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quelle profondeur dans ses manoeuvres, puisque notre grand général a été obligé de réunir toute son armée pour le reconnaître et, malgré cela, l'adresse de l'ennemi à cacher ses projets l'a empêché de deviner le point sur lequel les Français devaient s'avancer pour l'attaquer; il n'a pas même pu réussir à mettre sa cavalerie en contact avec la leur. Ainsi donc l'Angleterre a été dégarnie de toutes ses troupes, et notamment de sa cavalerie, dont il reste à peine quatre régimens dans toute la Grande-Bretagne et cependant les mouvemens de l'ennemi dans l'emploi de la sienne étaient si rapides, que notre infanterie a été exposée à une charge sur trois des faces de l'un de ses carrés.

» Lord Wellington mérite cependant qu'on lui sache gré d'avoir évité une bataille; car la plus belle victoire n'aurait pu compenser la perte de 6 à 7000 hommes qu'il aurait éprouvée pour la remporter: tel est le désavantage de cette lutte insensée, au soutien de laquelle notre population, le soin de notre prospérité intérieure et la liberté de notre constitution nous rendent peu propres. Les militaires les plus distingués ont constamment prédit ce qui est arrivé. » Ces prédictions, ces alarmes, ces plaintes, ne sont que trop justifiées par le tableau suivant ; c'est un officier de l'armée anglaise qui le trace dans une lettre de Rovina,

d'une date récente.

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Presque toute la route depuis Lisbonne jusqu'ici offre une scène de misère et de dépopulation. Le dernier état des hommes hors d'état de combattre était de 17,000 et de 700 officiers, nombre effrayant. Le 1er régiment a la moitié de son monde à l'hôpital. On s'attend à une attaque contre le pont de bateaux que nous avons eu tant de peine à construire à Villa-Felha, sur le Tage. Si ce pont était détruit, nous nous trouverions coupés de nos immenses magasins d'Abrantès. Nous avons reçu hier l'ordre d'envoyer nos malades sur les derrières, et de prendre avec nous pour trois jours de biscuit et de riz, afin d'être prêts à marcher au premier moment. Notre fourrage consiste en joncs et en paille, qu'il faut aller quelquefois chercher à deux lieues. "

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Voici les dernières relations officielles publiées par le Moniteur sur la suite des événemens de cette guerre.

Au midi, la petite colonne que commande le général Castanos, du côté d'Albuquerque, avait eru pouvoir profiter de l'éloignement de l'armée de Portugal, et se porter du côté de Montijo. Le général Girard y envoya le duc

d'Aremberg, qui nettoya avec son régiment les deux rives du Tage, culbuta tout ce qu'il rencontra, et poursuivit Castanos jusqu'aux frontières de Portugal.

Balleisteros, chassé du comté de Niebla, a débarqué à Algésiras et s'est réuni aux brigands des montagnes de Ronda. Le colonel Rignoux partit de Ronda le 12 septembre avec le 4° régiment du grand-duché de Varsovie; il surprit dans les montagnes 5 à 600 hommes qui s'y étaient cachés, et les fit passer par les armes : après différentes marches, il parvint à découvrir des amas considérables d'armes et de munitions dans différens endroits, entre autres à Montejaque et Ubrique; tout a été détruit, les rassemblemens ont été dispersés et ont eu plus de 1000 hommes tués. Notre perte est de 10 tués et 25 blessés.

Le colonel Combelle, avec sept compagnies du 94°, s'est porté sur Alcala de los Gonzales, que l'ennemi avait occupé et fortifié ; il attaqua un bataillon qui défendait la ville, le culbuta et le dispersa; au jour, le mineur fut attaché à une des tours du château, le commandant se rendit à discrétion avec 300 hommes. Le lendemain, Balleisteros parut avec ses bandes : il n'était plus tems; il fut obligé de se retirer.

Le colonel Rignoux profitant de la marche de Balleisteros sur Alcala, se porta sur Ximena avec 1200 hommes; mais déjà Balleisteros était de retour : les insurgés, quoiqu'au nombre de cinq contre un, ne purent entamer notre colonne, et furent constamment repoussés.

