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DISCOURS prononcé par Fontanes, orateur de la dépu tation chargée de porter au premier consul la délibération du Corps législatif prise sur la motion de Marcorelle. Le 4 germinal an 12..

Citoyen premier consul, un empire immense repose depuis quatre ans sous l'abri de votre puissante administration: la sage uniformité de vos lois en va réunir de plus en plus tous les habitans. Le Corps législatif veut consacrer cette époque mémorable; il a décrété que votre image, placée au milieu de la salle de ses délibérations, lui rappellerait éternellement vos bienfaits, ses devoirs, et les espérances du peuple français. Le double droit de conquérant et de législateur a toujours fait taire tous les autres vous l'avez vu confirmé dans votre personne par le suffrage national. Qui pourrait nourrir encore le criminel espoir d'opposer la France à la France? Se divisera-t-elle quelques souvenirs passés, quand elle est unje par tous les intérêts présens? Elle n'a qu'un chef, et c'est vous; elle n'a qu'un ennemi, et c'est l'Angleterre.

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» Les tempêtes politiques ont pu jeter quelques sages euxmêmes dans des routes imprévues: il était facile de se méprendre au milieu des orages où combattaient tous les partis, dans ces temps funestes où les factions se montraient partout, et la patrie nulle part. Mais sitôt que votre main a relevé les signaux de la patrie, tous les bons Français les ont reconnus et suivis ; tous ont passé du côté de votre gloire. Ceux qui conspirent au sein d'une terre ennemie renoncent irrévocablement à la terre natale. Et que peuvent-ils opposer à votre ascendant? Vous avez des armées invincibles; ils n'ont que des libelles et des assassins, et tandis que toutes les voix de la religion s'élèvent en votre faveur au pied des autels, que vous avez relevés, ils vous font outrager par quelques organes obscurs de la révolte et de la superstition. L'impuissance de leurs complots est prouvée. Ils rendront tous les jours la destinée plus rigoureuse en luttant contre ses décrets. Qu'ils cèdent enfin à ce mouvement irrésistible qui emporte l'univers, et qu'ils méditent en silence sur les causes de la ruine et de l'élévation des empires!

RÉPONSE du premier consul.

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« J'ai vu avec plaisir le bon esprit des Français dans ces dernières circonstances. Les conspirateurs n'ont trouvé d'asile que parmi cette espèce d'hommes qui n'a point de patrie. Tous ceux qui mettent du prix à l'honneur, et qui ont des droits à la considération publique, soit par leurs anciennes habitudes, soit

par la confiance actuelle du gouvernement, se sont éloignés avec horreur des assassins. Nulle classe n'est coupable; quelques individus seront seuls frappés. Les opinions et les erreurs passées, de quelque nature qu'elles soient, ne pourront être recherchées par la justice nationale; elle ne connaîtra que les délits actuels. Les puissances continentales de l'Europe forment les mêmes vœux que le gouvernement français; elles désirent avec lui que les instrumens de trouble et de discorde aux gages de l'Angleterre disparaissent à jamais. >>

XIII.

DE L'ÉTABLISSEMENT DU GOUVERNEMENT IMPÉRIAL HÉRÉDITAIRE.

RAPPORT au premier consul, par le grand juge ministre de la justice (Régnier). -Du er germinal an 12. (Communiqué le 2 au Sénat.)

« Citoyen premier consul, je crois devoir distraire de l'instruction du complot infâme que bientôt la justice doit dévoiler et punir, les pièces d'une correspondance accessoire qui dans cette grande affaire, et sous des rapports de police, n'est qu'un simple incident, mais qui, considérée politiquement, me semble propre à ouvrir les yeux de l'Europe sur le caractère de la diplomatie anglaise, sur la bassesse de ses agens, et sur les misérables expédiens qu'elle emploie pour remplir ses vues.

>> Un ministre du gouvernement anglais est accrédité auprès d'une cour voisine de la France. L'usage, les mœurs, le droit des gens, attachent des distinctions, des prérogatives à cette place; et ce n'est pas sans motifs : l'existence d'un ministre étranger est partout destinée à constater et maintenir les liens d'amitié, de confiance et d'honneur qui unissent les états, et dont la durée fait la gloire des gouvernemens et le bonheur des peuples.

