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cette probité deviennent le caractère général des citoyens, par la rectitude et la force de l'opinion

commune.

351. En 1819, il y a six ministres à département, savoir: de la justice, de l'intérieur, de la guerre, de la marine, des finances et des relations extérieures. Le ministère de la police générale, vraie inquisition d'état, incompatible avec la liberté, n'existe plus.

352. Les ministres agissent ou séparément, ou en conseil des ministres, et sous la présidence de celui que le roi a désigné pour cette fonction. Jusqu'à présent, cette présidence a eté décernée au ministre des relations extérieures.

353. Séparés ou réunis, les ministres doivent suivre le même plan général, les mêmes principes généraux, le même système de gouvernement, comme les roues du même char font la même route et suivent les mêmes traces. Aussitôt qu'ils ont des marches contraires ou trop différentes, le bien du service public, ou ce qui revient au même, le véritable intérêt du roi, exigent la dissolution du ministère actuel et la formation d'un nouveau. En un mot, le ministère doit être un corps homogène.

354. Les ministres en conseil, et chacun dans son département, exercent, au nom du roi, une autorité toujours responsable au roi et aux chambres, toujours précaire et révocable; ils l'exercent par des actes relatifs ou à la confection des lois, ou à leur exécution.

Tous ces actes, fussent-ils signés du roi, doivent être signés de l'un des ministres, afin que la responsabilité puisse être exercée contre le ministre signataire; afin que les agens ministériels aient dans cette signature un moyen qui puisse, quand il y a lieu, excuser ou atténuer le fait de leur concours à l'exécution d'un acte contraire aux lois, ou prohibé et réprimé par nos lois pénales. Une dépêche télégraphique ne pouvant être signée, peut bien transmettre des avis, des instructions, mais non pas des ordres qui puissent excuser', devant l'autorité judiciaire, le subordonné qui exécute.

355. Il est difficile, mais non pas tout-à-fait impossible, que des projets de loi fassent partie intégrante de l'accusation contre un ou plusieurs ministres. Ce sont les actes exécutifs, ou l'injuste déni de ces actes, ou leur retard malicieux, qui doivent être sujets à l'examen et à la poursuite des chambres. Il en faut exclure tous ceux qui appartiennent au pouvoir modérateur du roi. Ceux-là exigent l'obéissance la plus absolue, et ne peuvent être attaqués par aucune pétition, ni par aucune proposition d'initiative indirecte dans les chambres. Les seuls actes exécutifs sont soumis à leur surveil lance.

Ces actes sont généraux ou spéciaux ; et au rang des actes généraux d'exécution, viennent les ordonnances et réglemens administratifs, les instruc

1 De la Justice Criminelle en France; par M. Bérenger; page 605.

tions ou décisions générales ministérielles, ainsi que les ordres généraux d'administration, et les approbations des actes d'administrateurs subordonnés aux ministres.

Parmi les actes spéciaux sont toutes les décisions individuelles, tous les ordres particuliers.

CHAPITRE VIII.

Ordonnances et autres actes généraux d'exécution.

356. La réunion des trois branches du pouvoir législatif constitué, délimité par la Charte, fait seule toutes les lois secondaires d'ordre politique, public ou privé; elle agit comme exerçant la souveraineté constituée, et sous l'unique restriction de se conformer au droit naturel ou à la raison universelle, et de se renfermer dans les bornes posées à son action par la Charte, par l'autorité suprême

ou constituante.

Ainsi, aucun acte du pouvoir exécutif isolé n'est une loi de l'état; autrement, tout acte du pouvoir exécutif isolé ne peut être qu'un mode d'exécution de la Charte ou des lois secondaires, ou un attentat, une trahison d'un ou de plusieurs ministres. Et comme il peut y avoir des actes du pouvoir législatif qualifiés lois, et qui ne soient que des violations du droit naturel et de la Charte, de vé

ritables prévarications; de même, il peut y avoir des actes qualifiés de noms qui conviennent aux actes exécutifs, et qui ne soient néanmoins que des usurpations de l'autorité législative, des usurpations frappées de nullité par le vice radical du défaut de pouvoir, et par le vice encore plus révoltant de l'iniquité intrinsèque, de l'évidente contrariété à la justice naturelle, à la Charte et aux lois secondaires. Il n'y a eu que trop d'exemples de ces deux genres de calamité publique, avant la nouvelle formation du ministère à la fin de décembre 1818.

357. Telles sont les conséquences de la Charte, et particulièrement des art. 13 et 14 qu'il s'agit d'expliquer.

«< Au chef suprême de l'état appartient la puissance exécutive. » C'est donc lui qui doit en chef, faire exécuter la Charte et les lois secondaires, pourvu qu'elles ne soient pas incompatibles avec la Charte; il les fait exécuter par ses ministres et par tous les magistrats, par tous les agens d'exécution.

« Il fait les réglemens et ordonnances nécessaires pour l'exécution des lois et la sûreté de l'état. »>

Ces deux expressions constitutionnelles, réglemens, ordonnances, désignent les ordres d'exécution, et surtout les ordres généraux. Il serait presque impossible d'assigner des caractères qui distinguent essentiellement les réglemens du roi d'avec ses ordonnances générales; mais la plupart

des ordres particuliers du roi sont appelés ordonnances, et ne peuvent pas être nommés réglemens: ce dernier terme ne convient qu'aux actes exécutifs contenant des règles générales d'exécution. Notre article 14 comprend, sous le nom d'ordonnances, les ordres généraux et les ordres particuliers du roi.

358. Les bouts de loi, comme on disait sous le régime de Napoléon, c'est-à-dire les sommaires de législation rédigés en quelques lignes, tout exprès pour les développer, les modifier ensuite arbitrairement, par des volumes de réglemens, ou décrets ou ordonnances exécutifs, en vertu de la délégation spéciale de la loi, ou sans cette autorisation spéciale, ne furent et ne seront jamais que des artifices du despotisme, des formes traîtresses, afin de réduire à de vains simulacres les chambres législatives.

En toute matière, la loi doit énoncer avec les principes leurs principales conséquences, autrement il y a confusion des deux grands pouvoirs, et suppression des garanties constitutionnelles. Cela est vrai, surtout pour les lois politiques ou criminelles, ou de finances. Il y a d'autres matières où l'on peut se confier davantage au discernement, à la sagesse des ministres, des administrateurs et des juges telles sont les dispositions de loi surajoutées aux lois générales, pour les étendre ou les restreindre, ou les éclaircir. C'est alors que les bouts de loi peuvent convenir si on à la paresse de ne

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