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n'aura de valeur pour nous que le jour où nous serons en état de dire aux Américains : « Vous pouvez nous écraser avec vos immenses syndicats industriels; mais vous ne nous ôterez pas nos forêts, et à elles seules elles valent les 5 ou 6 milliards de dollars que vous étalez dans une trentaine de vos industries >>.

(La Presse, de Montréal).

L'ALIMENTATION DES POISSONS DE VIVIERSA

Dans la pisciculture moderne, le vivier est souvent peuplé de telle sorte que la nourriture produite naturellement ne suffit pas. On est donc forcé de venir en aide, soit en favorisant la production des matières nutritives, soit en fournissant directement celles-ci aux poissons. Les aliments qui présentent le plus d'avantages à ce point de vue sont ceux qui renferment une forte proportion de protéine. Parmi ceux-ci on doit signaler tout particulièrement les différentes poudres de viande; la poudre de viande (Fleischfuttermehl) de Liebig est particulièrement à recommander en raison de sa composition constante. La poudre de Liebig a la composition centésimale suivante:

Eau....
Protéine..
Graisses..

Substances minérales...

5 à 8%

76 à 82 %
11 à 15 %

I à 2%

Cette poudre est un produit de déchet que l'on obtient dans les grandes fabriques de la Compagnie d'extrait de viande Liebig à Fraybentos (Amérique du Sud), au cours de la fabrication de l'extrait de viande. Cette poudre a encore l'avantage d'être fournie desséchée dans des conditions parfaites de préparation, de sorte qu'elle se conserve indéfiniment. Enfin, grâce à la façon dont se fait l'extrait de viande, tous les micro-organismes, susceptibles de devenir pathogènes, sont dé

truits.

Maint éleveur de truites, dont l'habitation est éloignée du chemin de fer ou de localités importantes, ne peut pas se procurer chaque jour de la chair de poisson ou de la viande de cheval, ou encore des déchets

1. Fischerei-Zeitung, no 31, 1899.

d'abattoir; il trouve dans la poudre de Liebig un très bon succédané remplaçant la nourriture fraîche.

Aux plus jeunes alevins, on donne la poudre telle quelle ou bien on la tamise; la poudre, ainsi distribuée, flotte pendant un moment sur l'eau et est dévorée avec beaucoup d'avidité par les jeunes truites. Lorsque les alevins sont devenus un peu plus grands, on prépare une sorte de pâtée très épaisse avec cette poudre, à laquelle on ajoute de la farine de seigle et un peu de sel; ce mélange est ensuite traité dans une machine à hacher. La pâte hachée sort de l'appareil sous la forme d'un boudin; on sèche celui-ci au soleil ou au four; on peut alors le distribuer aux poissons, pour lesquels il constitue une nourriture bonne et substantielle. Suivant le calibre adapté au hachoir, la nourriture peut servir pour des poissons de différentes grandeurs.

Cette poudre peut aussi être utilisée pour les carpes et pour divers autres poissons. Avant d'être distribuée aux poissons, la poudre doit être trempée ou délayée dans de l'eau bouillante. On la jette dans l'étang là où l'eau n'est pas trop profonde. La poudre qui n'est pas consommée par les carpes l'est par la petite faune de l'étang qui constitue leur nourriture naturelle, de sorte que celles-ci peuvent en profiter aussi bien immédiatement que médiatement. On ne doit commencer l'alimentation que lorsque l'eau est devenue assez chaude (environ† 15o Réaumur), au courant du mois de mai.

On en donne d'abord de faibles quantités, puis on augmente progressivement, de façon à distribuer le maximum aux mois de juillet-août. On diminue en septembre et à la fin de ce mois l'alimentation doit cesser complètement. Pour produire une livre de carpe, il faut compter 3 à 4 livres de poudre. Pour une livre de truite, 5 à 6 livres, de sorte qu'au prix moyen de 7 francs les 100 livres on obtient un rendement satisfaisant.

