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guerait très-peu du crime, et pour lesquelles le public serait sans indulgence.

chant à embrasser non-seulemens tous les délits, mais encore toutes les circonstances des délits, le code de l'an iv est tombé dans le vice des lois qui veulent tout prévoir.

» Comme cette prévoyance universelle est im

>> Le magistrat offre donc nécessairement plus de garantie contre les diverses seductions de l'éloquence, de la pitié, de la faiblesse ou de la peur, qui tour à tour, et souvent toutes ensem-possible à l'esprit humain, il est arrivé que pluble, viennent assiéger l'homme institué par la sieurs nuances de délits, qui ne s'étaient point loi pour juger ses semblables. offertes à la pensée des rédacteurs du code, ont été une source d'embarras inextricables pour les jurés comme pour les juges.

» Le gouvernement, continuait le grand juge, pressé par l'accroissement des crimes et des désordres publics, qui bravaient avec audace les lois existantes, s'est vu forcé de recourir temporairement à des remèdes plus actifs et plus effi

caces encore.

» La procédure par jury a été suspendue dans plusieurs départements; des tribunaux spéciaux ont été créés pour frapper le crime avec une rapidité telle, qu'on pût espérer d'en arrêter le debordement. Aussi, malgré les clameurs de l'ignorance et les scrupulès vrais ou affectés de quelques esprits inquiets qui s'étaient réunis pour décrier, avant sa naissance, une institution que les circonstances commandaient avec tant d'empire, le crime a pâli; les brigands, les voleurs de diligences, les affreux chauffeurs, ont vu dissiper leur bandes impures; et le faussaire impudent, devenu circonspect et timide, laisse enfin espérer à la société, alarmée par l'excessive multiplicité des crimes de faux, que ce fléau dévastateur cessera bientôt d'être redoutable.

>> Mais de telle mesures, essentiellement transitoires et temporaires, forment la plus forte démonstration de l'imperfection et de l'insuffisance actuelle de notre législation criminelle; et c'est surtout pour tâcher de rendre ces mesures désormais inutiles, qu'il importe de la purger des vices dont on est généralement frappé.

>> Malgré la triste expérience que nous avons faite, les partisans de la procédure par jury sont bien loin de convenir, comme le croient beaucoup d'autres, que cette institution ne puisse s'acclimater en France : ils soutiennent, quoi qu'on puisse en dire, que cette institution est très-compatible avec le génie et le caractère de la nation; que si jusqu'à présent elle a rencontré des obstacles, il faut les attribuer principalement aux nombreuses divisions que la révolution a fait naître, et que ces divisions, usées par le temps, devant nécessairement bientôt disparaître, la marche et le succès de l'institution ne seront plus retardés que par de légers empêchements dont il ne sera pas difficile de triompher.

» Ainsi, en compliquant la procédure d'une manière étrange en la surchargeant de difficultés sans nombre, on a été fort loin encore de remplir ce plan chimérique de tout prévoir, auquel on avait aspiré.

» Les juges, dans ce système, devenus, en quelque sorte, de simples machines d'application, se sont vus forcés, pour obeir à la loi, de multiplier les questions inutiles et quelquefois nuisibles à la découverte de la vérité, et de les multiplier contre leur opinion, à laquelle il est souvent impossible de renoncer sans que la conscience en souffre; position cruelle pour un juge intègre et vertueux.

» Il est bien démontré, par l'expérience, que le système de gradation n'a servi qu'à ralentir l'action de la justice criminelle, qu'à multiplier les ressources et les subterfuges en faveur du crime, et à ouvrir une source intarissable de nullités auxquelles peu de procédures pouvant échapper, il devient très-souvent nécessaire de les recommencer; ce qui, joint à d'autres circonstances, fait que les procédures criminelles coûtent maintenant à l'État des sommes énormes.

» Respectons les vues philanthropiques qui ont dicté ce système; mais hâtons-nous de l'abandonner.

» En classant les crimes, il n'en faut caractériser que les circonstances principales ; et au lieu de ces questions infinies sur les nuances, dont l'expérience a prouvé le vice et l'inanité, déterminons un maximum et un minimum de peines, qui, en allégeant les fonctions du jury, laissera du moins au juge le moyen de faire usage de sa conscience et de sa propre conviction.

