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plus d'un mois, la peine sera celle des travaux forcés à perpétuité.

343. La peine sera réduite à l'emprisonnement de deux ans à cinq ans, si les coupables des délits mentionnés en l'article 541, non encore poursuivis de faits, ont rendu la liberté à la personne arrétée, séquestrée, ou détenue avant le dixième jour accompli depuis celui de l'arrestation, détention ou séquestration. Ils pourront néanmoins être renvoyés sous la surveillance de la haute police, depuis cinq ans jusqu'à dix ans.

= Non encor poursuivis de fait ont rendu la liberté à la personne arrêtée, séquestrée ou détenue avant le dixième jour, etc. La loi ne prononce plus, dans ce cas, que des peines correctionnelles; elle commue la pèine en faveur du repentir du coupable, et Yeut bien supposer que sa faute a été plutôt le résultat de l'irréflexion du moment, que d'une préméditation tenant à des combinaisons criminelles; mais passé le dixième jour, elle ne doute plus de la perversité de l'intention, et devient inflexible.-Le législateur entend par poursuites de fait, celles qui sont dirigées contre le coupable lui même, telles qu'un mandat d'amener, et non des poursuites faites d'une manière générale à l'occasion du crime de détention; on conçoit très-bien les motifs de l'exception, lorsque le coupable a rendu la liberté à la personne arrêtée après des poursuites dirigées contre lui; ce n'est plus au repentir, mais à la crainte qu'il a obéi.

344. Dans chacun des trois cas suivants: 1° Si l'arrestation a été exécutée avec le faux costume, sous un faux nom, ou sur un faux ordre de l'autorité publique; - 2o Si l'individu arrêté, détenu ou séquestré, a été menacé de la mort; -3° S'il a été soumis à des tortures corporelles; - Les coupables seront punis de mort.

Avec le faux costume. Cette profanation des attributions de l'autorité publique ajoute une gravité nouvelle à l'attentat, ainsi que les circonstances qui suivent; le crime dégenère alors en brigandage et en assasinat. et la loi a dú, dans chacune de ces circonstances, appliquer par suite la peine terrible qu'elle inflige à l'assassin. Mais si le coupable, dans les trois cas prévus par notre article, rendait la liberté à la personne détene jouirait-il de la faveur contenue dans l'article précédent? La négative découle, 1o des termes bien positifs dans les quels est conçu l'article 343, lequel ne se réfère qu'à l'article 541; 20 de la gravité du crime prévu par l'article actuel, qui suppose un degré de perversité tel qu'aucune indulgence n'est plus possible. Sous un faux nom. Il faut donner à ces expressions

un sens en harmonie avec toute la disposition ; c'est-àdire que le coupable a emprunté le nom d'un fonctionnaire public, et non pas celui d'un autre particulier; c'est en effet l'usurpation du caractère d'un fonctionnaire public qui seule aggrave le crime.

A été menacé de la mort. Cette menace rend la peine de la mort applicable, bien que l'arrestation ait eu lien sans prendre le costume ou le nom d'un fonctionnaire public; car c'est cette menace qui, par elle-même, donne au fait criminel le caractère du brigandage.

Tortures corporelles.De simples tortures morales ne suffiraient pas; mais comme le législateur n'a pas défini ces tortures, il s'ensuit qu'elles sont abandonnées à la conscience des jurés.

SECTION VI. Crimes et délits tendant à empêcher ou détruire la preuve de l'état civil d'un enfant, ou à compromettre son existence; enlèvement de mineurs ; infraction aux lois sur les inhumations.

SI. Crimes et délits envers l'enfant.

Ces crimes bouleversent l'ordre naturel et civil ; ils conduisent à une usurpation d'état, à un vol manifeste auquel ils associent la loi. Ils ne s'exercent pas seulement sur l'enfant qui en est la première victime, ils attaquent souvent les pères et les mères dans leurs plus chères affections: des peines graves devaient donc servir de frein à ces sortes d'attentals.

345. Les coupables d'enlèvement, de recélé ou de suppression d'un enfant, de substitution d'an enfant à un autre, ou de supposition d'un enfant à une femme qui ne sera pas accouchée, seront punis de la réclusion. La mème peine aura lieu contre ceux qui, étant chargés d'un enfant, ne le représenteront point aux personnes qui ont le droit de le réclamer (1).

