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CODE

D'INSTRUCTION CRIMINELLE.

DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES.

(LOI DÉCRÉTÉE LE 17 NOVEMBRE 1808.

ART. 1. L'action pour l'application des peines n'appartient qu'aux fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi (1). L'action en réparation du dommage causé par un crime, par un délit ou par une contravention, peut être exercée par tous ceux qui ont souffert de ce dommage.

– L'action pour l'application des peines. C'est cette action qu'on nomme action publique, par opposition à l'action civile dont s'occupe le second alinéa de cet article. Il est facile, au moyen de quelques expl:cations, de se fixer sur la nature de ces deux actions: toute espèce de délit, en troublant l'ordre public, base de l'existence sociale, offense nécessairement la société tout entière: or, l'action publique est le droit qui appartient à toute la société, au public, de poursuivre la vengeance du mal qui lui a été fait; le même délit qui attaque tout le corps social, blesse le plus souvent un citoyen en particulier; mais vengé comme membre de la société, par l'application de la peine que réclament les fonctionnaires préposés pour exercer l'action publique, le citoyen lésé dans ses intérêts privės, ne saurait plus invoquer que la loi civile, qui veut que tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage soit réparé par l'auteur de ce dommage (1382, Code civ.); on nomme par suite action civile, le droit, la faculté qui appartient au citoyen lésé dé poursuivre la réparation du dommage qu'il a éprouvé : ainsi, un vol de 100,000 fr. m'a été fait; comme le vol porte atteinte à l'ordre public, qui commande le respect à la propriété, on poursuivra, au moyen de l'action publique, l'application de la peine dont la loi punit le vol; mais si la société est vengée par l'application de cette peine, je dois, moi, recouvrer les 100.000 fr. qui m'ont été enlevés, et c'est pour les réclamer que j'exercerai l'action civile.

Qu'aux fonctionnaires. Puisque l'action publique a pour but la réparation du tort causé à tout le corps social, et conséquemment à chacun des membres qui le composent, il semble que l'exercice de cette

(1) Nulle peine ne peut être établic ni appliquée qu'en vertu de la lo!. Const. B. art. 9. Nulle autorisation préalable n'est nécessaire pour exercer des poursuites contre les fonctionnaires publics, pour faits de leur administration,

CODE D'INSTR. CRIM.

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action devrait appartenir à tous les citoyens, c'est en effet ce qui existait à Rome; mais cet état de choses offrait de grands inconvénients, il encourageait les délateurs et servait les haines privées, en même temps qu'il laissait sans vengeance une foule de crimes; en France, les progrès de la civilisation durent amener l'institution de fonctionnaires chargés de poursuivre l'application des peines; les citoyens ont bien le droit de dénoncer les crimes, et c'est même pour eux souvent un devoir, mais la dénonciation est tout à fait distincte de l'exercice de l'action qui a pour objet l'application de la peine. (22, 30, 31.)

Confiée par la loi. Les fonctionnaires auxquels la loi confie l'exercice de l'action publique, sont, devant les Cours d'assises et sur les appels de police correctionnelle, les procureurs généraux et leurs substituts; devant les tribunaux correctionnels, les procureurs du roi et leurs substituts, et en matière forestière, les conservateurs, inspecteurs, sous-inspecteurs et gardes généraux forestiers; devant les tribunaux de police, les commissaires de police, et subsidiairement le maire ou son adjoint. (271 et suiv. 91, 182, 144; loi communale belge, art. 125 et 127.) Il ne faut pas confondre ces fonctionnaires avec ceux que l'article 9 charge de la recherche des crimes; car tous ceux qui sont chargés de cette recherche ne sont pas chargés de poursuivre l'application de la peine; ainsi, par exemple, les juges d'instruction et les gardes champêtres, sont au nombre des officiers chargés de la recherche des délits (8, 9), et ils ne sauraient poursuivre l'application de la peine; mais quant au droit de poursuite en lui-même, il faut distinguer entre les délits 10 dans les matières criminelles, l'action ne peut être intentée qu'à la réquisition du ministère public, parce que, dans ces sortes de matières, l'intérêt général, dont le ministère public est le gardien, se trouve surtout compromis; 20 dans les matières correctionnelles ou de police simple, le ministère public peut aussi agir par voie de réquisition; mais c'est pour lui une simple faculté, et non une obligation, conime lorsqu'il s'agit de crime, car s'il était forcé d'agir par voie d'ac tion dans ces sortes de matières, où l'intérêt privé est

sauf ce qui est statué à l'égard des ministres. (Ibid., art. 24.) Il ne peut être créé de commissions, ni de tribunaux extraordinaires, sous quelque dénomination que ce soit. (Ibid., art. 94.)

