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partage des Juftes, à qui les Apôtres ont dit que a. 14. c'eft par beaucoup de peines & d'afflictions qu'on 21. doit entrer dans le roiaume de Dieu.

Pendant que les Saints font ainfi affligez ou s'affligent eux-mêmes, le monde eft dans la joie. Les méchans que l'Ecriture apelle du nom de monde, parce qu'ils font poffedez & enïvrez de l'amour des créatures, & qu'ils ne connoiffent ou n'aiment point le Créateur; ce monde dont Dieu nous a feparez par le batême; ce monde incapable de l'Efprit de Dicu; ce monde l'ennemi de J. C. & de ceux qui font à lui: ce monde, dis-je, eft dans la joic, il ne penfe qu'à fe divertir, il évite l'affliction, & il cherche tout ce qui peut le fatisfaire; il marche à fon aife par la voie large & facile, il s'abandonne à tous les defirs dereglez de fon cœur, & il goûte tant qu'il lui eft poffible la douceur mortelle des plaifirs qui le feduifent & le perdent.

Voilà deux états bien differens, mais qui ne dureront pas long-tems. Encore un peu, & ces juftes qui pleurent ne pleureront plus, ccs méchans qui rient ne riront plus. Une joie éternelle effuira les larmes des uns, & des larmes éternelles étoufferont toute la joie des autres. Les affliЄtions de cette vic qui paroiffent longues pendant qu'elles durcnt, paroîtront courtes quand elles feront paffées, & qu'elles auront fait place à un bonheur qui ne finira jamais. Les gens du monde, de leur coté, feront épouvantez de l'aveuglement effroiable qui aura fait aimer & rechercher avec tant de paffion, des plaifirs fi courts & fuivis d'une mifere fi longuc.

Que les juftes ne s'ennuient donc pas. Quelques grandes que foient leurs afflictions, ce font des douleurs d'enfantement. Ces douleurs font

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violentes, mais elles paffent ; & le fruit qu'elles produifent les fait oublier bien promtement. Qu'ils ne portent point envie à la profperité des méchans. Le chemin par où ils marchent est tout femé de rofes, mais il inene au précipice. La voie étroite au contraire conduit au falut. Qu'on ne s'étonne pas pourquoi les Saints ne prennent point de part aux delices du fiecle, c'eft qu'ils ne veulent pas être dannez avec le monde. Ils ont apris Lac 21. de J.C. que bien-heureux font ceux qui pleurent, parce qu'ils feront confolez ; & que malheur á ceux qui rient parce qu'ils pleureront. Les uns & les autres n'aiment point à pleurer; mais ce qui les diftingue, c'cft que les gens du monde rient ici bas, parce qu'ils ne s'atendent pas à pleurer ailleurs: & les difciples de J. C. plcurent en cette vie, afin de n'être pas obligez de pleurer éternellement en l'autre. Ils tremblent dans la profperité, ils fuient les plaifirs, ils cherchent l'afflition, ils fe retranchent beaucoup de chofes dont ils pourroient, ce femble, jouir fans fcrupule: & pourquoi cela? Parce qu'ils craignent de s'atacher au monde, dont ils favent quelle doit être la fin; ils craignent d'y trouver une douceur qui le leur faffe aimer; parce que voulant s'afsurer qu'ils vont bien, & fachant d'ailleurs qu'il n'y a qu'une voie laquelle cft étroite & difficile, toute voie large leur fait peur; parce que le S. Efprit affurant dans l'Ecriture que tous ceux qui veulent vivre avec pieté en J. C. fouffriront perfecution, ils aprehendent de n'être pas perfecutez: & ils aiment mieux fe perfecuter eux-mêmes, que de ne pas fouffrir ce que doivent fouffrir tous les juftes. Voilà, Seigneur, voilà ce que le monde ne comprend point; voilà ce qu'il traite de folie;

mais voilà ce qu'il reconnoîtra lui-même trop tard avoir été une veritable fageffe. Donnez-nous votre efprit, Seigneur, ôtez-nous l'efprit du monde. Faites-nous aimer la voie qui mene à vous, toute rude & toute penible qu'elle eft: faites-nous haïr la voie qui éloigne de vous, quelque douce & agréable qu'elle puiffe paroître.

