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la prescription fur ce qu'on croyoit pouvoir confiderer le Champart, lorsqu'il eft joint à une Cenfive, comme une quotité de Rente. Et fur cela il intervint partage.

Le Magiftrat qui a confèrvé cet Arrêt dans fes Mémoires, dit que le partage ayant été porté à la premiére Chambre des Enquêtes, les Juges furent furpris qu'on eût déclaré que les Emphitéotes n'euffent pas eu la liberté d'intervertir la culture de leurs Terres Et quoiqu'il ne peut plus être queftion de cela, puifque la chofe étoit jugée, en forte qu'il falloit prendre neceffairement parti entre les deux opinions qui faifoient le partage, le penchant que fentoient les Juges de cette Chambre à autorifer purement & fimplement cette interverfion, donna lieu à un fecond partage. Mais l'affaire étant enfin dévoluë à la Grand'Chambre où l'on s'occupa uniquement du point de partage, il fut dit que le Champart n'étoit pas moins imprefcriptible, quoiqu'il fût joint avec une Cenfive, & l'Emphitéote fut condamné en conféquence de remettre en culture les preds dont il étoit question.

Je ne fçai pas fi les doutes que forma la premiére Chambre des Enquêtes, ne font pas mieux dans les vrais principes, que le fuffrage unanime qui avoit eu lieu dans celle d'où venoit le partage. Il eft vrai que dans les Reconnoiffances le Champart avoit été fixement ftipulé fur chaque pièce de Terre labourable; mais comment expliquer cette ftipulation par laquelle les preds, les vignes, & les bois, s'ils étoient convertis en Terres labourables, devoient devenir fujets au Champart? Comment expliquer encore cette autre claufe, par laquelle on exceptoit deux pièces de Terre de la Loi du Champart fur le fondement qu'elles étoient destinées à être converties en vigne ou en bois?

Dira-t'on à l'égard de la premiére de ces deux ftipulations qu'elle doive prouver feulement qu'il avoit été convenu lors de l'inféodation primitive, que la quantité des Terres labourables pourroit être augmentée pour le profit du Champart, mais en forte que le Champart n'étoit pas moins fixement ftipulé fur tout ce qui étoit alors Terre labourable ? Et dira-t'on à l'égard de la feconde claufe que ce fût un affranchiffement que le Seigneur avoit jugé à propos d'accorder ? Rien ne paroît moins raisonnable que cette interprétation. Les regles de la reciprocité ne permettent pas de douter que le Seigneur ne fe fût foûmis à perdre par

l'interverfion de culture, tout comme il pouvoit gagner ; & il ne peut être permis de regarder comme un affranchiffement volontaire, cette exception faite par les Reconnoiffances pour ces deux piéces qui devoient être converties en vigne & en pred, lorfqu'il eft fi naturel de regarder cette exception comme ayant été une dépendance & une fuite de l'état primitif du Cham

part.

Je tiens donc que le changement de culture ne peut être défendu, lorfque c'eft au genre de culture que le Champart a été originairement attaché; mais il n'en eft pas de même au fecond cas, lorfque le Champart a été fixement établi pour une forte de fruit, fur des Terres particuliéres.

C'est alors qu'on dit avec raifon que l'interverfion de culture XIV. n'eft pas permife, parce que le Seigneur qui ne gagneroit rien par la converfion des Terres labourables, ne doit pas être expofé à perdre par la converfion des Terres labourables en vigne ou en pred. Et dans ce cas néanmoins on admet encore deux exceptions. La premiére, prise de la qualité des Terres, lorsqu'il s'agit d'une Terre qui foit plus propre à mettre en vigne qu'à produire des grains. Et la feconde prife de la commodité du labourage, lorfque l'Emphitéote a befoin de conftruire des grandes étables qu'il ne pourroit placer ailleurs auffi commodement, parce que c'eft une efpéce d'amelioration de l'héritage qui eft cenfée profiter au Seigneur par les Lods plus confidérables qu'il retirera en cas de vente.

ges,

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X V.

