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L'ingrat bientôt passa des pleurs au rire,
Et dit: voilà tout ce que je désire,
Je suis déjà guéri. Regardez. Voyez-vous?
Sa joue était fraîche et vermeille,
Je la croyais blessée, est-il ruse pareille?
Rien ne pourrait vous peindre mon courroux.
Je le poursuis pour en tirer vengeance.,
Mais le trompeur, dans nos combats,
Me fuit, fait mille tours et dirige mes pas
Vers les piéges cachés. Dans mon impatience
Je le poursuis encor. Mon pied se trouve pris;
Ma colère s'accroît et mon courage augmente,
Je rompis les filets, tant je me débattis.

Je l'aurais joint; mais quand je me tourmente
Pour sortir d'embarras, en riant il s'enfuit,
Et me laisse en partant la honte et le dépit.

EUPHROSINE.

Et vous me conseillez de garder le silence?

THALIE.

Je hais l'Amour autant que vous le haïssez,

Je voudrais en tirer vengeance,

Mais comment faire? je ne sais.

Il est sans foi, sans indulgence,

Sans respect, sans pitié. Mais mon mal est commun
Le craindre et le souffrir est le sort de chacun :
Partager les malheurs de tant de cœurs ensemble
Peut les adoucir, ce me semble.

EUPHROSINE.

De mon courroux l'Amour n'est pas l'unique objet,
Un tel rival serait peu redoutable;

Des fautes de son fils Vénus se rend coupable,
De tous nos maux elle est le seul sujet.

Encor ses offenses dernières

Pourraient me paraître légères

Sans le souvenir du passé.

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Lequel?

AGLAÉ.

EUPHROSINE.

Lequel? vous demandez encore

Quel pouvoir le destin nous a-t-il donc laissé,
Le ministère enfin dont le ciel nous honore?

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AGLAÉ.

D'accorder les mortels entr'eux

Et de tâcher qu'ils soient heureux.

THALIE.

De calmer la colère et d'éteindre la haine.

AGLAÉ.

Nourrir la paix, maintenir l'amitié.

EUPHROSINE.

Vénus veut de son fils étendre le domaine,
Et ne nous met point de moitié.

Seulement elle veut que nous soyons complices
Des crimes de son fils et de ses injustices.
Tantôt dirigeant un coup-d'œil,

Ordonnant un souris, vous verriez sur la terre,
Et la violence et le deuil,

Et l'infidélité compagne de la guerre.

THALIE.

Il est trop vrai; mais que pouvons-nous faire ?
Et quel moyen de nous venger?

EUPHROSINE.

J'en connais un qui peut nous satisfaire, Mes sœurs, c'est à vous d'en juger. Ecoutez-moi, d'attraits si Vénus est parée, De qui tient-elle tous ses dons? Sans nous serait-elle honorée ? Ah! vengeons-nous, puisque nous le pouvons. Ensemble formons une belle,

Dont les attraits plus séduisans

Otent à Vénus tout l'encens

Qu'elle obtient chaque jour de la troupe mortelle, Et dont toutes les qualités

Surpassent encor les beautés. /

Qu'elle unisse à-la-fois la grâce à la décence,
La douceur à la majesté ;

Que ses talens égalent sa naissance,

Et qu'en elle l'esprit se joigne à la bonté.

Y

THALIE.

pensez-vous, ma sœur, et pouvons-nous encore Disposer de tant de bienfaits?

La souveraine qu'on adore

Les déploie aux yeux des Français..

Ah! vous savez, sans que je vous le dise,
Les soins que nous avons prodigués à Louise
Quand chaque jour autour de son berceau
Nous lui donnions quelque charme nouveau.

EUPHROSINE.

Oui, nous avons fait voir, en marchant sur ses traces,
Que la France n'est pas le seul pays des Grâces.
Maintenant de Vénus abandonnant la cour,
Nous pouvons à loisir nous venger de l'Amour.

