MERCURE DE FRANCE. EUPHROSINE. NON, n'espérez pas me calmer : Un trop juste courroux commence à m'enflammer. Des célestes palais l'aurore se dévoile: Nous verrons, nous verrons, si sa fidèle étoile Etincelle sans nous d'un éclat si brillant. AGLAE. Ne troublons point le mouvement des sphères. THALIE. Notre courroux retarde trop le jour, Les coursiers du soleil attendent son retour, Impatiens de franchir les barrières : Pigeons amoureux, frein de rose, Conque marine, il faut... EUPHROSINE. Ne vous pressez pas tant. Quoi toujours avec complaisance A ses travers nous prêterons les mains? Que nous devons le jour au maître des humains. AGLAÉ. Ma sœur, vous a-t-on fait quelque nouvel outrage? EUPHROSINE. Ecoutez et voyez si je me fâche en vain. La froide pluie entr'ouvrait le nuage. Dans ce moment il s'égara fort loin. Enfin De Chypre il regagna la cour. Il était si changé ! ses flèches et ses ailes, Il confondait tous ses accens, Et soudain d'une larme une autre était suivie. Dans mes deux mains je prends ses mains cruelles, Je le flatte, je lui souris, A peine est-il remis qu'il demande ses armes. Il me lance un trait vers le flanc. Je fuis. Il me poursuit. Cependant je m'échappe, Que fit Vénus dans cet instant? Ah! pensez que pour nous il n'a pas plus d'égard. EUPHROSINE. Il peut vous avoir fait injure, AGLAÉ. Ecoutez-moi fuyant les rayons du soleil, Et le silence des forêts, Auparavant une onde pure, A ma bouche altérée avait rendu le frais. Le doux murmure des ruisseaux, Le bruissement du feuillage, Le souffle du zéphir jouant sur mon visage, L'Amour n'était pas loin. Il me voit, et sans peine Et sut tout conduire si bien Qu'il partit de ces lieux et je n'entendis rien. Entre l'effroi, le sommeil, la douleur. Pour l'auteur d'un si méchant tour. Combien alors je brûlai de colère ! Je lui donnai cent noms aimables; Mais vous savez qu'il est des cœurs impitoyables. Que vous dirai-je, enfin ! Hébé vint dans ces lieux Et brisa mes liens, grâce à la destinée, Car sans son zèle officieux Je serais encore enchaînée. ་ 7 EUPHROSINE. Des outrages si grands pouvez-vous les souffrir? Sont plus grands que ceux qu'il vous cause. Je n'en dirai qu'un seul ; mais c'est bien autre chose Quand ils sont tous examinés. Au bas de la belle Amathonte, Où la mer s'introduit, et qu'un rocher surmonte, Domine sur les eaux que son œil voit couler; It sut en abuser, un buisson était près, Puis à quelques pas de distance, Parmi les fleurs, sur l'herbe, il étend des filets. Ensuite il crie, hélas! je suis blessé, De ses petites mains se couvrant le visage. D'une vitesse sans pareille, Je vais à lui savoir ce qu'il avait. Mais tandis que je choisissäis Par ses inévitables traits. |