Ou de suppression d'un enfant. Si l'enfant nonseulement avait été enlevé à sa famille, mais encore mis à mort, il n'y aurait plus simplement suppression. il y aurait infanticide; crime que la loi punit de mort. (302.) Il s'agit, dans notre article, d'enfants nouveauxnés; pour d'autres personnes, l'enlèvement, le recélé constitue le crime de séquestration de personnes. (341.)

346. Toute personne, qui, ayant assisté à un accouchement, n'aura pas fait la déclaration à elle prescrite par l'art. 56 du code civil, et dans les délais fixés par l'art. 53 du même code, sera punie d'un emprisonnement de six mo's, et d'une amende de seize francs à trois cents francs (2).

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(1) L'art. 345 s'applique au cas où l'enfant est mort au moment de sa suppression; ainsi jugé par plusieurs arrêts de la Cour de cassation de Paris, mais qui sont vivement combattus par M. Chauveau.

(2) Lorsque le père est connu, légalement avoué et présent sur les lieux, le docteur qui a assisté à l'accouchement n'est pas passible de poursuites pour n'avoir pas fait la déclaration de l'enfant.si le père l'a négligée. (Brux., 20 oct. 1831.)

A défaut du père, la loi, art. 56 du code civil, n'appelle ceux qui ont assisté à l'accouchement qu'après les gens de l'art qui y ont donné leurs soins. Elle n'a pas voulu les obliger solidairement, mais dans un ordre successif. Liége, cass., 16 mai 1829.)

Les peines prononcées par l'art. 346 du code pénal, pour le défaut de déclaration de naissance d'un enfant, ne sont pas applicables à tous ceux que l'art. 56 du code civil charge

de faire cette déclaration, mais uniquement à ceux qui ont assisté à l'accouchement. Ainsi,si la mère est accouchée hors de son domicile, la personne chez qui elle est accouchée ne serait passible des peines de l'art. 346 que pour autant qu'elle aurait été présente à l'accouchement. (Brux, 16 fév. 1828.)

Cependant, il a été jugé que lorsqu'une femme accouche hors de son domicile, l'obligation de déclarer la naissance n'est pas imposée cumulativement aux personnes qui ont assisté à l'accouchement (notamment aux chirurgiens ou médecins), et à la personne chez qui l'accouchement a cu lieu : la personne chez quil'accouchement a eu lieu est seule tenue à faire la déclaration, et seule punissable, en cas de non déclaration. (Paris, cass., 7 sept. 1823.)

Il résulte de ces arrêts que l'état civil de l'enfant est le plus exposé là ou il devrait par l'absence des personnes qui sont interessées à le fixer, être entouré de plus de garanties.

enfant nouveau-né, ne l'aura pas remis à l'officier de l'état civil, ainsi qu'il est prescrit par l'art. 58 du code civil, sera punie des peines portées au précédent article. La présente disposition n'est point applicable à celui qui aurait consenti a se charger de l'enfant, et qui aurait fait sa déclaration à cet égard devant la municipalité du lieu où l'enfant a été trouvé.

A celui qui aurait consenti à se charger de l'enfant. Si la personne qui a trouvé l'enfant ne veut pas s'en changer, il doit être remis à l'hospice le plus voisin. (Loi du 25 frimaire an v.)

348. Ceux qui auront porté à un hospice un enfant au-dessous de l'âge de sept ans accomplis, qui leur aurait été confié afin qu'ils en prissent soin ou pour toute autre cause, seront punis d'un emprisonnement de six semaines à six mois, et d'une amende de seize francs à cinquante francs. -Toutefois aucune peine ne sera prononcée, s'ils nétaient pas obligés de pourvoir gratuitement à la nourriture et à l'entretien de l'enfant, et si personne n'y avait pourvu.

349. Ceux qui auront exposé et delaissé en un lieu solitaire un enfant au-dessous de l'age de sept ans accomplis; qui auront donné l'ordre de l'exposer ainsi, si cet ordre a été exé cuté, seront pour ce seul fait, condamnés à un emprisonnement de six mois à deux ans, et à une amende de seize francs à deux cents francs.

Au-dessous de l'âge de sept ans. Le législateur a pensé qu'au-dessus de sept ans, l'eafant peut donner des renseignements, et échapper aux dangers d'une exposition, même dans un lieu solitaire.