Répandez par mifericorde, mon Dieu, des amertumes falutaires fur les plaifirs dont l'amour nous fouille & nous danne. Répandez la douceur de votre grace fur les larmes qui nous purifient & nous fauvent. Que nous pleurions, Seigneur, puifqu'il faut pleurer pour être confolé; que nous foions bien-aifes de pleurer, puifque par nos pleurs, nous meriterons d'être confolez. Heureux celui, qui pleure pour vous dans le tems, puifqu'il fera confolé par vous-même, & que vous ferez l'objet de fa joie dans l'éternité.

LE XXII. AVRIL,

S. SOTER ET S. CAIUS PAPES.
Semi-double.

Saint

SAINT SOTER.

Aint Soter fucceda à faint Anicet l'an 168. fous l'Empire de Marc-Aurele, & fut l'onziéme Pape depuis les Apôtres. C'étoit la coûtume de l'Eglife Romaine, depuis le commencement de la Religion Chrétienne, de rendre toute forte d'affiftance aux Fidéles de toutes les Eglifes en foulageant leur pauvreté, & en fourniffant à ceux qui travailloient aux métaux ce

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qui leur étoit néceflaire. S. Soter, loin d'abolir ou affoiblir cette louable coutume, prit foin au contraire de l'acroître & de la fortifier. Il fit diftribuer libéralement les aumônes destinées au foulagement des fidéles, & il confoloit par la douceur de fes discours avec une tendreffe de pere, les Chrétiens qui alloient à Rome. Il écrivit avec le même zele à l'Eglife de Corinthe, & S. Denis, qui étoit Evêque de cette ville, fit lire fa lettre le Dimanche dans l'affemblée publique, avec celle de faint Clement; & il af fura S. Soter, qu'il continueroit à faire lire ces deux lettres, parce qu'il fçavoit qu'on les lifant, ils ne manqueroient jamais de préceptes tresfalutaires. Ce témoignage fi glorieux à l'Eglife Romaine, & à S. Soter, nous fera toujours regretter la perte de fa lettre, en nous faifant admirer la charité paternelle, & la follicitude catholique dont fon cœur étoit rempli. Il mourut gloricufement, après un Pontificat de huit ans, & cut S. Eleuthére pour fucceffeur.

PEre de nos corps & de nos efprirs, donnez à tous vos faints Pontifes, comme à celui-ci ; donnez à tous ceux que vous commettez au gouvernement de votre Eglife, donnez à nous-mêmes, Seigneur, de joindre l'aumône & l'inftruction, pour rendre l'une & l'autre parfaite.

SAINT CAIUS.

LRPape mais, faint Caius lui fucE Pape Eutychien n'aiant gouverné l'Eglife ceda le 17. Decembre l'an 283. fous l'Empire de Carus. On fait ce S. Pape parent de l'Empe

reur

reur Diocletien, & oncle de la célebre Martyre
fainte Sufanne. Si les tempêtes qui agitent un
vaificau éprouvent la fcience & la fageffe du
pilote qui le gouverne, la perfecution qui s'éle-
va à Rome du tems de Caius lui donna lieu de
faire paroître une conftance digne d'un Pontife
de J. C. Auffi en donna-t-il de gloricufes mar-
ques, par le foin qu'il cut de tant de Chrétiens
que S. Sebaftien avoit convertis. Car il confeilla
à Cromace d'en retirer une partie chez lui ; &
lorfqu'ils allerent à la campagne, il leur donna
le faint Prêtre Polycarpe, pour les accompagner.
Pour lui, il demeura à Rome avec S. Sebastien
& quelques autres fideles, & il paffoit avec eux
les jours & les nuits en jeûnes & en priercs, pour
obtenir de Dieu la couronne du martyre. Le
grand nombre de ceux à qui elle fut accordée
fit bien voir que Dieu avoit exaucé des prieres
fi ferventes. S. Caius qui furvécut à ces illuftres
Martyrs, reçût enfin la récompenfe de fes ver-
tus, par une mort gloricufe le 22. Avril l'an
296. & eut pour fuceffeur S. Marcelin.

CE Martyr precedé de tant de Martyrs, a part
avec vous, Seigneur, à tant de couronnes. Ses
bonnes œuvres ne l'ont pas fuivi feulement, mais
l'ont devancé dans le ciel..

A LA MESSE.

L'introit, comme ci-devant, page 76.
Collecte.

BEatorum Marty- Seigneur, nous vous prions
rum, pariterque qu'en ces fères de vos
Pontificum Soteris & bienheureux Martyrs & Pon-
Tome VII.

E

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