Notre perte se monte à 12 hommes tués, 25 blessés et 25 faits prisonniers, parmi lesquels le colonel du 4° régiment de la Vistule. Le 28, une brigade avait marché sur Ximena, et le siége de Tarifa était ordonné.

Au centre, le général Darmagnac s'est établi à Cuença où il est en communication avec l'armée d'Arragon qui poursuit ses opérations. Le 12, le bruit courait à Madrid que le maréchal comte Suchet était entré à Valence. Voici jusqu'à ce moment les détails officiels que contient la correspondance avec le prince major-général.

Après la défaite d'Obispo le 30 septembre, je fus informé que les généraux O'Donell, Villa-Campa et SanJuan réunissaient 8000 hommes d'infanterie et 1500 chevaux à la chartreuse de Porta-Coeli je partis dans la nuit du 1er octobre avec trois régimens de la division Harispe, la brigade Robert et 700 chevaux. L'avant-garde ennemie fut rencontrée à Betera; elle opposa d'abord quelque résis

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tance, mais elle fut bientôt culbutée par les hussards du 4* et quelques voltigeurs du 7° de ligne, quoiqu'elle fût soutenue par 300 dragons.

A une heure après-midi, nous reconnûmes le camp ennemi à la Puebla de Benaguacil: ses troupes, formées sur deux lignes, annonçaient l'intention de se défendre; les généraux Harispe et Paris, à la tête du 7° de ligne, formé en colonne d'attaque par bataillons, chargerent l'ennemi, l'enfoncèrent, et le mirent dans une déroute complète. La difficulté du terrain, coupé de canaux, nous empêcha de ramasser un grand nombre de prisonniers, et donna à O'Donell le tems de se renforcer sur les hauteurs en arrière du village de Benaguacil; j'ordonnai au général Harispe de marcher à lui, tandis que le général Paris, sur la gauche, chassait des partis ennemis sur Ribaroja : à peine le général Harispe arrivait à Benaguacil, que l'ennemi opérait en toute hâte sa retraite. Mille chevaux de dragons de Numance, de la Maestranza et de Valence parurent alors dans la plaine. Le colonel Christophe, commandant le 4° régiment de hussards, forma deux de ses escadrons en colonne et un en bataille, et les chargea avec impétuosité : cette masse fut renversée et mise en fuite; plus de 100 hommes furent tués, 85 pris avec deux officiers et 100 chevaux; une partie de ces gens a fui sur Gistalgar, l'autre a passé précipitamment le Guadalaviar à Villa-Marchante. Nous avons eu dans cette affaire une trentaine de blessés et 25 chevaux tués ou blessés, qui ont été sur-le-champ remplacés. Le général Paris et le major Durand, du 7°, ont eu leurs chevaux tués sous eux. Le chef d'escadron Lemperrierre, du 4° de hussards, le lieutenant Schmitz, du même régiment, ainsi que le capitaine de voltigeurs du 7°, Gaury, se sont distingués par leur intrépidité.

Après avoir chassé l'ennemi au-delà de la Guadalaviar, je me suis assuré de sa dispersion complète : je vais faire pousser avec célérité les travaux du siége de Murviedro.

Black est resté dans Valence tranquille spectateur des deux combats dans lesquels les trois divisions de son armée ont été défaites.

Des paysans avaient tenté de se rassembler sur Onda et Lucena; le chef de bataillon Meneau, du 121o, a tué leur chef avec une cinquantaine de ses gens, et a dispersé les autres ces villages sont occupés et sont rentrés dans l'ordre..

La garnison du fort de Péniscola a tenté une sortie le 1o de ce mois, et a attaqué avec une pièce de canon notre avant-poste de la Venta; le chef de bataillon Ronfor, du 114°, s'est de suite porté au secours du poste; l'ennemi a été repoussé avec perte, et a laissé entre nos mains un officier et huit soldats prisonniers.

Les travaux de San-Carlos de la Rapita avancent rapidement, et seront sous peu de jours dans un état de défense respectable.

De bonnes nouvelles de Batavia sont venues en Hollande comme un à-propos de circonstances pendant le voyage de LL. MM. dans ce pays; en voici les détails officiels :

« Le général Daendels, gouverneur-général de l'île dé Java, est arrivé en France sur la corvette la Sapho. Il a apporté les nouvelles les plus satisfaisantes de cette colonie.