350. La peine portée au précédent article sera de deux ans à cinq ans, et l'amende de cinquante francs à quatre cents fr. contre les tuteurs ou tutrices, instituteurs ou institutrices de l'enfant exposé et délaissé par eux ou par leur ordre.

Contre les tuleurs ou lutrices, etc. La peine est plus forte, parce que ces personnes abusent en outre de la confiance que l'on a placée en elles.

351. Si, par suite de l'exposition et du délaissement prévus par les art. 549 et 330, l'enfant est demeuré mutilé ou estropié, l'action sera considérée comme blessures volontaires à lui faites par la personne qui l'a exposé et délaissé ; et si la mort s'en est suivie, l'action sera considérée comme meurtre :au premier cas, les coupables subiront la peine applicable aux blessures volontaires; et au second cas, celle du meurtre.

La peine applicable aux blessures volontaires. C'est-à-dire la réclusion, et s'il y a eu préméditation ou guet-apens, les travaux forcés à temps (310.)

Celle du meurtre. Cette peine est celle des travaux forcés à perpétuité. (304).

352. Ceux qui auront exposé et delaissé en un lieu non solitaire un enfant au-dessous de l'âge de sept ans accomplis, seront punis d'un empri

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= Exposé et délaissé. La cour suprême a décidé que le délaissement punissable des peines portées par notre article existait dans les cas où les coupables auraiert laissé l'enfant à la porte d'une maison dans laquelle ils auraient aperçu de la lumière, et où ils auraient frappé, s'il n'était pas d'ailleurs constant que l'enfant a été immédiatement l'objet des soins des habitants de la maison qui seraient survenus. La cour s'est fondée sur ce qu'il y a délaissement toutes les fois que l'enfant exposé a été laissé seul, et que, par le fait d'abandon, il y a eu cessation, quoique momentanée, ou interruption des soins et de la surveillance qui lui sont dus. Le fait d'avoir, par commission de la mère, deposé au tour d'un hospice, un enfant au-dessous de sept ans, n'est pas passible de l'application de l'art. 552 dù c. pén., ni d'aucun autre. (Bruxelles, 12 mai 1833 .) — Les peines portées contre ceux qui exposent et délaissent un enfant dans un lieu non solitaire, sont applicables à celui qui dépose un enfant dans le tour d'un hospice.(Bruxelles, 25 mars 1826; et en sens contraire, Brux., 11 mai 1833.)

353. Le délit prévu par le précédent article sera puni d'un emprisonnement de six mois à deux ans, et d'une amende de vingt-cinq francs à deux cents francs, s'il a été commis par les tuteurs ou tutrices, instituteurs ou institutrices de l'enfant.

SII. Enlèvement des mineurs.

Après avoir entouré l'enfant de mesures tutélaires et conservatrices, la loi accorde aux mineurs une protection spéciale: elle prévoit leur enlèvement du lieu où ils auraient été placés par les personnes à l'autorité ou à la direction desquelles ils étaient soumis et confiés; elle embrasse, dans sa généralité, les mineurs des deux sexes, quels que soient d'ailleurs les moyens employés pour les enlever ou détourner. Comme cet enlèvement peut être plus coupable dans ses motifs, plus dangereux dans ses conséquences cnvers le sexe le plus faible, il est puni, dans ce cas, d'une peine beaucoup plus forte, si, toutefois, la fille enlevée est âgée de moins de seize ans.

354. Quiconque aura, par fraude ou violence, enlevé ou fait enlever des mineurs, ou les aura entraînés, détournés ou déplacés, ou les aura fait entrainer, détourner ou déplacer des lieux où ils étaient mis par ceux à l'autorité ou à la direction desquels ils étaient soumis ou confiés, subira la peine de la réclusion (1).

Par fraude ou violence. Ces expressions se rapportent aux faits soit d'enlèvement, soit d'entraînement, soit de détournement, dont l'accusé aurait pu se rendre coupable: c'est la fraude ou la violence qui sont constitutives de la criminalité du fait. La violence est facile à reconnaître et à préciser; mais la fraude se compose d'éléments plus ou moins douteux, abandonnés à la conscience des jurés. — Si le coupable était lui-même mineur de moins de seize ans, il est clair que, malgré la généralité des termes de la disposition qui nous occupe, il faudrait appliquer les art. 66, 67 et 68.

