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Dans le cas de non-convention préalable, lorsqu'un règlement intérieur, affiché dans l'atelier, ou un usage constant et connu des ouvriers du même genre, détermine le prix de la journée ou de la pièce d'ouvrage, c'est à ce règlement, à cet usage constant qu'il faut se rapporter.

Les chefs d'établissement ont le droit de faire des règlements sur l'ordre du travail et la discipline de l'atelier; mais lorsque ces règlements touchent aux conventions antérieures de salaires et de travail, il faut le consentement des ouvriers; ces règlements ne peuvent avoir d'effet rétroactif.

Le tarif doit être fait du consentement libre des deux parties; les patrons et les ouvriers sont sans droit pour l'établir sans le concours des uns et des autres; chacun ne peut consentir une convention que pour soi-même.

Les usages de fabrique ne sauraient prévaloir contre les conventions particulières librement consenties et exécutées; ils n'ont de force qu'en l'absence de conventions.

A défaut de convention, de règlements et d'u sages reconnus, siles parties ne peuvent s'entendre à l'amiable, le juge doit décider.

Il y a dans chaque profession un prix moyen de journée ou de façon, prix le plus souvent appliqué soit par les patrons, soit par les administrations publiques qui emploient des ouvriers; c'est ce prix qui sert de base à la décision du juge.

C'est aussi ce prix que doit recevoir l'ouvrier renvoyé pendant le temps d'essai; si le patron ne veut donner qu'un prix inférieur, il doit prévenir l'ouvrier, qui, de même, doit prévenir son patron s'il veut avoir un prix supérieur.

Le prix doit se solder en argent; c'est une règle générale à laquelle il ne peut être dérogé que par des stipulations contraires expressément consenties.

La gratification ne fait point partie du salaire, elle n'en est qu'un accessoire; elle est toujours facultative; et quand même le patron y aurait en quelque sorte habitué ses ouvriers en leur en donnant à des époques fixes, il n'y est point obligé. Il en serait autrement si le patron s'y était engagé par une convention formelle; mais alors ce ne serait plus une gratification, ce serait un salaire.

IV. DE L'AFFIRMATION DU PATRON.

ART. 1781. Le maître est cru sur son affirmation pour la quotité des gages, pour le paiement du salaire de l'année échue, et pour les à-comptes donnés pour l'année courante.

Cet article n'est pas applicable, aujourd'hui que la Constitution, dans son article 13, proclame l'égalité de rapports entre le patron et l'ouvrier.

D'ailleurs, il ne s'appliquerait ni aux commis recevant une quote-part des bénéfices, ni aux cochers des voitures de places, qui ne sont que les facteurs ou préposés des entrepreneurs, ni aux ouvriers à façon, qui sont considérés comme des entrepreneurs à forfait.

V. DE LA FOURNITURE DE LA MATIÈRE.

ART. 1787. Lorsqu'on charge quelqu'un de faire un ouvrage, on peut convenir qu'il fournira seulement son travail ou son industrie, ou bien qu'il fournira aussi la matière.

Lorsque l'ouvrier fournit à la fois son travail et la matière, il y a vente, et non louage d'ouvrage ; l'ouvrier devient entrepreneur et sort de la compétence des Prud'hommes.

Cependant, reste justiciable des Conseils de

prud'hommes l'ouvrier qui ne fournit que les accessoires nécessaires à la confection de l'objet, comme l'ébéniste qui fournit le vernis et la colle; le parqueteur qui fournit les clous; le marbrierpolisseur qui fournit l'encaustique; le cordonnier et le tailleur qui fournissent le fil.

VI. DE LA PERTE DE LA CHOSE.

ART. 1788. Si, dans le cas où l'ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr, de quelque manière que ce soit, avant d'être livrée, la perte en est pour l'ouvrier, à moins que le maître ne fût en demeure de recevoir la chose.

ART. 1789. Dans le cas où l'ouvrier fournit seulement son travail ou son industrie, si la chose vient à périr, l'ouvrier n'est tenu que de sa faute.

