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ennemis qu'il pourroit avoir. C'est ce que l'Ange, qui reprefentoit Dieu, lui expliqua, lorfqu'il lui dit après le combat, qu'il feroit au deffus de tout, puifqu'il avoit prévalu comte Dieu même.

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Il n'a point abandonné le jufte, lorsqu'il a été vendu. Jofeph, un des fils de Jacob, fut vendu par fes freres, à des marchands qui l'emmenerent en Egypte, & le vendirent à Putiphar officier de Pharaon. La femme de Putiphar n'aiant pû obliger Jofeph de fatisfaire l'amour deregle qu'elle avoit conçu pour lui, l'acufa auprès de fon mari, du crime dont elle feule étoit coupable. Il fut donc mis en prifon tout innocent qu'il étoit. Mais Dieu qui ne l'avoit pas abandonné, defcendit avec lui dans la prison, & lui en adoucit la rigueur, parce qu'il le rendit agréa ble à l'Intendant de la prifon, qui fe déchargea même fur lui du foin de tous les prisonniers, Deux ans après, aiant expliqué les fonges de Pharaon, ce Prince le fit gouverneur de toute l'Egipte, lui abandonnant toute fon autorité, & ne fe retenant que le rang & le nom de Roi. C'est ainfi que la Sageffe, comme il est dit ici, ne l'aiant point quité dans fes chaînes, lui mit le fceptre entre les mains; le rendit maître de ceux qui l'avoient traité injustement; fit connoître fon innocence; convainquit de mensonge ceux qui l'avoient deshonoré; enfin lui donna un nom éternel, puifque la memoire de fa vertu & de la gloire dont Dieu l'a recompenfée, ne s'effacera jamais.

Il eft aifé de juger en quel fens l'Eglife aplique aux Saints, & principalement aux Martyrs, ce que l'Ecriture dit de Jacob & de Jofeph. Les juftes marchent fous la conduite de Dieu par la voie droite de l'Evangile. Il leur fait voir fon roiau

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ine, & il les foutient dans toutes les perfecutions qu'ils ont à fouffrir, par la vûe de ce poids éternel de gloire que produit le moment court & leger des afflictions de cette vie. Il leur donne la 2. Cor. 4. fcience des Saints, qui confiste à connoître en quoi confifte le veritable bonheur de l'homme, & ce qu'il faut faire pour l'aquerir. Il est lui-même la recompenfe de leurs travaux, il eft leur richeffe; & contens de lui, ils méprisent avec joie tous les biens du fiécle. Il les éclaire & les foutient contre les embûches du Demon, & contre les artifices dont le monde fe fert pour les atirer à lui. Leur vertu leur fufcite des ennemis, mais Dieu les protege contr'eux; & s'il les abandonne à leur rage, comme il y a abandonné les Martyrs, il eft avec eux au milieu de leurs fouffrances; il defcend dans leur prison, il adoucit leurs peines par l'onction de fa charité, & par la vue de la couronne qu'il leur prepare: il les foutient dans le combat, & il leur fait fentir par leur propre experience, que la Sageffe eft plus puiflante que toutes chofes, puifque des hommes fi foibles par eux-mêmes, deviennent par elle capables de tout fouffrir pour l'amour de Dieu. Ils fortent enfin victorieux du combat; le Seigneur leur met le fceptre à la main, & leur donne la poffeffion de ce roiaume, qu'il leur avoit fait voir; & s'ils ont été traitez des hommes comme des méchans & des feducteurs pendant leur vie, il fait connoître & reverer après leur mort leur innocence & leur fainteté par toute la terre. C'eft ainfi que toute la juftice chrétienne fe peut reduire à ces deux points : N'estimer que Dieu, & ne rien craindre fous fa conduite & fous fa protection.

C'Eft à vous, Seigneur, que l'Ecriture atri

bue tout ce qu'elle nous raconte de vos Saints: c'est vous qui les conduifez, qui les éclairez, qui les foutenez. En leur faifant voir qu'ils peuvent tout avec vous, vous leur faites connoître que fans vous ils ne peuvent rien. Nous reconnoiflons avec eux notre foibleffe & nous implorons le fecours de votre grace. Montrez-vous à nous, Seigneur, & nous mépriferons tout pour vous: foiez notre protecteur; & nous fouffrirons tout pour vous.

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L'Explication de l'Evangile, comme ci-devant page 71.

