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& le Seigneur l'exige, ou en prénant chaque année la quatrième partie des fruits, ou en joüiffant pendant un année de l'entier Fonds, en laiffant joüir pendant trois années le Tenancier fans aucune charge, tout cela dépend des Titres ou de la convention.

C

'EST une queftion célébre de fçavoir fi le Champart est Seigneurial de fa nature; & cette question a deux branches. La premiére, fi le Droit de Champart einporte effentiellement la Seigneurie directe; en forte que celui à qui appartient un Champart n'ait pas besoin de prouver particuliérement qu'il ait la directe du Terroir ou celle du Fonds, & que ce Champart foit par lui-même un figne certain de la Directe. La feconde fi le Champart, lorsqu'il eft joint à la Cenfive, perd le carectere de Droit Seigneurial pour prendre celui d'une Rédévance purement ordinaire.

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II,

tit. des Cens,

Liv. 2. ch. 24.

A l'égard de la premiére question, les avis ont été partagés. III. Dumoulin décide hautement que celui à qui il eft dû un Cham-Coût. de Pare part, ne peut en prendre droit pour fe dire Seigneur directe, & c'est l'opinion commune des Auteurs du Païs de Droit Ecrit. Mr. Dolive après avoir dit que le Cens préfuppofe abfolument la Seigneurie directe, déclare qu'il en eft autrement du Champart. Me. Graverol, fur Larroche, dit que le Champart n'est point in- Grav.fur Larr. compatible avec la Directe, il étoit donc bien éloigné de penfer des Dr. Seign. que le Champart pût emporter de lui-même la Directe de l'héritage. Bretonnier, Baffet & plufieurs autres, enfeignent pareillement que dans les Païs de Droit Ecrit, le Champart n'emporte q. point la Directe Seigneuriale s'il n'y a des Titres exprès.

cb.5.

Bret fur Henr. 34 Baff. tom.

tom. I. liv. I.

2.

liv. 6. tit. 8. cb.2.

IV. Montarg. tif. 4.

Si l'on confulte quelles font fur ce point les Coûtumes de ce Royaume. Les unes, unes, telles que celles de Montargis & de Blois, déclarent que le Champart eft un figne de Directe & de Seigneu- Blois, art. 435 rie. Les autres, qui font le plus grand nombre, en parlant du Champart & prefcrivant la maniére d'en ufer, n'ont point dit quelle étoit fa nature. Mais ce que n'ont pas fait les Coûtumes les Arrêts l'ont fait. Et le principe qu'ils ont établi, c'eft que le Champart, s'il ne fe trouve point d'autre Seigneur, doit emporter la Seigneurie directe & en produire tous les Droits. C'est

Brod furLouet ainfi let, C. fom. 19.

que

le Parlement de Paris l'a jugé par les trois Arrêts de Month. Atr.62. 1577. 1589. & 1603. dans le Reffort de la Coûtume de CharLaland, fur Ocl. tres qui eft une de celles où il n'y a rien de déterminé touchant art. 113. Vid. la qualité du Champart. Et c'eft une maxime que l'Ancien Loyf. du Dég. Coutumier de la France a posée comme une tradition générale Liv. 1. ch.5.n. de tout le Royaume.

art. 480.Chart.

9.11. Char.

fur Par. art. 73. Bacq des Fr. Fi. cb.7.8.170

V.

Ces Arrêts du Parlement de Paris ne tombent point fur des principes propres & particuliers aux Païs Coûtumiers, puisqu'ils ont été rendus dans des Coûtumes où les chofes étoient laiffées aux termes du Droit commun: c'est donc fur l'efprit général du Droit François que ces Arrêts ont été rendus ; & comme les Auteurs du Païs de Droit Ecrit, quand ils difent que par l'ufage de leurs Provinces, le Poffeffeur d'un Champart n'est point fondé de cela feul à fe prétendre Seigneur, ne rapportent rien qui conftate la verité de cet ufage, qu'ils ne rapportent ni des Arrêts de Reglement, ni des Arrêts particuliers, en un mot, qu'ils parlent de leur chef & par goût, pourquoi dans ce doute, ne nous rangerions-nous pas à cette Jurifprudence du Parlement de Paris qui a déclaré que le Droit commun de la France eft de regarder le Champart comme une Rédévance directe, toutes les fois qu'il ne paroît point un autre Seigneur? Telle eft en effet, comme le dit Zet. S. n. 5. un des Annotateurs de Lapeyrere, la Jurifprudence reçûë au Parlement de Bordeaux.

V I.

