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On fe plaint, comme d'un des plus pernicieux abus, que les conciles ne se tiennent plus deux fcis par an felon les canons, & on ordonne qu'ils le tiendront au moins une fois. Les Evêques doivent imiter en tout les exemples des faints Peres, & conferver l'ancien usage d'avoir avec eux des clercs qui ne les quittent jamais ni le jour ni la nuit, afin qu'ils aient toujours des témoins de la pureté de leur conduite. Le concile fe plaint que les Evêques s'abfentent fouvent de leurs églifes. Ils doivent dire les heures canoniales avec leurs clercs, leur faire tous les jours des conférences fur l'Ecriture. fainte, & manger avec eux. Les Evêques veilleront fur l'exécution de l'Ordonnance de l'Empereur touchant l'établissement des écoles. L'article le plus important du troifiéme livre, regarde les entreprifes des deux Puiffances.Depuis long-temps, dit le concile, les Princes s'inge rent dans les affaires eccléfiaftiques; & les Evêques, par ignorance ou par cupidité, s'occupent plus qu'ils ne doivent des affaires temporelles.

Concile de l'an

Sur la fin de l'an 850. on tint un concile à Pavie, où l'on fit vingt-cinq canons dont Pavic voici les plus remarquables. L'Evêque aura 850. toujours dans fa chambre des clercs vertueux, qui le voient continuellement prier, veiller, étudier l'Ecriture - fainte; qui foient en tout les témoins & les imitateurs de fa bonne conduite. Sa table fera frugale, on y lira l'Ecriture - fainte, & on s'y entretiendra de chofes édifiantes. L'Evêque n'aura ni habits précieux, ni ce qui fent le fafte; il fera fim ple & vrai dans fes difcours. Il méditera continuellement l'Ecriture-fainte, afin qu'il foit en état d'inftruire folidement le Clergé & le, peuple. Les prêtres de la ville & de la campa

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Canons du

gne veilleront fur les pénitens, pour voir s'ils
obfervent ce qui leur eft prefcrit, s'ils font des
aumônes ou d'autres bonnes œuvres, & quelle
eft leur contrition, afin d'abréger ou de prolon
ger le temps de leur pénitence. Ceux qui font
en pénitence publique, ne doivent fe mêler d'au
cune affaire, ni même rendre de vifites. Ils
pourront prendre foin de leurs affaires domefti
ques, à moins, comme il arrive fouvent, qu'ils
-ne foient tellement touchés de l'énormité de
leurs péchés, qu'ils ne puiffent s'y appliquer.
Ce font les paroles du concile.

Le huitiéme Concile général fit vingt-fept VIIIe Conci--canons, la plupart touchant l'affaire de Pho le général, tius. On y renouvella la dérenfe d'ordonner -des néophites, c'eft-à-dire, d'élever tout d'un -coup un laique à l'Epifcopat, quand même on le feroit paffer par tous les dégrés du Cler -gé, à moins qu'il ne foit conftant, qu'il y eft entré par un pur mouvement de piété, fans auscune vue d'ambition ou d'intérêt. En ce cas il doit être un an lecteur, deux ans foudiacre, trois ans diacre, quatre ans prêtre. Ce font dix ans, avant qu'il puiffe être ordonné Evêque. Il eft défendu d'ordonner des Evêques par l'au torité & le commandement du Prince, fous peine de dépofition. Il est également défendu aux laiques puiffans, d'intervenir à l'élection des Evêques, s'ils n'y font invités par l'Eglife; ou de s'oppofer à l'élection canonique, fous peine d'anatheme. Ces canons font d'autant

plus remarquables, qu'on les publicit en pré fence de l'Empereur & du Sénat. Les Evêques naviliront point leur dignité, en faifant aucune baffeffe à l'égard des Grandstils doivent con ferver l'autorité néceffaire pour les reprendre quand ils y font obligés.