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plutôt lésé que l'intérêt public, le trésor royal serait exposé à des frais considérables. La loi a, par suite, permis à la partie civile de citer directement le prévenu devant le tribunal, et alors le ministère publ c réclame, par voie de conclusions seulement, l'application de la peine (64, 145, 153, 182, 196); 5o certains délits ne peuvent être poursuivis que sur la dénonciation de la partie civile; tels sont les délits d'injure et de calomnie commis par la voie de la presse envers les particuliers (Décret belge du 20 juillet 1831); le délit de contrefaçon (Loi du 19 juillet 1795) (1); le délit de chasse hors les temps prohibés (2), et celui de pêche dans un ruisseau non navigable ni flottab`e, hors le temps prohibé et sans engins défendus (Art. 8, loi 22 avril 1790); le délit d'adultère, qui ne peut être poursuivi que sur la plainte du mari, si c'est la femme qui est coupable, ct sur la plainte de la femme, si le mari a entretenu la concubine dans la maison conjugale; le rapt, qui ne peut être poursuivi que par les parents qui ont le droit de demander la nullité du mariage, si le ravisseur a épousé Ja personne enlevée (357, C. pén.); les délits des fournisseurs, qui ne peuvent être poursuivis que sur la dénonciation du gouvernement; enfin, en matière de contributions indirectes, les lois et décrets ont conféré à l'administration le droit exclusif de poursuivre et faire prononcer les amendes et cenfiscations, ainsi que de transiger avec les contrevenants; de telle sorte, que le ministère public n'agit dans ces affaires que comme partie jointe, et au moyen de simples conclusions. (L. 15 vent. an XII, 1er germ. an XIII; décr. 16 mars 1813; toi belge du 26 août 1822, art. 247.) - Il nous reste à observer que, même dans le cas où le ministère public a besoin pour agir de la dénonciation des parties, la renonciation que ces dernières feraient à leur action, ou les transactions qui pourraient avoir lieu, n'empêcheraient pas la poursuite du ministère public, une fois armé par la dénonciation, si ce n'est dans la poursuite d'adultère, qui s'éteint absolument si le mari consent à reprendre sa femme. La cour suprême a même décidé qu'une fois les tribunaux correctionnels ou de police saisis par la plainte directe de la partie, ils se trouvent nécessairement investis de l'action publique, et doivent prononcer la peine due au délit dont il s'agit, bien que le ministère public eût négligé d'y conclure; tel est le vœu des art. 161 et 189 (3). Il faut remarquer encore qu'il est des personnes que la loi défend de poursuivre relativement à certains délits qu'elles auraient pu commettre: ainsi un mari ne saurait être poursvivi à raison des soustractions qu'il aurait commises au préjudice de sa femme, d'avec Jaquelle il ne serait pas legalement séparé; il en serait de même des soustractions que commettrait une femme au préjudice de son mari, et de celles que commettraient des ascendants au préjudice de leurs descendants, ou ceux-ci, au préjudice de leurs ascendants: l'honneur du mariage dans le premier cas, le lien du sang dans le second, ne permettraient pas que des poursuites criminelles pussei.t avoir lieu (380, C. pén.);

on ne peut également être poursuivi pour avoir recélé une personne coupable d'un crime emportant peine afflictive ou infamante, si on était époux, ascendant, descendant, frère ou sœur du criminel recélé (148, ibid.).

L'action en réparation du dommage. Cette action est l'action civile. (Art. 2.)

Par un crime, par un délit ou par une contravention. L'infraction que les lois punissent des peines afflictives ou infamantes est un crime (7 et 8, C. pén.); celle qu'elles punissent des peines correctionnelles est un délit (9, C. pén.); celle qu'elles punissent des peines de police est une contravention (464. C. pén.). — Ccpendant le législateur emploie quelquefois d'une manière générale l'expression délit, pour exprimer collectivement les trois espèces d'infractions que nous venons de définir, par exemple, articles 22, 27, 91, etc.

Par tous ceux qui ont souffert de ce dommage. Soit qu'ils aient éprouvé personnellement le dommage, ou qu'ils l'aient éprouvé comme héritiers de ceux qui en ont souffert, soit encore qu'ils l'aient éprouvé directement, ou qu'ils ne l'aient éprouvé qu'indirectement, comme des enfants qui demandent des dommages-intérêts contre l'assassin de leur père, dont le travail subvenait à leur existence (4).