L'ouvrier doit prouver l'accident qu'il allègue, et s'il prétend que la matière lui a été volée, il doit établir que le vol a eu lieu, et qu'il n'y a eu ni imprudence ni négligence de sa part.

Non-seulement l'ouvrier doit restituer au fabricant la valeur des matières perdues, mais il peut encore être condamné à des dommages-intérêts.

ART. 1790. Si, dans le cas de l'article précédent, la chose vient à périr, quoique sans aucune faute de la part de l'ouvrier, avant que l'ouvrage ait été reçu et sans que le maître fût mis en demeure de le vérifier, l'ouvrier n'a point de salaire à réclamer, à moins que la chose n'ait péri par le vice de la matière.

Si le fabricant a reçu l'ouvrage, ou a été mis en

demeure de le recevoir, le salaire est dû à l'ouvrier.

Si la chose périt par un vice de la matière, le fabricant en subit la perte, à moins que l'ouvrier n'ait su que la chose était impropre à l'usage auquel on la destinait, et qu'il n'ait pas averti le fabricant de ce défaut; il serait dans ce cas passible de dommages-intérêts.

VII. DE LA VÉRIFICATION DE L'OUVRAGE.

ART. 1791. S'il s'agit d'un ouvrage à plusieurs pièces ou à la mesure, la vérification peut s'en faire par parties; elle est censée faite pour toutes les parties payées, si le maître paie l'ouvrier en proportion de l'ouvrage fait.

VIII. DES MALFAÇONS.

ART. 1792. Si l'édifice construit à prix fait périt en tout ou en partie par le vice de la construction, même par le vice du sol, les architecte et entrepreneur en sont responsables pendant dix ans.

Cet article n'est pas restreint aux édifices proprement dits, ou gros ouvrages; la responsabilité s'étend à toute espèce de constructions, notamment à la construction d'un puits.

Les principes de responsabilité applicables aux architectes et entrepreneurs ne s'appliquent pas aux ouvriers quand ils ne travaillent pas à forfait; en conséquence, la mauvaise exécution des travaux n'empêche pas que des ouvriers maçons travaillant à la journée ne réclament leurs salaires (Trib. civil de la Seine, 27 avril 1850).

Cependant, si, sans la permission de l'entrepre

neur, l'ouvrier a employé des matériaux tellement défectueux que le vice pouvait en être facilement aperçu, s'il y a eu inobservance des règles de l'art, il y aurait lieu à la demande en garantie de l'entrepreneur contre lui.

L'article 1792 n'est pas non plus applicable aux ouvriers à façon, dont la responsabilité ne dure pas au-delà de la réception faite de l'ouvrage; la réception décharge l'ouvrier de tous risques quant à la matière qui a servi à l'ouvrage reçu; mais s'il y avait vice caché dans la façon, il serait tenu de son dol ou de sa fraude, d'après les principes généraux du droit.

L'ouvrier est seulement responsable des malfaçons qui lui sont personnelles; il doit suivre les ordres et les instructions qui lui sont données; se conformer au type, au modèle, au dessin, au plan tracé; remplir sa tâche, copier exactement; mais il n'est pas tenu de perfectionner. Il y aurait malfaçon s'il retranchait ou ajoutait au modèle.

Dans le cas de malfaçons ou de détériorations,l'ouvrier ne peut alléguer son inexpérience.

Il n'y a pas lieu à responsabilité quand la malfaçon est la conséquence nécessaire du genre d'ou

vrage commandé.

Quand l'objet n'est plus en la possession du patron, et qu'il ne peut plus en faire constater l'état, il n'y a pas lieu au rabais de malfaçon.

L'ouvrier n'est pas tenu de garder pour son compte les objets mal confectionnés; il n'est responsable que des malfaçons.

IX. DE L'AUGMENTATION DU PRIX EN CAS DE CHANGEMENTS DANS LES TRAVAUX.

ART. 1793. Lorsqu'un architecte ou un entrepreneur s'est chargé de la construction à forfait d'un bâtiment, d'après un plan arrêté et

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