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tres (1). Un fait bien différent, ajoute le même auteur, c'est que plus de deux cents ans auparavant, vers l'an 1109, saint Hugues, abbé de Cluny, dans une supplique pour ses successeurs, où il leur recommande l'abbaye de filles de Marcigny qu'il avait fondée, leur enjoint de ne point souffrir aucun sujet au-dessous de l'âge de vingtans, faisant de cette injonction un point irrévocable, comme étant appuyée de l'autorité de toute l'Eglise. On ne doit pas non plus, par rapport aux religieuses, omettre un usage qui remonte jusqu'au douzième siècle: on exigeait d'elles qu'elles apprissent la langue latine, qui avait cessé d'être vulgaire; cet usage dura jusqu'au quatorzième siècle, et n'aurait jamais dù finir. >>

§ II. RELIGIEUSES, clôture.

La matière de cet article se rapporte à ces quatre chefs, dont il est parlé sous le mot CLÔTURE: 1° l'obligation des religieuses d'être cloîtrées; 2o le droit des évêques de visiter la clôture des couvents de religieuses, de celles même qui se prétendent exemptes de leur juridiction; 3° les permissions et les causes nécessaires aux religieuses pour sortir de leurs monastères; 4° en quels cas et par quelle autorité les personnes séculières peuvent y entrer.

§ III. RELIGIEUSES, supérieure, temporel.

Les religieuses, avons-nous dit, diffèrent des religieux, en ce qu'elles ne peuvent être gouvernées que par des hommes; cela doit s'entendre pour le spirituel et pour toutes les fonctions qui sont interdites aux femmes. (Voyez FEMMES.) Car pour ce qui regarde la discipline intérieure du cloître, la supérieure y exerce une autorité à peu près semblable à celle qui est accordée, en général, aux supérieurs des religieux. Ce principe est établi sous le mot ABBESSE, où l'on trouve les règlements du concile de Trente, touchant l'élection des abbesses et supérieures des religieuses, les qualités requises pour être élevé à cette charge, et les devoirs et obligations de celles qui y sont parvenues.

Nous remarquons ici que les canons exhortent les évêques et leur font un devoir de veiller sur le temporel des religieuses, ce qui se rapporte à la manière de faire les baux des terres et autres dépendances, à l'emploi des revenus, à l'examen des comptes et à la sùreté pour la conservation des deniers. Saint Charles a donné des règles très-sages sur tous ces articles dans le premier concile de Milan, en 1565, et le quatrième en 1576. (Voyez MONASTÈRE, § IV.)

Nous trouvons dans Durand de Maillane un règlement très-sage que fit, sur ce sujet, un archevêque d'Aix, en 1739, pour les religieuses de son diocèse. L'article 18 de ce règlement porte : « Quoique ce qui regarde l'administration des biens et revenus appartenant aux communautés religieuses, ne puisse point entrer en com

(1) Registre 53 du trésor des Chartres, pièce 190.

paraison avec ce qui concerne la piété, la ferveur et la régularité qui doivent régner dans ces saintes retraites, le soin temporel est cependant un devoir qu'il n'est pas permis de négliger. Les supérieures sont obligées de veiller à ce que les biens de leurs communautés soient régis et ménagés avec une sage et convenable économie, non pour accumuler les richesses vaines et méprisables, mais dans la vue de mettre leurs maisons en état de subsister et de se soutenir. Mais comme des filles renfermées dans un cloître, n'étant point à portée de tout savoir, encore moins de tout faire par elles-mêmes, se trouvent dans la nécessité de s'en rapporter, sur bien des choses, à des personnes étrangères, quelquefois, ou peu intelligentes, ou peu attentives, peut-être même peu fidèles, il est à craindre que le temporel des monastères ne tombe peu à peu dans un grand dérangement. Pour prévenir un pareil inconvénient, nous ordonnons aux supérieures et autres religieuses, qu'il appartiendra, de tenir prêt, tous les ans, un état de tout le temporel de leurs maisons, et un compte exact de toute la recette et de toute la dépense de l'année entière, pour être représentés, examinés et arrêtés par tel député de notre part que nous jugerons à propos de nommer pour cet effet. Défendons, en même temps, à toutes les supérieures, discrètes, conseillères, économes et autres religieuses, de faire aucune dépense considérable, telles que sont, achats de maisons, ou autres fonds, constructions de bâtiment, réparations importantes, et autres dépenses semblables, sans avoir auparavant obtenu notre permission

expresse. >>

Ces dispositions, conformes aux saints canons, doivent être partout observées.

§ IV. RELIGIEUSES, novices, profession.