La nouvelle de la réunion avait été apportée par le brick le Claudius Civilis, arrivé en février, et avait été reçue avec plaisir.

"Le général Jansen, nommé par l'Empereur gouverneur général, était arrivé à Batavia le 25 avril, avec trois frégates. Le 16 mai, le général Daendels lui avait remis les pouvoirs en présence d'une assemblée du conseil suprême des Indes. Le 20, le général Jansen avait reçu les autorités constituées, qui avaient prêté serment entre ses mains. En juin, il avait reçu le serment des rois et princes du pays, qui avaient témoigné la plus grande joie de la nouvelle situation de la colonie.

Le 16 mai, le général Daendels avait, par une procla mation, notifié sa démission et a fait reconnaître son suc

cesseur.

» Un arrêté du général Jansen, en date du 4 juin, rapporte un arrêté du gouverneur antérieur, qui défendait aux habitans d'avoir dans leurs maisons plus de deux vases remplis d'eau purifiée, avec ordre de reprendre la même précaution si la ville était déclarée en état de siége. Il paraissait que les craintes d'un débarquement d'ennemis étaient éloignées.

» L'armée était en bon état, et toutes les mesures étaient prises pour la défense de l'île. »

De retour à Amsterdam, où l'Empereur a rendu un grand nombre de décrets qui organisent, en Hollande, l'instruction publique, le budjet des recettes et des dépenses pour 1810, les maisons de détention, les dépôts de mendicité, la liquidation générale, les pensions, le service de

la garde nationale, le budjet annuel des recettes et des dépenses, les manufactures impériales, étc. LL. MM. ont reçu les hommages des habitans de cette troisième ville de l'Empire, au milieu d'une réunion brillante formée pour une très-belle fête. Elles ont daigné/accueillir avec bonté l'expression des sentimens que leurs bienfaits ont gravés en caractères ineffaçables dans les cœurs dévoués et fidèles du sage et prévoyant Hollandais qui, cette fois, a perdu sa gravité accoutumée, son flegme imperturbable, et a prouvé que chez les nations les plus graves il est des sentimens assez vifs pour produire l'enthousiasme, et pour donner à ces nations une physionomie toute nouvelle, une attitude différente, et des moyens d'expression nouveaux. D'Amsterdam, LL. MM. ont été à Leyde, à La Haye, à Rotterdam, où elles ont trouvé dans le même peuple les mêmes témoignages de reconnaissance et d'attachement. Dans ces visites multipliées, où l'Empereur trouve naturellement quelques obstacles locaux à la rapidité ordinaire de sa marche; malgré quelques contrariétés de tems attachées à la saison et au climat, l'Empereur a tout vu, tout inspecté, et porté sur toutes les parties de \services ce coup-d'œil qui est lui seul une amélioration, et qui en enfante d'innombrables. Il a partout accueilli, entretenu les fonctionnaires avec cet intérêt paternel qui multiplie les questions, et rend les réponses instructives en les encourageant par la bienveillance. De son côté, l'Impératrice a partout reçu et daigné entretenir les dames des villes admises à l'honneur de lui être présentées, heureuse d'avoir à exercer, en quelque sorte, la mission digne d'elle, d'annoncer à ses peuples les bienfaits de son époux, de les entretenir de son amour pour eux, et de recevoir à-la-fois et l'expression de leurs vœux, et celle de leur reconnaissance. Les villes des bords du Rhin, de Dusseldorf à Mayence, font des préparatifs pour recevoir LL. MM. dont rien d'officiel n'annonce positivement l'itinéraire pour leur retour à Paris. L'Empereur trouvera dans une activité complète tous les travaux d'utilité ou de magnificence qu'il a ordonnés. Les vastes conduits d'eau ouverts dans plusieurs quartiers sont presqu'achevés, et leur service est assuré ; le marché des Augustins va être ouvert; celui du Temple l'est déjà; celui de Saint-Martin occupe ses construc teurs; l'intérieur du Louvre avance; la galerie nouvelle sur le Carrousel est achevée. Le magnifique pont d'Jéna est terminé; on y passera dans les premiers jours de novem

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