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No 25. COUR DE CASSATION (Ch. req.). 7 Mai 1884.

Bois.

Lapins.

- Responsabilité. - Mesures insuffisantes.

Le propriétaire d'un bois est responsable des dégâts causés aux récoltes du voisin par les lapins de ce bois, lorsque, loin de prendre les mesures nécessaires pour combattre la multiplication de ces animaux, il l'a, au contraire, favorisée, en faisant, depuis plusieurs années, garder sévèrement sa chasse. (C. civ., 1382, 1383.)

Il n'importe qu'il ait fini par organiser quelques battues et fait défoncer quelques terriers, si c'est seulement après que la presque totalité des dégâts constatés sur les terres du voisin avait eu lieu, en telle sorte que les mesures prises ont été tardives et insuffisantes. (Id.)

DE VALON C. PIGACHE.

ARRÊT:

LA COUR: - Sur le moyen unique du pourvoi, tiré de la violation des art. 1382 et 1383 C. civ.: Attendu qu'il résulte des constatations du jugement attaqué (Trib. des Andelys, 27 déc. 1881) que des dégâts importants ont été causés aux récoltes du sieur Pigache par les lapins du bois du sieur de Valon; que celui-ci, loin de prendre les mesures nécessaires pour combattre la multiplication de ces animaux, l'a, au contraire, favorisée en faisant, depuis plusieurs années, garder sévèrement sa chasse; que, s'il a fini par organiser des battues et faire défoncer quelques terriers, c'est seulement après que la presque totalité des dégâts constatés sur les terres du sieur Pigache avait déjà eu lieu, et que ces mesures ont été tardives et insuffisantes; Attendu qu'en cet état des faits souverainement constatés, le jugement attaqué a déclaré à bon droit le sieur de Valon responsable des dégâts causés par les lapins de son bois aux récoltes du sieur Pigache, et, loin de violer les articles de loi visés au pourvoi, en a fait une juste application; - Rejette, etc.

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Du 7 mai 1884. Ch. req. - MM. Bédarrides, prés.; George Lemaire, rapp.; Petiton, av. gén. (concl. conf.); Massenat-Déroche, av.

(Sirey, 1887, p. 15.)

Voir notamment, dans ce sens : Cass. req., 21 avril 1879, Tocque, Rép., X, 49; - Cass. req., 14 avril 1883, Bertin, Rép., XI, 451; – Cass. civ., 9 avril 1884, Brisemure, Pal., 84, 968; — Cass., req., 3 juin 1885, Pescheux, Pal., 86, 139.

No 26. TRIB. CIVIL DE DUNKERQUE. 16 Juin 1887.

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Chasse. - Bail. Abus de jouissance.

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Demande prématurée.

Le fait de capturer des lapins à l'aide de filets et de chiens n'est pas par lui-même un abus de jouissance du droit de chasse concédé à l'auteur de ce fait.

L'emploi d'engins prohibés n'est donc pas un motif pour une action en dommages-intérêts dans le cours du bail.

Pour savoir s'il y a eu abus du droit de chasse, il faut attendre là fin du bail et comparer la richesse de la chasse à ce moment avec sa richesse au moment de la location.

BOURGEOIS-PANNIER C. BEIRNAERT ET AUTRES.

Ainsi jngé dans des circonstances que relate la décision suivante :

Le TRIBUNAL: Attendu que M. Bourgeois-Pannier a assigné MM. Beirnaert et Bourgeois ès qualité, ses cofermiers, en payement de la somme de 20.000 francs avec les intérêts judiciaires pour la réparation du préjudice causé par l'abus de jouissance de la chasse louée, sans préjudice des dépens;

Attendu que MM. Beirnaert et Bourgeois ont assigné en garantie M. Bossut, sous-locataire;

Attendu que le défendeur en garantie n'a fait aucune difficulté pour reconnaître qu'il s'était emparé, à l'aide de pans, de rêts et de chiens, d'une certaine quantité de lapins, à son choix, qu'il avait expédiés par le chemin de fer à l'adresse d'un de ses amis; mais qu'il a soutenu en même temps qu'il n'avait fait qu'user du droit qui lui appartient;

Attendu qu'il ne s'agit pas aujourd'hui de rechercher si le défendeur en garantie a usé d'un mode de chasse autorisé ou prohibé par la loi; mais bien s'il a abusé du droit de chasse qui lui a été concédé;

Attendu que le fait de prendre dans une chasse un nombre déterminé de lapins ne constitue pas, en soi, un abus de jouissance; qu'il y a un second terme dont il faut tenir compte : la richesse de la chasse;

Attendu que, pour savoir s'il y a eu abus de jouissance d'un droit de chasse, il est indispensable de connaître ce qu'était la chasse au moment de la souslocation et ce qu'elle sera à la fin du bail;

Attendu qu'il est possible que la chasse des Dunes-de-Loon et de Gravelines soit trop peuplée à la fin du bail et que la demande de Bourgeois-Pannier est au moins prématurée;

Par ces motifs;

Joint la demande en garantie à la demande principale;

Déclare le demandeur mal fondé, le déboute avec dépens.