Quant à la feconde queftion, la Jurifprudence des Païs du Droit Ecrit eft ouvertement contraire à celle des Païs Coûtumiers. On juge dans les Païs Coûtumiers que le Champart, lorsqu'il eft dû conjointement avec une Cenfive, n'est qu'une Rédévance fimple & fans caractere, parce que dans ces Païs-là on tient pour principe que fi avec le Cens il a été ftipulé quelqu'autre devoir annuel, ce fecond devoir ne paffe point pour un Droit Seigneurial, mais pour un Droit fimplement Foncier. La Doctrine des Païs du Droit Ecrit eft bien différente: on tient pour maxime, que tout ce qui a été ftipulé dans la tradition premiére a également le caractere de Droit Seigneurial; de forte que bien loin que le Champart ceffe d'être confideré comme Seigneurial parce qu'il feroit joint avec une Cenfive, nos Auteurs tiennent au contraire que c'eft cette jonction avec une Cenfive qui doit lui attribuer plus ouvertement le caractere de preftation Seigneuriale.

Graverol

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Mont. tit. 3. art. 5 Berry,tit. 10. art. 25. Val, cb. z art. 34

Graverol fur Laroche, dit que de Droit commun le Champart VII. eft la quatrième partie des fruits. Mais quel eft le fondement de cette opinion? Il ne peut y avoir de Droit commun qu'en vertu d'une Loi fixe & certaine. Or où eft la Loi qui ait déterminé que le Champart, lorfque la quotité ne feroit pas déclarée par des Titres, emporteroit la quatriéme portion des fruits. On ne peut point dire qu'il y ait fur cela un ufage général qui tienne lieu de Loi car rien n'eft auffi varié que la quotité du Champart. Montargis, Berry & Valentinois donnent la douziéme gerbe. Bouvines donne la dixième. Dans le Païs de Lyonnois, c'est tantôt le cinquiéme & tantôt le quart. Dans le Dauphiné, c'est la vingtiéme gerbe. En un mot, on ne trouve rien d'uniforme pour établir une forte de Droit commun. Ainfi l'unique regle qu'on puiffe suivre, c'est de confulter en défaut de Titres, l'ufage particulier du Lieu ; & fi cet ufage n'eft point déterminé, il faut recourir à celui des Terres voifines, parce que, comme l'enfeignent Dumoulin fur la Coûtume de Paris, & Dargentré fur celle de Bretagne, l'exemple des Seigneuries voifines a une pleine autorité, lorsqu'il ne s'agit que de déterminer la quotité d'un Droit d'ailleurs établi & certain.

6.

Bouvines, art.

Henr. tom. . liv. 94. 3.

Boifl. ch. 46.

N comprend aifément que le Champart produit VIII. plus ou moins au Seigneur, fuivant que la recolte

eft plus ou moins abondante; mais il eft remarquable qu'il ne dépend pas du Tenancier de fruftrer le Seigneur par défaut de culture. Larroche rapporte divers Des Dr.Seign. Arrêts qui ont condamné les Poffeffeurs des Fonds fu- ch.5. art. 1. jets au Champart, & qui avoient négligé de les culriver, à payer au Seigneur la portion des fruits qu'il auroit recueillie fi les Fonds avoient été cultivez, le tout arbitrio boni viri, & fuivant l'eftimation faite par des Experts.

A question que touche Mr. de Boutaric a trois Parties. La premiére, de fçavoir fi l'Emphitéote peut fe difpenfer de travailler les Terres fujettes au Champart. La feconde, s'il peut

Hh

art. 23. Poitou,

Remorantin.tit.

en intervertir la culture. Et la troifiéme, fi en confervant le même genre de culture, il lui eft permis de rien faire qui diminuë le produit des fruits fujets au Champart.

I X. 1'. Non-feulement l'Emphitéote ne peut fe difpenfer de travailBerry, tit. 10. ler les Terres qui font en culture, mais le Seigneur peut même 104. Xaintong le contraindre à ouvrir celles qui font en friche; excepté fi ce 21.Amiens.195. font des Terres ingrattes & fteriles, en forte qu'il n'y ait qu'à 4. art. 6. Blois, perdre à les travailler. Sur quoi il y a cette différence que lorf134 Lamarche, qu'il s'agit d'abandonner une Terre qui eft en culture c'est à 120. Mornac,en l'Emphitéote de prouver la fterilité, parce que la préfomption est fes Arr. p. 1. ch. contre lui; au lieu que lorsqu'il s'agit d'ouvrir une Terre en friOrl. tit. 4. Lar- che, c'eft au Seigneur de prouver qu'elle en vaille la peine, parce roche, des Dr. qu'alors la préfomption lui eft contraire.