2. L'action publique pour l'application de la peine s'éteint par la mort du prévenu. L'action civile, pour la réparation du dommage, peut être exercée contre le prévenu et contre ses représentants (5). L'une et l'autre action s'éteignent par la prescription, ainsi qu'il est réglé au livre II, titre VII, chap. V, de la Prescription.

-S'éteint par la mort du prévenu. Les peincs sont établies pour venger la société et prévenir par la terreur de l'exemple, les crimes et les délits; le procès fait à la mémoire du prévenu n'obtiendrait aucun de ces résultats; et si, dans l'ignorance de la mort du prévenu, une condamnation par contumace était prononcée, l'arrêt, sur la requête des héritiers, pourrait être déclaré non avenu par la cour qui l'aurait rendu. Inutile d'observer que la mort de l'auteur du crime n'éteint pas l'action contre ses complices.

Peut être exercé contre le prévenu et contre ses représentants. La mort du prévenu éteint l'action publique, parce que les héritiers du coupable ne doivent pas porter la peine d'un crime qu'ils n'ont pas commis: ce principe de justice et d'humanité a été consacré par toutes les législations, et notamment par la loi romaine: in hæredem non solent actiones transire quæ pœnales sunt. Mais la mort du coupable n'empêche pas l'exercice de l'action civile; car successeurs ne doivent pas profiter de sa mort, pour conserver les fruits de son crime; c'est alors devant les tribunaux civils que l'action doit être intentée,

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(1) Le délit de contrefaçon est, en Belgique, prévu par la loi du 25 janvier 1817, sur le droit de cople; il a été jugé, que la poursuite doit en être faite devant les tribunaux correctionnels, et que le ministère public peut d'office en poursuivre la répression. Er. 6 déc. 1828.

(2) Mais il peut poursuivre le même fait sur des terres non depouillées de leurs récoltes. Paris, Cassation, 4 février 1830.

(3) L'action publique une fois mise en mouvement par les poursuites ou par la plainte de la partie civile, ne peut rester subordonnée à son changement de volonté, ni être arrêtée par son inaction. Spécialement: bien que le ministère public ne puisse poursuivre les délits de chasse en temps non prohibé, commis sur le terrain d'autrui, qu'autant qu'il y ait plainte du propriétaire, il est néanmoins

recevable à interjeter appel du jugement intervenu sur la plainte du propriétaire, quoique celui-ci n'appelle pas luimême. P., Cass, 31 juillet 1830.

(4) Le père a qualité pour se constituer partie civile dans une poursuite en répression de calomnie, dirigée contre sa fille majeure, habitant avec lui. (V. art. 63.) Liége, Cass., 24 mai 1823.

(5) Lorsqu'un tribunal correctionnel a annulé des actes d'aliénation de biens immeubles, comme ayant été obtenus à l'aide d'escroquerie, la partic lésée, qui a fait prononcer cette annulation, ne peut attraire devant le même tribunal correctionnel les tiers détenteurs de ces biens, pour s'y voir condamner à les lui restituer. Pareille demande doit être formée devant les tribunaux civils. Br. 18 mars 1824.