» Abandonnons ces dangereuses formules qui, si souvent, ont égaré les jurés et violente la conscience des juges : le prévenu a-t-il agi méchamment, dans l'intention du crime, à dessein de nuire à autrui? tandis qu'un accusé peut être très-justement puni sans avoir eu cette » Eh bien! ne leur refusons pas une nouvelle préméditation, ce calcul, cette méchanceté d'inépreuve, et qu'une troisième expérience décidetention que supposent ces questions banales, entre eux et leurs contradicteurs. » rendues nécessaires dans toutes les procédures criminelles.

M. Regnier était absolument du même avis que la cour de cassation sur la pénalité. « En » Mais, dira-t-on, si vous retranchez les auaspirant à une perfection illusoire, et en cher-tres questions, et si vous les réduisez toutes à

« Le chef du gouvernement se fait rendre compte de l'état du travail relatif au Code criminel. Il ordonne à la section de législation de rédiger la série des questions fondamentales en

celle ci : l'accusé est-il coupable? prenez garde que vous n'accordiez au juge une trop grande latitude de pouvoir, qui, affaiblissant l'influence du jury, pourrait en dénaturer l'institution. » Non, l'institution du jury ne sera ni affai-les disposant dans leur ordre naturel, et au seblie ni dénaturée, en débarrassant les jurés de crétaire général de les livrer à l'impression. Ses cette foule de questions qui ont été le principal intentions sont que ces questions soient d'abord obstacle à ses succès: ce sont ces questions, discutées, sans néanmoins que les principes qui devenues ridicules par leur multiplicité et leur seront fixés puissent être considérés comme arinsignifiance, qui ont principalement aliéné les rêtés définitivement, le conseil demeurant libre esprits de la procédure par jury. La question de revenir sur ses premières décisions lors de intentionnelle, sans cesse prodiguée, est deve-la discussion des articles du projet. nue la source des plus criantes impunités; c'est » Sur l'observation faite par M. Treilhard dans cette question que se sont toujours retran- que l'arrêté qui a formé la commission par lachés des jurés faibles ou corrompus, pour sous-quelle le projet de Code criminel a été rédigé, traire le coupable aux peines qu'il avait trop mé-porte que ses membres concourront à la discussion du conseil, Napoléon ordonne au secrétaire général de les convoquer.

ritées.

» Laisser subsister toutes ces causes de méprise, d'erreur et de prévarication, ce serait » M. l'archichancelier ayant observé que s'ils vouloir porter à l'institution le coup mortel; car étaient également appelés à la séance de la secil n'y a pas de doute que les impunités scanda- tion, ils s'y trouveraient en majorité, d'où il leuses ne se reproduisent encore, et peut-être résulterait que le conseil ne connaîtrait pas l'amême plus fréquemment ; et il n'y en a pas da-vis des conseillers qui composent la section, vantage que la nation, fatiguée enfin d'une in-Napoléon décrète que les membres de la comstitution qui avait paru si séduisante en théorie, mission ne seront appelés qu'aux séances du et qui produirait de si déplorables résultats dans la conseil. " pratique, n'en demandat à grands cris l'abolition. Les questions fondamentales furent présentées >> C'est donc pour la mettre à l'abri du coup dans la séance du 16. Elles étaient au nombre qui la menace, que je propose de la dégager des de quatorze dont les huit premières avaient pour éléments qui seraient pour elle un principe iné-objet les formes, et les six autres la pénalité. vitable de destruction. Voici ces questions :

» Quand le délit aura été bien caractérisé,

« 1re QUESTION. L'institution du jury sera1o par l'acte d'accusation, 2o par le résumé du t-elle conservée?

président du tribunal, destiné à mettre dans » Il QUESTION. Y aura-t-il un jury d'accutout son jour et le délit, et son véritable carac-sation et un jury de jugement?

tère, et ses circonstances essentielles, un jury » III QUESTION. Comment seront nommés tel que je le propose trouvera habituellement les jurés? Dans quelle classe seront-ils nommés? fort peu d'embarras à prononcer sur la question Qui les nommera? de la culpabilité.