» Mais tel n'est pas le but de la mission des agens diplomatiques du gouvernement anglais. Je mets sous vos yeux, citoyen premier consul, la correspondance directe que M. Drake, ministre du roi d'Angleterre près la cour électorale de Bavière, entretient depuis quatre mois avec des agens envoyés, payés, dirigés par lui au sein de la République.

» Cette correspondance consiste en dix lettres originales;

elles sont toutes écrites de sa main.

» Je mets également sous vos yeux les instructions que M. Drake est chargé de distribuer à ses agens, et l'état authentique des sommes payées et des sommes promises pour récom

penser et encourager des crimes que les législations les plus indulgentes punissent partout du dernier supplice.

» Ce n'est pas pour représenter son souverain que M. Drake est venu à Munich revêtu du titre de ministre plénipotentiaire; cette représentation n'est que le rôle apparent, le prétexte de sa légation. Son véritable objet est de recruter des agens d'intrigue, de révolte, d'assassinat, de faire une guerre de brigandage et de meurtre au gouvernement français, et enfin de blesser la neutralité et la dignité du gouvernement près lequel il réside.

» Ainsi, ostensiblement, M. Drake est un homme public; mais réellement il est, ses instructions en font foi, le directeur secret de la police anglaise sur le continent. Les moyens de cette police sont l'or, les séductions, les folles espérances de tous les intrigans, de tous les ambitieux de l'Europe: son objet se trouve clairement exposé dans les dix-huit articles des instructions que M. Drake fournit à tous ses agens, et quí forment la première des pièces jointes à ce rapport.

» Les numéros 2, 7, 8, 9 et 13 de ces instructions sont remarquables :

Art. 2. « Le but principal du voyage étant le renversement » du gouvernement actuel, un des moyens d'y parvenir est » d'obtenir la connaissance des plans de l'ennemi, Pour cet » effet il est de la plus haute importance de commencer » avant tout par établir des correspondances sûres dans les » différens bureaux, pour avoir une connaissance exacte de » tous les plans, soit pour l'extérieur, soit pour l'intérieur. » La connaissance de ces plans fournira les meilleures armes » pour les déjouer; et le défaut de succès est un des moyens » de discréditer absolument le gouvernement, premier pas » vers le but proposé, et le plus important.

»7. On pourrait, de concert avec les associés, gagner » les employés dans les fabriques de poudre, afin de les » faire sauter quand l'occasion s'en présentera.

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8. Il est surtout nécessaire de s'associer et de s'assurer de » la fidélité de quelques imprimeurs et graveurs, pour imprimer et faire tout ce dont l'association aura besoin.

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9. Il serait à désirer que l'on connût au juste l'état des partis en France, et surtout à Paris.

» 13. Il est entendu qu'on emploiera tous les moyens pos»sibles pour désorganiser les armées, soit au dehors, soit au » dedans.

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» Ainsi, corrompre les administrations, établir des vol

cans partout où la République a des magasins de poudre, se procurer des imprimeurs et des graveurs fidèles pour en faire des faussaires, pénétrer dans le sein de tous les partis pour les armer l'un contre l'autre, et enfin soulever et désorganiser les armées, tels sont les objets effectifs de la mission diplomatique de M. Drake en Bavière.

» Mais heureusement le génie du mal n'est pas aussi puissant dans ses moyens qu'il est fécond en illusions et en projets. sinistres! S'il en était autrement, les sociétés humaines n'existeraient plus. La haine, l'astuce, l'argent, l'indifférence sur le choix des moyens ne manquent ni à M. Drake, ni à la po~ litique immorale de son gouvernement; mais il leur manque de pouvoir ébranler en France une organisation forte comme la nature, établie sur l'affection de trente millions de citoyens, cimentée par la force, par l'intérêt de tous, et animée par la sagesse et le génie du gouvernement.

»Des hommes qui ne mettent de prix qu'à l'or, et qui n'ont d'habileté que pour de basses intrigues, ne sont pas саpables de concevoir quelle est la consistance et le pouvoir d'un état de choses qui est le résultat de dix années de souffrances et de victoires, d'un grand concours d'événemens, et de la maturité d'une noble nation, formée par les dangers et les efforts d'une guerre glorieuse et d'une terrible révolution.