(Bulletin de la Société centrale d'aquiculture.)

LA DÉFENSE CONTRE LA GRÊLE

Depuis quelques années, en Styrie et en Italie, on se livre à des expériences, qui paraissent avoir donné d'excellents résultats, sur les moyens de prévenir les orages de grêle. On établit, sur les points culminants de la région que l'on veut préserver, des canons ou d'autres pièces d'artil lerie plus ou moins rudimentaires. Quand un orage menaçant se pré

sente, on tire dans la direction des nuages de manière à produire des détonations aussi fortes que possible. L'ébranlement produit par ces détonations a pour effet d'empêcher les grêlons de se former et de forcer les nuages à se résoudre en pluie.

Ces essais ont produit des résultats si remarquables qu'ils ont excité un véritable enthousiasme dans les contrées voisines; aussi, commencés seulement il y a quatre ans en Styrie, ils se sont étendus avec la plus grande rapidité dans la Vénétie, la Lombardie, le Piémont. De nombreuses communes se sont groupées pour unir leurs efforts et obtenir des résultats plus complets.

On compte déjà beaucoup de syndicats comprenant jusqu'à 20 et 30 communes et possédant 300 et 400 stations de tir. Les savants se sont attaqués à cette importante question; les gouvernements eux-mêmes s'en sont préoccupés, et enfin, au mois de novembre dernier, un grand congrès s'est tenu dans le Piémont, à Casale-Montferrato, et, après quatre jours de discussion, l'ordre du jour suivant a été adopté :

« Le Congrès, ayant pris bonne note des résultats obtenus avec les expériences dans le Piémont, la Lombardie, l'Emilie, la Toscane et la Styrie, demeure convaincu

« 1° Qu'avec les effets des détonations nous sommes en bonne voie pour résoudre le grave problème d'éviter la grêle;

« 2o Que les résultats obtenus cette année ne peuvent être plus encou

rageants. >>

« Et il émet le vœu :

Que les régions dans lesquelles ont été faits, cette année, les premiers essais trouvent moyen de compléter leur défense sur la base des expériences déjà acquises. »

Ilya là également un intérêt de premier ordre pour notre agriculture. La France ne perd pas moins de go millions de produits par an du fait de la grêle : c'est à peu près l'équivalent du principal de l'impôt foncier.

Dans une conférence faite à Villefranche (Rhône), le 15 janvier dernier, M. Antonin Guinand, vice-président de l'Union du Sud-Est des Syndicats agricoles, a rendu compte des résultats obtenus en de nombreuses localités et signalés au congrès.

Ces résultats, dit-il, ont été obtenus sous les conditions suivantes : 1° Que le tir soit fait en temps opportun, c'est-à-dire soit commencé dès que l'orage arrive et même avant si c'est possible;

2° Qu'il soit fait avec ensemble et suivant les règles normales;

3° Qu'il soit suffisamment nourri au début, 3 ou 4 coups à la minute, puis un coup toutes les trois ou quatre minutes;

4° Qu'il dure et se prolonge tant que l'orage n'est pas complètement écarté, sous peine de voir l'orage se reformer et la grêle tomber;

5° Qu'il soit fait par un nombre de canons s'appuyant les uns les autres et non isolés;

6o Qu'il soit fait par des canons suffisamment rapprochés, c'est-à-dire placés de 500 à 1.000 mètres les uns des autres.

Il s'ensuit donc que les canons doivent être placés non pas sur les sommets, mais sur le territoire même qu'on veut protéger, puisque la grêle tombe exactement tout autour des batteries, là où il cesse d'y avoir des canons.

Le gouvernement italien livre aux stations de tir la poudre de la guerre de 1859 à raison de 30 centimes le kilog. Il faut de 65 à 100 grammes de poudre par coup. La détonation produit un sifflement (sibillo) qui indique la hauteur qu'atteint la colonne d'air : environ 2.000 à 2.500 mètres.

