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» Le gouvernement accueille avec satisfaction les sentimens que vous venez de lui exprimer.

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DISCOURS du Tribunat, prononcé (le même jour) par Challan, président.

Citoyen premier consul, le peuple français vient de vous donner un témoignage éclatant de sa reconnaissance.

» Il a vu par vous la victoire fixée près de ses drapeaux, la paix couronner le succès de ses armes, le calme intérieur rétabli, les cités repeuplées par l'indulgence, la liberté des

consciences reconnue.

» Il a senti que la seule main qui en aussi peu de temps avait fait de si grandes choses pouvait en assurer la durée.

» Son intérêt, celui de l'Europe entière s'unissaient à sa gratitude; il vous a fait consul à vie.

» Par la sagesse de vos vues, tout, à côté de vous et dans la République, assure cette stabilité que le Tribunat avait désirée, et dont il avait posé la base en émettant son vœu. >> Ce vœu est enfin accompli.

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Agréez, général premier consul, les félicitations du Tribunat; elles se confondent en ce jour mémorable avec les acclamations des citoyens.

» Veuillez être aussi convaincu que le plus vif désir de chacun de nous est et sera toujours de contribuer à la stabilité du gouvernement, à sa gloire, au bonheur de la nation, et du premier consul à vie qu'elle se donne. »

RÉPONSE du premier consul.

«La stabilité de nos institutions assure la destinée de la République.

» La considération des corps dépend toujours des services qu'ils rendent à la patrie.

» Le Tribunat, appelé à discuter les projets de loi proposés par le Conseil d'état, constitue avec lui une des parties les plus essentielles à l'organisation législative.

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Egal en nombre, divisé comme lui en sections, il continuera de porter dans les discussions cet esprit de sagesse, zèle, ces talens dont il a donné, dont il donne aujourd'hui un si bel exemple dans l'examen du code civil.

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Le

gouvernement est vivement touché des sentimens que vous venez d'exprimer.

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» Il y répondra toujours par son dévouement à la patrie.

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VI.

DE LA NATURALISATION DES ÉTRANGERS.

MOTIFS du sénatus-consulte proposé au Sénat dans sa séance du 16 vendémiaire an 11 (1); exposés par le conseiller d'état Regnault (de Saint-Jean d'Angely).

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« Sénateurs, la gloire qui environne la République, la richesse de son territoire, la douceur, la variété de son climat, l'abondance de ses productions, la réunion des monumens, des chefs-d'œuvre de tout genre, ouvrage de nos artistes ou conquêtes de nos guerriers, l'étendue sans cesse croissante de l'industrie nationale, la situation avantageuse de nos ports sur les deux mers, tout appelle les étrangers au sein de la Françe pacifiée et triomphante.

» Les uns, attirés seulement par le désir de voir de près la grande nation, victorieuse avec ses propres forces de l'univers presque entièrement ligué contre elle, remportent dans leur pays l'étonnement et l'admiration; d'autres forment le vœu de s'associer à tant d'avantages, de partager des destinées si riches de réalités et d'espérances; ils aspirent à devenir Français.

» L'Acte constitutionnel leur offre à la vérité des moyens d'obtenir le titre de citoyen; mais ces moyens, trop lents pour leur impatience, paraissent aussi trop lents pour l'intérêt public.

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» L'article 3 du titre 1r de l'Acte constitutionnel n'autorise qu'un seul moyen de devenir citoyen français, c'est de ré

(1) Sénatus-consulte adopté le 26 vendémiaire an 11, promulgué le 5 brumaire suivant ; il portait:

« Art. 1or. Pendant cinq ans, compter de la publication du présent sénatus-consulte organique, les étrangers qui rendront ou qui auraient rendu des services importans à la République, qui apporteront dans son sein des talens, des inventions ou une industrie utiles, ou qui formeront de grands établissemens, pourront, après un an de domicile, être admis à jouir du droit de citoyen français.