330 Clermont,

123.Laland. fur

Seign. ch.5.&

ch. 11. art. 5.

X,

XI.

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Il y a des Coûtumes qui permettent au Seigneur de reprendre les Terres quand l'Emphitéote les laiffe un certain tems fans culture. Les unes difent trois ans ; les autres trois cueillettes; & d'autres neuf ans. Telles font les Coûtumes de Lamarche, Clermont, Blois, Berri, Mais ce font des difpofitions particuliéres qui ne peuvent avoir lieu que dans l'étendue de ces Coûtumes. Je crois feulement que la Coûtume d'Amiens, en ce qu'elle porte que le Seigneur, lorfque l'Emphitéote néglige de travailler les Terres pendant trois ans, peut en prendre la culture & la retenir, jufqu'à ce que l'Emphitéote fe préfente pour les travailler, devroit tenir lieu de Droit commun, pourveu que le Seigneur n'en viene là, qu'après avoir fait des fommations préalables à l'Emphitéote. Enfin, le Seigneur eft reçû à fe plaindre, quoique les Terres foient travaillées, fi on ne leur a point donné les façons ordinaires, ou fi on n'a pas fait les travaux au tems requis. Et dans l'un & l'autre cas, c'eft-à-dire, foit pour le défaut de culture, foit pour le peu d'exactitude dans la maniére de cultiver les Terres, l'action du Seigneur ne tend pas feulement à faire ordonner qu'à l'avenir l'Emphitéore fera obligé de mieux faire ; mais tend encore à obtenir des dommages & interêts pour le paffé.

2o. L'Interverfion de culture n'eft point défenduë, lorsque le Dum. fur. Par. Champart eft indifferemment établi fur toute forte de fruits, parce Chop. fur Par. qu'il n'y a rien à perdre pour le Seigneur qui prendra le Cham

$74.Gl.2. n. 9.

liv. I. tit. 3. n.

20. Lapeyr, let, part fur le nouveau fruit que l'Emphitéote fera produire à fes

R. n. 84. Les

Terres. Mais il en feroit autrement fi le Champart n'étoit éta- S n. 6. & let. bli que fur une forte de fruits; par exemple, s'il n'étoit établi Auteurs & Coûque fur les grains, & que l'Emphitéote entreprît de convertir en tumes ci-defius. vigne une Terre qui auroit toûjours été labourée.

Je diftingue néanmoins dans le cas que le Champart est établi feulement fur une forte de fruit, s'il a été originairement attaché au genre de culture, en forte qu'une vigne ou un pred, deviennent fujets au Champart lorfqu'ils font convertis en Terre labourable, ou fi le Champart a été ftipulé fur des Terres fixes & déterminées.

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Au premier cas, je ne crois pas que le Seigneur puiffe s'oppofer à l'interverfion de culture; premiérement, parce que de même qu'il peut gagner, fi les vignes & les preds font convertis en Terres labourables il n'eft pas jufte qu'il puiffe refufer de perdre par la converfion des Terres labourables en vigne & en pred. Et fecondement, parce qu'en attachant le Champart au genre de culture, fans avoir rien déterminé pour telle & telle piéce en particulier, il eft fenfible que le Seigneur a laiffé l'Emphitéote le maître de regler à fon gré la culture de fon bien.

Il y a eu cependant un Arrêt contraire le 10. Juin 1691. dans l'efpéce de deux Reconnoiffances où le Champart étoit véritablement ftipulé dans le détail fur chaque pièce de Terre labourable, conjointement avec une Cenfive, dont chacune de ces piéces étoit feparement chargée; mais dans ces mêmes Reconnoiffances il avoit été dit d'une part, que les preds, les vignes, & les bois, s'ils étoient convertis en Terres labourables, feroient fujettes au Droit de Champart; Et d'autre part, parmi les Terres labourables qui étoient reconnuës fous, la Loi du Champart, il y en avoit deux qui avoient été exceptées, parce que l'une étoit destinée à être convertie en vigne, & l'autre en pred. Ainfi il est évident qu'il étoit queftion d'un Champart originairement attaché au genre de culture.

On jugea cependant fans difficulté que l'Emphitéote n'avoit pû intervertir la culture de quelques piéces de Terres labourables, dont il avoit fait des preds, & tout le doute qu'il y eut, fut de fçavoir file Champart, de-là qu'il étoit joint à une Rente. n'avoit pas été prefcriptible, parce que l'interverfion dont fe plaignoit le Seigneur, remontoit au-delà de trente ans. On fondoit

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XIL

XIII.
Mém de Mr.

de Tournier.

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