» Cette question décidée, je voudrais que le tribunal se fit faire un nouveau rapport dans lequel seraient appréciés les moyens d'excuse ou d'atténuation qui pourraient s'élever en faveur de l'accusé, et que la peine fût ensuite appliquée suivant le degré du crime, et d'après la latitude que l'établissement d'un maximum et d'un minimum aurait laissée au tribunal. »

» IV QUESTION. Comment s'exercera la récusation?

» Ve QUESTION. L'instruction sera-t-elle orale, ou partie orale et partie écrite?

» VI QUESTION. Présentera-t-on plusieurs questions au jury de jugement? N'en présenterat-on qu'une: N. est-il coupable?

» VII QUESTION. La déclaration du jury sera-t-elle rendue à l'unanimité ou à certain nom

Les choses en étaient là quand la discussion | bre de voix? du projet de Code criminel a commencé.

Elle ne fut entamée que dans la séance du 2 prairial an XII (22 mai 1804), quelques jours seulement après l'établissement du régime de l'empire. «Le chef du gouvernement, porte le procès-verbal du conseil, charge la section de présenter, dans le délai de quinze jours, les questions fondamentales du Code criminel. » Oubliant ensuite qu'il avait donné cet ordre, il le réitéra dans la séance du 9. Voici ce qu'on lit dans le procès-verbal :

» VIII QUESTION. Y aura-il des magistrats qui pourront tenir des assises dans un ou plusieurs tribunaux criminels de département? » IX® QUESTION. La peine de mort sera-t-elle conservée?

» X QUESTION. Y aura-t-il des peines perpétuelles?

» XI QUESTION. La confiscation aura-t-elle lieu en certains cas?

» XII QUESTION. Les juges auront-ils une certaine latitude dans l'application des peines?

Y aura-il un maximum et un minimum qui | poursuite des crimes est confiée à un magistrat leur laisseront la faculté de prononcer la peine de sûreté, à un juge instructeur, au procureur pour plus ou moins de temps, suivant les cir- général, fonctionnaires isolés, qui ne trouvent constances? pas en eux assez de force pour attaquer les coupables puissants : le tribunal ne peut les mettre en mouvement, ni ranimer leur énergie; car il est sans pouvoir sous ce rapport, et le président le plus ferme dans ses fonctions, verrait commettre un délit, qu'il serait réduit à en être le témoin passif.

>> XIII QUESTION. Pourra-t-on placer sous la surveillance certains condamnés qui auront subi leur peine, et pourra-t-on exiger dans certains cas des cautions de leur conduite future? » XIV QUESTION. Y aura-t-il un mode de réhabilitation pour les condamnés dont la conduite aura mérité cette faveur? »

Je ne m'arrêterai qu'à la première, à la seconde, à la huitième et à la douzième question: les autres sont étrangères à l'histoire générale des deux codes.

La première fut attaquée dans la séance même. Elle donna lieu à une profonde et lumineuse discussion, où les avantages et les inconvénients du jury furent amplement débattus, et à la suite de laquelle l'institution fut maintenue. Toutefois, avant de mettre aux voix, et pendant qu'on discutait encore, Napoléon déclara de nouveau qu'il ne regardait point le conseil comme engagé par la détermination qu'il allait prendre, et que si, en organisant le système, on rencontrait des obstacles imprévus, le conseil pourrait revenir sur sa première opinion.

On revint en effet à la question, et ce fut par suite de la discussion que la huitième question engagea de la manière suivante.

La commission et la section étaient partagées. La section voulait que chaque cour criminelle eût un président sédentaire; la commission, qu'il y eût un certain nombre de préteurs qui, sans être attachés à aucune cour en particulier, allassent tenir des assises.

La délibération sur ces deux opinions différentes commença dans la séance du 25 prairial, et fut reprise dans celle du 50. Le conseil adopta en principe que les cours criminelles seraient sédentaires.

» Il faut, si le ministère public néglige ses devoirs, que la cour criminelle puisse le mander, et lui ordonner de poursuivre.