355. Si la personne ainsi enlevée ou détournée est une fille au-dessous de seize ans accom

(1) Cet article n'est pas applicable à l'enlèvement d'une mineure mariée. (Paris, cass., 1er juiil. 1831.)

plis, la peine sera celle des travaux forcés à Lemps.

356. Quand la fille au-dessous de seize ans aurait consenti à son enlèvement ou suivi volontairement le ravisseur, si celui-ci était majeur de vingt-un ans on au-dessus, il sera ✓ condamné aux travaux forcés à temps. Si le ravisseur n'avait pas encore vingt-un ans, il sera puni d'un emprisonnement de deux à cinq ans.

Aurait consenti à son enlèvement ou suivi volontairement le ravisseur. Ainsi la loi prononce une peine très-grave, encore qu'il n'y ait eu ni violence ni fraude. Le consentement donné par un enfant de moins de seize ans est censé arraché à la timidité, ou être l'effet décevant des illusions et des prestiges dont il est si facile d'entourer l'inexpérience et la crédulité de cet âge.

Si celui-ci était majeur de vingt-un ans ou audessus. A cet âge, la séduction dont le suborneur a employé le langage est absolument sans excuse; aucune pitié n'était due au vil corrupteur qui a su faire tomber dans d'horribles piéges une innocente victime.

N'avait pas encore vingt-un ans. Il ne peut, s'il a atteint sa seizième année, invoquer le défaut de discernement; mais la loi suppose encore, tant qu'il n'a pas touché l'époque de sa majorité, qu'aveuglé par le désir d'une première passion, il n'a pas saisi et calculé tous les résultats de sa téméraire entreprise. Il échappera donc aux travaux forcés et à la flétrissure qui accompagne cette peine; cependant il a troublé la paix d'une famille, il a violé le sanctuaire domestique, il doit être au moins puni correctionnellement.

357. Dans le cas où le ravisseur aurait épousé la fille qu'il a enlevée, il ne pourra être poursuivi que sur la plainte des personnes qui, d'après le code civil, ont le droit de demander la nullité du mariage, ni condamné qu'après que la nullité du mariage aura été prononcée.

Aurait épousé la fille qu'il a enlevée. Si toutes les personnes qui auraient intérêt à demander la nullité du mariage le confirment par leur silence, ne serait-il pas dangereux d'armer la partie publique du droit de former une action qui n'aurait plus d'autre objet que de porter inutilement le trouble dans une famille et le scandale dans la société ? La loi n'a pas dû se montrer plus sévère que la famille outragée; elle doit se laisser fléchir aussi, et l'offense qui lui avait été faite est censée remise, quand cette offense a reçu ainsi la meilleure des réparations dont elle était susceptible.

S III. Infraction aux lois sur les inhumations.

858. Ceux qui, sans l'autorisation préalable de l'officier public, dans le cas où elle est prescrite, auront fait inhumer un individu décédé, seront punis de six jours à deux mois d'emprisonnement et d'une amende de seize francs à cinquante francs; sans préjudice de la poursuite des crimes dont les auteurs de ce délit pourraient être prévenus dans cette circonLa même peine aura lieu contre ceux qui auront contrevenu, de quelque manière que ce soit, à la loi et aux réglements relatifs aux inhumations précipitées.

stance.

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Sans l'autorisation préalable de l'officier public. Cette autorisation a pour objet de s'assurer que la

personne est réellement décédée, et aussi de constater le genre de mort. Elle se donne sur papier libre et sans frais. (77, code civil.)

A la loi et aux réglements relatifs aux inhumalions précipitées. L'inhumation est censée précipitée, lorsqu'elle est faite avant l'expiration des vingt-quatre heures, hors les cas prévus par les lois et réglements. (77, c. civ.)- Un décret du 23 prairial an X11 règle le mode des inhumations; il veut aussi, art. 19, que, lorsque le ministre d'un culte, sous quelque prétexte que ce soit, se permet de refuser son ministère pour l'inhumation d'un corps, l'autorité civile, soit d'office soit sur la réquisition de la famille, commette un autre ministre du même culte pour remplir ces fonctions. Dans tous les cas, l'autorité civile est chargée de faire porter, présenter et inhumer les corps.

