pour continuer la même hypothèse, le jugement qui prononcerait, avant que l'autorisation fût intervenue, l'acquittement de l'agent, contiendrait évidemment un excès de pouvoir 1. Mais ce jugement, quoique entaché de nullité, puisque les juges étaient incompétents, n'en devrait pas moins profiter à l'agent inculpé. Ce point a été jugé dans une espèce où les juges, sans avoir égard à la demande en autorisation déjà formulée, avaient renvoyé le prévenu de la poursuite. Le conseil d'État, « considérant que la garantie à été introduite en faveur des fonctionnaires, et que ce serait la tourner contre eux que d'anéantir un jugement d'absolution intervenu en l'absence de cette formalité; que, dans l'espèce particulière, une telle décision serait d'autant plus dure, que l'absolution paraît avoir été justement prononcée, spécialement en ce que le moyen principal a été détruit; que néanmoins la poursuite a été illégale ; » a émis l'a

vis qu'il y avait lieu de faire le renvoi du jugement à

la Cour de cassation, pour y être statué dans Fintérêt

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1 Arr. Cass, 30 août 1833 (J. du pal., t. XXV, p. 864).

de la loi 4. » La Cour de cassation, saisie en vertu de cette ordonnance, a prononcé l'annulation du jugement dans l'intérêt de la loi seulement et sans préjudice de son exécution 2.

Mais cette exception, soit qu'elle soit proposée au seuil ou dans le cours de la procédure, soit qu'elle soit soulevée par la partie ou d'office, ne se présente pas dans tous les cas avec un caractère complet d'évidence. Les points de savoir si l'inculpé est ou n'est pas agent du gouvernement, si l'acte incriminé est étranger ou relatif à la fonction, amènent fréquemment de sérieuses difficultés. A quelle autorité appartient-il de les résoudre? Est-ce le conseil d'Etat, est-ce le tribunal qui doit décider si l'autorisation est nécessaire? La jurisprudence de la Cour de cassation a varié sur cette question. Elle avait déclaré d'abord: « que la garantie doit suspendre, à l'égard des personnes qui ont droit d'en jouir, l'action des tribunaux toutes les fois qu'elles ont été traduites devant eux, sans que le conseil d'Etat ait préalablement examiné la qualité dans laquelle l'agent a agi, et si le fait incriminé peut ou non donner lieu à la poursuite; que, dans aucun cas, l'autorité judiciaire n'est compétente pour juger ni la qualité de l'agent inculpé, ni si quelque intérêt politique ou administratif souffrirait pour sa traduction en justice; que, s'il en était autrement, la garantie dont la loi couvre les agents du gouvernement pourrait être illu

1 Ord. cons. d'Ét. 1er févr. 1811, app. le 6 (ibid., t. IX, p. 369). 2 Arr. Cass. 6 juin 1811 (J. du pal., t. IX, p. 369).

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