puisque l'action civile n'étant devant les tribunaux criminels que l'accessoire de l'action publique, et cette dernière action se trouvant éteinte, l'accessoire ne peut plus, dans l'absence du principal, étre porté au criminel; il en serait ainsi, lors même que le coupable viendraît à décéder pendant l'instruction; car les débats cessant à l'instant même, les juges criminels se trouveut en même temps dessaisis de l'accessoire, c'est-à-dire de l'action civile: si, au contraire, le condamné meurt après le jugement, comme il a dû être statué sur l'acAion civile en même temps, et que tout est consommé sous les deux rapports, le plaignant pourra poursuivre, contre les représentants du condamné, l'exécution des réparations civiles obtenues, mais huit jours après leur avoir fait signifier l'arrêt, aux termes de l'article 877 du Code civil; si le condamné venait à mourir pendant l'existence du pourvoi en cassation contre l'arrêt, bien que le décès du condamné rende l'arrêt inutile quant à la vindicte publique, il ne doit pas moins être statué par la cour suprême, dans l'intérêt de la partie civile: si le pourvoi est rejeté, la partie civile peut exécuter la condamnation, sauf le droit que les représentants peuvent avoir de former tierce opposition à l'arrêt de la cour de cassation; si, au contraire, l'arrêt est cassé, comme la décision relative tout à la fois à l'action publique et à l'action civile, est absolument éteinte, et qu'un nouveau procès criminel ne peut plus recommencer contre le prévenu décédé, le plaignant doit porter alors son action devant les tribunaux civils. Relativement au condamné par contumace, c'est-à-dire qui n'était point présent à sa condamnation, il faut distinguer s'il ineurt dans le délai de cinq ans, qui lui est donné pour se représenter (33, C. civ. ), ou s'il meurt après ce délai; daus le premier cas, comme aux termes de l'article précité du Code civil, il est réputé mort dans l'intégrité de ses droits, on doit agir par une action nouvelle contre les héritiers du condamné devant les tribunaux civils (Ibid.); dans le second cas, tout étant consommé à l'expiration des cinq ans, les plaignants peuvent poursuivre les héritiers du condamné en vertu de l'arrêt de condamnation, et sans qu'ils soient obligés d'intenter une action nouvelle au civil.-Quant à l'amende et à la confiscation des objets saisis, par exemple dans les condamnations prononcées au profit de la régie des contributions indirectes, il faut encore distinguer: l'amende est considérée comme une peine, et conséquemment le décès du prévenu avant la condamnation éteint l'action sur ce point (1); mais la confiscation des objets saisis n'est pas considérée comme une peine, car les peines sont toujours applicables à la persoune, tandis que la confiscation s'applique à la chose; elle peut donc être poursuivie contre les héritiers du prévenu et telle est en effet la jurisprudence de la cour suprême. La condamnation au remboursement des frais ne doit pas non plus être considérée comme une peine personnelle, mais comme une simple indemnité civile envers le trésor; et conséquemment la mort du condamné après sa condamnation,

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mais avant l'exécution, n'empêcherait pas l'action du trésor contre les héritiers du condamné (2); mais il est de jurisprudence qu'ils n'en seraient tenus que personnellement pour leur part et portion (875, C. civ.); car la solidarité, qui ne se présume pas (1202, C. civ.), n'est prononcée par l'article 157 du décret du 18 juin 1811, à l'égard du remboursement des frais, que contre les auteurs et les complices du même délit, et non contre leurs héritiers; si le prévenu est mort avant le jugement de condamnation, le trésor n'a pas d'action; car l'action principale étant éteinte, les frais de poursuite qui en sont l'accessoire ne peuvent plus être réclamés; si c'était la partie civile qui eût fait ces frais, elle pourrait les comprendre dans l'indemnité qu'il lui est permis de réclamer par l'action civile.

L'une et l'autre action s'éteignent par la prescription. Ce sont les articles 657 et 638 qui déterminent le laps de temps nécessaire pour la prescription : ces articles distinguent entre les crimes emportant au moins peine affictive et infamante, et les délits de nature à être punis correctionnellement ; dans le premier cas, l'action publique et l'action civile se prescrivent par dix ans, compter du jour où le crime a été commis, ou s'il a été fait une instruction, du dernier acte de la procédure (637). Dans le second, l'une et l'autre action se prescrivent par trois ans, à compter de la même époque (638); mais il ne faut pas confondre la prescription de l'action qui n'a encore été suivie d'aucune condamnation, et la prescription des peines prononcées par des condamnations criminelles ou correctionnelles, que le condamné n'aurait pas subies, soit parce que la condamnation serait par contumace, soit parce qu'il se serait évadé: en effet, la prescription des peines prononcées par des jugements rendus en matière criminelle n'a lieu que par vingt ans (635); celle des arrêts ou jugements en matière correctionnelle, par cinq ans (636).

3. L'action civile peut être poursuivie en même temps et devant les mêmes juges que l'action publique. Elle peut aussi l'étre séparément; dans ce cas, l'exercice en est suspendu, tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'aclion publique intentée avant ou pendant la poursuite de l'action civile (53).

-En même temps et devant les mêmes juges que l'action publique. L'action civile prenant naissance absolument dans les mêmes faits que l'action publique, il était utile, afin de ne pas multiplier les procédures et les jugements, d'étendre les pouvoirs des juges de l'action publique, en leur permettant de juger en même temps l'action civile, qui en est l'accessoire (4); mais, par une conséquence nécessaire, si les tribunaux de répression se trouvent dessaisis de l'action publique, ils ne peu

la plainte correctionnelle. Paris, Cass., 15 juin 1829. Le principe que le criminel tient le civil en état, ne souffre pas d'exception même en matière de banqueroute frauduleuse, ainsi un failli renvoyé devant la cour d'assises comme coupable de banqueroute frauduleuse, ne peut demander que, la cour saisie de l'appel du jugement qui a rejeté son opposition au jugement déclaratif de faillite y statue avant l'arrêt criminel. Ce moyen préjudiciel doit être prononcé d'office. Br., 10 mars 1831.