» Mais on ne doit pas attendre tant de fermeté de tribunaux composés d'un président et de deux assesseurs, qui ne sont pas soutenus par la force de l'opinion, et que les avocats dominent. Il est naturel que les juges criminels soient moins considérés que les juges civils : la science du droit civil, supposant des connaissances trèsétendues, concilie plus d'estime à ceux qui la possèdent que la science, très-restreinte, du droit criminel. Les fonctions du juge civil imposent aussi davantage aux avocats; car, comme ce sont les causes civiles qui font leur fortune, il est certain qu'ils auront toujours plus de ménagement et de respect pour les tribunaux qui jugent ces sortes d'affaires.

» Le ressort de la justice criminelle n'est donc pas assez étendu; et dès lors l'ordre civil n'est pas constitué en France, car il n'existe que lorsque la justice criminelle contient chacun dans le devoir. C'est surtout dans les pays qui ont une puissance militaire considérable, qu'il convient de l'organiser fortement, afin que dans tous les temps il arrête le torrent de la force.

» Voilà le rapport sous lequel la réunion de la justice criminelle devient nécessaire. Il s'agit de former de grands corps, forts de la considération que donne la science civile, forts de leur nombre, au-dessus des craintes et des considéMais cette discussion avait attiré l'attention de rations particulières, qui fassent pålir les couNapoléon sur une question beaucoup plus éle-pables quels qu'ils soient, et qui communiquent vée, sur celle de la réunion de la justice civile et de la justice criminelle, et sur la formation de grands corps judiciaires qui remplaçassent ceux que l'assemblée de 1789 avait détruits. Napoléon avait donné ordre de l'examiner. La section de législation s'en occupa. Elle rendit compte de sa délibération dans la séance du 1er brumaire.

Les avis avaient été partagés.

On faisait valoir en faveur de la réunion le besoin de rendre à la justice sa dignité en créant des corps qui imposassent au public, aux accusés, aux defenseurs. Napoléon l'envisageait sous un autre rapport. Il se décidait surtout à embrasser cette opinion par le désir de donner plus d'intensité à la justice criminelle.

leur énergie au ministère public. Il s'agit enfin d'organiser la poursuite des crimes; elle est nulle dans l'état actuel des choses. »

On fit beaucoup d'objections, presque toutes prises de la difficulté de concilier ce système avec le jugement par jurés; et, en débattant ces objections, on revint insensiblement à la question du maintien de cette dernière institution.

La discussion se termina par un renvoi à la section pour qu'elle rédigeât un projet dans le système de la fusion des deux sortes de justices.

Ce projet fut en effet présenté dans la séance du 8 brumaire.

Les partisans du jury le combattirent, et en lui-même, et comme ne pouvant se concilier « Dans l'état actuel des choses, disait-il, lal avec le jugement par jurés.

Alors on rentra dans la question du jury, et Napoléon permit de la discuter de nouveau.

Le conseil, sans rien arrêter à cet égard, se contenta de décider que la justice civile et la justice criminelle seraient rendues par les mêmes tribunaux, que ces tribunaux seraient sédentaires, que néanmoins, dans le cas de nécessité et en vertu d'un décret, la section criminelle pourrait aller tenir des assises hors du lieu où siége le tribunal.

Dans la séance du 22 brumaire, la section présenta un nouveau projet sur la réunion. Le conseil adopta l'article premier qui établissait le principe. Les autres articles, qui contenaient l'organisation du système, furent renvoyés, après discussion, à une rédaction nouvelle.

Le projet subit encore deux rédactions, qui furent présentées, la troisième dans la séance du 29 brumaire, la quatrième dans celle du 20 frimaire.

Mais dans cette dernière séance, on remit la réunion même en question.

Les présidents et les procureurs généraux des cours criminelles étaient venus à Paris dans l'intervalle, à l'occasion du couronnement. Voyant leur existence menacée par la réunion, ils avaient fait des observations. La section crut devoir en rendre compte au chef du gouvernement.

