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pendant trois jours de combats acharnés. Charles X, qui avait de vrais partisans, fut reconduit jusqu'à la frontière de l'exil par ses compagnies de gardes du corps; Louis-Philippe s'évada de France moins comme un proscrit (il ne l'était pas) que comme un coupable. Celui-là se retirait devant la Révolution de la liberté. Celui-ci fuyait la Révolution du mépris.

Est-ce à dire que ce règne de dix-huit ans ait été complétement stérile? Non, certes. Un gouvernement qui ne satisferait en rien aux besoins de son temps ne vivrait pas dix-huit ans. La monarchie de 1830 n'a pas eu, il faut l'en louer, le leurre décevant des grandes aventures militaires, comme le premier Empire. Elle compte cependant plusieurs brillants faits d'armes : Anvers, Lisbonne, Constantine, Saint-Jean-d'Ulloa, Tanger, Mogador, l'Isly, etc.

L'éloquence politique, sans atteindre peut-être la hauteur où le feu de la passion l'éleva de 1816 à 1830, fit encore grand honneur à la tribune française et fixa sur elle l'attention des peuples et des souverains. Dans des partis contraires ou des nuances différentes, avec des mérites divers, la monarchie de Juillet peut citer des orateurs tels que Berryer, Montalembert, Lamarque, Mauguin, Cousin, Guizot, Thiers, Garnier-Pagès, Ledru-Rollin, d'autres encore. A côté d'eux, elle montrera aussi des publicistes comme Armand Carrel, Godefroy Cavaignac, Armand Marrast, Edgar Quinet, Louis Blanc, qui ont jeté un si vif éclat sur la presse française.

Cette période n'a pas eu la magnifique aurore de renaissance littéraire et artistique de la Restauration, mais elle en a vu l'éclat atteindre son apogée. Les génies et les talents qui s'étaient révélés avant 1830 ont grandi et se sont pleinement épanouis après 1830. Lamartine, toujours grand poëte, est devenu grand orateur et grand prosateur. Victor Hugo a donné ses plus doux chants (les Feuilles d'automne), a publié Notre-Dame de Paris et a tenu au théâtre les promesses d'Hernani. Alexandre Dumas a étonné, charmé des générations de lecteurs et d'auditeurs par le vif intérêt et le dialogue spirituel de ses drames et de ses romans. Alfred de Vigny a maintenu sa renommée. D'autres écrivains ont paru et conquis une gloire légitime Théophile Gautier, George Sand, Brizeux; Balzac, Soulié, Alfred de Musset, Stendhal, pour ne citer que des maîtres. En dehors de ceux-ci, il faudrait enregistrer une quantité considérable de noms, plus ou moins illustres, qui tiennent une grande place dans l'histoire littéraire et artistique de la France.

Augustin Thierry, Villemain, Guizot, Cousin, ont continué, à des degrés divers, la voie de rénovation historique où les ont suivis Mignet, Thiers, Michelet, Louis Blanc, Edgar Quinet, Henri Martin, etc.

Dans les arts, les noms de Eugène Delacroix, Decamps, Ingres Horace Vernet, Delaroche, Dévérią, Gavarni, Marilhat, Rude, Cortot. David (d'Angers), Barye, Pradier, Visconti, Viollet-Leduc, Lassus, Auber, Hérold, Halévy, etc., ont ajouté à la gloire de nos différentes écoles.

Des génies étrangers, Rossini, Meyerbeer, Bellini, Donizetti, Verdi, sont venus demander à la France la consécration de leur renommée.

Le mouvement, dans les sciences, sans avoir le même éclat devant le public, n'en fut pas moins très-grandiose. C'est sous e règne de Louis-Philippe qu'apparurent beaucoup les principaux travaux de François Arago, Biot, Thénard, Gay-Lussac, Boussingault.

Cuvier achève dans l'étude une vie glorieuse, et qu'il eût mieux valu ne jamais détourner de son but. Après lui et à côté de lui, des savants tels que Geoffroy-Saint-Hilaire, Milne-Edwards, Flourens, Andral, Broussais, Velpeau, Lisfranc, Magendie, etc., font faire aux sciences naturelles et médicales des progrès considérables.

Dans les sciences purement mécaniques, des découvertes de la ¦ plus haute importance se produisent de toutes parts. L'application de la télégraphie électrique, due en grande partie à l'ingénieur Breguet et la construction des chemins de fer, donnent à l'activité générale un essor inconnu jusqu'alors; la rapidité des transports et des communications commence à transformer entièrement les conditions de la vie. Dans toutes les industries une révolution analogue se prépare. L'esprit d'association tend à paraître en France, et la grande industrie tend dès lors à absorber les industries de détail.