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Du 16 juin 1887. Trib. civ. de Dunkerque. M. Tabary, prés.; M. Pelletreau, proc: de la Rép.; Mes Lebleu et Govare, av.

(Journal la Loi, du 30 juin 1887.)

OBSERVATIONS. -En cas d'abus de jouissance de la part du locataire, le propriétaire ne peut, en général, intenter une action en dommagesintérêts avant l'expiration du bail, que si le dommage causé n'est pas susceptible d'être réparé avant cette époque. (V. Aubry et Rau, Cours de Droit civil, IV, p. 482.) Dans l'hypothèse présente, la destruction d'un nombre de lapins par trop considérable constitue un dommage très réparable; il y avait donc lieu d'ajourner les parties à la fin du bail, pour le règlement des comptes qui pourra être demandé, s'il y a lieu, par le propriétaire.

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Le locataire auquel un propriétaire a affermé le droit de chasse sur ses terres peut agir directement contre ce propriétaire pour obtenir la suppression des grillages établis par le fermier de ces mêmes terres, qui font obstacle à l'exercice du droit de chasse : le trouble ainsi apporté par le fermier rural à la jouissance du locataire de la chasse ne constitue pas une de ces voies de fait dont le bailleur, aux termes de l'art. 1725 C. civ., n'est pas tenu de garantir le preneur. — Lorsque le bailleur s'est expressément réservé le droit de chasse, pour en jouir par lui-même ou par autrui, le fermier ne peut apporter aucun obstacle à la jouissance complète de ce droit : spécialement il ne peut, dans le but de garantir ses récoltes des atteintes du gibier, établir autour des pièces louées des grillages faisant obstacle au passage du gibier et à la libre circulation des chasseurs.

BOULEY C. DE SARDELYS ET ROYER.

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LE TRIBUNAL : Attendu que Bouley, cessionnaire du droit de chasse que Deville de Sardelys, ou son auteur, s'était réservé sur le domaine de la Doutre, sis commune d'Ozouer-la-Ferrière, affermé à Rayer, a assigné Deville de Sardelys, pour voire dire qu'un grillage en fer, d'une hauteur de 1 m. 10, avec ronces métalliques au-dessus, établi sur les terres du domaine, serait supprimé comme gênant la circulation des chasseurs et nuisant au passage du gibier; que, pour le préjudice à lui causé, il lui a demandé une somme de 2.000 fr., à titre de dommages-intérêts; - Attendu que Deville de · Sardelys a appelé aux débats Rayer, fermier desdites terres, comme étant l'auteur du trouble apporté à la jouissance de chasse de Bouley, pour qu'il prît son fait et cause, demandant à être mis hors de l'instance; -En la forme: Attendu qu'aux termes de l'art. 1719 C. civ., le bailleur est obligé 1

faire jouir paisiblement le preneur de la chose louée; que, si l'art. 1725 l'affranchit de toute garantie pour le trouble que les tiers apportent, par leurs voies de fait, à la jouissance du preneur, sans prétendre, d'ailleurs, aucun droit sur la chose louée, c'est parce que ces voies de fait émanent de personnes qui lui sont étrangères, et qu'à raison de leur nature elles ne sauraient être considérées comme pouvant constituer l'exercice d'un droit qu'il aurait conféré; Attendu que l'établissement d'un grillage par Rayer dans les lieux à lui loués suivant acte authentique du 27 novembre 1872 ne saurait être consideré comme une voie de fait, commise par un tiers, dont parle l'art. 1725; que l'adversaire naturel et légal contre lequel Bouley pouvait et devait recourir n'était autre que Deville de Sardelys, sauf à celui-ci de se replier en garantie, ainsi qu'il l'a fait, contre l'auteur de l'établissement du grillage; que Bouley était d'autant mieux fondé à actionner Deville de Sardelys qu'il ignorait quelle stipulation avait pu intervenir entre ce dernier et Rayer, et que les faits dont il se plaignait pouvaient toucher au bail intervenu entre eux; qu'il importe, en conséquence, que Deville de Sardelys soit maintenu.

