Page images
PDF
EPUB

le droit romain sur la matière des effets de l'adultère pût être consulté par les tribunaux de la république française, et que la novelle 117, chap. 8, pût encore être appliquée, en France, aux divers cas qui naissent des suites des déréglemens des époux, relativement à la perte des avantages matrimoniaux, ces lois, et notamment le chapitre 8 de la novelle 117, n'auraient été ni violés, ni mal et faussement interprêtés et appliqués par le jugement dénoncé; qu'en effet, d'après le texte de ces lois, la peine de la déchéance de la dot n'aurait pu être prononcée contre Marie Portes, épouse de Mathieu, frère du demandeur, qu'autant que son mari eût présenté lui-même contre elle une plainte formelle en adultère, et que, sur l'instruction de cette plainte, il eût été prononcé un jugement qui eût déclaré l'épouse convaincue de ce délit; et, de plus, que le mari eût lui-même requis l'application de la peine de la déchéance de la dot; que les juges, ne voyant en cause que l'héritier du mari, ne se seraient pas écartés de la lettre et de l'esprit de ces lois romaines, en refusant de l'admettre, même par exception, à opposer l'adultère de l'épouse de son frère, pour se dispenser de remettre la dot reçue par ce frère aux sœurs de cette épouse; que leur décision serait d'autant moins contraire à cette ancienne législation et à la jurisprudence à laquelle elle avait servi de base, qu'ils ont constaté et décidé en fait que la plainte rendue le mari en 1778 ne tendait pas formellement à constater l'adultère de l'épouse, mais seulement sa fuite de la maison maritale; que le mari avait même abandonné les suites de cette plainte, et avait resté dix-sept ans sans qu'il l'ait rappelée ou suivie, ce qui aurait écarté tout prétexte de reprise d'instance, ou de continuation d'exécution de la vengeance maritale; Attendu que les juges d'appel n'ont pas fait une fausse application de la loi du 20 septembre 1792, sur le divorce, en décidant que cette loi a abrogé l'ancienne jurisprudence sur les suites de l'adultère; que, puisque le mári qui a survécu à la publication de cette loi n'aurait pas lui-même faire prononcer la déchéance de la dot contre

pu

par

son épouse, même en recourant au seul moyen offert par la législation nouvelle, qui est la demande en divorce pour déréglemens de mœurs notoire, son héritier ne pouvait pas, surtout par une autre voie interdite par la loi, obtenir plus que n'aurait obtenu le mari par une voie légale qu'il a refusé de prendre ; - REJETTE, etc. »

Nota. Sur les peines de l'adultère, aujourd'hui, V. l'article 298 du Code civil, et les art. 337 et 338 du Code pénal.

COUR D'APPEL DE PARIS.

Lorsque le cessionnaire d'une créance a trouvé, lors de la signification du transport, des oppositions faites sur son cédant, peut-il exercer des contraintes contre le débiteur cédé, avant le jugement des oppositions? (Rés, nég.) Peut-il néanmoins, avant le même jugement, faire tous actes conservatoires contre le débiteur cédé, par exemple, former des saisies-arréts dans les mains de ses locataires? (Rés. aff.)

GRIMOND, C. LA DAME CAQUÉ.

Le 29 brumaire an 11, le sieur Froidefond transporte au sieur Grimond une somme de 9,012 fr. à lui due par la veuve Caqué, en vertu d'un titre exécutoire,

Le 5 frimaire suivant, une opposition est formée entre les mains de la veuve Caqué, à la requête d'un créancier de Froidefond.

Ce n'est que le lendemain 6 que Grimond fait signifier son transport à la veuve Caqué. Toutefois cela ne l'empêcha pas de faire un commandement à cette veuve, de faire saisir ses meubles et d'établir garnison chez elle; il fit aussi des saisiesarrêts entre les mains de ses locataires.

La veuve Caqué s'est pourvue en référé, et a demandé la nullité de ces contraintes, et même des saisies-arrêts.

En effet, le 1er nivôse, ordonnance de référé par laquelle,

attendu qu'il est constant qu'avant la signification du transport il existait sur le cédant une opposition entre les mains de la veuve Caqué, que dès lors cette veuve n'était pas la débitrice directe de Grimond, cessionnaire, il est ordonné le gardien sera tenu de se retirer, et les locataires tenus de payer, nonobstant toutes oppositions.

que

Appel de la part de Grimond. Ses moyens se trouvent consignés dans l'arrêt suivant. Quant à la veuve Caqué, elle a développé les motifs de l'ordonnance sur référé, du 1er nivôse.