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2. Ce droit leur sera conféré par un arrêté du gouvernement pris sur le rapport du ministre de l'intérieur, le Conseil d'état entendu. » 3. Il sera délivré à l'impétrant une expédition dudit arrêté, visée par le grand juge ministre de la justice, et scellée du sceau de la République.

» 4. L'impétrant, muni de cette expédition, se présentera devant la municipalité de son domicile, pour y prêter le serment d'être fidèle au gouvernement établi par la Constitution. Il sera tenu registre et dressé procès verbal de cette prestation de serment, »

sider en France pendant dix ans après avoir déclaré l'intention de s'y fixer.

» Mais si cette longue épreuve a pu paraître nécessaire à établir comme règle générale et pour tous les temps, ne doitelle pas avoir ses exceptions, motivées sur les circonstances, fondées sur l'intérêt public, autorisées par la justice, commandées même par la reconnaissance ?

» En ce moment, où de nouvelles et de plus vastes limites sont posées à notre territoire, ne faut-il pas encourager à se fixer parmi nous ce propriétaire dont les possessions sont désormais sur le sol français, quand son habitation est restée sur le territoire étranger? ce négociant, cet armateur, qui a vu des routes longtemps fermées rouvertes aux spéculations commerciales, et qui veut apporter, établir dans nos ports ses capitaux, qu'il craint de voir oisifs ou mal employés, et son comptoir, dont il redoute la désertion ou la langueur, l'inactivité ou l'abandon?

»Ne faut-il pas appeler dans nos cités manufacturières ces hommes dont quelques uns sont déjà arrivés parmi nous, ces hommes dépositaires ou confidens de ces secrets qui décuplent, centuplent la force, l'activité des ouvriers par la manière de les employer? les auteurs de ces mécaniques précieuses, de ces découvertes fécondes, qu'au milieu de nos richesses en ce genre nous sommes cependant forcés d'envier à nos voisins, nos rivaux?

» N'est-il pas juste de récompenser les artistes qui, plus attachés encore aux arts qu'à leur pays, ne pourront peut-être se détacher ni des monumens antiques qui furent le prix de nos victoires, ni des monumens modernes qui les ont précédées ou consacrées, enfin de cet assemblage de chefs-d'œuvre où les élèves triomphent encore près de leurs maîtres, et les imitateurs près de leurs modèles?

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Enfin, si nos guerriers avaient ramené du théâtre de leurs expéditions lointaines des hommes généreux qui sur une terre étrangère leur auraient montré de l'affection et du dévouement, qui se seraient associés à leurs périls et à leurs succès avec un abandon assez absolu pour ne pouvoir plus rester dans leur patrie sans péril, ou loin des Français sans douleur, ne serait-il pas digne de la nation de leur rendre ce qu'ils auraient sacrifié pour elle?

» Si ces vérités sont incontestables, si la politique, la raison et le sentiment s'unissent pour les avouer, il en résulte la nécessité d'une modification à l'Acte constitutionnel, d'une modification qui autorise l'exception à la règle générale établic dans l'article 3 du titre 1.

» Chez tous les peuples l'usage de la naturalisation a été consacré.

» En France le prince accordait des lettres appelées lettres de naturalité, et qui, enregistrées dans les cours, donnaient toutes les prérogatives attachées au titre de Français.

» Les négocians qui venaient s'établir à Marseille y jouissaient des mêmes avantages que les habitans nés Français.

» La Constitution de 1791, article 4, réservait au Corps législatif le droit de donner un acte de naturalisation sans les délais et les conditions prescrites comme règles générales dans l'article précédent.

» Mais la publicité d'un tel acte, qui dans aucun temps ne serait sans inconvéniens, en aurait de plus grands encore dans les circonstances actuelles : la solennité des formes législatives est incompatible avec la réserve prudente ou même la sage discrétion qui peut être nécessaire dans la translation que projetterait un étranger de sa famille, de sa fortune, de son industrie.