359. Quiconque aura recélé ou caché le cadavre d'une personne homicidée ou morte des suites de coups ou blessures, sera puni d'un emprisonnement de six mois à deux ans, et d'une amende de cinquante francs à quatre cents francs, sans préjudice de peines plus graves s'il a participé au crime.

= Récélé ou caché le cadavre d'une personne homicidée. La loi a vu un délit dans un acte de cette nature, parce qu'il a pour objet de dérober le crime à la vindicte publique.

360. Sera puni d'un emprisonnement de trois mois à un an, et de seize francs à deux cents francs d'amende, quiconque se sera rendu coupable de violation de tombeaux ou de sépultures; sans préjudice des peines contre les crimes ou les délits qui seraient joints à celui-ci.

= Coupable de violation de tombeaux ou de sépultures. Le respect pour la cendre des morts est commandé par toutes les législations: un peuple qui n'y attacherait aucune sanction pénale ne serait plus un peuple civilisé.

Sans préjudice des peines contre les crimes ou les délits qui seraient joints à celui-ci. L'acte de dépouiller un cadavre des objets dont il est couvert dans son cercueil constitue-t-il un vol? Pour la négative, on dit que l'enlèvement d'une chose qui n'appartient à personne ne peut constituer une soustraction frauduleuse portant préjudice au propriétaire de la chose, caractère sans lequel il n'y a pas de vol. Pour l'affirmative, consacrée par la cour suprême, on dit que tous les objets qui enveloppent les morts, les cercueils eux-mêmes, et tous les objets qui y ont été déposés pour exprimer des affections ou pour conserver des souvenirs, ont une détermination fixe et invariable, détermination qu'il est impossible de méconnaître, et qui réclame perpétuellement contre l'enlèvement qui peut être fait de ces objets; que, ne pouvant être mis dans la classe des objets abandonnés, pour devenir la propriété du premier occupant, personne ne saurait avoir le droit de se les approprier; que leur soustraction, qui ne peut être réputée exempte de fraude, est un vol, est que ce vol est un crime, s'il s'y joint des circonstances aggra

vantes.

SECTION VII. Faux témoignage, injures, révélation de secrets.

Le faux témoignage fait en justice peut conduire un homme innocent sur l'échafaud, ou rejeter un coupable dans la société. Ce crime, d'autant plus odieux qu'il fait lâchement servir la justice elle-même d'instrument à ses vengeances et à ses passions, ne pou vait échapper à la sévérité des lois. L'honneur aussi

cette propriété sacrée de l'homme, peut être atteint par la calomnie et l'injure. Il fallait encore réprimer, par des dispositions rigoureuses, ces moyens honteux de faire le mal. Enfin, l'homme dépositaire obligé d'un secret, dispose, en le divulguant, de ce qui ne lui appartient pas, et la loi ne pouvait laisser sans châtiment cette action coupable.

SI. Faux témoignage.

36-1. Quiconque sera coupable de faux témoignage en matière criminelle, soit contre l'accusé, soit en sa faveur, sera puni de la peine des travaux forcés à temps. — Si néanmoins l'accusé a été condamné à une peine plus forte que celle des travaux forcés à temps, le faux témoin qui a déposé contre lui subira la même peine (1).

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Nous

De faux témoignage en matière criminelle. Notre article ne s'occupe que du faux témoignage en matière criminelle; c'est l'article suivant qui concerne le faux témoignage en matière correctionnelle. avons vu, sous l'art. 75 du c. d'instr. crim., que les peines du faux témoignage, portées par notre article, ne s'appliquaient qu'aux fausses dépositions faites dans le cours des débats, et non à celles qui étaient faites devant les juges d'instruction et les autres officiers de police judiciaire ; la cour suprême parait s'être déterminée à consacrer cette opinion, par le motif principalement que s'il en était autrement, les témoins entendus dans la première instruction seraient entraînés à persévérer dans le mensonge par la crainte d'être poursuivis comme faux témoins (2). Les témoins entendus en vertu du pouvoir discrétionnaire du président (269, c. d'inst. crim.) pourraient-ils être poursuivis comme faux témoins? La négative parait constante; car 10 ils ne déposent pas sous la foi du serment. (Ibid., c. d'inst. crim.), et 20 ce n'est pas des dépositions proprement dites qu'ils viennent faire ; ils ne sont appelés que pour donner de simples renseignements. (Ibid., c. d'instr. crim.) faux témoignage étant un crime, la tentative de ce crime, lorsqu'elle réunit toutes les circonstances déterminées dans l'art. 2, doit être punie comme le crime même ; mais on conçoit qu'il est difficile qu'une tentative de faux témoignage réunisse tous ces caractères; cependant la cour suprême a vu ces circonstances dans une fausse déposition interrompue par la défaillance du témoin.

