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cela peut bien fervir à le faire confiderer comme ayant prétendu acquerir pour lui-même, mais ne peut point attribuer le caractere d'une feconde vente & d'un fecond changement de main, à ce qui n'eft de fa nature qu'une éviction, & la deftruction de la Dominité dont cet Adjudicataire s'étoit induément revêtu.

Que s'il ne paroît point de Mandat par écrit, en ce cas il est évident que l'élection d'ami que fait l'Adjudicataire, après que le Décret a été confommé fur fa tête par la prife de poffeffion, ne peut être confiderée que comme un nouveau Contrat qui doit produire de nouveaux Droits.

Dumoulin propofe pourtant quelques exceptions. Il pofe le cas que l'Adjudicataire par l'Acte de délaiffement des biens, ne reçoive pas de prix, déclarant que celui que lui-même avoit payé, étoit des deniers de ce fubrogé. Et dans cette pofition il décide, que de-là qu'il n'y a pas de nouvelle numeration de deniers, le Seigs'il ne veut point que cet Acte foit reputé être une vraye élection d'ami, ne peut le faire du moins envisager autrement, que comme une donation qui ne doit point de Lods.

neur,

Il propose ensuite une feconde exception dans le cas que l'élec- XXXIX, tion eft faite après un court intervalle, qu'il borne à huit jours, & qu'elle eft accompagnée d'une déclaration de l'Adjudicataire, qu'il a pris le Décret en vertu d'un Mandat verbal.

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Mais je ne crois pas qu'on puiffe adopter cette décision. La brieveté du tems fait préfumer, dit Dumoulin, que le Mandat qui a été énoncé les Parties avoit préalablement précedé. Mais s'il par eft vrai qu'il y eût un Mandat, pourquoi donc l'Adjudicataire a-t'il procedé en fon nom, lorfqu'il a furdit, qu'il a configné, qu'il a pris la poffeffion? Toute cette conduite ne détruit-elle pas plus fortement cette préfomption d'un Mandat verbal, que ne peut contribuer à l'établir, la circonftance du bref intervalle dans lequel a été faite la fubrogation? Le deffein de cette fubrogation ne peut-il pas avoir été conçû dans cet intervalle, quelque court qu'il ait été ?

Dumoulin a fenti cet inconvenient, & pour tacher de le mettre à côté, il a exigé qu'à ces deux circonftances d'un Mandat énoncé, & de la brieveté du tems, il s'en joigne une troifiéme, qui eft que l'Adjudicataire n'eût point configné le prix du Décret que ce prix fut dû lors de l'élection, & qu'il en ait delegué le

payement fur celui qu'il a fubrogé. Dans le concours de ces circonftances il n'eft plus poffible, dit cet Auteur, d'appercevoir deux ventes differentes, parce qu'il n'y a qu'une feule numeration de prix.

Pour détruire cette mauvaise subtilité, peu digne certainement d'un fi grand homme, qu'on me permette de fuppofer cette efpece. Si j'ai fait une acquifition dont je doive encore le prix, & que je revende la chofe, en chargeant mon Acquereur de payer celui de qui j'avois acheté, ne fera-t'il pas dû deux Lods ? & que diroit-on, fi ces Parties repréfentoient qu'il n'y a qu'un Contrat, parce qu'il n'y a eu qu'une numeration de prix ?

Pour revenir donc à la question de laquelle il s'agit, que l'Adjudicataire s'impute de n'avoir pas procedé comme il auroit dû le faire afin de n'être pas expofé à payer de fon chef un Droit de Lods particulier. Il faut avoir des regles certaines, & le grand interêt des Etats, c'est que les Jugemens n'y foient pas arbitraires. Si l'on accorde huit jours, pourquoi n'en accordera-t'on pas dix ? pourquoi pas douze, quinze ? Et s'élevant ainfi par degrés, il ne fe trouveroit plus de terme auquel il fut permis de s'arrêter.

XXXIII. Quant à ce qui concerne les adjudications faites fur une folle enchere, il faut diftinguer trois cas, 1'. Lorfque l'Adjudicataire n'eft point entré en poffeffion, 2o. Lorsqu'il est entré en poffeffion, fans qu'il y ait eu de terme donné de la part des Créanciers; 3. Lorfque les Créanciers lui ont donné terme, expreffement, ou tacitement, en recevant de lui des payemens d'interêt.