Les règles générales établies pour le noviciat et la profession religieuse regardent les religieux comme les religieuses; il n'y a à cet égard aucune différence, ainsi qu'on peut le remarquer sous les mots NOVICE, PROFESSION. Mais pour certaines considérations, on a établi des règles particulières touchant la profession religieuse des filles. D'abord, on voit sous le mot RÉCLAMATION le règlement du concile de Trente, qui défend de mettre obstacle à la vocation des religieuses. Autrefois, avant qu'elles fussent toutes réduites en communauté et cloîtrées, l'évêque avait exclusivement le droit de les consacrer et de leur donner le voile, ce qui ne différait pas de la profession qui se fait aujourd'hui avec les solennités prescrites. Un concile de Paris, tenu en 829, réserve expressément à l'évêque le droit de donner le voile aux veuves et aux vierges qui se consacrent à Dieu, et condamne trois abus qui s'étaient glissés de son temps: 1° l'entreprise de quelques prêtres, qui, sans avoir consulté l'évêque, donnaient le voile aux veuves, et consacraient à Dieu les vierges; 2o celle de quelques femmes qui s'imposaient le voile; 3° celle de quelques abbesses et religieuses, qui s'attribuaient cette autorité à

l'égard des veuves et des vierges qui voulaient se retirer du monde. Le concile de Trente a confirmé expressément ce droit aux évêques, en rendant nécessaire l'examen des filles qui veulent entrer en religion. Voici comment parle à ce sujet ce saint concile, conformé ment aux canons Puella; Sicut 20, qu. 1; Puella, 20, qu. 2, etc.: « Le saint concile de Trente, voulant pourvoir à la liberté de la profession des vierges qui doivent être consacrées à Dieu, établit et ordonne qu'une fille qui voudra prendre l'habit ayant plus de douze ans ne le prendra point, et que ni elle ensuite, ni telle autre que ce soit, ne fera point profession, qu'auparavant l'évêque, ou, s'il est absent ou empêché, son vicaire général, ou quelque autre par eux commis et à leurs dépens, n'ait soigneusement examiné la volonté de la fille, si elle n'a point été contrainte ou séduite, et si elle sait bien ce qu'elle fait; et après qu'on aura reconnu son pieux désir et que sa volonté est libre, que du reste elle a les qualités et les conditions requises, conformément à l'ordre et à la règle du monastère, et enfin que la maison lui est propre et convenable, il lui sera permis de faire librement sa profession; et, afin que l'évêque n'en puisse ignorer le temps, la supérieure du monastère sera tenue de l'avertir un mois auparavant, et si elle manque de le faire, elle sera interdite de la fonction de sa charge, aussi longtemps qu'il plaira à l'évêque. » (Session XXV, chap. 17, de Regul.)

Tous les conciles provinciaux se sont conformés à ce règlement.

§ V. RELIGIEUSES, discipline, visite.

Le premier concile de Milan, en 1565, explique avec étendue ce qui regarde la conduite des religieuses, leurs emplois, et ce qui concerne leur gouvernement spirituel (1).

La fréquentation des parloirs de religieuses est expressément défendue, et les évêques doivent y veiller comme à un abus qui blesse l'esprit des règlements touchant la clôture. Le chapitre Monasteria, de Vitâ et honestate cleric., veut qu'on punisse les ecclésiastiques de suspense et les laïques d'excommunication, lorsque, contre la défense de l'évêque, ils continuent leur fréquentation. Cette décrétale a été appliquée aux religieux que la congrégation des cardinaux a déclarés privés ipso facto de voix active et passive, par les visites des religieuses, per accessum ad monasteria, sans permission de qui de droit (2). Les proches parents ne sont point compris dans ces défenses.

Le règlement de l'archevêque d'Aix, dont nous avons cité un article dans le paragraphe II ci-dessus, s'exprime, à l'occasion du parloir, dans des termes qui méritent d'avoir place ici; l'article 9 est ainsi conçu:

(1) Mémoires du Clergé, tom. iv, pag. 1796 jusqu'à 1828. (2) Barbosa, De Jure ecclesiastico, cap. 44, n. 153.

« C'est dans la retraite et le silence que l'âme s'élève à Dieu. Une religieuse, pour peu qu'elle ait de zèle pour sa perfection, et qu'elle soit attentive sur elle-même, s'aperçoit aisément que lorsqu'elle s'est livrée à quelque dissipation inutile, elle ne retourne aux saints exercices de son état qu'avec une conscience agitée et un cœur desséché. Le parloir est souvent une occasion à cette dissipation si funeste. Une religieuse y perd quelquefois dans l'espace de quelques heures, tout cet esprit intérieur qui est si nécessaire à son état, et qu'elle avait acquis par le travail de plusieurs années. C'est pourquoi nous exhortons, au nom du Seigneur toute religieuse, d'éviter les parloirs autant qu'il leur sera possible, et de n'y demeurer qu'autant que la nécessité, la charité où une bienséance indispensable le demandera. >>