-

Le

Soit contre l'accusé, soit en sa faveur. Le jury doit s'expliquer positivement sur ces circonstances, qui sont constitutives de la criminalité du fait, de telle sorte qu'un arrêt basé sur une déclaration du jury, portant que l'accusé s'est rendu coupable de faux témoignage aux débats d'un procès criminel, devrait être cassé; car il pourrait se faire que le témoin eût porté un faux

La

témoignage sur un fait étranger à l'accusation, et, par
suite, il ne serait nullement établi que le faux témoi-
gnage a été fait contre l'accusé ou en sa faveur.
cour de cassation a décidé qu'un accusé de faux témoi-
gnage ne pourrait être exempté de la peine, par le motif
qu'il n'a pas fait sa déposition dans le dessein de nuire.La
cour s'est fondée sur ce que l'intention criminelle est es-
sentiellement inhérente à une déposition faite sciemment
contre la vérité. Mais on a également jugé qu'une con-
damnation pour faux témoignage ne pouvait reposer uni-
quement sur la circonstance que la déposition du témoin
poursuivi était en contradiction avec celles d'un ou de
plusieurs autres témoins, car ces témoins pourraient
eux-mêmes être faux témoins; il faudrait donc d'autres
éléments constitutifs du crime; on a également décidé
qu'une simple déclaration négative ne constituait pas le
crime de faux témoignage, puisqu'un des témoins a pu
ne pas voir un fait qu'un autre affirme avoir vu; de
même, le refus de répondre ne peut être assimilé à une
fausse déposition. — Quant à l'interprète juré qui trans-
met infidèlement aux débats la déposition des témoins,
il ne saurait étre pani comme faux témoin, car il ne
porte pas un faux témoignage ; mais remplissant mo-
mentanément une fonction publique, il serend coupable
de forfaiture (166 et 167.)

Qui a déposé contre lui. Une peine égale à celle qu'il a fait prononcer frappe alors justement le faux témoin qui dépose contre un innocent; mais la déclaration du jury doit porter que le faux témoignage a été fait contre l'accusé. Il ne suffirait pas qu'il déclarât que le faux témoin avait été cité comme témoin à charge car un témoin appelé ainsi devant dire tout ce qu'il sait pourrait même déposer en faveur de l'accusé. Il est clair que la flétrissure ne doit pas être infligée aux témoins comme faussaires, bien qu'une fausse déposition soit une espèce de faux ; l'art. 163, qui inflige la flétrissure à tout faussaire, ne réfléchit que sur le faux dont la loi s'occupe dans la section première du chap. 3, livre 3 (132 et suiv.), mais il pourrait être flétri s'il était, pour faux témoignage, condamné aux travaux forcés à perpétuité. (20). Le faux témoignage donne lieu à surseoir à l'exécution de la condamnation, et peut devenir un moyen de révision de l'arrêt. (445, c. d'instr. crim.)

362. Quiconque sera coupable de faux témoignage en matière correctionnelle ou de police, soit contre le prévenu, soit en faveur, sera puni de la réclusion (3).

363. Le coupable de faux témoignage en matière civile, sera puni de la peine portée au précédent article (4).

364. Le faux temoin en matière correctionnelle, de police ou civile, qui aura reçu de l'argent, une récompense quelconque ou des promesses, sera puni des travaux forcés à temps.

(1) Un témoin, qui, dans une affaire criminelle ou correctionnelle fait une déclaration négative de non vu, ne dépose rien. Sa déposition est inutile, elle ne peut constituer un faux témoignage. (Paris, cass., 10 janv. 1812.)

Le témoin qui dépose n'avoir pas vu ou entendu des faits qu'il a réellement vus ou entendus, est coupable de faux témoignage. (Paris, cass., 17 mars 1827; et Brux., cass., 31 octobre 1831.)