:

Ils n'attaquaient pas directement le système ils observaient seulement qu'il ne pourrait se concilier avec la vocation des jurés et des témoins, ni, par conséquent, avec l'institution du jury. Du reste, eux qui jusque-là ne s'étaient pas montrés très-partisans de cette institution, qu'ils avaient assuré marcher fort mal, prétendirent que, depuis quelque temps, elle allait beaucoup mieux : les crimes, disaient-ils, sont bien moins fréquents, il y a moins d'abus; les citoyens sont plus exacts à remplir les fonctions de jurés, quoiqu'il soit vrai que, sans les peines dont on menace les jurés négligents, il y aurait infiniment moins d'exactitude.

Après qu'on eut encore délibéré quelque temps touchant la possibilité et les moyens de concilier la réunion avec le jugement par jurés, Napoléon demanda si les tribunaux avaient émis une opinion positive sur l'institution.

Le grand juge répondit que la majorité se prononçait contre toute institution avec laquelle le jury ne pourrait se concilier. « Si donc, continua-t-il, on persiste à maintenir le jury, je n'admets plus le système de la réunion; si, au contraire, on met de nouveau en délibération la question de savoir si le jury sera maintenu, je présenterai mes réflexions. »

Après quelques observations fort judicieuses de l'archichancelier Cambacérès, qui conclut, vu la situation des choses et des esprits, à laisser à la justice son organisation actuelle, Napoléon

dit que l'opinion sur l'institution du jury paraissait trop douteuse pour qu'en supprimant cette institution, on n'excilât pas des regrets. Le grand juge ajouta que c'était par cette raison qu'il lui paraissait utile de ne rien changer dans l'ordre actuel des choses. Et le conseil arrêta que la justice civile et la justice criminelle continueraient d'être administrées par des tribunanx différents.

Depuis ce jour, Napoléon cessa de prendre part, pour cette fois du moins, à la discussion du Code criminel, à laquelle, au surplus, on ne donna plus que trois séances, après quoi l'on cessa tout à fait de s'en occuper.

Les sept premières questions fondamentales, toutes relatives aux formes, avaient été décidées dans les deux premières séances. La huitième avait amené celle de la réunion des deux justices, dont la discussion s'était terminée de la manière que je viens de dire. Les six questions relatives à la pénalité avaient été également décidées, et l'on avait adopté, même sans discussion, l'affirmative sur la douzième qui consistait à savoir si l'on donnerait au juge, pour l'application des peines, de la latitude entre un maximum et un minimum. De là on avait passé à la discussion du projet retravaillé par la section. Le livre de la police était achevé; on s'était avancé dans le livre II de la justice jusqu'au chap. XXII des renvois d'un tribunal à un autre, lorsque la question de la réunion vint couper ces discussions et faire cesser les délibérations du conseil.

Cette première discussion, commencée le 16 prairial an XII (5 juin 1804) et prolongée jusqu'au 29 frimaire an XIII (20 décembre 1804) employa vingt-cinq séances.

Pendant quatre ans on ne songea plus au projet de Code criminel. Ce ne fut qu'en 1808 qu'on en reprit la discussion.

Dans la séance du 23 janvier de cette année : « Le chef du gouvernement, porte le procèsverbal, ordonna qu'il lui serait rendu compte de l'état du travail sur le projet de Code d'instruction criminelle. Il chargea la section de législation de lui faire un rapport sur cet objet; et de fixer les questions principales dont la solution donnerait les bases du Code. »

A cet époque, la section de législation était présidée par M. Treilhard, et composée de MM. Albisson, Berlier, Faure et Réal. Elle s'associa M. Muraire, premier président de la cour de cassation, et conseiller d'Etat hors section depuis le 14 messidor an x, et M. Merlin, procureur général près la même cour, nommé depuis conseiller d'État hors section.

Ce fut alors que séparant des dispositions pénales les dispositions relatives aux formes, on divisa le projet originaire en deux codes.

De cette époque, on cessa d'appeler aux séan- d'améliorer l'institution et l'on proposa diverses ces les membres de la commission qui avait ré-mesures. digé le projet originaire.

Alors Napoléon, reprenant la parole, dit « que ces mesures pouvaient être très-utiles,

5. CONFECTION du code d'instRUCTION CRIMI- mais qu'il fallait, avant tout, voir si actuelle

NELLE.