Au premier cas, il est évident qu'il ne peut être dû des Lods de la premiere adjudication, puisqu'elle a été anéantie & refoluë, avant qu'il n'y ait eu de changement de main.

Le fecond cas paroît plus difficile, attendu le changement de main que la prife de poffeffion femble avoir operé. Mais les Loix ayant établi pour maxime dans les ventes judiciaires, que le Dominité n'y est transferée par la prife de poffeffion, qu'autant que le prix a été payé comptant, parce que les ventes judiciaires font cenfées être faites prefenti pecuniâ, il s'enfuit que l'Adjudicaire en prenant poffeffion fans avoir payé, n'a acquis qu'une détention de fait; mais n'eft point devenu Proprietaire, & civilement poffefleur

feffeur; jufques-là qu'il feroit tenu de rendre les fruits qu'il a perçûs.

Quant au troifiéme cas, je tiens qu'il est dû de doubles Lods, parce que les Créanciers en donnant terme à l'Adjudicataire, ont rendu la vente parfaite. Elle a donc fubfifté pendant tout le tems qui s'eft écoulé jufqu'à ce que les Créanciers ont fait proceder à la déclaration de la folle enchere; & elle n'eft réfoluë que pour l'avenir. Je ne fçai pas même fi cette réfolution ne doit pas paffer pour être purement volontaire, parce qu'il femble que les Créanciers après avoir donné terme, n'ont plus contre l'Adjudicataire, qu'une action propre pour demander leur payement, mais qu'il ne leur eft plus permis de faire revivre la Procedure de Décret.

Part. 84. de la

J'avouë néanmoins qu'il y a jufqu'à cinq Arrêts du Parlement de Paris, (1) qui même dans le cas que l'Adjudicataire n'a pas Lect, lett. R. (1) Brod. fur pris poffeffion, ou lorfqu'il n'a eu qu'une poffeffion inutile & Sem. 2. Ricard nulle, ont jugé qu'il ne laiffoit pas d'être dû deux Lods. Les & Ferriere fur plus célébres d'entre les Modernes (2) fe font élevés contre cette Coût. de Paris. Doctrine, & déclarent tous qu'il n'y a que la feconde adjudi- &tre fur cation dont les Lods foient dûs au Seigneur. Lapeyrere (3) dit le même art. que c'est la Jurifprudence du Parlement de Bordeaux. Bainage Henrys, liv. 3. (4) en rapporte deux Arrêts du Parlement de Rouen. Hevin (3) Lapeyrere, (5) fur Frain en cite deux autres du Parlement de Bretagne ; Edit. de 1706. & Sauvageau (6) dans fon Recueil d'Arrêts, en allegue un du

Confeil du 2. Août 1680.

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la

Il ne faut donc confiderer que la feconde adjudication, mais il reste de fçavoir fi dumoins la fomme de la folle enchere n'eft pas comptée dans le prix fur lequel doivent être payés les Lods, Il y a un Arrêt du Parlement de Normandie du 27. Juillet 1638. qui jugea que la folle enchere n'augmentoit point les Lods. Et je crois que c'eft à quoi il faut s'en tenir, foit parce que folle enchere n'eft point payée aux Créanciers, comme une partie du prix de la chofe, mais comme une peine; foit parce qu'il n'eft pas permis au Seigneur, de porter la vûë fur une adjudication qui eft à fon égard, comme fi elle n'étoit pas ; foit enfin parce qu'il n'eft pas trop facile de déterminer fur qui feroient pris les Lods de cette folle enchere. Seroit-ce fur les Créanciers qui n'ont ni la qualité de vendeurs ni celle d'acquereurs ? ou feroit-ce

Lemaître

quest. 54.

let. P. n. 81.

(4) Bafnage fur Norm, art.

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fur celui à qui la folle enchere est déclarée ? Mais la réfolution de fon enchere l'a rendu étranger au Seigneur. Enfin feroit-ce fur le nouvel Adjudicataire qui ne peut devoir des Lods que relativement au prix auquel il s'eft obligé ?