Il est un Roi dont la naissance
Ne date encor que d'un printems,
Et qui du monde entier fait l'unique espérance,
Suivons ses pas dans tous les tems.
O Roi de Rome, avant que le courage,

Mette dans tes mains son flambeau
Tu jouiras des trésors de ton âge;

Comme l'amour tu seras beau;

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Meilleur que lui, tu plairas davantage.
Tous deux vous êtes fils et des Dieux et des Rois,
Mais l'Amour connaît-il la justice et les lois?

Souvent ce dieu, dans son humeur légère,
Fait le tourment des cœurs qu'il a vaincus ;
Il gardera les défauts de sa mère,
Quand de la tienne en toi brilleront les vertus.

Par Mile SOPHIE DE C...................

LES PARJURES ET LES SERMENS.

A DÉLIE. ROMANCE.

Si je jure qu'à ma faiblesse
La raison succède à son tour,

Que je vous revois sans amour,

Que votre absence est pour moi sans tristesse ;

Que désormais vous ne m'entendrez pas

Vous accuser des peines que j'endure;

Regardez-moi... Soudain, hélas,

Je sens que j'ai fait un parjuré.

>

Mais si j'ose peindre l'ardeur
D'un amour délirant, extrême;

Si ce mot trop vrai, je vous aime,
Dans un soupir s'échappe de mon cœur;
Si je vous dis qu'un moment d'espérance
Me paye assez d'un siècle de tourmens;
Ah! mes yeux vous l'ont dit d'avance,
Il n'est besoin de sermens.
pas

Portant aux pieds d'une autre belle
Un cœur par vous trop rebuté,
Si je jure par sa beauté

Qu'il l'aime seule et ne veut aimer qu'elle,

Que cet amour sera jusqu'au trépas

De mon bonheur la source unique et pure,
Je pense à vous....... Soudain, hélas,
Je sens que j'ai fait un parjure.

Mais quand votre aimable souris
Semble encourager ma tendresse,

Si je

dis que d'une déesse

Les doux baisers seraient d'un moindre prix;

Qu'un autre amour, vos rigueurs, ni l'absence,
N'éteindront point l'amour que je ressens ;
Ah! mes yeux vous l'ont dit d'avance,

Il n'est pas besoin de sermens.

EUSEBE SALVERTE.

AU JEUNE ALFRED REGNIER.

UN Alfred, brillant dans l'histoire,
Fut législateur et guerrier :

Dans quinze ans à tes vœux la gloire
Ouvrira ce double sentier.

De tes aïeuls, l'un (1) à la France
Donne son sang et ses exploits;
L'autre (2), noble organe des lois,
Toujours veille pour l'innocence.

(1) Le maréchal duc de Tarente.
(2) Le grand-juge, duc de Massa.

D

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EN tout tems, en tout lieu, comme l'on me consulte,
Il convient qu'en tout tems, en tout lieu, je sois juste,
Et quand je n'obtiens pas cette perfection,

En moi c'est un défaut d'organisation.

Je marche avec mes sœurs tellement divisée,
Que par celle qui suit je suis toujours chassée.
Il se peut que souvent on me voie arriver,
Ainsi qu'on me voit fuir, sans beaucoup m'observer.
Prends-y garde pourtant! dans ma course légère,
S'il se fait que pour toi j'arrive la dernière,
Tu me redoutes lors avec trop de raison,

Et je répands le deuil dans toute ta maison.

S......

LOGOGRIPHE.

DANS le palais des rois de la seconde race,
Si j'occupai jadis une éminente place,
Sans mentir à présent, je pourrais me vanter
En France, d'en avoir trente mille à compter..
Donnera qui pourra de mon nom l'origine,
Ouvrage mal aisé plus qu'on ne l'imagine,
Pour faire de ses pieds les transpositions,
Je vais pour un instant quitter mes fonctions..
Si tu connus, lecteur, le comte de Lignole,
Tu trouveras en moi, sois sûr de ma parole,
Ce qu'il cherchait d'abord, lorsqu'il faisait des vers ;
Un fluide léger qui remplit l'univers;

Le saint qui pour sacrer un monarque de France-
Reçut du ciel un suc qui doit être fort rance,

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