pas pris au hasard, comme on le dit un peu trop son→ vent, je puis assurer que j'aurais facilement trouvé au moins autant de morceaux à ajouter aux premiers. Je n'ai point dissimulé les défauts qui m'y ont frappé. J'en pourrais relever quelques autres si j'entrais dans plus de détails; mais je les crois de nature à disparaître facilement dans un second travail; il me semble que tous les amis des vers doivent désirer comme moi que M. Chaussard s'en donne la peine, et que cela seul autorise à lui en présager le succès. GINGUENÉ. L'AMOUR MATERNEL, poëme en quatre chants; par Mme B*****. - Un vol. in-18, grand raisin. - Prix, 1 fr. 50 c., et 1 fr. 80 c. franc de port. A Paris, chez Michaud frères, imprimeurs-libraires, rue des Bons-Enfans, no 34. AUTREFOIS, lorsqu'un auteur mettait au jour un ouvrage, il était rare qu'il ne le fît pas précéder d'un bout de préface ou d'avertissement, dans lequel il ne manquait jamais de se jeter aux pieds de ses lecteurs, et de réclamer toute leur indulgence. Les choses ont bien changé depuis ce tems-là ! Les préfaces sont toujours à la mode; mais le ton en est fort différent. Ce sont quelquefois de longues dissertations dans lesquelles un auteur, enflé d'amour propre, vous entretient avec une sorte de fierté de son talent et de sa personne : souvent aussi ce sont de violentes diatribes dirigées contre tels ou tels censeurs. Les femmes elles-mêmes, à qui la douceur et la modestie conviennent si bien, ne craignent pas, en de certaines occasions, de prendre de pareils airs, et l'on oubliera difficilement la conduite que tient assez fréquemment une dame fort connue, de beaucoup d'esprit, mais qui ne saurait vivre un instant sans avoir quelque chose à démêler avec ses critiques. Dernièrement encore, à propos d'une compilation médiocre, et qu'on ne lui pardonnera jamais, ne l'a-t-on pas vue chercher querelle à des littérateurs d'un mérite distingué, aux avis desquels elle ferait très-bien de se mon trer docile, et dont elle devrait sur-tout respecter l'opinion? De semblables reproches s'adresseront-ils un jour à Mme B*****? C'est ce que je ne puis prévoir. Elle se présente dans la carrière avec beaucoup de défiance et de candeur; elle prétend bien moins à des éloges qu'à des encouragemens et à des conseils. Tant de modestie est sans doute très-sincère, et je ne pense pas que je doive craindre de m'exposer à son ressentiment, en m'expliquant avec franchise sur le poëme qu'elle offre au public. Je la prierai cependant de ne point s'effrayer. Je ne viens pas avec l'intention de censurer amèrement son ouvrage : je sais les égards que l'on doit aux dames, et personne ne m'accusera, dans cette circonstance, d'y avoir manqué. Tout le monde connaît le poëme de M. Millevoye sur l'amour maternel. Mme B***** nous assure qu'elle ne le connaissait pas encore quand elle a commencé le sien: peut-être ne dit-elle pas ici la vérité. Je crois, au contraire, qu'elle le connaissait très-bien, qu'elle l'avait lu et relu; mais comme les productions de M. Millevoye ne sont pas marquées du sceau de la perfection, elle a pensé qu'elle pouvait, sans inconvénient, s'essayer sur un sujet déjà traité par lui. Malheureusement pour Mme B*****, elle est restée fort au-dessous de M. Millevoye; son petit poëme présente peu d'invention, peu d'intérêt; mais des détails gracieux, des sentimens doux et honnêtes qui pourraient quelquefois être exprimés d'une manière moins faible et moins commune. Après une courte invocation à la tendresse maternelle, Mme B***** entre en matière par la peinture des agitations qu'éprouve une jeune épouse qui attend vainement le bonheur d'être mère. Ce qui ajoute encore aux tourmens de cette jeune épouse, c'est l'indifférence et la froideur de son mari. Autrefois, orgueilleux du bonheur de lui plaire, En elle il ne voit plus cette épouse féconde En comptant tristement des jours sans avenir. Il faut