en cause;

Au fond: - Attendu qu'en louant ses biens à Rayer, le bailleur s'est réservé le droit exclusif de la chasse, pour en disposer comme il l'entendrait; - Attendu que cette réserve expresse par le bailleur du droit de chasse, pour en jouir par lui-même ou par autrui et comme bon lui semblerait, doit s'entendre dans ce sens que le réservataire a le droit de chasse, sans qu'aucun obstacle puisse être apporté par le fermier à la jouissance complète de ce droit; que, cependant, Rayer a fait enclore les terres par lui occupées, au bord du chemin de Roissy à Ozouer-la-Ferrière et sur une longueur d'environ 1.100 mètres, au moyen d'un grillage surmonté d'une ronce métallique, et dépassant la hauteur d'nn mètre; qu'il est incontestable que cette clôture fait réellement obstacle au passage du gibier et à la libre circulation des chasseurs, et qu'en l'établissant Rayer a contrevenu aux dispositions du contrat intervenu entre son bailleur et lui; — Attendu, il est vrai, que Rayer prétend que, s'il a établi un grillage, c'était pour protéger contre les lapins ses récoltes, qui étaient ravagées; qu'il a été d'autant plus forcé de le faire que, par suite des agissements de Bouley lui-même, qui avait muni de grillages les propriétés voisines, le gibier se trouvait pourchassé sur ses terres à lui, Rayer, lesquelles formaient la seule issue possible; qu'il y avait là pour lui une aggravation de la servitude des lieux à laquelle il était urgent de porter remède; Mais attendu que, sous le prétexte de protéger ses récoltes contre l'invasion du gibier, Rayer ne saurait paralyser l'exercice du droit de chasse, tel qu'il a été réservé et ensuite concédé à Bouley; qu'au cas de dégâts de lapins, la loi fournit à Rayer le moyen de se faire indemniser, et qu'il appartient à ce dernier d'en user, s'il le juge ainsi; Par ces motifs; Déclare l'action de Bouley contre Deville de Sardelys recevable; de maintenir ce dernier en cause; grillage, etc.

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Dit qu'il y a lieu Dit que Rayer sera tenu d'enlever le

Du 5 mars 1886. Trib. civ. de Melun. M. Louiche, prés.

(Sirey, 1887, p. 92.)

OBSERVATIONS.

Voir dans le même sens un arrêt de la Cour de

Paris, du 26 mars 1878, Garcet, rapporté en note, § 87, p. 93.

Quant au droit du locataire de la chasse, il est indiscutable : le droit de chasse comporte, à la charge du propriétaire bailleur, l'obligation de faire jouir le preneur, droit garanti par une action que ne peuvent infirmer d'autres contrats passé par ce même bailleur.

Quant au fermier rural, la jurisprudence actuelle, admettant qu'à défaut de réserve expresse le propriétaire ou ses ayants cause ne peuvent passer sur les terres préparées et ensemencées sans commettre un délit (V. notamment Rép. XII, p. 172), à quoi bon empêcher le fermier de protéger ses terres, et de quoi le propriétaire ou son locataire peuvent-ils se plaindre, puisque, clôturées ou non, elles ne peuveut être traversées par eux? On aurait donc pu décider que le trouble de jouissance n'est pas suffisamment caractérisé pour autoriser l'action du locataire de la chasse eontre le propriétaire bailleur.

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MONSIEUR LE PRÉFET, à plusieurs reprises, j'ai appelé votre attention sur la nécessité de mettre fin aux plaintes auxquelles donne lieu le braconnage sous ses diverses formes.

Désireux de faciliter la tâche des agents de la force publique auxquels incombe principalement le soin de rechercher les infractions à la loi, j'ai décidé qu'il y avait lieu désormais de communiquer à la gendarmerie la liste des personnes auxquelles des permis de chasse ont été délivrés.

Cette mesure me paraît présenter de nombreux avantages.

Elle rendra plus aisée la répression du délit de chasse sans permis, dont la constatation est d'autant plus difficile que l'étendue du territoire à surveiller dans chaque département est hors de proportion avec le nombre des agents qui en sont chargés.

Elle préviendra les méprises assez fréquentes auxquelles sont exposés les gendarmes, auxquels il arrive de requérir l'exhibition des permis, alors que les chasseurs en sont pourvus, et même de se livrer à la poursuite de ces derniers.

De son côté, l'Administration en retirera des résultats utiles. La communication à la gendarmerie des listes des permis délivrés vous permettra, en effet,

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