XXXIV. La troifiéme queftion que j'ai propofée, fçavoir, s'il est dû double Lods, lorfque l'abfent au nom de qui a été fait un achat, ne ratifiant pas, ou renonçant aux Droits qu'il pouvoit avoir fur cette acquifition, la chose reste à celui qui a ftipulé la vente, doit fe décider par cette diftinction.

S'il y a eu une Procuration pour acquerir, (& quand cette Procuration ne feroit pas rapportée, il fuffit que l'Acheteur fe foit qualifié dans le Contrat de Procureur fondé, ) il ne faut pas douter qu'il ne foit dû double Lods; parce que la possession & la Dominité ayant été acquises à l'abfent, felon la maxime, que par la délivrance qui eft faite au Procureur, celui qu'il repréfente, devient de plein droit Poffeffeur & Proprietaire, il s'enfuit que quand il arrive que la chose reste à ce Procureur, du confentement de celui pour lequel il avoit agi, c'est veritablement une feconde vente, & une feconde mutation. Je fuppofe toûjours que ce traité entre le Procureur & celui qui l'avoit commis, ait été fait après la délivrance, parce qu'autrement ce ne feroit qu'une fubrogation à l'action, qui, comme je l'ai déja dit, ne produit avec le Contrat de vente qu'un Droit unique.

Mais lorsqu'il n'y a point eu de Procuration, ou qu'il n'en eft énoncé aucune dans le Contrat, en forte que les effets de la vente n'ayent dû être acquis à l'abfent qu'autant qu'il auroit ratifié ; fi par le défaut de ratification, il arrive que celui qui a ftipulé la vente, demeure le Maître de la chofe, il eft évident qu'il n'eft dû qu'un Lods, parce que le droit de la vente s'étant uniquement formé fur la tête de ce Contractant, que la proprieté ayant été acquife à lui feul par la délivrance qui lui a été faite, & n'y ayant que la ratification de l'abfent qui dût le dépouiller, il s'enfuit qu'il n'eft queftion ni de feconde vente, ni de feconde mutation, quand l'abfent a refufé de ratifier, mais (1)Soëfve,liv. que cet Ache2. Cent. 2. ch. teur conferve feulement ce qui lui étoit déja acquis. C'est ainsi que 58. Journ. des la queftion a été jugée par deux Arrêts du Parlement (1) de Liv. 1. chap. 48. Paris du 13. Février 1669.

Aud. tom. 2.

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cenfée emportée une exemption des

Lods.

V. Quid, lorfque le Fief eft declaré être purement d'honneur ? VI. Quelle Coûtume il faut fuivre, ou celle du Fief fervant, ou celle du Fief dominant.

I.

Ferr. fur la

qu.
liv. 4. ch. 33.
Catell. liv. 3.

3. Chopin fur

y a cette difference du Droit qu'exige le Seigneur Féodal, d'avec celui qu'exige le Seigneur Directé à chaque mutation ou changement de main ; que le premier de ces Droits n'eft dû, qu'autant qu'il eft établi par la convention, ou par la Coûtume des Lieux, de fure non debentur Laudimia ex alienatione Feudi, nifi vel pacto, vel Confuetudine, aliud cautum fit. Au lieu . 167. Mayn que l'autre eft dû de Droit commun, & par la propre ch.21.Pap. liv. nature du Bail à Cens, fur quoi un de nos Auteurs 13. tit. 1. art. fe recrie fur la bizarrerie de nos Coûtumes; car pour- Paris, liv. 1. quoi, dit-il, le Droit Commun n'eft-il point fur cette matiere pour le Seigneur Féodal, auffi-bien que pour le Seigneur Directe, celui-là autant, & plus favorable même que l'autre, puifque les Lods font pour lui une maniere de dédommagement de ce qu'il fouffre depuis que les Fiefs font devenus hereditaires & Patrimoniaux ? Et pourquoi, ajoûte-t-il encore, le Droit Commun n'est-il pas pour le Retrait Cenfuel, de même que pour le Retrait Féodal? L'objet de l'un & de

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tit. 3. ”. 5. &

fur

Anj. liv. 3. miere Partic tit. 3. n. 5.

ch. 3. de la pre

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