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cile de Latran. C'est un vieux scandale ecclésiastiqué, féodal, royal et laïcal; il ne pourrait plus reparaître sans ébranler tous les fondemens de l'ordre social, et mettre en péril le trône et l'autel. Passons au troisième serment, dit de l'ordre du Saint-Esprit.

247. Cet ordre fut institué par le dissolu Henri III, pour décorer ses mignons, et les rois juraient de n'y admettre, pour commandeurs et officiers que des gentilshommes de trois quartiers paternels.

Voilà donc des employés, au moins des employés titulaires et nominaux privilégiés, et leurs priviléges, comme les autres, réprouvés par la Charte, sont abrogés par les trois premiers articles de cette loi, modèle obligé de toutes les lois et de toutes les pratiques.

248. Le quatrième serment concernait l'ordre de Saint-Louis; la formule dit que le roi fera observer l'édit de Louis XIV, cet édit portant que « tout grand-croix, commandeur, chevalier et officier' ne pourront être que des catholiques, apo

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Voyez comment les hiérarchies, même nominales, prennent de l'extension et de la variété, et admirez les perfectionnemens de l'esprit humain. Henri III ne reconnaît que deux degrés; Louis XIV en invente un troisième, un quatrième : on ne restera pas en si beau chemin. La loi de la Légion-d'Honneur (sans noblesse), en date du 29 floréal an x, n'admettait que des grands-officiers, des commandans, des officiers et des légionnaires; quatre degrés de récompenses sans anoblissement. Napoléon, par ruse en fit des degrés de noblesse; et, laissant la ruse, devenu, par les rubans et l'argent, plus fort que les lois, il créa un cinquième degré de cette décoration, les sublimes grand'croix ! Les nonis des membres de la légion entière ne peuvent pas tenir dans deux gros

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stoliques et romains » : clause inconciliable avec les articles et 3 de la Charte.

249. Reste le serment, plus qu'inutile, contre le duel; il porte « qu'il ne sera accordé ni grâce ni >> abolition aux prévenus du crime de duel ou de >> rencontre préméditée. »

Le retour aux délirantes opinions chevaleresques a rétabli de fait la barbare et gothique épreuve du combat singulier. Ces idées s'éteindront à mesure que la raison et le système libéral feront des progrès. L'expérience a prouvé, dans un autre hémisphère, qu'une loi efficace contre le duel est de déclarer les coupables privés de leur raison; en conséquence, d'ordonner qu'ils seront mis en curatelle, et privés conséquemment de toute fonction publique, Si cette loi sage existait, il faudrait faire cesser, en pareil cas, le droit de grâce, et cette loi suffirait pour obliger le roi, sans recourir à la faible ressource d'un serment devenu trop difficile à observer.

trop

Ceci nous conduit à une autre pénsée d'une importance plus générale : le serment royal du couronnement devrait contenir, avec la promesse d'observer la Charte, celle d'observer les autres lois en vigueur. Il est vrai que cette seconde promesse est implicitement contenue dans la première.

Mais cette énonciation explicite pourrait se trou

volumes in-8°; nous attendons le troisième. Tout cela n'est qu'une petite portion de la noblesse titulaire de France. Quels merveilleux progrès dans ce tems de lumières !

ver dans une loi de développement qui prescrirait aussi la formule du serment civique à prêter, au nom des chambres, dans cette cérémonie, par le président de chacune d'elles. Cette même loi devrait fixer la formule du serment du régent, et celle du serment civique des fonctionnaires. Toutes ces formules seraient insérées dans la Charte, lorsqu'on la réviserait.

250. Quelques feuilles publiques ont parlé de la bulle du sacre, qui doit être envoyée de Rome à Paris. On ne sait pas ce que pourrait être la bulle du sacre; si ce n'est pas une méprise de gazetier, ce serait donc quelque perfectionnement tout-à-fait nouveau et singulier sur-ajouté à toutes les superfluités extérieures, ecclésiastiques et politiques. Nous ne voyons nulle part que le couronnement des rois appartienne, en quelque sens que ce puisse être, aux réserves papales. Si c'était quelque chose d'analogue, l'abus serait au comble, et si révoltant qu'il aurait peu besoin de remède.

251. La liste civile de Louis XVIII a été fixée pour tout le tems de son règne par la loi du 8 novembre 1714, qui développe les conséquences de l'inaliénabilité.

252. D'après les articles ci-dessus de la Charte, les attributions du pouvoir royal se rapportent à trois chefs il est co-législateur avec les deux chambres, et il a, dans ce qui regarde la législation, des prérogatives particulières; 2° à lui seul appartient la puissance exécutive, qui consiste par

ticulièrement à nommer et à remplacer les ministres; 3° il est, sous de certaines conditions, le directeur ou modérateur, ou le préservateur, de toutes les autorités du royaume.

§ Ier.

Pouvoir modérateur réservé à la personne du roi exclusivement.

253. Pour qu'il y ait une liberté régulière, il faut une autorité médiatrice directoriale, modératrice, neutre à certains égards, absolue sous d'autres rapports, enfin irresponsable, une autorité qui prévienne ou termine toute lutte pernicieuse, qui entretienne ou rétablisse l'harmonie nécessaire entre les grandes autorités. Voilà ce que le roi seul effectue en proposant la loi, en refusant ou accordant la sanction aux résolutions des deux chambres, en nommant les pairs, et en créant de nouveaux pairs; en convoquant, ajournant, ou dissolvant les chambres; en usant de son droit de faire grâce et de commuer les peines; en nommant et en déplaçant les ministres; en distribuant, révoquant les récompenses et les faveurs.

S II.

Prérogatives du roi dans l'ordre législatif.

254. Le roi n'est point, comme disent les flatteurs, le maître, le souverain maître et seigneur. Il serait l'objet d'une haine universelle'. Toute

1 Voy. ci-dessus, liv. I, chap. vII, no 84. Voy. La Fontaine, dans

puissance absolue, tout pouvoir royal sans limites est contre la nature. La France doit être gouvernée par des lois, et non par des firmans. Les ordonnances du roi doivent avoir pour fin et pour moyen l'exécution de la Charte et des lois secondaires. Les lois sont l'expression présumée de l'opinion ou de la volonté générale, sur tout ce qui n'est pas réglé par la constitution; et les seuls organes officiels de cette même volonté, sur ces objets, sont le roi et les deux chambres. Le roi seul propose la loi, c'est-à-dire, que seul il a le droit de la faire proposer directement, et dans celle des deux chambres qu'il lui plaît de choisir; seul, il sanctionne la loi; il la promulgue seul et en son nom.

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255. On a senti généralement que l'initiative directe exclusive et la sanction de la loi sont incompatibles dans une même personne. Dès qu'il s'agit de projets soumis à toutes les attaqnes d'une discussion publique, et d'une critique nécessairement vive et forte pour qu'elle atteigne son but, il de

sa

fable de l'Ane et ses Mattres. Le charmant flatteur d'Auguste sentait, observait bien mieux les convenances, que n'ont fait les serviteurs employés par leur maître.

Ames dic pater atque princeps.....
Optime Romula

Custos gentis.....

Traduire ici: Prince adoré, maître des Romains...... n'est-ce point travestir Horace? Cette locution chevaleresque et servile, que nous repoussons, ne sied pas même dans un acte diplomatique; elle offense jusque dans ce traité de 1815, qui ne trouvait pas de signataires, et où l'on peut lire, art. 7: Dans tous les pays qui changeront de MAITRE.....

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