(2) Les fausses déclarations faites devant un juge d'instruction, ne constituent pas le crime de faux témoignage; il ne peut exister de faux témoignage que devant une cour ou tribunal chargé de prononcer sur le sort d'un accusé ou d'un prévenu. Ainsi jugé par différents arrêts de la cour de cassation de Paris.

(3) On peut être obligé à déposer contre soi-même; ainsi le témoin interrogé sur un fait essentiel à la cause, ne peut

se dispenser de dire la vérité, encore bien que cette vérité doive tourner contre lui et l'incriminer. Une fausse déposition constituerait le faux témoignage. La loi ne fait aucune exception pour ce cas ; et la sainteté du serment n'en comporte aucune. Par cela seul qu'un témoin a pris la divinité à témoin de ses paroles et de sa déposition, il ne pouvait être dispensé, par aucune considération personnelle, de remplir les devoirs sacrés que le serment lui imposait. (Paris, cass., 26 août 1824.) Le faux témoignage est punissable par cela seul qu'il a été commis, et quand bien même il ne s'ensuivrait pas de décision. (Paris, 16 août 1836.)

(4) Le faux témoignage, en matière civile, est punissable, indépendamment du préjudice qu'il a, ou non, porté à celui contre qui il était dirigé. Il n'est donc pas nécessaire que le jury soit interrogé sur cette circonstance. (Paris, cass., 14 juill. 1827.)

Dans tous les cas, ce que le faux témoin aura reçu sera confisqué.

Qui aura reçu de l'argent. En matière criminelle, la loi n'a aucun égard aux motifs qui ont pu engager le témoin à faire un faux témoignage; elle voit un crime très-grave dans le seul fait d'avoir cherché à faire perdre l'honneur ou la vie à un innocent, ou à faire rentrer dans la société un coupable qui, enhardi par l'impunité même, commettra bientôt de nouveaux forfaits. Elle a, par suite, prononcé pour ce cas la peine des travaux forcés; mais en matière correctionnelle, de police ou civile, le faux témoignage ayant des résultats moins affreux, la loi n'a infligé à ce fait la peine des travaux forcés qu'autant que la corruption est venue ajouter son infamie à celle du crime.

Dans tous les cas. C'est-à-dire dans tous les cas de faux témoignage, soit en matière criminelle, correctionnelle, de police ou civile; car il est bien clair que si le législateur a voulu que le prix de la corruption fût confiqué dans le faux témoignage en matière correctionnelle ou de police, il a dû le vouloir, à plus forte raison, en matière criminelle.

365. Le coupable de subornation de té moins sera condamné à la peine des travaux forcés à temps, si le faux témoignage qui en a élé l'objet emporte la peine de la réclu sion; aux travaux forcés à perpétuité, lorsque le faux témoignage emportera la peine des travaux forcés à temps, ou celle de la déportation ; et à la peine de mort, lorsqu'il emportera celle des travaux forcés à perpétuité ou la peine capitale.

Le coupable de subornation de témoins.La loi ne définit pas la subornation, qui consiste dans la séduction et dans les moyens employés pour engager une personne à faire un faux témoignage(1). Du silence du législateur sur les éléments du crime de subornation, la cour suprême a conclu qu'ils étaient abandonnés à la conscience des jurés, et que, par suite, il suffiraft qu'ils déclarassent qu'il y avait eu subornation de témoins, pour que leur délibération devint la base d'une condamnation légitime, bien qu'ils ne se fussent expliqués sur aucun des éléments constitutifs du crime.

A la peine des travaux forcés à temps, si le faux témoignage qui en a été l'objet emporte la peine de la réclusion. Ainsi, bien que la subornation de témoins constitue la complicité du erime de faux témoignage la loi, cependant, punit cette complicité d'une peine d'un degré plus élevé que celle du crime principal. Cette aggravation est motivée sur le rôle même de suborneur, dont le crime est plus grave que celui du faux témoin, puisque ce dernier n'est dans les mains du suborneur qu'un instrument docile et corrompu.—Mais si le témoin corrompu n'avait pas encoreporté de faux témoignage, ou s'il ne s'en était rendu coupable que dans l'instruction, et pas encore aux débats, le suborneur pourrait-il être poursuivi? La cour de cassation a consacré la négative, par la raison qu'il résulte de la combinaison des art. 361, 362, 363 et 365, et notamment du rapprochement des deux dispositions de l'art. 61 avec l'art. 565, qu'une déposition fausse ne peut constituer le crime de faux témoignage que lorsqu'elle est faite dans les débats, d'après lesquels il doit être prononcé définitivement sur le fait auquel la déposition se rapporte, et que la subornation de témoins n'étant qu'un fait de compli