3°. Le Droit du Seigneur a paru fi refpectable, qu'il a été décidé que non feulement il n'étoit pas permis de lui faire perdre le Droit de Champart par l'interverfion de culture, mais qu'il n'étoit pas même permis de le diminuer. C'eft fur ce principe qu'a été décidée la queftion de fçavoir fi lorfque l'Emphitéote a furchargé par des complantemens, les Fonds fujets au Chainpart, le Seigneur doit être reçû à demander que les arbres foient arrachés, ou que le Champart lui foit payé des fruits de ces arbres à titre d'indemnité. Le Parlement de Normandie par un Arrêt du 2. Août 1658. jugeant que de tels complantemens diminuoient le produit des Fonds, condamna l'Emphitéote à en payer le Champart. Le Parlement de Bordeaux prit un parti plus moderé par un Arrêt du 6. Avril 1699. renvoyant à des Experts le foin dexaint. art. II,

Bafnage, fut Norm. art. 31.

Baff. & Sant.

fur la fin.

d'examiner fi le produit du Fonds étoit notablement diminué par Guy: fedt. 1. les complantemens. Me. Guyot, en fon Traité du Droit de Champart, trouve qu'il y a trop de rigueur dans la difpofition de l'un & l'autre de ces Arrêts; il croit que la perte eft trop peu confidérable pour que l'on doive s'en occuper; mais puifque le Seigneur perd, quoiqu'il perde peu, n'eft-il pas en droit de fe plaindre? N'eft-il pas en droit d'exiger qu'on ne lui faffe rien perdre? Tout le temperament que l'on peut prendre, c'est de ne pas adjuger l'entier Agrier des complantemens, s'il fe trouve qu'ils produifent plus que ce que perd le Seigneur, parce qu'en effet ce n'eft qu'à titre d'indemnité qu'on admet ce fecond Champart.

XVI

No

Ous avons dit dans le Chapitre précedent, que les arrerages du Cens ou de la Rente, pouvoient être demandez depuis vingt neuf ans avant l'introduction de l'instances il n'en eft pas de même des arrera ges du Champart ou Agricr; les Arrêts rapportez Dol. liv. 2 par Mr. Dolive & par Graverol fur Larroche ont fupra. jugé qu'ils n'étoient dûs que depuis cinq années utiles avant l'inftance.

ah. 24.Gray.ubi

XVII

L

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A Jurifprudence n'a pas été toûjours la même au Parlement de Toulouse. Graverol fur Larroche rapporte un Arrêt du 23. Juin 1670. qui jugea que le Champart n'arreragcoit point ; mais aujourd'hui l'on ne doute plus que les arrerages ne foient dûs Lapeyr. let. S. de cinq années. Le Parlement de Bordeaux diftingue le Chamn. 5. Gayot, du

P. 503:

Dr. de Champ. Part Seigneurial d'avec celui qui ne l'eft pas il adjuge les arrerages pour le Champart de la premiere efpece depuis 29. ans, au lieu que du Champart non Seigneurial, il n'accorde que cinq années. Boniface rapporte un A.êt du Parlement de Provence P.173. du 24. May 1583. qui adjugea 39. années à un Seigneur Ecclésistique.

Bonif. tom. 4.

XVIII.

A l'égard des Païs Coûtumiers, la Jurifprudence certaine eft Covarr. fur que le Champart, foit Seigneurial ou non Seigneurial, ne tombe de Chartres, point en arrerages. Il eft vrai qu'il y a des Auteurs qui ont dif

l'art. 11 de

Coût de Berry,

l'art. 64. de

tingué fi le Champart étoit portable, ou s'il ne l'étoit pas, mais Lathaumafficcette distinction a été rejettée : l'on a crû que dans l'un & l'au- re, déc. fur la tre cas, le Seigneur devoit également veiller tous les ans fur la liv. 3.th. 40. la perception de fes Droits. On doute feulement s'il en doit être Bouchenal fur de même, lorfque l'Emphitéote a negligé d'avertir le Seigneur, Poitou. il a été décidé qu'il faut que le Seigneur fe reveille fur le champ, avant que les gerbes ne foient dénaturées, autrement tout eft confommé, & il n'y a plus rien à attendre pour lui.

LE

L

E Champart eft toûjours querable fur le champ. XIX.

Dr. Seign. ch. 5. art. I. Lapeyrere,

Poit. art. 64.

Amiens,

art.