» En Angleterre le monarque accorde des lettres qui conferent une partie des droits de naturalité; un bill du parlement est nécessaire pour en obtenir la plénitude.

» Mais à la sévérité de cette législation il est une infinité d'exceptions, toutes fondées sur les intérêts du commerce ou de la navigation.

» Un matelot qui sert deux ans durant la guerre, un négociant qui a habité les colonies pendant un certain temps, un homme employé pendant trois ans à la pêche de la baleine, sont naturalisés de droit en prêtant les sermens d'allégeance et de suprématie.

» C'est d'après ces principes, c'est en consultant ces exemples que le gouvernement a cru convenable de ne pas assujettir à de trop longues et trop éclatantes formalités les actes de naturalisation.

» Il a pensé qu'en confiant au gouvernement le droit de les accorder, et en exigeant le rapport et la discussion préalable au Conseil d'état, vous donneriez la garantie que cette faveur ne serait accordée que justeinent et en connaissance de cause et vous éviteriez le danger d'une imprudente publicité.

En adoptant le résultat des considérations importantes que le gouvernement présente à votre sagesse, vous assurerez à la France la jouissance et la multiplication des conquêtes nouvelles qu'elle est appelée à faire pendant la paix sur les nations étrangères, et qui, non moins que les conquêtes de la guerre, ajouteront à la puissance et à la prospérité de la République. »

VII.

EXPOSÉ DE LA SITUATION DE LA RÉPUBLIQUE; lu devant le Corps législatif par le conseiller d'état Muraire. Séance du 3 ventose an 11 (22 février 1803).

<«< Les événemens n'ont point trompé les vœux et l'attente du gouvernement. Le Corps législatif, au moment où il reprend ses travaux, retrouve la République plus forte de l'union des citoyens, plus active dans son industrie, plus confiante dans sa prospérité.

» L'exécution du concordat, sur laquelle des ennemis de l'ordre public avaient encore fondé de coupables espérances, a donné presque partout les résultats les plus heureux : les principes d'une religion éclairée, la voix du souverain pontife, la constance du gouvernement ont triomphe de tous les obstacles; des sacrifices mutuels ont réuni les ministres du culte. L'église gallicane renaît par les lumières et la concorde, et déjà un changement heureux se fait sentir dans les mœurs publiques. Les opinions et les cours se rapprochent; l'enfance redevient plus docile à la voix de ses parens, la jeunesse plus soumise à l'autorité des magistrats. La conscription s'exécute aux lieux où le nom seul de conscription soulevait les esprits, et servir la patrie y est une partie de la religion.

» Dans les départemens qu'a visités le premier consul il a recueilli partout le témoignage de ce retour aux principes qui font la force et le bonheur de la société.

» Dans l'Eure, dans la Seine-Inférieure, dans l'Oise, on est fier de la gloire nationale; on sent dans toute leur étendue les avantages de l'égalité; on bénit le retour de la paix; on bénit le rétablissement du culte public. C'est par tous ces liens que les cœurs ont été rattachés à l'Etat et à la Constitution.

» Le devoir du gouvernement est de nourrir et d'éclairer ces heureuses dispositions.

>> Les autres cultes s'organisent, et des consistoires se composent de citoyens éclairés, défenseurs connus de l'ordre pu- . blic, de la liberté civile et de la liberté religieuse.

» L'instruction publique, cet appui nécessaire des sociétés, est partout demandée avec ardeur; déjà s'ouvrent plusieurs lycées; déjà, comme le gouvernement l'avait prévu, une multitude d'écoles particulières s'élèvent au rang d'écoles secondaires : tous les citoyens sentent qu'il n'est point de bonheur sans lumières; que sans talens et sans connaissances il n'y a d'égalité que celle de la misère et de la servitude.

» Une école militaire recevra de jeunes défenseurs de la pa

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