Le Code d'instruction criminelle fut le premier soumis à la discussion.

ment le jury prenait une fausse direction; que d'ailleurs on devait aussi voir la question sous le rapport de la réunion de la justice civile et de la justice criminelle. »>

C'était surtout là qu'il voulait en venir. Il tira de sa poche un projet en cinq articles sur la réunion, et demanda l'avis du conseil.

On débattit le projet sous le rapport de la

De ce moment les deux questions se mêlèrent. Celle du jury fut reprise à neuf et traitée avec la mème étendue que si on ne l'avait jamais abordée. De part et d'autre, on émit des opinions très-remarquables. Rien ne fut arrêté dans cette séance.

Le rapport demandé par le chef du gouvernement fut fait le 30 janvier. On n'avait conservé qu'un souvenir confus de ce qui s'était passé quatre années auparavant, et l'on ne s'en serait même point du tout souvenu si les procès-ver-possibilité d'y adapter l'institution du jury. baux n'en avaient pas conservé la mémoire. Le rapport s'en ressentit. On n'avait pas eu le temps de dépouiller les procès-verbaux, travail long, minutieux, difficile, et cette impossibilité fut cause qu'on rendit un compte fort inexact de la situation du travail. En effet, on reproduisit les questions fondamentales, et l'on supposa A la séance suivante, qui se tint le 4 février, que quelques-unes n'avaient pas été décidées. Napoléon communiqua un autre projet plus Cela fut cause qu'elles furent toutes remises en étendu que le premier, ordonna au secrétaire délibération, à commencer par celle de l'insti- général de les faire imprimer l'un et l'autre, et tution du jury. On supposa également qu'aucune les renvoya tous deux à la section. partie du projet n'avait été arrêtée, tandis que, Le 6, la section fit son rapport, donna la comme je l'ai dit, le conseil avait presque priorité au second projet, et en présenta elleachevé la partie du projet dont on formait ac-même un nouveau, où elle mit en avant le systuellement le Code d'instruction criminelle. tème des assises.

Voilà au surplus ce que porte le procès-ver- Feu M. Jaubert le combattit avec beaucoup de force, par cela seul qu'il y retrouverait le

bal:

« M. Treilhard, au nom de la section de lé-jury, et conclut à la suppression de l'institugislation, fait le rapport que, dans la séance du tion, à la formation de grands corps qui exer23 de ce mois, le chef du gouvernement a or-çassent tout à la fois les deux sortes de justices, donné de présenter sur l'état du travail relatif à l'organisation d'une procédure qui conservât au Code d'instruction criminelle. la publicité des débats et l'usage des défenseurs.

Après avoir rendu compte de la marche de la discussion qui eut lieu en l'an XII, M. Treilhard ajoute qu'on s'était réduit à présenter diverses questions dont la solution devait fixer les bases du projet; que plusieurs ont été décidées; que d'autres sont demeurées indécises.

» M. Treilhard, fait la lecture de la série de ces questions (1).

» Le chef du gouvernement ouvre la discussion sur la première question, sur celle de savoir si l'on conservera le jury. »

Dans cette séance, l'institution du jury fut chaudement attaquée et non moins vivement défendue. Elle sortit victorieuse de cette nouvelle épreuve le conseil fut, pour la troisième fois, d'avis qu'elle devait être maintenue.

On revint ensuite au projet présenté. Il fut décidé en principe que la justice civile et la justice criminelle seraient réunies, et qu'il y aurait des assises.

Les autres séances furent employées à établir un système assis sur ces bases.

Il la laissa discuter quelque temps, puis il La nouvelle discussion, commencée le 30 jandemanda comment le jury marchait actuelle-vier 1808, fut terminée le 30 octobre, et occupa trente-sept séances.

ment.

Le grand juge déclara que les jurés remplissaient leurs fonctions avec beaucoup de faiblesse, et encourageaient ainsi le crime par l'impunité.

On répondit au ministre qu'il était possible

(1) Ce sont celles qui avaient été présentées dans la séance du 16 prairial an xu, et que j'ai rapportées textuellement.

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