(4) Les tribunaux de répression ne connaissent de l'action civile qu'accessoirement à l'action publique. Ainsi ils sont incompetents pour statuer sur l'action civile, s'ils rejettent cette derniere. Paris, Cass., 12 mai 1827.

Les tribunaux correctionnels ne peuvent statuer sur des demandes en dommages-intérêts que quand il y a délit constaté. Ainsi, lorsque sur l'appel, un prévenu qui avait été condamné par les premiers juges à des réparations ci

vent rester saisis de l'action civile; lors donc que le prévenu meurt pendant l'instruction, la partie civile doit se pourvoir au civil. Il en serait de même s'il y avait condamnation, et que le condamné mourût dans le délai de l'appel ou du pourvoi en cassation; car tant que le condamné a un moyen de faire annuler la condamnation, il meurt dans l'intégrité de ses droits.—Il y a exception, en matière d'usure, au principe posé dans l'article actuel, que l'action civile peut être poursuivie devant les mêmes juges que l'action publique. En effet, il est de jurisprudence que la partie lésée par un fait d'usure, ne peut agir en réparation que devant les juges civils; la raison en est, que le délit d'usure ne peut résulter que d'une série de faits qui forment l'habitude d'usure (Loi du 3 septembre 1807); or, comme l'action civile, pour être portée devant les mêmes juges, doit nécessairement procéder du même fait qui constitue le délit, le fait isolé d'usure dont une partie se plaint, n'est pas cette habitude de l'usure que la loi punit.

délit par la loi, la partie lésée, au lieu d'agir par voie d'action criminelle, saisit la juridiction civile, le mode d'exécution des condamnations prononcées au profit de la partie demanderesse est le même que celui qui aurait lieu, si les condamnations émanaient de la juridiction criminelle; ainsi les restitutions ordonnées entrainent contrainte par corps. (Paris, 6 janvier 1852.) Des arrêts ont égalements décidé par application du même principe que les dommages intérêts et les dépens adjugés contre les auteurs et complices d'un même délit, sont dus solidairement aux termes de l'art. 53. C. pén., quoi-. que la condamnation ait été prononcée par un tribunal civil.

L'exercice en est suspendu. Il ne fallait pas que les tribunaux fussent exposés à rendre des jugements contradictoires; ce qui arriverait nécessairement, si les tribunaux civils condamnaient à des dommages-intérêts, pour un fait que les tribunaux criminels déclareraient n'avoir pas existé. L'accessoire, dans ce cas, aurait un effet, bien qu'il fut jugé qu'il n'y a pas de fait principal; or, cùm principalis causa non consistat, plerùmque nec ea quæ sequuntur locum habent.-Mais il est des cas où c'est l'action publique, au contraire, qui doit être suspendue, jusqu'à ce qu'il ait été prononcé par les tribunaux civils, sur des questions qui ont une influence immédiate sur l'action publique; questions qu'on nomme, pour cette raison, préjudicielles (1). Ainsi on m'accuse d'avoir commis un délit dans telle propriété; je conviens du fait qu'on m'impute; mais je prétends que cette propriété m'appartient, et que, conséquemment, j'ai eu le droit de faire ce qu'on me reproche; en un mot, je me retranche derrière l'exception : Feci, sed jure feci. Avant de poursuivre l'action publique, il faut vider la question de propriété, qui ne peut être jugée que par les tribunaux civils; car il s'agit d'interpréter des actes, et d'appliquer les principes du droit civil; mais s'il ne s'agissait que d'une vérification quelconque ; si, par exemple, un individu poursuivi pour un délit forestier, prétendait que les arbres qu'il a coupés n'étaient pas au nombre des arbres réservés, le tribunal correctionnel ne serait pas incompétent pour en connaître, car il ne s'agirait pas là d'une appréciation de titres de propriété, mais d'une simple vérification, et ce serait le cas d'ap