Barbosa établit (1) que les religieuses ne doivent admettre des pensionnaires dans leurs monastères qu'avec la permission de la sacrée congrégation, et sous certaines conditions: comme, que la réception de ces pensionnaires se fasse capitulairement, ou que du moins on ait égard à l'opposition des religieuses qui ne le voudraient pas; que le monastère soit dans l'usage d'en recevoir et qu'elles y soient gardées, actu retineat; qu'il y ait un quartier affecté aux pensionnaires pour le dortoir et le réfectoire où les professes et les novices ne soient point mêlées; qu'elles soient au-dessus de sept ans, et au-dessous de vingt-cinq; qu'elles n'excèdent jamais le nombre permis; que les pensionnaires entrent seules, vêtues modestement, et qu'étant une fois entrées et admises dans le monastère, elles observent la clôture, et qu'elles y paient d'avance les frais de leur entretien et de leur éducation, et qu'enfin étant une fois sorties du monastère, elles n'y rentrent plus sans la permission des supérieurs. Barbosa s'étend ensuite sur la discipline intérieure et les mœurs des religieuses, qui doivent faire l'objet principal des visites de l'évêque.

§ VI. RELIGIEUSES, translation.

Nous n'entendons point parler ici de la sortie des religieuses qui doivent rentrer dans leur monastère; cette matière est traitée sous le mot CLÔTURE. Il ne s'agit que de la translation des religieuses d'un monastère qui, soit pour cause de pauvreté, soit pour d'autres raisons, ne doit pas subsister. Il est parlé sous le mot TRANSLATION, de la translation personnelle d'une religieuse de son couvent dans un

autre.

Nous rappelons sous le mot CLÔTURE le décret du concile de Trente, session XXV, chapitre 5, qui ordonne la translation des monastères de filles situés à la campagne ou hors des murs des villes, selon que l'évêque le jugera convenable. Le concile de Milan, en 1565, fit un autre règlement par lequel il est dit que les monas

(1) De jure ecclesiastico, cap. 44.

tères pauvres où il n'y a pas suffisamment de revenus pour douze religieuses doivent être supprimés, et les religieuses transférées avec leurs revenus dans d'autres plus anciens (1).

On a décidé que les religieuses peuvent être transférées de leurs couvents dans d'autres, par leur évêque, quand elles croient ne pouvoir pas faire leur salut dans le couvent où elles ont fait profession, et ce couvent est alors obligé de leur payer la pension qui est ordonnée par l'évêque (2).

§ VII. RELIGIEUSES, confesseurs.

Les confesseurs des religieuses sont choisis par les évêques, ou par les supérieurs réguliers, selon qu'elles sont ou ne sont pas exemptes; mais tous doivent recevoir la commission et l'approbation de l'évêque diocésain. Voici ce que dit à cet égard le concile de Trente, session XXV, ch. 10, de Regularibus: « Les évêques et autres supérieurs des maisons religieuses auront un soin particulier que dans la constitution desdites religieuses elles soient averties de se confesser et de recevoir la très-sainte eucharistie au moins tous les mois, afin que, munies de cette sauvegarde salutaire, elles puissent surmonter courageusement toutes les attaques du démon.

<< Outre le confesseur ordinaire, l'évêque ou les autres supérieurs en présenteront, deux ou trois fois l'année, un autre extraordinaire pour entendre les confessions de toutes les religieuses.

« Quant à ce qui est de garder le très-saint sacrement dans le chœur du dedans, en l'enclos du monastère, au lieu de le mettre dans l'église publique du dehors, le saint concile le défend, nonobstant quelque indult ou privilége que ce soit. »

Aucun prêtre ne peut confesser des religieuses sans un pouvoir spécial de l'évêque ou du Souverain Pontife. Le curé même n'a pas droit, en vertu de son titre, de confesser les personnes du sexe consacrées à Dieu par des vœux solennels; mais leurs confesseurs, lors même qu'elles seraient exemptes de la juridiction de l'ordinaire, ont besoin de l'approbation de l'évêque, ainsi que l'ont réglé les papes Grégoire XIV et Benoît XIII. Les évêques et les prélats des monastères sont tenus de donner aux religieuses qui leur sont soumises, deux ou trois fois l'année, un confesseur extraordinaire, comme l'ont spécialement établi Innocent XII, Benoît XIII et Benoît XIV. Ce dernier pape, dans sa bulle Pastoralis, qui est du 5 août 1748, ordonne à toute religieuse de se présenter au confesseur extraordinaire, lors même qu'elle ne voudrait pas se confesser à lui. De plus, il enjoint de donner un confesseur particulier à toute religieuse qui le demande à l'article de la mort. Enfin, il veut que, si une religieuse refuse de s'adresser au confesseur ordinaire, on en députe un autre pour entendre sa confession, pro certis vicibus; et il

(1) Mémoires du Clergé, tom. iv, pag. 1799.

2) Id., tom. vi, pag. 635.

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