Les questions ouvrières, dont on s'émeut comme d'un phénomène inattendu, ne sont qu'une conséquence logique des révolutions produites dans l'industrie; elles ne sont, en effet, qu'une des parties de la grande question industrielle qui, chaque jourira s'éclaircissant.

De l'observation des faits confus, certains esprits spéculatifs essayent de dégager les principes d'une science nouvelle, l'Économie politique.

Dans l'étude de la philosophie, le mouvement est peut-être moins apparent; néanmoins l'étude des sciences naturelles introduit des formes nouvelles.

Dans les industries intellectuelles, c'est-à-dire dans celles qui fournissent les aliments de l'esprit, de graves changements s'accomplissent, les perfectionnements de l'imprimerie et de la papeterie permettent de produire des publications d'un prix très-modique. et mettent la lecture à la portée de tous.

Le Magasin pittoresque et, ensuite, divers recueils fondés dans cette période donnent un essor extraordinaire à la gravure sur bois, qui parvient presque à égaler la gravure sur cuivre ou sur acier.

I es découvertes de Daguerre et Niepce préparent l'invention de la photographie.

C'est aussi de ce temps que date la révolution financière qui a changé les bases du crédit public en France.

Les combinaisons des entrepreneurs de chemins de fer, non toujours fondées sur une rigoureuse probité, ont multiplié les emprunts, les souscriptions et fait pénétrer dans toutes les classes de la population le goût des chances aléatoires et la recherche des aventures pécuniaires. Malheureusemeut cette révolution ne put s'opérer sans produire des troubles graves dans la fortune et dans la moralité de tous. Elle donna lieu à un immense développement de l'agiotage, qui a égalé les plus mauvaises époques en ce genre. Ce n'était encore qu'un commencement.

Cette révolution financière a eu pour effet politique de lier plus étroitement les intérêts directs du plus grand nombre aux intérêts de l'État ou plutôt du gouvernement, et de créer une classe nombreuse de rentiers dont l'influence pèsera de plus en plus sur l'esprit public dans un sens qui ne sera pas toujours celui du patriotisme.

Au total, c'est dans l'ordre des intérêts matériels, dans le développement industriel des sciences exactes qu'il faut placer la caractéristique de la royauté de Juillet; là, encore, elle a suivi une impulsion générale plus qu'elle ne l'a donnée. La création des chemins de fer en France, l'extension de la navigation à vapeur datent de cette époque; mais la France en recevait l'exemple du dehors et, alors même qu'elle avait précédé les autres nations dans la théorie, elle venait après plusieurs dans la pratique ; car si, chez nous, la pensée est hardie, trop souvent l'action est routinière.

En concédant les réformes, bien faciles, qui lui étaient deman

dées, Louis-Philippe cùt assuré le trône à son petit-fils. Mais i voyait que la monarchie constitutionnelle ne pouvait fatalement aboutir qu'à la République. Il n'eut pas le courage de sacrifier l'avenir de la dynastie pour en faire une simple période de transition; il voulut écarter pour toujours la République : il en hâta l'avènement.

C'est un thème banal et facile de prendre texte des établissements et des chutes de gouvernements, depuis 1789, pour accuser la France de mobilité. Qui aura lu avec attention cette partie de notre histoire reconnaitra que la France a voulu persévéramment conserver et développer les principes de la Révolution, proclamės par la grande Constituante de 1789 et défendus contre les monarchies européennes par la glorieuse Convention nationale.

La Constitution de l'an III n'était pas tellement défectueuse qu'il fallût la briser au lieu de l'améliorer. Si l'esprit public, fatiguė d'une lutte incomparable, privé des hommes qui l'avaient soutenue et rendue victorieuse, se livra, par surprise et par affaissement, au pouvoir d'un capitaine ambitieux et coupable, cet esprit ne le suivit pas dans les insatiables conquêtes et ne fit rien pour le défendre au jour de la défaite.

L'opposition libérale de la Restauration revendiqua le maintien des droits acquis; dans cette limite restreinte, elle accomplit du moins sa tâche avec vaillance et succès.

Par malheur, après la victoire, elle s'oublia dans une Capoue de monarchie élective et délaissa l'héritage de ses pères dont il y avait tant de parties à reconquérir.

La République de 1848 essayera de reprendre la tradition et de compléter l'œuvre de 1789. Y réussira-t-elle ?

IN DU TOME CINQUIÈME

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(VRE IV.

ECTION 1.

CHAPITRE I.·

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Monarchie constitutionnelle (1814-1848).
Première Restauration (11 avril 1814, 20 mars 1815,.
Les Bourbons. - - Le comte d'Artois en France.

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Con

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§ IV.

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§ VII.

13 mai.

Premiers actes. - Charges de cour.
militaire

§ VIII. Premier ministère.-L'abbé Louis.
néral Dupont

Maison

13

Le gé

14

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