(1) Il y a subornation de témoins lors même que le faux témoignage a été demandé seulement à titre de service et qu'il n'a été employé, pour l'obtenir, ni promesses ni récompenses. (Paris, 16 août 1836.)

cité du crime principal de faux témoignage, il s'ensuit que là où il n'y a pas de faux témoignage, il ne peut y avoir de crime de subornation.

366. Celui à qui le serment aura été déféré ou référé en matière civile, et qui aura fait un faux serment, sera puni de la dégrada. tion civique (2).

Celui à qui le serment aura été déféré ou référé en matière civile. Déférer le serment, c'est demander que l'adversaire fasse serment: le référer, c'est demander que celui qui nous l'a déféré le prête lui-même. (1358, 1362, code civil.) Ce serment peut aussi, dans certains cas, être déféré d'office par le juge; mais alors il ne peut être référé. (1366, 1367, 1568, c. civ.)- Aux termes de l'art. 1363 du code civil, lorsque le serment déféré ou référé a été fait, l'adversaire n'est plus recevable à en prouver la fausseté, parc> qu'autrement la personne qui a consenti à la prestation du serment ne manquerait jamais de recommencer to procès, sous prétexte de la fausseté du serment, ce qui irait positivement contre le but de son institution: mais alors, comment la fausseté du serment sera-t-elle prouvée pour qu'il y ait lieu à l'application de l'article actuel? C'est au ministère public que la poursuite appartiendra, à moins qu'il ne s'agisse du serment déféré d'office (1366); mais, dans tous les cas, il faudra observer, quant à la preuve du faux serment, la distinction proclamée par la cour suprême entre les actes à l'égard desquels la loi admet la preuve testimoniale, et ceux pour lesquels elle exige une preuve écrite : c'està-dire dans lesquels il s'agit d'une somme excédant 150 fr. (1341, c. civ.); pour la preuve du faux serment déféré, à raison de sommes excédant 150 fr., la cour a décidé qu'elle ne pouvait être faite que par des actes écrits, par la raison que si les faits criminels peuvent être prouvés par des dépositions de témoins et par tout autre moyen de conviction étranger à la preuve qui résulte des actes écrits, il n'en est pas de même des faits civils autorisés par la loi civile, et dont la preuve est assujettic par elle à la production d'un acte écritqui les constate; qu'à l'égard de ces faits, la loi qui détermine le genre de preuve qui en peut être admis, étend son empire sur la procédure criminelle, comme sur la procédure civile; qu'elle doit être respectée et observée par les juges criminels, même dans le cas où le fait autorisé par la loi civile, se liant par des rapports nécessaires et absolus au fait puni par la loi criminelle, la preuve du fait criminel ne peut être établie que par celle du fait civil, et doit en être la conséquence; qu'ainsi, le serment prêté par un accusé de faux serment ne peut prendre ce caractère, et devenir passible de poursuites criminelles qu'autant qu'il serait produit une preuve écrite, ou du moins un commencement de preuve par écrit (1547, c. civ.), du paiement d'une somme excédant 150 fr., qui aurait été déniée par serment.

De la dégradation civique. On a pensé que nulle peine ne convenait mieux au crime de faux serment que celle qui consiste dans la destitution et l'exclusion du condamné de toutes fonctions ou emplois publics, et dans la privation de plusieurs droits civiques, tels, par exemple, que celui d'être juré ou témoin. (42).

SII. Calomnies, injures, révélations de secrets.

Les art. 367, 568,375 et 576 énumèrent les différentes espèces d'injures que la loi rend passibles des peines de

(2) Cet article est applicable à tout serment déféré ou prêté, bien qu'il ne soit pas décisoire, mais simplement relatir à un fait isolé duquel ne dépendait nullement la décision de la cause. (Liége, cass., 30 nov. 1824.)

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