avouer que voilà un époux bien peu raisonnable, et qui se hâte furieusement de perdre l'espérance d'avoir des enfans. Un autre, à sa place, examinerait que sa femme a tout au plus dix-sept ans, que ce qui n'arrive pas à la première ni à la seconde année de mariage, peut se présenter à la troisième, et il n'en serait que plus vif et plus empressé auprès de l'objet que son cœur a choisi; mais non, l'époux de Phrosine s'attriste et se décourage : Mm* B***** và même jusqu'à lui reprocher de dormir en paix à côté de sa femme. Le reproche est sanglant, il faut en convenir. Est-il bien' fondé ? c'est ce que je n'accorderai pas à Mme B*****, puisqu'à la fin Phrosine devient enceinte, et que quelques pages plus loin, elle met au monde une fille qui reçoit en naissant le nom de Zélis. Cet heureux évènement ramène au milieu des deux époux la joie et les plaisirs, et termine le premier chant du poëme. Dans le second chant, l'auteur plaide en faveur de l'hymen. Ce n'est point un joug dur et pesant, comme se le figurent quelques libertins: c'est une chaîne aimable et fortunée, dans laquelle les cœurs honnêtes et sensibles peuvent goûter des douceurs infinies. Mme B***** représente ensuite Phrosine occupée entièrement de l'enfance de sa fille, et lui prodiguant tous les soins d'une tendre mère. Dans le troisième chant, Zelis a atteint sa quinzièmė année. Instruite à toutes les vertus, on les lui voit pratiquer sous les yeux de Phrosine. Dans le réduit abscur où le pauvre honteux Jette un triste regard sur ces murs dépouillés, Et confuse se presse à côté de sa mère ; Cependant elle avance, et son œil suppliant, Semble implorer un don, en offrant un présent. Enfin Zélis fait sa première communion, et dans le quatrième chant sa mère l'amène à Paris, avec le projet de la marier. A son arrivée dans la grande capitale, Zėlis tombe malade. Phrosine tremble pour les jours de sa fille ; mais Tant d'amour et de soins auront leur récompense, La crainte sans retour le cède à l'espérance, Le délire a cessé, la fièvre a disparu, Sur ce livide front les lis ont reparu ; Et déjà dans les bras de sa mère ravie Les cieux se sont ouverts, un bonheur sans mélange, Pour célébrer l'heureux rétablissement de sa fille, la tendre Phrosine apprête une fête brillante. Le jour fixé arrive, Zélis voudrait pouvoir éviter tous les yeux; mais comment parvenir à s'y soustraire ? Une aimable et bruyante jeunesse En ce lieu réunie, autour d'elle s'empresse; Charles est le nom de cet aimable jeune homme. Il est prudent, sage, modeste; il a su se garantir des écueils que le monde présente à chaque pas; il est de plus possesseur d'un héritage immense: son mariage avec Zélis est aussitôt arrêté. Le jeune couple est con ́duif à l'autel; il y prononce le serment de toujours s'aimer, et bientôt après toute la famille abandonne On revient sous le toit antique et révéré Cependant, au milieu de toutes ces jouissanees, l'im- Conseils d'un sage littérateur à un jeune auteur, ou Lettre de M. D. à M. R. C'EST maintenant, Alphonse, que le monde s'ouvre pour vous; votre vie presqu'entière vous appartient encore. Mon âge, et l'intérêt que je dois prendre au sort d'un peyeu, me portent à vous faire part de mes observations, Il est vrai que la raison pourrait suppléer à l'expérience; mais ce n'est qu'en faisant un choix dans les conséquences qui résultent des réflexions des autres, ce qui suppose toujours qu'une expérience quelconque est indispensable et que pour voir les choses telles qu'elles sont, il faut les avoir observées long-tems. Voyez-les donc par mes yeux, si vous voulez les considérer sous un aspect qui vous soit utile. Pour arriver au but, il faut marcher, dès les premiers pas, dans des voies sûres. Le terme que nous nous proposons s'éloigne assez sans que nos erreurs nous en dé→ journent, et le tems, ou le courage nous manquent plutôt que vous ne croyez peut-être. |