193. Nevers,

E Parlement de Toulouse tient pour maxime que le Cham- Gräverol des part eft querable. Au Parlement de Bordeaux on diftingue fi le Champart eft Seigneurial ou s'il ne l'eft pas: Au premier cas, il est déclaré portable ; & dans le fecond, il eft querable. Le lett. S n. 5. Droit commun des Païs Coûtumiers eft que le Champart eft que- Saint. art. 12. rable de sa nature, fi la Coûtume du Lieu n'en dispose autrement, telles que les Coûtumes de Poitou, Saintes, Amiens, tit, du Cham. Nevers, Montargis, Blois, & Bourbonnois. Lorfque le Champart eft portable, ou par les Titres, ou par Coûtume, on en ufe comme à l'égard de la Cenfive, c'est-à-dire, que l'Emphitéote n'eft point tenu de le porter hors des limites de la Seigneurie. C'est ainfi que le déclarent les Coûtumes dont je viens de parler, & les Auteurs qui les ont commentées. Mais fur cela il y a quatre ou cinq principes à obferver.

la

art. 21. Mont.
tit. 3. art. 12.

Blois, art. 132.
Bourb. art.35 2.

Poit. 64.
Nevers du

Le premier, que les Emphitéotes ne font pas même obligés X X. d'aller à la Grange que le Seigneur poffede dans l'étenduë de la Seigneurie, fi elle eft trop éloignée de leurs poffeffions. La Coû- Champart, art. tume de Poitou dit à la distance de deux lieuës: le plus grand 2.Mont. desCh. nombre difent demi lieuë. C'est au Juge à regler la chofe dans les Provinces où il n'y a point de Coûtume particuliere.

Le fecond, que le Seigneur n'eft pas précisement obligé de recevoir le Champart dans l'étendue de fon Fief, & qu'il lui eft permis d'établir fa Grange dans tel lieu de la Seigneurie qu'il juge à propos, quoique ce foit fur des Fiefs qui ne relevent pas de lui. C'eft pour cela que la plupart des Coûtumes & des Commentateurs ne difent point que la Grange du Seigneur doive être

art. 2.

Poitou Mon targis,ubi fupra. Amiens,art.1931

Etamp. act. 19. Montargis,

ubi fup.

469.

dans fon Territoire, mais qu'il faut qu'elle ne foit pas hors de la Châtellainie.

Le troifiéme, que le Seigneur eft le maître de changer & remuer fa Grange, comme il le juge à propos, tant qu'il ne fort pas de la Seigneurie dans laquelle font enclavés les heritages fujets au Champart.

Le quatrième, que la poffeffion où auroient été les Emphitéotes, d'attendre que le Seigneur envoyât chercher le Champart, ne les difpenfe point de le porter, fi pendant le tems qu'a duré cette poffeffion, le Seigneur n'a point eu d'Hôtel ou de Grange Guyot, du Dr. dans le Territoire. C'est ainfi que la question a été jugée par de Champ.pag. un Arrêt du Parlement de Paris du 24. Mai 1586. dans l'efpece d'un Seigneur nouvel Acquereur qui avoit un Hôtel dans la Châtellainie, au lieu que fon prédeceffeur n'en avoit point. Et pareillement l'Ufage où auroient été les Emphitéotes, de porter le Champart hors du Territoire, ne les oblige point d'en ufer de même à l'avenir, fi les choses ne font en un état où l'on puiffe préfumer que telle ait été la condition originaire de l'inféodation. Guyot, ibid. Suppofons, par exemple, que le Champart ait été vendu à un Seigneur étranger, il eft à préfummer que le Champart tant qu'il étoit poffedé par le Seigneur naturel, étoit portable à l'Hôtel de fa Seigneurie ; & la poffeffion contraire qui fe feroit formée en la perfonne de cet Acquereur ou de fes heritiers, eft confiderée comme une furcharge que le tems n'a pû établir. Telle a été encore la décision d'un Arrêt du Parlement de Paris du 23, Juillet 1742.

X X I.

L

E Poffeffeur du Fonds fujet au Champart, ne peur retirer les fruits fans en avoir plûtôt averti le SeigInftit. Coût, neur,, qui tient, dit Mr. Loyfel, Terrres fujettes à liv. 4. tit. 2. ,, Champart, n'en peut lever la Des-blée fans appeller le Seigneur à peine d'amende, &c. «

art. 5.

Larr. des Dr. Seign.ch. 6. art. 15. Arrêts des

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A maxine que l'Emphitéote avant d'enlever les gerbes, doit avertir le Seigneur, a été établie par un grand nombre d'Ar

LA

4 Tuin & 19. rêts.

Juiler 1737.
Lapp. par Guyot

Mais l'avertiffement doit-il être donné par écrit ? Les Coûtu

mes

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