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s'exerce collectivement par le roi, la chambre des pairs et la chambre des députés des départemens, >> et, art. 19: Les chambres ont l'initiative indirecte des lois; art. 23: Point d'impôt sans le consentement des chambres; art. 53: Les citoyens pétitionnent devant les chambres; art. 56: « La chambre des députés a le droit d'accuser les ministres. >>

299. Il est vrai que Napoléon, dans són délire ambitieux, prétendit que les députés ne sont que les conseillers du prince: cette idée est encore chère aux flatteurs du pouvoir. En 1818, un conseiller-d'état, un président de collége électoral dans un département du centre, un candidat des ministres, un directeur ministériel d'élections, a osé dire aux électeurs, en un discours solennel et imprimé : « Je viens pour vous diriger.....; vous n'avez d'autre pouvoir que de nommer des con seillers du roi..... » A ce langage inconstitutionnel et servile, sachons reconnaître les adversaires de la Charte et de la liberté publique; redoublons de vigilance pour déconcerter leurs desseins; ne souffrons pas qu'ils arrachent au peuple une confiance dont ils se déclarent indignes.

300. « Le président de la chambre des députés est choisi entre les membres de la chambre; il est nommé par le roi, sur une liste de cinq membres présentée par la chambre » (art. 43 de la Charte). C'est encore ici une de ces dispositions qui entrent comme élément dans la constitution du pouvoir directorial et modérateur du roi, du pouvoir neutre,

à quelques égards, chargé d'écarter les obstacles à l'harmonie qui doit régner entre les trois branches de l'autorité souveraine. Les devoirs du président sont tracés par la nature de ses fonctions, par l'usage et par le réglement; il peut y être ramené s'il s'en écarte, s'il influence le débat, s'il veut paraître savoir ce que l'assemblée ignore, s'il se fait publiquement ou secrètement l'entrepreneur ou l'avocat du projet en discussion, s'il affecte de donner une priorité de faveur aux préavis contraires ou favorables à ce projet. Les devoirs de tout président sont de maintenir l'ordre, d'expliquer et de poser la question avec impartialité; ils se bornent là. Le président doit être surveillé par le bureau et par les scrutateurs, quand il s'agit de recueillir et de constater les voix. Il n'a point de suffrage prépondérant, dans le cas rare du partage égal des votes.

301. Ainsi, l'art. 43 ne semble pas sujet à de graves difficultés. Mais l'art 44, en sa seconde partie, doit tomber en désuétude, comme il y est déjà tombé ou à peu près. S'il était pratiqué un peu habituellement, il suffirait seul pour que la chambre perdit le caractère de publicité le plus essentiel au maintien de la justice tant législative que judiciaire. Un conseil national, tenu à l'ombre du mystère, menace de troubles et de révolutions comme une assemblée de conspirateurs ; il s'altère dans l'ombre, et dégénère en réunion privée ; il travaille au profit des intérêts privés.

Cependant, l'art. 44 de la Charte est conçu dans

ces termes : « Les séances de la chambre sont publiques; mais la demande de cinq membres suffit pour qu'elle se forme en comité secret. »

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C'est la donner d'une main et retirer de l'autre ; c'est reconnaître la règle, et réserver le moyen le plus facile de la violer sans cesse. Mais il a été sagement prescrit, par le réglement de la chambre, que les noms des cinq membres qui demanderaient le secret seraient insérés au procès-verbal ; et cette menace de publicité a suffi pour neutraliser le mauvais principe glissé dans notre art. 44. Un vice mal équivalent se retrouve dans l'article 21 de la Charte, dans cette forme d'initiative indirecte qui transporte au comité secret la discussion, disons mieux, la véritable délibération. Ainsi, la publicité cesse d'être effective dans les matières les plus importantes, et les ministres peuvent régner dans le secret qui a fait, jusqu'en 1819, l'une des grandes bases de leur système politique. (Voyez liv. 3, chap. 6.) La révision fera disparaître cet art. 21, et rendra aux députés le droit d'initiative directe, sans en priver le monarque.

302. Elle définira plus largement l'inviolabilité naturelle des députés, et leur exemption de toute contrainte par corps.

Il y a d'autres contraintes par corps que celle qui peut résulter de l'état de débiteur failli, par exemple, en matière de réintégrande, etc. Ce sont principalement ces contraintes dont l'article 51 de la Charte affranchit les députés pendant leurs fonc

tions. L'exercice des droits de député et même d'électeur ou d'éligible doit être, suivant la raison suspendu par l'état de débiteur failli. L'article 51, déjà cité, porte généralement « qu'aucune contrainte par corps ne peut être exercée contre un membre de la chambre, durant la session et durant les six semaines qui l'ont précédée ou suivie. » Il n'est pas vraisemblable que l'intention de cet article soit que le failli dont les droits politiques sont suspendus ou doivent l'être, puisse représenter le peuple avant d'avoir satisfait les créanciers de sa faillite. Mais si un failli était député pendant la durée de sa faillite connue ou inconnue lors de son élection, ou survenue depuis, l'art. 51 lui serait applicable, sauf à le déclarer, s'il y avait lieu, non élu valablement, ou démissionnaire.

303. Les anciennes constitutions voulaient qu'aucun représentant ne pût être, en aucun tems, recherché, accusé, ni jugé pour ce qu'il aurait dit ou écrit dans l'exercice de ses fonctions; et ce principe sacré est l'un des fondemens de l'art. II de la Charte, si persévéramment violé', et qui défend toute recherche des opinions, des votes émis avant la restauration. Ce principe général manque dans la Charte et la rend défectueuse. Punir un votant pour avoir dit son avis, cet avis que l'autorité souveraine lui a demandé, c'est une barbarie

que les

1 Par la loi du 12 janvier 1816

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factions se permettent, et qu'elles peuvent décorer du nom de loi, parce qu'elles sont capables de tout. Mais la liberté d'opiner, la sûreté la plus complète dans ses opinions, sont de droit naturel pour un représentant; elles n'ont de bornes que sa conscience et les règles de police intérieure admises dans l'assemblée législative au jour où il a parlé.

La Charte, à cet égard, est bien moins libérale. Contre l'esprit de l'art. 11, elle se borne à déclarer, art. 52, « qu'aucun membre de la chambre ne peut, pendant la durée de la session, être poursuivi et arrêté en matière criminelle, sauf le cas de flagrant délit, qu'après que la chambre a permis sa poursuite. >>

304. Sur l'entrée et la séance des ministres et des commissaires du roi dans les chambres, et sur la question si les chambres peuvent se montrer hors du lieu de leurs séances, voyez le chapitre précédent, no 296.

305. Il est très-nécessaire de fondre en chaque loi générale de finance toutes les lois et tous les articles des lois précédentes que l'on veut conserver, tout au moins d'en faire imprimer le texte avec chacune de ces lois générales; c'est l'unique moyen d'éviter la surprise et l'erreur sur des dispositions légales d'intérêt habituel et universel. Ce serait une heureuse occasion d'alléger le poids des impôts, d'abroger et d'améliorer chaque année le

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