LE XIX. MAI

SAINT PIERRE CELESTIN. Double.

CE Saint étoit natif d'Ifernia dans l'Abruffe,

& s'apelloit Pierre de Monron. Il renonça au monde dès fa jeuneffe, & fe retira dans les deferts, où il mena une vie tres-auftere, domtant fa chair par le jeûne, le cilice & le travail des mains, & fortifiant fon efprit par la priere, à laquelle il paffoit les jours & les nuits. Sa fainteté attira auprès de lui plufieurs perfonnés, qui formerent une Congregation fous la Regle de S. Benoît, avec des Conftitutions d'une obfervance plus étroite & plus rigide, Il fit approuver fon Inftitut par Gregoire X. au Concile de Lion en 1274. & le Pape donna à fa Congregation le nom de S. Damien, qu'elle conferva jufqu'au Pontificat de fon fondateur. Nicolas IV. étant

mort le 4. Avril 1292. les Cardinaux ne pou vant convenir fur le choix de fon fucceffeur, le Siege vaqua plus de deux ans, après lefquels, à la perfuafion de Latin Cardinal d'Oftie, on nomma notre Saint, qui étoit fort âgé, & qui ne penfoit à rien moins qu'à cette élection qui fe fit le 5. Juillet 1294. Auffi fut-il tellement furpris de cette nouvelle, qu'il ne penfa qu'à s'enfuir avec un de fes difciples nommé Robert. Mais il fe trouva environné tout d'un coup d'une fi grande foule de peuple qui le prioit de fe rendre à l'election qu'on avoit faite, que ne pouvant écha per il demanda à Robert s'il le vouloit suivre. A quoi cet humble Solitaire répondit en ces termes dignes de l'inftruction qu'il avoit reçûe de celui à qui il les difoit: Je vous fuplie de m'épargner la peine les perils où vous voulez m'engager, & de fouffrir que je fois l'heritier de votre pauvre cellule, & du repos que vous y goutiez, fans vous accompagner dans une dignité qui n'a pas moins d'épines, qu'elle a d'éclat & de commoditez. Le Saint aiant donc laiffé retourner fon Religieux, s'en alla monté fur un âne à Aquila ville de l'Abruffe, où il fut confacré, & prit le nom de Celestin V. qui a paffé dans fa Congregation, qui s'apelle encore à prefent des Celeftins. Il crea auffi-tôt douze Cardinaux d'un grand merite. Il s'ennuia bien-tôt du Pontificat, auquel il fe reconnoiffoit peu propre; & après la mort du Cardinal d'Oftie qui lui fervoit beaucoup de fes confeils dans le gouvernement il ne penfa plus qu'à fe retirer: & il executa ce deffein fix mois après fa confecration, aiant auparavant fait un decret pour declarer qu'un Pape pouvoit fe demettre lui-même de la Thiare Pontificale. Il prit donc le chemin

de fa chere folitude, avec une joie qui paroif foit fur fon visage. Il penfoit bien y gouter un repos tranquille le refte de fes jours; mais Dieu qui vouloit exercer fa vertu, lui avoit destiné une autre retraite, où il confomma fa vie par une patience animée, foutenue & fanctifiée par une oraifon continuelle. Il reçût enfin par une mort precieuse la recompenfe de fa penitence, de fon humilité, & de fes fouffrances. Clement V. le canonifa à la follicitation de Philippe Roi de France, le 5. Mai 1313.

UN cœur bien rempli de vous, Seigneur,

ne veut que vous, ne cherche que vous, & ne peut-être malheureux, parce qu'il vous trouve par-tout, mais plus près dans l'obfcurité que dans la fplendeur, & dans les fouffrances que dans les delices.

LE MEME JOUR.

MEMOIRE DE S. PUDENTIENNE,

LE Breviaire Romain dit que fainte Puden

tienne ou Potentienne, étoit fille du Senateur Pudens. On croit que c'eft celui dont S. Paul fait les recommandations, à la fin de fa feconde lettre à Timothée. On dit que ce Senateur fut converti à la foi par S. Pierre, avec toute fa famille compofée de deux fils nommez Novat & Timothée, & de deux filles, à favoir Pudentienne & Praxede. Ces deux vierges vendirent leur bien, & en diftribuerent l'argent aux pauvres, ne penfant qu'à fe fanctifier dans la tetrai te par les prieres & par les jeûnes. Pudentienne mourut la premiere, & fut enterrée dans le ci

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