» Dans ce bel ensemble de puissances et de volontés, M. Drake ne voit que des occasions d'intrigue et des scènes d'espionnage. Pendant mon séjour en Italie, dit-il à ses correspondans (Munich, 27 janvier), j'ai eu des liaisons avec l'intérieur de la France; il en doit étre de méme à présent, d'autant plus que je me trouve étre dans ce moment un des ministres anglais les moins éloignés de la frontière.

» Tels sont ses titres pour travailler au bouleversement de la France. Ses moyens valeut-ils mieux que ses titres ?

» Il a des agences auxquelles il n'ose se fier. Ses correspondans incertains lui écrivent par la Suisse, par Strasbourg, par Kehl, Offenbourg, et Munich. Il a des subalternes dans ces villes pour soigner la sûreté de sa correspondance. Il fait usage de faux passeports, de noms de convention, d'encre sympa. thique. Tels sont les moyens de communication par lesquels il transmet ses idées, ses projets, ses récompenses; et c'est par les mêmes voies qu'on l'informe des trames ourdies sous sa direction pour soulever d'abord quatre départemens, y former une armée, la grossir de tous les mécontens, et renverser le gouvernement du premier consul.

» Sans doute ces tentatives et ces promesses sont insensées, et les vils et misérables moyens qu'on a mis en œuvre sont trop

disproportionnés avec les difficultés de l'entreprise pour qu'on doive concevoir la moindre inquiétude sur son succès; mais ce n'est pas toujours sur des motifs de crainte et dans les vues de punir qu'agit cette politique intérieure et domestique à laquelle on a donné le nom de police, et dont l'objet capital n'est pas seulement de prévenir et de réprimer le crime, comme celui de la politique extérieure est d'enchaîner l'ambition, mais encore d'ôter au vice et à la faiblesse même jusqu'aux occasions, jusqu'à la tentation de faillir.

»Dans les pays les mieux gouvernés il y a des esprits capables d'être détournés de la ligne du devoir par une sorte de penchant naturel à l'inconstance: dans la société la mieux organisée il y a des hommes faibles et des hommes pervers. Il a toujours été reconnu par mes prédécesseurs que c'était remplir un devoir d'humanité de veiller sur ces hommes, non dans la vaine espérance de les rendre bons, mais pour arrêter le développement de leurs vices; et comme à cet égard toutes les nations policées ont le même intérêt à défendre et les mêmes devoirs à remplir, il a toujours été reçu en maxime générale qu'aucun gouvernement ne devait souffrir qu'il s'élevât nulle part une bannière autour de laquelle les hommes corrompus de tous les pays et de toutes les professions pussent se rallier, s'entendre, et comploter la désorganisation générale ; et dans cette vue ils doivent moins encore souffrir qu'il s'établisse autour d'eux une école infâme de séduction et d'embauchage, qui éprouve la fidélité, la constance, et attaque à la fois les affections et la conscience des citoyens.

» M. Drake avait une agence à Paris; mais d'autres ministres, instrumens de discorde et embaucheurs comme lui, peuvent aussi avoir des agences. M. Drake, dans sa correspondance, dévoile tous ceux qui existent en France par le soin même qu'il prend de nier qu'il les connaisse. Je répète, dit-il dans ses lettres, que je n'ai aucune connaissance de l'existence d'aucune autre société que de la vôtre. Mais je vous répète, dit-il en plusieurs endroits, que s'il en existe je ne doute nullement que vous et vos amis ne preniez toutes les mesures convenables non seulement pour ne pas vous embarmais pour vous aider mutuellement. Et enfin il ajoute (Munich, 9 décembre 1803), avec une fureur grossière et digne du rôle qu'il joue: Il importe fort peu par qui l'animal soit terrassé; il suffit que vous soyez tous prêts à joindre la chasse.

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» C'est par suite de ce système que, lors de la première manifestation du complot qui dans ce moment occupe la justice, il écrit : Si vous voyez les moyens de tirer d'embarras quel

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