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Avril 1793.)

LE DOMINE SALVUM.

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suprême, qu'ils préparèrent et murirent dans l'espace de deux mois environ, sans se préoccuper beaucoup des événements étrangers à leur cause. Aussi les royalistes ne se dissimulèrent pas que l'ordre de choses passé élait entièrement perdu. Le règne des sans-culottes succédait à celui de Louis XVI, et dans une gravure intitulée le Domine salvum fac regnum, ils figurèrent l'état actuel de la France. On y voit le buste de Louis XVI, emblème de la royauté, dit le texte. Sur une des faces du piédestal qui le supporte, sont écrits ces mots : O mon roi, vous serez vengé! A droite, Philippe-Égalité, accompagné de sans-culottes, appelés ses satellites, est, prétend le graveur, un personnage connu qui veut s'emparer du trône après l'avoir renversé. Ce personnage s'apprête à monter les gradins du trône; il est fortement soutenu par Jourdan le coupe-têtes. La France est écrasée sous les débris de la monarchie légitime, et monseigneur le prince de Condé, l'épée à la main, jure de mourir pour venger la royauté, serment répété par d'autres princes du sang. Necker et compagnie sourient à ce désastre. Ils s'écrient: Nous aurons deux chambres! Enfin, le prince de Conti, mollement couché sur un sofa, se de tout sur l'honneur des autres (a).

repose

Disons seulement que Louis-Philippe-Égalité était bien peu goûté à cette heure, puisque la convention, au contraire, avait voulu l'expatrier.

Dans cet état de cause, à quoi avait servi aux girond ns de voter la plupart, malgré leur conscience, et par pusillanimité, la mort du défunt roi? Ils avaient, par cette action, obscurci d'avance quelques rayons de leur couronne de martyre!

Communiqué par M. le marquis de Pastoret.

T. i.

F.N DU CHAPITRE DIX-NEUVIÈME.

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LES MOYENS DES MONTAGNARDS.

(Avril 1793.)

CHAPITRE XX.

Condamnations à mort de Louis Gigot Dumollans et Blanchelande.

bins.

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La Marmite épuratoire des jaco

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Funérailles

Certificat de civisme épuré; brevet de garde nationale. Fête de l'hospitalité. du héros Lajowski. Le maximum est établi. Comité central d'insurrection.-Etablissement, abolition de la commission des douze. -Journées des 31 mai, 2 juin. la Vendée. Marat.

L'anarchie tombée en quenouilles. L'insurrection morale. Avénement de la constitution de 93. Le général Mousseux; La faction du fédéralisme. Mort de Châlier à Lyon. Charlotte Corday assassine Portrait de Marat en robe de chambre. Obsèques de Marat; litanies, reliques; Jésus et Marat; son tombeau. Description de la fete en l'honneur de Marat à Bourg-Régénéré.

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Les montagnards avaient à leur service deux instruments redoutables, le tribunal révolutionnaire et le comité temporaire de salut public. Le premier les aida puissamment à renverser la gironde; le second fut leur porte-respect, lorsqu'ils eurent en leurs mains le pouvoir: nous remettons au temps de la terreur, les notions à donner sur la conformation du comité de salut public, et nous suivons peu à peu les actes du tribunal révolutionnaire, dont la séance d'installation eut lieu le 6 avril.

Seulement, à part les répugnances que nous avons pour les mesures sanguinaires, nous ne pouvons passer outre sans faire remarquer au lecteur, que la conduite des montagnards était bien loin d'être politique. Le génie des hommes politiques, en effet, consiste à vaincre par la persuasion ou par l'habileté des actes du gouvernement. Mais tuer les ennemis d'un système, ce n'est pas faire triompher ce système, c'est l'imposer brutalement. C'est cette façon inouïe de trancher les difficultés, qui a amoncelé sur la tête des montagnards tant d'accusation de la part des historiens. Une tête tombe sur le moindre soupçon! Que devient alors le libre examen des citoyens, leur indépendance, leur inviolabilité privée ? Le tribunal révolutionnaire, au point de vue politique, est une mesure de despotes; au point de vue humain, c'est tine odieuse institution.

Le premier individu condamné à mort fut un nommé Louis Gigot Dumol

Avril 1793).

BLANCHELANDE.

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lans, gentilhomme poitevin, émigré rentré en France (a). Il fut exécuté cinq heures après son jugement. Dumollans ouvre la liste par rang de date; par rang d'importance politique, c'est Blanchelande, lieutenant du gouverneur des Iles sous le vent, dont le portrait fut répandu à plusieurs milliers d'exemplaires, et dont la culpabilité était bien moins que certaine.

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Un journal annonça, peu après, que l'on avait mis la dernière main à la guillotine (b)?

(a) Révolutions de Paris.

b Bulletin du tribunal criminel révolutionnaire, etc.

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PATRIOTES ÉPurés.

(Avril 1793.)

Les jacobins, en vue du terrible tribunal, épurèrent leur club, et chassèrent notamment l'ex-capucin Chabot, et le comédien Fabre d'Eglantine, à cause du peu de fondement de leur moralité. Une caricature parut à ce propos, et fut intitulée la Marmite épuratoire. Robespierre, qui proposa ce scrutin étrange, y est représenté passant les jacobins à l'écumoire (a). Un journaliste dit que les Jacobins faisaient comme leurs frères les moines, qui chassaient du couvent ceux qui ne savaient pas sauver les apparences (b). Cet acte du club rendit le parti jacobin encore plus compact qu'il ne l'avait été jusqu'alors, et le livrait à Robespierre et à Marat, opposés d'opinions, mais tous deux bien d'accord pour risquer les moyens extrêmes. Maintenant, les faits se succèdent selon le vœu des purs jacobins ; ils se moquent bien des petites plaisanteries que leurs antagonistes hasardent sur leur compte: ils vont droit au but, et commencent à répéter cette phrase: Rira bien qui rira le dernier. Déjà, on se délivre, dans toute la France des certificats de civisme épuré, ainsi conçus; en voici un de la ville de Cambrai: (c)

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Nous sou signés, Membres composant le Conseil d'administration du premier bataillon de CAMBRAI, certifions qu'après avoir invité les citoyens composant le bataillon de faire leurs observations, sur la conduite ou le civisme du Citoyen.... natif de........ district d........ département du... depuis le.... a été reconnu, après une múre délibération, réunir les qualités qui caractérisent un vrai républicain.

En foi de quoi nous lui avons délivré le présent, pour lui servir et valoir ce que de raison, et icelui fait apposer le Sceau du Bataillon.

Fait en séance, à... le... année républicaine.

Signature du Commandant.

(a) Cartons de la Bibliothèque royale.

(b) Le Patriote français, journal.

(c) Ce certificat, que plusieurs mots démontrent être d'une date un peu ultérieure, avait néanmoins cours à l'époque où nous le plaçons, sauf de très-légères modifications.

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