Le tir doit être rapide au début, c'est-à-dire 3 ou 4 coups à la minute, puis un coup toutes les trois ou quatre minutes, dès que le nuage se montre et tant qu'il n'a pas disparu.

La dépense d'installation varie suivant qu'on place un canon tous les 1.000 mètres, c'est-à-dire couvrant cent hectares, ou tous les 500 mètres, c'est-à-dire couvrant 25 hectares; dans le premier cas, elle est d'environ 250 fr. pour 100 hectares, y compris les cabanes, soit 2 fr. 50 par hectare; dans le second cas, de 1.000 fr., soit 10 fr. par hectare, dépense une fois faite.

La dépense annuelle, y compris l'assurance de l'artilleur, sa rétribution, la poudre pour 500 coups par pièce, arrive à environ 100 fr. par pièce, soit 1 fr. par hectare, s'il y a une pièce tous les 100 hectares, ou 4 fr. s'il y en a une tous les 25; ce qui est beaucoup plus sûr.

I

A la suite de la conférence de M. Guinand il vient de se constituer dans le Beaujolais, sur les communes de Denicé, Montmelas et Blacé un syndicat de défense contre la grèle par les tirs d'artillerie. La commission d'organisation a déjà recueilli 8.500 francs sur la seule petite commune de Denicé. A Denicé et dans les communes limitrophes, l'État a dépensé, pendant les dix dernières années, tant en subventions qu'en dégrèvements à la suite des ravages de la grêle, près de 200.000 francs, correspondant à un dommage d'environ quatre millions.

BIBLIOGRAPHIE

- En mars 1899, à la Société royale de Dublin, M. Fisher, professeur d'économie forestière à Coppers-Hill, a fait une conférence forestière dont il nous envoie le texte en un fascicule des Economies Proceedings de la Royal Dublin Society (1). Étudiant la question des forêts de la manière la plus pratique, il montre d'abord la nécessité d'accroître la surface laissée dans le Royaume-Uni, puis les principaux défauts du traitement des forêts en Angleterre, ensuite les moyens de rendre la forêt rémunératrice en jeune futaie, en taillis sous futaie, ou en sapinière, et enfin les conditions où se trouve et celles où il y a lieu de mettre la forêt en Irlande. Une carte des fles britanniques donne en chaque comté, proportionnellement à l'étendue totale du comté, un carré ombré représentant les terrains boisés et un carré blanc représentant les terres incultes. C'est frappant en somme 3 millions d'acres de bois et plus de 28 millions d'acres de terrains incultes, plus d'un tiers du territoire! Les bois sont d'ailleurs beaucoup trop clairplantés et menés avec ignorance. Ce n'est pas seulement en Angleterre que les bois des particuliers sont ainsi traités, à la diable, sans que les propriétaires sachent qu'il y a mieux à faire.

L'Irlande est extrêmement pauvre en bois ; c'est le pays le moins boisé de toute l'Europe. M. Fisher passe rapidement en revue les meilleurs procédés de plantation, dans les terrains tourbeux notamment, et en les exposant d'après des faits constatés dans le pays. Il établit qu'il serait utile de créer quelques forêts de l'État en Irlande où elles pourraient servir de modèles, et d'accorder aux agences privées des avances pour reboisements à titre d'amélioration du sol; mais, pour l'un et l'autre objet, il est indispensable d'avoir des forestiers de métier attachés à la commission territoriale, comme en ont déjà les États-Unis. Après indication des conditions spéciales et regrettables que fait aux bois le mode d'acquisition du sol en vigueur en Irlande, l'auteur indique qu'il serait bon de donner à Dublin l'instruction forestière au Collège scientifique et de mettre à la disposition de cet enseignement un terrain boisé d'étendue suffisante.

1.

Lecture on Forestry, given before The Royal Dublin Society, March 1899, by W. R. Fisher, B. A., Assistant Professor of Forestry, Royal Indian Engineering collège. Williams and Norgate, 11, Henrietta-Street, Covent Garden, London. Prix, un shilling.

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