Elle peut aussi l'être séparément. Le législateur ne pouvait pas obliger la partie lésée de renoncer à la juridiction ordinaire en qui elle a confiance, pour suivre les chances d'une procédure spéciale et sévère, qui peut ne pas lui offrir les mêmes avantages. C'est donc une faculté pour la partie civile d'embrasser l'une ou l'autre voie; mais il y a exception à ce principe dans l'article 600 du Code de commerce, qui défend, en matière de banqueroute simple ou frauduleuse, d'attribuer aux tribunaux de police correctionnelle ou aux cours d'assises, les actions civiles autres que celles dont il est parlé dans l'article 598 du même Code (relativement aux complices des banqueroutes).—Mais celui qui a d'abord formé sa demande devant les tribunaux civils, est-il recevable à revenir ensuite, devant les tribunaux de répression, suivre cette même action accessoirement à l'action publique? Pour l'affirmative, on invoque l'article 67 du Code d'instruction criminelle, qui permet au plaignant de se rendre partie civile en tout état de cause; pour la négative, qui paraît avoir été embrassée par la cour suprême, on dit que la partie qui a pris la voie civile, a renoneé à la voie criminelle ; qu'en optant, elle a épuisé son droit : Semel optare possumus ; que l'ar- | ticle 67 ne parle que du plaignant et non du demandeur qui a suivi l'action civile; du reste, on est généra-pliquer le principe que les juges de l'action le sont aussi lement d'accord que la partie qui a pris la voie civile, pourrait revenir par la voie criminelle, si le fait qui n'avait dans le principe qu'un caractère civil, prenait, dans l'instruction, les couleurs d'un délit.

Le motif est que la voie civile ne peut exclure la voie criminelle, qu'autant qu'elle a été prise avec choix et en connaissance de cause.

Toutes personnes obligées par les faits d'un prévenu ou d'un accusé, peuvent être citées par la partie civile, devant les tribunaux criminels saisis de l'a tion publique. L'art. 5 n'est pas restreint à l'action civile dirigée contre le prévenu ou l'accusé lui-même : spécialement, le père d'un accusé mineur, peut, comme civilement responsable des faits de son fils, être actionné par la partie civile devant la Cour d'assises où le fils est raduit. Colmar, 23 février 1851.

Lorsque pour la réparation d'un fait qualifié crime ou

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de l'exception.-Il y aurait également question préjudicielle à décider par les tribunaux civils, si l'action publique avait pour objet la violation d'un dépôt, et que le prévenu niát avoir reçu le dépôt (Brux., 4 nov. 1831); car il ne saurait y avoir violation du dépôt, qu'autant qu'il est prouvé qu'il a été fait; et comme, aux termes des articles 1925 et 1924 du Code civil, la preuve par témoins n'est pas admise pour les dépôts excédant 150 francs, si les tribunaux criminels pouvaient rester juges de cette question préjudicielle, cette règle serait violée, puisque la loi permet la preuve testimoniale en matière criminelle, correctionnelle et de police (2).-Remarquons encore, que le propriétaire qui n'aurait pas la possession du fonds, et qui se serait permis de detruire la récolte du possesseur, ne pourrait, pour échapper aux poursuites, invoquer l'exception de propriété; car la possesseur de bonne foi

viles comme coupable du délit qui Ini était imputé, a fait réformer ce jugement par un arrêt d'acquittement, la partie civile ne peut prétendre que le fait non considéré comme délit étant au moins constitutif d'un quasi-délit, il y a toujours lieu à lui adjuger des dommages-intérêts. Liège, 31 mai 1827. Br., 19 janv. 1832.

(1) Lorsqu'une question préjudicielle est élevée par un prévenu, pour arrêter les poursuites dirigées contre lui par le ministère public, le tribunal ne peut, en prononçant le sursis, se borner à ordonner qu'il sera justifié par la partie la plus diligente de la décision à intervenir sur cette question préjudicielle; il doit, à peine de nullité, condamner le

prevénu à rapporter cette décision dans un délai déterminė. Paris, Cass., 29 mai 1830.

Il a cependant été décidé que le juge devant lequel un prévenu élève une question préjudicielle de propriété ne doit pas,sur la demande du ministère public, tout en accueillant cette exception, déterminer un délai en-déans lequel ledit prévenu sera tenu de faire ses diligences à l'effet de faire statuer par le juge compétent sur le fondement de l'exception. Gand, 31 mars 1835. J. de B., 1835, 322.

(2) S'il y avait commencement de preuve par écrit du dépôt des deniers, effets ou pièces dont la destruction, la soustraction ou la dissipation donneraient lieu à la

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