Le 2 ventőse an 11, ARRÊT de la Cour d'appel de Paris, 2 chambre, par lequel :

« LA COUR, — Attendu que l'opposition formée entre les mains de la veuve Caqué, antérieurement à la signification du transport de Grimond, n'a point fait obstacle à la saisine dudit Grimond, et qu'il en résulte seulement que Grimond n'a été saisi de la créance transportée qu'à la charge de l'opposition subsistante; que, sa propriété étant ainsi assurée, il a pu faire tous actes conservatoires entre les mains des fermiers et locataires de la débitrice; mais qu'il n'a pu procéder par voie de saisie-exécution contre sa débitrice, jusqu'à ce que l'opposition formée entre les mains de la veuve Caqué eût été levée, et qu'enfin le dépôt, s'il doit avoir lieu, ne pourrait être ordonné qu'avec l'opposante; — Dır qu'il a été mal statué par l'ordonnance du 1er nivôse dernier, en ce que par icelle il a été ordonné que, nonobstant les oppositions formées sur la veuve Caqué, à la requête de Grimond, entre les mains de ses fermiers et débiteurs, non plus qu'à toutes autres qui pourraient être faites de la part dudit Grimond, ladite veuve Caqué demeurerait autorisée à toucher de ses débiteurs et locataires les sommes qui lui sont dues ou pourraient l'être par la suite; émendant quant à ce, ordonne que les oppositions tiendront jusqu'au paiement de l'obligation transportée à Grimond. »>

COUR DE CASSATION.

•S Ier.

Lorsque c'est mal à propos qu'un tribunal s'est arrété à des questions de forme, et n'a pas décidé le fond (comme s'il s'est à tort déclaré incompétent), le tribunal d'appel, qui infirme le jugement sur ces questions, peut-il ou doit-il, en ce cas, statuer au fond? (Rés. aff.) (1)

BORCHGRAVE, C. VANSTRAETen.

Le sieur Borchgrave s'était pourvu, en 1777, devant l'official ordinaire du pays de Liége, pour faire déclarer bon et valable le congé qu'il venait de faire donner au sieur Vanstraeten, locataire de son château d'Exanten. De là une instance qui n'était pas encore jugée lorsque le pays de Liége fut réuni à la France.

En l'an 8, le sieur Vanstraeten a repris cette instance devant le tribunal civil de Liége. Le sieur Borchgrave s'y est présenté, et tous deux ont plaidé au fond.

Au lieu de prononcer sur le fond, le tribunal s'est d'office déclaré incompétent, par la raison que le sieur Vanstraeten, défendeur originaire, n'était pas domicilié dans son ressort; comme s'il n'eût pas été libre aux deux parties de choisir ce tribunal pour leur juge, et comme si, de fait, ils ne l'eussent pas choisi et reconnu pour tel, en plaidant au fond devant lui.

[ocr errors]

Le sieur Vanstraeten a appelé de ce jugement devant la Cour d'appel de Liége, et a conclu à ce qu'en l'infirmant, cette Cour retînt la connaissance du principal. -De son côté, le sieur Borchgrave a adhéré à l'appel de son adversaire; et, sur sa demande en retenue du principal, il a déclaré s'en rapporter à la prudence de la Cour.

(1) V. tom. 1er, p. 405 et 407.

Là-dessus, arrêt du 14 germinal an 9, qui infirme la décision des premiers juges, déclare qu'ils étaient compétens, retient la cause, et ordonne aux parties de plaider au fond.

C'est contre cet arrêt que le sieur Borchgrave s'est pourvu en cassation. Il a allégué la violation de l'art. 17 de la loi du 24 août 1790.

Mais, le 2 ventóse an 11, ARRÊT de la section des requêtes, M. Delacoste rapporteur, par lequel :

« LA COUR,

Sur les conclusions conformes de M. le procureur-général Merlin, - Attendu que les juges d'appel, en ordonnant que les parties instruiraient devant eux, vu que les juges de première instance avaient épuisé leur pouvoir, n'ont point contrevenu aux lois qui établissent deux degrés de juridiction, ni interverti l'ordre constitutionnel des juridictions, et encore moins violé l'art. 17 du tit. 2 de la loi du 24 août 1790; qu'ils ont, au contraire, fait une juste application de cette loi; — REJETTE, etc. »

Nota. Il avait déjà été rendu d'autres arrêts semblables. V. tom. 1er, pag. 407. Du reste, l'art. 473 du Code de procédure modifie cette jurisprudence, en ce qu'il autorise bien, mais n'oblige pas les tribunaux d'appel à prononcer sur le fond dans le cas dont il s'agit. C'est déjà ce que nous avions remarqué loc. cit., pag. 406.

S II.

Néanmoins si, dans le cas précédent, le fond de la cause n'a pas été plaidé devant les premiers juges, le tribunal d'appel qui annulle le jugement peut-il encore retenir le fond? (Rés. nég.)

MOYNAT, C. LANGE.

Le 28 thermidor an 8, le sieur Lange, propriétaire d'un privilége pour la fabrication des lampes connues sous le nom

Tome III.

18

« PreviousContinue »