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Nous voions dans plufieurs actes du neu- Forme des viéme fiécle, quelle étoit alors la forme de l'é- élections. lection des Evêques. Auffi-tôt qu'un Evêque étoit mort, l'églife vacante envoioit des députés au Métropolitain, qui envoioit un Evêque de la province pour y faire la fonction de vifiteur. Cet Evêque vifiteur fe rendoit à l'église vacante, & exhortoit le peuple à élire fans paffion & d'un commun confentement, celui qu'ils jugeroient le plus digne, le plus fçavant, le plus vertueux & le plus capable de gouverner. L'élection ne devoit pas être faite feulement par le Clergé de la ville, mais auffi par les curés de la campagne, & par les députés des monafteres. Les citoiens devoient auffi y concourir; car c'étoit une maxime, que tous devoient élire celui à qui tous devoient obéir. Le Métropolitain écrivoit en même-temps au Clergé & au peuple de l'églife vacante, pour leur marquer de faire des jeunes & des prieres, & de s'affembler pour l'élection en présence de l'Evêque vifiteur. Celui qu'on choififfoit, devoit être prêtre ou diacre de la même églife. Le décret d'élection étoit en forme de lettre adreffée au Métropolitain & à fes fuffragans, de la part du Clergé & du peuple de l'églife vacante.Il devoit être écrit dans un parchemin,avec les foulcriptions du Clergé, des députés des monafteres, des principaux d'entre les curés de la campagne & du peuple. Si l'élu n'étoit que diacre, on l'ordonnoit prêtre dans le temps convenable. L'Evêque élu étoit examiné par tous les Evêques de la Province, & on lui faifoit promettre d'obferver exactement les canons & les ordonnances des conciles.

En finiffant cet article, je remarquerai que c'eft proprement dans le neuviéme fiècle, que

la fête de tous les Saints fut célébrée dans tou te l'Eglife d'Occident. L'an 837. le Pape Grégoire IV. donna à cette fête toute l'étendue qu'elle a aujourd'hui, en dédiant une cha pelle à Rome en l'honneur du Sauveur, de la fainte Vierge, des faints Apôtres, de tous les faints Martyrs & de tous les juftes de la terre. Cette fête bien-tôt après paffa en France & en Allemagne. Louis-le-Débonnaire, à la priere du Pape & du confentement des Evêques, publia un Edit, qui en ordonnoit la célébration dans tous fes Etats, & qui la fixoit au premier Novembre.

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Maux de l'Eglifed'Occident.

Normands.

ARTICLE X.

Réflexions fur l'état de l'Eglife pendant

le neuvième Siècle.

I.

N Angleterre les Chrétiens tomberent tendant les

E dan

envola

foixante premieres années du neuviéme fiécle. Dieu voulant les réveiller de leur affoupiffement, & les punir de leurs défordres, les Normands ou Barbares du Nord, qui les Ravages des accablerent de toutes fortes de maux temporels. Les mêmes iniquités, qui attirerent fur l'Angleterre les effets terribles de la colere de Dieu, furent auffi caufe des ravages que ces mêmes Barbares firent dans l'Empire François Ces exécuteurs des divines vengeances, pottoient par-tout la terreur & la défolation. On

ne

the concevoit pas pourquoi des infidéles, qui ne connoiffoient pas Dieu, avoient toujours de fi grands avantages dans les guerres qu'ils faifoient aux Chrétiens. Mais c'étoit Dieu qui les avoit revêtus de fa puiffance pour châtier fon peuple, & qui proportionnoit avec une fageffe infinie le remède au mal, & le châtiment a l'iniquité. Le grand mal des Chrétiens étoit leur attachement aux biens temporels. L'avarice des laïques avoit gagné dans le Clergé & dans les monaftéres. Bien loin de regarder les richesses comme un obftacle à la piété, & de s'estimer heureux d'en être privé, on ne travailloit qu'à en acquérir; & on perdoit infenfiblement de vûe la fin & le but du chriftianifme, qui confifte à dégager le cœur de tout autre amour que de celui des biens invifibles & éternels. Dieu envoia des barbares, pour dépouiller les Chrétiens de ces richeffes dont ils abufoient, & pour les rappeller par ce châtiment à l'efprit primitif de leur Religion.

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Les Normands n'entreprirent point de pervertir les Chrétiens, & d'enlever leur foi. Ils n'en voulurent qu'à leurs biens temporels, & travaillérent principalement à s'enrichir de leurs dépouilles. Les tréfors des églifes & des monaftéres, furent l'appas qui attira ces barbares; enforte que par un jufte jugement de Dieu ce qui avoit été l'occafion de l'affoibliffement des Chrétiens, devint celle de leur punition. Quelle leçon Dieu ne donnoit-il pas à fon peuple par cet événement ! Il lui apprenoit d'une maniére également fenfible & frappante, ne pas eftimer des biens qu'il faifoit paffer à des barbares, à réferver les larmes que ces afflictions temporelles leur faifoient répandre, pour déplorer les maux intérieurs & fpiTome III.

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